Comme des marionnettes, les hommes dansent sur la symphonie de la Destruction

Sandman Vol 4 par Neil Gaiman, Jill Thompson et Bryan Talbot

Quand t'es dans le brouillard....

Quand t’es dans le brouillard….

Ce Commentaire mixera les scans des différentes éditions trouvées sur le net. Il contient des révélations majeures sur l’intrigue globale de Sandman.

Vous l’avouerai je, chers lecteurs ? Chaque commentaire de Sandman est un cauchemar à rédiger !

Je me dis, je commence demain,  je vais dégommer du Bendis, c’est plus marrant et moins fatiguant !

La saga de Neil Gaiman demande une disponibilité d’esprit totale pour apprécier les références philosophiques, religieuses, littéraires, mythologiques et fantaisistes.

Comment écrire autres choses que des évidences ? être original sur une oeuvre si commentée ?

Nous tenterons de mettre ce commentaire sous le signe de l’enfance.

Après un volume 3 en demi teinte, Gaiman produit ici avec Brief Lives, une histoire étonnamment linéaire tout en tension dramatique avec un début, un milieu et une fin de toute beauté.

Les infinis en belle tenue

Les Infinis en belle tenue

Il est indispensable de lire cette histoire pour apprécier la conclusion de la saga puisque Gaiman y insère une vignette du destin de Dream qui se produire quelques trente numéros plus tard.

Le gros de ce volume revient sur le destin de Orpheus qui, dépité par la mort d’Eurydice, retourne la chercher bredouille jusqu’aux enfers. Révolté par l’attitude passéiste et froidement résolue de son père Morpheus, Orphéus le renie avant d’être sauvagement décapité par les Bacchantes.

Etant immortel, notre tête coupée est alors confiée aux soins d’une famille sur une île Grecque. Il a l’éternité devant lui pour réfléchir au courroux de son père.

Morpheus se prend la tête avec Orpheus

Entre temps commence un étrange périple. Delirium, la plus jeune des éternels emmène Dream avec elle à la recherche de leur frère disparu : Destruction. Celui-ci a déserté son poste et fait désormais de la peinture caché sur … une île grecque.

Dream, comme Preacher, veut le retrouver pour le mettre face à ses responsabilités. Un Dieu, ça quitte pas son boulot ! Delirium, elle veut juste retrouver son frère.

Commence alors un étrange Road Trip où Dream apprendra à ses dépends qu’on ne ressort pas indemne du chemin croisé du délire et de la destruction ! Et bien entendu, sa route va croiser celle de son fils qu’il avait abandonné à son sort cruel.

Allez hop ! on y va ! en route pour l'aveeeenture !

Allez hop ! on y va ! en route pour l’aveeeenture !

Alors que Gaiman nous avait bailler pendant l’arc précédent, le voila revenu au mieux de sa forme dans une histoire où Dream reprend le devant de la scène. Le lecteur se régale ! Le scénariste a d’abord l’idée géniale de faire d’Orpheus, figure mythologique connue, le fils de Morpheus.

L’anecdote veut que l’idée lui soit venue en une de convention de comics. Il annonce à ses fans qu’il prépare une histoire sur Orpheus ! Et nos geeks d’entendre Morpheus ! Il réalise alors qu’une seule  lettre sépare le mythe du personnage de papier et décide de rattacher leurs destins.

Eurydice piquée au vif !

Eurydice piquée au vif !

Quelle habileté ! Tout en ravissant le lecteur de la tragédie d’ Eurydice et d’Orphée, Gaiman fait de la mythologie dans la mythologie.

C’est ainsi qu’Orphée est présenté comme un idéaliste romantique. Sa chaleur humaine vient s’opposer à la froideur de son père. Et pourtant leur destin est similaire. Orphée, privé de son corps est prisonnier de ce qu’il lui en reste. Dream est resté 70 ans dans une cage de verre !

Orphée va chercher Eurydice en enfer ! Dream y a envoyé Nada, une mortelle qui avait osé le repoussé. Orpheus est mutilé par les bacchantes ? Il est dit dès le début de la saga que Dream finira par avoir les Furies sur le dos !

La première partie de cette saga est brillamment dessinée par Bryan Talbot. En quelques pages, le britannique parvient à emmener son lecteur dans la Grèce antique peuplée de Satyres, de Bachantes, d’Hadès et Perséphone.

Aux pieds Hadès et Perséphone

Aux pieds d’Hadès et Perséphone

Orphée traverse le Styx, fait pleurer les damnés et perd définitivement Eurydice en violant la règle que Hadès avait fixé : ne jamais regarder en arrière. Lorsque Orphée chante devant l’assemblée, son public de damnés a de vraies expressions de souffrances sur le visage.

Et lorsque Orphée est mutilé, sa mise à mort sous forme d’orgie dionysiaque est réellement terrifiante ! Son idéalisme romantique est littéralement déchiquetée par la violente irruption de la réalité qui le met à mort.

Ah les belles bacchantes !

Ah les belles bacchantes !

La dessinatrice Jill Thompson rentre alors en scène pour la suite de l’histoire des milliers d’années plus tard. Neil Gaiman lui a offert précédemment un galop d’essai dans une histoire où un petit garçon Daniel, visite dans son sommeil le royaume de Dream.

Il y rencontre Cain, Abel et Eve la première femme qui lui racontent leur histoire. Encore une fois, il est essentiel de ne pas perdre de vue ce petit Daniel qui jouera un rôle crucial dans la conclusion de la série.

A l’occasion d’une séquence où Thompson dessine les Infinis version Hello Kitty, elle devient une des artistes les plus populaires de la saga .Et offre inconsciemment un superbe prologue à l’arc Vie Brèves : Dream, tout immortel soit il, est un enfant qui refuse le changement !

Hello Infinis !

Hello Infinis !

Car cet arc est celui de la renonciation à la toute puissance infantile et divine ! Dream accomplit ce voyage guidé par Delirium, la plus jeune des Infinis. Représentée comme une adolescente, elle s’exprime comme une enfant dans des propos décousus mais non dénués de sagesse.

Son apparence, inspirée directement par une amie intime de Gaiman, la chanteuse Tori Amos fera des milliers d’émules à travers le monde. Comme un enfant, elle est polymorphe et change d’apparence entre chaque épisode. Lorsque l’histoire commence, elle ressemble à une Punk issue de la scène Londonienne. Cheveux hirsute, collant déchiré, sale.

On se rappelle que dans Season of Mist, Gaiman représentait déjà l’incarnation du Chaos par une enfant avec un ballon inspiré de sa..fille !

Au fur et à mesure que sa quête de Destruction avance, Delirium s’embellit jusqu’à obtenir une apparence harmonieuse, rousse, lunaire et poétique. Comme si cette quête avait rassemblé cette déesse schizophrène.

Delirium, on sent que Gaiman l’adore. Il lui file les meilleures répliques et lui fait l’honneur d’apparaître dans un arc entier tandis que les autres Infinis n’apparaissent qu’en filigrane tout au long de la série. Il faut saluer au passage le travail remarquable de Todd Klein, le lettreur de la série qui personnalise les phylactères de chaque personnages.

Pour Delirium, ce sont des phylactères de couleurs dont les lettres change de taille et de couleurs pour en souligner l’instabilité mentale.

Delirium version papier

Delirium version papier

Delirium est le vilain petit canard des Infinis : Dream, Despair, Desire, Destiny la rejettent totalement, lassés par ses propos incohérents. Delirium, part à la recherche de Destruction, le seul de la famille à lui témoigner de l’amour.

A son contact, Dream va s’humaniser. D’abord parce que Gaiman applique la formule du Road Movie : deux personnages dysfonctionnels se rapprochent au cours d’un voyage dans un espace clos.

Mais aussi, parce que surnaturel oblige, Dream comme Martin Sheen à la recherche de Marlon Brando dans Apocalypse Now, médite sur la défection de Destruction et aux conséquences de ces actes sur la vie des mortels.

Destruction quitte ses fonctions solennellement

Destruction quitte ses fonctions solennellement

Cette recherche de Destruction n’est pas sans effets sur les mortels. Lors de cette quête,  tous ceux qui croise la route des Infinis décèdent ou deviennent fous. Dream, auparavant insensible, apprend que ces créatures ne sont pas qu’un public pour les audiences nocturne qu’il leur offre.

Ce sont des êtres de chair et de sang, dont la vie brève est interrompue simplement parce qu’ils ont croisé sa route. Pour la première fois Dream doute !

D’autant plus que sur la route il croise de nombreuses divinités déchues ! De Babylone à l’ancienne Egypte, de la Déesse des Chats à celle de l’Amour, ces divinités en qui plus personne ne croit ont été démis de leurs fonctions et vivent désormais infiltrées parmi les humains!

Une Déesse Strip-Teaseuse

Ishtar : une Déesse Strip-Teaseuse

Les voici tentant de grappiller quelques miettes de l’adoration qui leur était vouée autrefois. Ainsi, Ishtar, la Déesse de l’amour cherche l’adoration masculins en finissant strip-teseause dont le final est…explosif!

La déesse des Chats quant à elle,  en réduite à manger des rats sans saveurs dans des égouts puisque plus personne ne croit en elle  !

Gaiman illustre à merveille l’interdépendance entre un Dieu et ses créatures. Sandman  raconte le destin d’immortels qui ont fini par se rapatrier sur notre existence et victimes comme les mortels de coups du sort !

Ce qui nous amène à cet aphorisme de Gainsbourg : Les hommes ont crée les Dieux, l’inverse reste à prouver.

Destruction en pleine création !

Destruction en pleine création !

Depuis le début, Gaiman prend le lecteur à rebrousse poil : l’incarnation de la Mort est une jeune femme avenante pleine de compassion, le Rêve un individu pompeux et sinistre, Le Délire une enfant psychotique et Destruction un artiste chaleureux !

Destruction dessiné dans sa version antique évoque Henri V et laisse transparaître derrière sa bonhomie, une puissance inquiétante. Son exil terrien l’adoucit et le voici très proche de Piotr Raspoutine des Xmen : un grand balèze qui aime la cuisine, la poésie et la peinture.

Destruction a accepté l’idée de l’inexorabilité du changement. Au contraire de Dream, arc bouté sur des règles, des responsabilités et des principes cachant son immaturité plus subtile que celle de Delirium.

melvin

Melvin Potiron n’en loupe pas une !

Celui-ci est d’ailleurs tourné en dérision par son serviteur, l’hilarant Melvin Potiron qui ne loupe pas une occasion de dégommer les attitudes adolescentes et poseuses de son patron.

Au fur et à mesure, de son aventure intérieure Dream s’humanise : il remercie son personnel, fait preuve d’indulgence envers Melvin qui se fout de lui, pardonne à Nuala d’avoir désobéi à ses ordres. Le Griffon qui garde sa porte ne le reconnait pas l’espace d’un instant.

Et surtout, lorsque il est amené à prendre la vie de son fils, loin de poser sous la pluie à la vue de tous comme à son habitude, il se retire seul dans ses appartements en proie à un remord poignant superbement rendu par Jill Thompson.

Son désarroi n’est pas sans rappeler…. Michael Corleonne à la toute fin du Parrain 2 et 3 !

C’est personnellement la séquence que je préfère dans toute la saga du Sandman, l’enchaînement implacable qui amène Dream à tuer son fils unique.

Dream terrassé par les remords

Dream est ici confronté pour la deuxième fois à la cruauté de ses actes. Si avec Nada, la femme qu’il avait condamné à la souffrance éternelle, il avait pu trouver une forme de rédemption, Dream n’ a pas ici d’autres choix que de verser le sang de son enfant.

Gaiman et Thompson mettent ici en scène une véritable tragédie où l’on arrive à plaindre Dream pour le mal qu’il essaie de réparer. Lui, qui comme Pilate, s’est souvent lavé les mains des souffrances qu’il infligeait, voit les siennes couvertes du sang d’Orpheus.

Ce sang qui  donne la vie à ses pieds à des fleurs ; ce sang guérisseur serait t’il aussi à l’origine des émotions humaines de Dream ?

Les fleurs du Bien

Les fleurs du Bien ? 

Le fils aurait il fait renaître le père  ou l’a t’il condamné à mort ? en sachant que depuis le début de la saga, il est dit que verser le sang de la famille est puni de mort, même chez les Infinis. Il est clair que Dream connaît ces règles et que cet acte est un acte d’amour.

Avec ce volume 4, le lecteur de Sandman est aux anges et retrouve une fresque certes parfois verbeuse mais à la puissance incomparable. Aidé par Jill Thompson, Gaiman parvient à mélanger tragédie, ruminations mystiques et soap opéra avec des conflits de famille ….infinis.

 

godfather-2

….familial sur les mains…

19 comments

  • Présence  

    Il a fallu que j’aille relire mon propre commentaire (pas terrible d’ailleurs) datant d’il y a 5 ans pour me souvenir que je m’étais bien ennuyé à la lecture de ces « vies brèves ». Comme tu le fais bien ressortir, Gaiman est surtout adroit pour mettre en place discrètement les ressorts de son intrigue, les éléments menant vers le changement inéluctable de Morpheus dans le dernier tome.

    Il utilise sa série pour jeter un regard qui m’avait paru assez superficiel sur la condition humaine. En relisant ce tome à travers de ton commentaire, il apparaît que Gaiman est déjà en train d’étoffer le thème principal de son livre « American gods » : que deviennent les dieux quand l’adoration des humains se tarit ? Il effectue également des variations imaginatives sur son thème majeur : l’inéluctabilité du changement. Décidément, je le trouve plus convaincant quand il s’astreint à un format court (les récits en 1 épisode), ou quand il bénéficie d’un artiste capable d’apporter une dimension complémentaire à ses scénarios (oui, je pense à Dave McKean).

    Toujours en découvrant ton commentaire, je me demande si Gaiman a précisé ou explicité quelque part d’où sort cet interdit (ce tabou) pour les Endless de ne pas tuer l’un des leurs.

  • Bruce lit  

    Je te trouve décidément bien exigeant avec Neil Gaiman. Son écriture est parfois pédante, verbeuse, baroque mais je ne l’ai jamais trouvé superficielle.
    Quand même, il y a 20 ans écrire l’histoire d’Orphée et d’Euridyce pour un public avide de Wolverine et de Youngblood, c’est pas superficiel si ? Les formats courts sont à double tranchant pour Gaiman. Je trouve que parfois il s’agit d’un pitch qu’il développe laborieusement.
    Jill thompson n’est pas ici au sommet de son art, mais on retrouve son gôut pour les animaux, la gentillesse de Destruction (!). Quant à Gaiman, il met en place une véritable tragédie moderne, même si le mot est galvaudé. Tragédie en jouant sur le fait que Dream a fréquenté Shakespeare, qu’il puise à la fois cette histoire dans la mythologie grecque pour l’étirer habilement jusqu’à nos jours. Non, décidement Présence, je ne suis pas d’accord avec toi pour une fois ! Et je précise qu’ailleurs Gaiman m’ennuie, mais sur Sandman, je reste époustouflé et pourtant j’ai la dent dure….
    Il me semble que dans ce tome justement est abordée l’impossibilité pour les Infinis de se faire du mal entre eux. Mais je ne crois pas que Gaiman ait développé ce thème. On attend les autres volumes .

  • Nicolas  

    Quand je pense que j’avais aimé Sandman à 20 ans ! C’est pompeux, académique, lourd, pesant, périssant d’ennui. Pas passionnant pour deux sous. Les seuls personnages que j’aime encore dans cet arc sont la poignée d’immortels (Capax, Etain, Ishtar) que j’avais récupéré il y a fort longtemps dans le cadre de mes fictions pour l’univers Highlander.

    Le reste… bof.

    • Bruce lit  

      Gasp…. Vous vous êtes passé le mot aujourd’hui ou quoi. A quoi ça sert que le Bruce se décarcasse ??

      • Bruce lit  

        Ah non ! Ne me comparez pas Gaiman à Bendis ! Ce serait comme comparer Chuck Austen à Alan Moore. Il y a quelque chose d’infini dans Sandman, un truc incomparable, une vraie leçon de vie que je n’ai trouvé nulle part ailleurs.

  • sam  

    Alors sur ce coup, je vais être du côté de Bruce pour défendre Sandman et Gaiman.

    Déjà, je ne comprends pas comment on peut trouver cette oeuvre ennuyeuse étant donné sa richesse absolument incroyable, ce ne sont pas tant que les références incompréhensibles pleuvent comme chez Moore, non ici c’est simplement que l’intrigue et les personnages résonnent et emportent avec eux tellement …tellement d’idées, des idées et de l’inspiration quasi à l’état pur, ils brillent tellement qu’ils peuvent aveugler.

    Pédant, pas vraiment, on peut ressentir cela car Dream est le personnage principal et qu’au début du récit dans lequel on est complètement immergé, il est effectivement peu attractif comme héros, sinon personnage principal. L’idée de Dream est plus séduisante que le personnage en lui même qui comme l’indique Bruce, ne cesse de s’humaniser au fur et à mesure du récit.

    Il y a à ce titre effectivement un joli effet de parallèle entre Dream et son fils. Ils se sont mutuellement rejetés et ce n’est qu’après avoir vécu une partie des souffrances de son enfant qu’il va finir par renouer avec lui.

    En relisant ton commentaire, je me suis rappelé combien j’avais peu apprécié délirium au début du tome; Comme Dream on ne comprend rien de ce qu’elle raconte tant son discours est guidé…par toutes les idées qui peuvent la traverser à tout instant.

    Je trouve d’ailleurs assez drôle l’idée de Gaiman :

    – le fait que Destruction soit le seul à apprécier Delire (la destruction qui aime la compagnie du délire c’est savoureux)

    – le fait que ce soit elle qui cherche la destruction et donc le changement

    – le fait que les sentiments de Dream vis à vis de sa soeur change au fur et à mesure que son humanité s’affirme. Il est vrai que leur opposition au départ désarçonne car on peut se dire que le rêve et le délire ne sont au fond pas si éloignés. L’état du sujet (éveil pour le délire, sommeil pour le rêve) pour l’atteindre est différent, mais le chaos et le non sens règne sur les deux .

    – le fait que délire est présentée à un moment comme le membre le plus dangereux de la petite famille de Dream, même leur grand frère Destin. Elle ne se prive pas de le lui dire, de lui rappeler qu’elle marche sur des chemins qui lui échappe lui qui est censé tout voir.

    Un tome comme d’habitude riche, assez intense, où on retrouve des idées que Gaiman explorera plus tard dans American Gods, l’idée que les dieux d’antan vivent parmi nous des miettes de foi qu’ils peuvent récolter.
    Mais dont le début est assez déconcertant, puisque l’on voit Dream alors qu’il vient de rompre avec une femme…dont on ne connaît rien. Je me suis même jeté sur les précédents tomes en me demandant si j’avais oublié cet élément et c’est en lisant les commentaires de Gaiman dans les bonus que je me suis rendu compte que non c’était l’auteur qui balançait là un élément pour plus tard…

  • Présence  

    Tornado m’a souvent reproché cette schizophrénie de lecteur qui me permet d’apprécier des récits de superhéros bas du front, et de me montrer beaucoup plus critique vis-à-vis de récits plus ambitieux.

    A la lecture des commentaires de Bruce, je constate à chaque fois que je n’ai pas su repérer et identifier la richesse des différentes parties de « Sandman », n’ayant pas relevé le quart de ce qu’il met en lumière dans ses commentaires. Finalement mes remarques en disent plus long sur mes limites de lecteur (et mon insensibilité à l’écriture de Gaiman) que sur les qualités de l’oeuvre. Pour m’enfoncer encore plus, je me suis ennuyé à la lecture d’American Gods.

    • Bruce lit  

      @ Présence : là c’est moi qui plaide coupable, je me suis arrêté à la page 10 de Gods… ! Très belle preuve d’humilité de ta part, bravo !

      @ Leo : Putain, reste avec nous et fuck ta tanière, j’adore ton écriture !! Tu as raison. Ce que j’aime chez Sandman, c’est effectivement la profondeur de ses personnages secondaires : Lucien qui gère une bibliothèque de livres imaginaires, Melvin Potiron, Lady Bast, Hypolyta Hall, Rose. Tous ces personnages ont une personnalité si affirmées qu’ils pourraient avoir une série. A ce propos, je n’ai jamais lu Lucifer de Carey. Si quelqu’un veut s’en charger… Sandman est il adaptable au grand et petit écran ? Débat…

      @ Sam : on va te créer une rubrique : le défenseur du mercredi !! C’est un plaisir d’avoir des réflexions de cette qualité et ce d’autant plus que j’ai bossé dur sur l’article !! Je suis jaloux, ce n’est plus un commentaire que tu laisses mais un article !!

      Présence parle de ces limites de lecteur. Parlons des miennes.Puisqu’il est question de Morrison ou Miller, je dirais ceci. Ce que je recherche dans une BD : du divertissement en premier lieu et contrairement à la rumeur , je suis plutôt bon public…
      Mais aussi de l’émotion , de la sensibilité, de la profondeur, de la culture, de l’humanisme et un peu d’humour. Sandman conjugue tout ça et avec brio. Je trouve aussi ça chez Ennis.
      Je réalise en écrivant ceci que j’ai lu une bonne dizaine d’oeuvres de Morrison, du plus accessible ( NOU3) à l’incompréhensible ( The filth). C’est toujours avec un certain plaisir que je m’y suis atelé, avec un certain gôut du défi : Allais je être à la hauteur en tant que lecteur. La plupart du temps, je me sentais exclu dans son délire. Il y a dans Sandman bcp de bienveillance envers le lecteur, plein de petits moments croustillants sur la vie ordinaire que je n’ai jamais retrouvé ailleurs. Jamais.

  • tornado  

    Ben moi je ne peux pas dire grand chose. J’ai acheté la série complète du temps de Delcourt/Panini. Mais je ne l’ai jamais lue.
    Ayant lu deux fois « Orchidée Noire » et n’ayant jamais réussi à en comprendre un traitre mot, j’ai sans cesse repoussé la lecture de « Sandman ».
    Donnez-moi envie. Dites-moi qu’il ne s’agit pas d’une lecture opaque et incompréhensible ! Donnez-moi des raisons de me jeter dans la série sans crainte de m’y perdre !

    • Bruce lit  

      @ Tornado. j’ai rien compris à Black Orchi non plus.
      « Donnez-moi des raisons de me jeter dans la série sans crainte de m’y perdre ! » Non la série est très accessible, surtout pour quelqu’un comme toi qui apprécie W. Ellis, qui pour le coup m’est hermétique.

  • Présence  

    @Tornado – Bruce te donne plein de raisons tout au long de ses 4 commentaires. Je cite :

    – La place des Dieux dans notre imaginaire, leurs responsabilités envers les hommes, leurs vies, leurs morts
    – Le rapport au temps des Divinités qui n’y résistent pas
    – Satan, abandonnant son travail de responsable des Enfers
    – Un brassage homogène de multiples mythologies qui se côtoient harmonieusement sans rien perdre de leur identité, des contes africains aux pièces de Shakespeare, en passant par de nombreux panthéons
    – Une galerie de personnages secondaires brassant plusieurs cultures (Marco Polo,Marc Twain, l’empereur Octavien, la muse Calliope, Puck…)
    – Une imagination fertile et sensible

    En termes de lecture, cette œuvre de Neil Gaiman possède de nombreux autres atouts.

    Pour commencer, Gaiman fait clairement apparaître le thème qui sous-tend toute la série : l’inéluctabilité du changement, et sa nécessité. Ainsi, même lors de chapitres moins intéressant (ou qui semble n’être que des digressions futiles), il est toujours possible de se demander en quoi il se rattache au changement, en quoi Gaiman est en train d’évoquer une nouvelle facette de la position impossible de Morpheus qui refuse tout changement.

    La forme : Neil Gaiman alterne récits composés de plusieurs chapitres et histoires courtes en 1 épisode. En cas de lassitude d’un format, il est toujours possible d’apprécier l’autre.

    Les dessinateurs : tout du long les responsables éditoriaux ont fait appel à diverses dessinateurs (parfois demandés par Gaiman) dont certains excellents. Je ne me lasse pas des dessins de Michael Zulli et de Charles Vess. L’épisode illustré par Jon J. Muth est magnifique. Tu devrais apprécier l’histoire dans laquelle Lucifer décide de s’en aller, car elle est dessinée par Kelley Jones (très en forme).

    L’épisode « Ramadan » est un petit bijou de sensibilité narrative et visuelle (dessiné par P. Craig Russell).

    Les couvertures de Dave McKean : Gaiman et McKean ont révolutionné l’approche des couvertures. Il y a bien sûr les compositions complexes, sophistiquées et parlantes de l’artiste. Il y a aussi le choix de rejeter les codes en vigueur à l’époque, à commencer par le personnage principal qui n’apparaît pas sur les couvertures. Il y a aussi l’idée de penser les couvertures par histoire, concevoir une forme ou un cadre spécifique pour chaque histoire.

  • Stan FREDO  

    Je suis passé à côté de Gaiman. Question de génération. Il a publié tout son truc quand je ne lisais plus de BD. De loin, cela fait très gothique des années 1980/1990. Pas mon trip (bien que j’aime bien les singles de Bauhaus, notamment ‘Bela Lugosi’s Dead’ et ‘Terror Couple Kill Colonel’). Cela tombe bien, la contrainte économique est aussi là qui impose des choix. En quelque sorte, dans ma séance et mon budget de rattrapage, c’était Alan Moore ou Gaiman.

    • Bruce lit  

      Dans les années 90’s ma série culte Xmen tournait en rond après Alan Davis. Je n’avais pas bcp d’argent et j’ai été à Aappum Bapoum dans la rue Dante à Paris. Ce jour là, un vendeur m’a parlé avec tellement de passion de titres indépendants que j’ai craqué. J’ai achété ( pas le même jour) : The Invisibles, Stranger in Paradise, Preacher, House of secrets et Death la mini série. Ceci a été ma première approche avec GAiman et un BAchalo débutant…

    • Présence  

      @Stan – Souvent Sandman ne correspond à ma sensibilité, par contre je n’ai jamais été déçu par les collaborations entre Gaiman et Dave Mckean : Signal to noise, Mr. Punch, Violent cases.

  • Stan FREDO  

    Si Gaiman travaille un jour avec Sean Murphy, Adam Hughes, Chris Sprouse ou Stuart Immonen, je tenterai l’essai. Promis 😉
    By the way, la nouvelle série d’Ed Brubaker et Sean Phillips, ‘The Fade Out’, démarre du tonnerre ! Une édition limitée du 1er n° reproduit l’apparence (format et look) de revues people étatsuniennes des années 1940.

  • jyrille  

    Comme Sam et Bruce, j’ai beaucoup aimé ce tome, que j’ai lu juste avant mes vacances. Je découvre Sandman, mais je n’ai jamais de mal à m’y plonger tant j’aime ces histoires où parfois rien ne se passe. Tornado, tu devrais essayer, c’est très facile d’accès. Par contre, à chaque fois je me rends compte que pour l’instant, je ne fais que les lire au premier degré, tant les références culturelles me manquent. C’est là où ton commentaire est intéressant, Bruce, car oui, en faire une chronique doit être un vrai cauchemar, je suis bien content que tu t’y attelles ! Ce road trip est tout ce qu’il y a de plus classique, mais tu y décèles toujours des choses qui me semblent sans importance. Bref, Sandman, c’est très riche, contemplatif, ça se lit tranquillement, à un rythme indolent, rien que pour ça, je trouve ces tomes précieux. C’est un peu un film de Miyazaki en bd.

    J’ai bien aimé les dessins de Jill Thompson, mais je dois avouer que pour le moment, je trouve souvent que les différents dessinateurs s’adaptent au style de Gaiman, et dans mon cerveau, ils sont tous très proches. Il faudrait que je trouve les bds qu’ont faites Gaiman et McKean uniquement, ce doit être quelque chose.

    • Bruce lit  

      Merci Jyrille,
      Je vais peut être te publier après tout…(rires). Jill Thompson n’en était qu’aux prémices de sa carrière. Depuis, ce qu’elle fait est réellement d’une beauté confondante.
      Intéressant ton parallèle avec Miyasaki. C’est Gaiman qui a contribué à faire connaître Mononoké aux Etats Unis. Son nom apparaît d’ailleurs dans le générique de fin !

  • jyrille  

    Très bon article ! J’ai très envie de lire la suite, du coup, ainsi que toute les références que je ne connais pas encore…

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