D-éclaration D-amour (Daredevil : Father)

Daredevil : Father par Joe Quesada

Un article de : TORNADO

VF : Marvel

VO : Panini

Première publication le 9/09/2014-Mise à jour le 07/08/23

Un diable… rouge !

Un diable… rouge !©Marvel comics

En 2004, en plein cœur du run de Brian M. Bendis & Alex Maleev, Joe Quesada, alors grand manitou de l’industrie Marvel, décide de réaliser une mini-série dédiée au protecteur de Hell’s Kitchen, un personnage sur lequel il avait travaillé du temps où la série principale était écrite par Kevin Smith, puis David Mack.
Il réalise cette œuvre presque tout seul (scénario et dessin) et s’y dévoue corps et âme, au point de repousser sans cesse sa sortie.

En 2007, après trois ans de travail acharné, il livre enfin le résultat : Six épisodes magnifiques, réunis sous la forme d’un « graphic novel ».

Un travail soigné !

Un travail soigné !©Marvel comics

Alors qu’une vague de chaleur caniculaire envahit New York, un serial killer multiplie les victimes en arrachant leurs yeux de leurs orbites ! Un magnat des médias en pleine ascension, une nouvelle équipe de super-héros appelée « Santerians » dans les rues de New York et la moitié de la ville qui déteste Daredevil depuis que le Daily Globe a dévoilé son identité secrète…

Matt Murdock parviendra-t-il à lier tous les éléments d’une intrigue qui le ramène à ses plus lointains souvenirs, lorsqu’il était enfant et que son père, encore vivant, trempait dans des affaires pas toujours honorables ?

Daredevil par Quesada : Difforme, mais imposant !©Marvel comics

La première chose qui frappe à la lecture de cette œuvre, c’est sa mise en forme. Rien que la seule contemplation des planches du grand Quesada destine cette mini-série à rejoindre les étagères de n’importe quel collectionneur de comics. De ce seul point de vue, la chose mérite déjà ses 5 étoiles…

Pour l’occasion, le rédacteur en chef de la Marvel a suivi les traces de Tim Sale et réalise une mise en page, un découpage et une esthétique générale extrêmement proche du travail du dessinateur susnommé sur Les héros Marvel ou d’autres titres DC comics comme par exemple Batman : Un long Halloween, avec un surplus de violence et de noirceur. La mise en scène des planches est une merveille de narration pulsionnelle, que vient accentuer toute une série de cadrages et de postures majestueuses et poétiques, dans lesquelles le justicier s’impose dans toute son aura iconique.

Un maitre de la bande-dessinée !

Un maître de la bande-dessinée !©Marvel comics

Par ailleurs, Quesada le scénariste réalise un travail d’écriture magnifique en exposant, à travers son récit, une toile de fond pleine d’émotion sur la notion de paternité, avec toute l’ambivalence qu’un tel concept peut véhiculer. Alors que cet élément demeure tout au long du récit quelque chose de très secondaire, voire d’à peine évoqué, il représente pourtant tout le sel, toute l’âme et toute la profondeur du projet, allant jusqu’à offrir au lecteur des résonances universelles sur ses propres rapports paternels… A côté de cette toile de fond œdipienne, de cette atmosphère étouffante et de cette mise en page somptueuse, l’intrigue principale, d’une densité pourtant optimale, passe nettement au second rang.

Enfin, la dernière particularité de cette mini-série réside dans la ferveur et la passion que son auteur développe du début à la fin sur toute la mythologie de la série, réussissant à livrer un arc narratif tout simplement incontournable pour le fan de Daredevil. Le dénouement vous réservera bien des surprises et des révélations, tandis que vous contemplerez une des plus belles galeries de tableaux jamais mise en image sur les rues de Hell’s Kitchen…

Il est fort probable que certains lecteurs puissent trouver des défauts à l’ensemble de cette œuvre en forme de déclaration d’amour pour le personnage de Daredevil et son univers. L’intrigue principale recèle probablement son petit lot d’incohérences (l’enquête principale surtout) et de passages tirés par les cheveux (du style « quelle est cette équipe de super-héros qui ne sert à rien et qui n’est jamais revenue dans la continuité de l’univers Marvel ? » : franchement, qu’est-ce qu’on s’en fout !!!) et pour peu que l’on soit chipoteur, elle dissone certainement d’avec les événements relatés dans le run de Bendis & Maleev.

Un passage œdipien poignant, pour une magnifique composition toute en sur-cadrages !

Un passage œdipien poignant, pour une magnifique composition toute en sur-cadrages ! ©Marvel comics

Pour les lecteurs les moins émotifs, il est également possible de trouver à l’ensemble de ces épisodes une tonalité qui verse peut-être trop dans le pathos, le sang et les larmes. A moins qu’à l’inverse, on puisse estimer que ce Daredevil qui se moque de tout ce qui ne se passe pas dans son quartier soit une version trop égoïste de lui-même !

Mais pour les autres, il y a fort à parier que vous adorerez les qualités multiples de cette mini-série, la mise en couleur au diapason de Richard Isanove, les hommages divers et variés adressés à Frank Miller ou à Will Eisner à travers l’image du Spirit, et surtout la sincérité et la beauté d’une œuvre à la poésie diffuse, comme seul l’univers de la bande dessinée peut nous en offrir puisque c’est l’apanage de l’art séquentiel que de raconter une histoire avec toute l’émotion combinée de la littérature, du découpage cinématographique et de la beauté contemplative des illustrations. Et de ce point de vue là, on peut dire que « Father » remplit vraiment son office…

L’héritage incontournable de Frank Miller…

L’héritage incontournable de Frank Miller…©Marvel comics

30 comments

  • Eddy Vanleffe  

    Par contre j’adore l’influence/hommage Mignola sur l’image de DD face à l’affiche.

  • Fletcher Arrowsmith  

    Je n’ai pas aimé grand chose sur cette histoire (Joe n’est pas un scénariste). Même les dessins de Joe Quesada m’ont vite sortie de ma lecture, car trop caricaturaux, trop bodybuildés.

    • Tornado  

      Suite à tous ces mauvais retours, je l’avais relu encore une fois. Rien à faire je trouve ça toujours aussi beau et toujours aussi bon. Apparemment, c’est réservé à ceux qui ont une autre grille de lecture que celle de la continuité.

      • zen arcade  

        En ce qui me concerne, ce qui me gêne dans cette bd, c’est le dessin de Quesada.
        Je ne conteste pas que le gars sache dessiner mais je trouve ça horrible.
        Y a rien de ce que j’aime voir dans une bd dans le dessin de Quesada.

        Quand tu écris ça : « Rien que la seule contemplation des planches du grand Quesada destine cette mini-série à rejoindre les étagères de n’importe quel collectionneur de comics. De ce seul point de vue, la chose mérite déjà ses 5 étoiles… », c’est aux antipodes de la façon dont je ressens les choses.

      • Fletcher Arrowsmith  

        Salut Tornado

        Apparemment, c’est réservé à ceux qui ont une autre grille de lecture que celle de la continuité. Pas de mon côté. Ce n’est pas la continuité qui m’a dérangé, mais la qualité du script et surtout de l’écriture de Quaesada que j’ai trouvé très faible. Je ré itère mon propos, Quaesada est avant tout un dessinateur, pas un scénariste. L’idée était bonne, pas l’exécution. en plus plus on avance dans le récit, plus il s’enfonce. Le côté surnaturelle/fantastique (voire grotesque) est mal dosé par rapport au thème principal de la paternité.

        Sur les dessins, je n’aime pas ce Quesada là.

  • Tornado  

    C’est bon, je m’incline. Vous êtes trop de gens biens à trouver ça pas bon, c’est moi qui doit déconner sur ce coup (on a tous un côté « bizarre » qui ressort à un moment donné…). 🙂

  • Eddy Vanleffe  

    J’ai aperçu ce qu’était devenu DD ces derniers temps et je suis à peu près sûr qu’à coté ce FATHER que je n’ai pas toujours pas lu, est un authentique masterpiece… ^^
    Les dessins sont caricaturaux mais splendides je trouve, on se retrouve avec un DD « boeuf » assez inhabituel un peu comme le Bamtan de Miller aux antipodes de celui de Neal Adams ou Jim Aparo. ou le Superman de de Tim Sale aussi rendu « rond »

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