Interview Patrick Eudeline

Interview Patrick Eudeline

Un entretien mené par BRUCE LIT

Je dédie cette interview à mes amis Tornado et Eddy, l’un anti-punk et Floydien  forcené, et l’autre critique impitoyable de Rock’n’Folk. 

1ère publication le 13/03/20 – MAJ le 12/02/22

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En concert dédicace à Gibert Joseph un jour de Saint Valentin ©Bruce Tringale

J’admire Eudeline depuis une vingtaine d’années. Son style, son érudition, son amour du rock, ses articles pour Rock’n’Folk et ses romans, ses regrets aussi.
Il a côtoyé une jeune Siouxsie, William Burroughs, Christophe, s’est drogué avec Daniel Darc, a inspiré la jeune Virginie Despentes, soutenu le Punk dans la France de Giscard et défendu Johnny dont il a toujours été fan. Il est l’un des seul survivant d’Asphalt Jungle.

Je le rencontre un jour de St Valentin pour la dédicace de son nouveau roman ANOUSHKA 79, l’histoire d’un jeune Punk parti à la recherche de sa copine de défonce disparue dans un Paris en déliquescence et en junko-délinquance. Une séance à son image : haute-en-couleur, à la fois foutraque, snob, souvent touchante de maladresse. Il arrive nerveux, dans l’état de ces vieux rockers défoncés même des années après le clean-up time. Son débit de parole est rapide. Il jongle avec ses lunettes noires, fait de grands gestes passionnés et laisse entrevoir des yeux d’un vert délavé qui le rendent très séduisant. L’homme est plus timide que sauvage. Il se rappelle de nos conversations sur le Net et accepte spontanément ma proposition d’interview. Manoeuvre avait ainsi procédé l’an dernier et je rentre enchanté, mais pas dupe : rien ne l’oblige à me répondre.
Pourtant ce 29 février, au café de mon frangin, il arrive pile à l’heure, engage sur un chocolat chaud alors que je pensais lui faire plaisir en attaquant au Jack Daniel’s.

Eudeline a beaucoup d’ennemis et n’a jamais fait aucun effort pour se faire aimer. A 65 ans passés, son gout pour la provocation, ses formules lapidaires même envers ses amis, son franc parler et ses contradictions sont intacts. C’est pourtant un Dandy très accessible, disponible, sans filtre  et d’une grande gentillesse qui accepte une interview de plus de 3 heures puis l’apéro puis un repas en terrasse. Cet entretien est un mix  de ces moments enregistrés et de conversations informelles où Eudeline en vrai Gentleman me laisse carte blanche quant à la retranscription forcément émaillée de hors sujets, de bruits de bar (merci à l’équipe du Festiv’ pour sa patience)  et l’excitation mêlée d’anxiété d’avoir en face de moi un personnage de La vie en Rock.
Voici ma rencontre  avec un authentique écrivain et rescapé de l’underground parisien des 80’s , ces années que tout le monde a détesté sans pouvoir les enterrer. 

Lhomme en noir en pleine lumière ©Bruce Tringale

L’homme en noir en pleine lumière
©Bruce Tringale

Bonjour Patrick. Dionnet a sorti son autobiographie cette année, Manoeuvre la sienne l’an dernier, toi tu sors un roman. L’exercice ne t’a pas intéressé ?

J’en voyais pas l’intérêt, j’ai refusé plusieurs fois, le côté Name Dropping du truc… Celle de  Chrissie Hynde était très bien, celle de Rod Stewart, il y avait 20 pages formidables, tout le reste était inutile ; LIFE de Keith Richards, je ne trouve pas ça fascinant. Bref, l’autobiographie c’est intéressant quand c’est un roman commandé, de l’autofiction, tu vois ?

Ton héros est une version à peine dissimulée de Simon Reggiani, le fils de… Pourquoi ce choix plutôt qu’un jeune Patrick Eudeline ?

C’est pas tout à fait lui. J’ai emprunté beaucoup de la vie de Simon : le père célèbre, le frère mort, un héros romantique punk parfait, oui, bien sûr. D’un point de vue psychologique, ce n’est pas Simon, il n’aurait pas réagi comme le personnage de mon roman.

Lors de la séance de dédicace à Gibert, tu as invité Reggiani à jouer avec toi. Un personnage qui a commencé à déborder quitte à t’éclipser. Il a notamment admis n’avoir pas lu ton livre, celui dont il est le héros. Nous sommes en pleine escroquerie du rock’n’roll là !

Simon est un personnage un peu bipolaire. Il faut savoir que ça fait 15 ans qu’il veut faire un film sur le Punk, c’est un truc obsessionnel chez lui. Je lui ai proposé de jouer du saxo sur un morceau . Je n’aurais jamais pensé qu’il prendrait ma guitare pour jouer de vieux morceaux d’Asphalt.
Le bouquin, il l’a lu depuis, je ne lui souhaite que le meilleur.

Bertrand Burgalat a pointé le fait que l’on marche beaucoup dans ton roman. Je n’ai pas pu m’empêcher de faire la comparaison avec le nom de ton groupe, ASPHALT JUNGLE, où Simon tel un animal  traverse cette jungle urbaine à la recherche de son prochain shoot…

Burgalat a raison. C’est un peu comme LE PIÉTON DE PARIS chez Aragon (en fait,un livre de Léon-Paul Fargue -Ndr) . Tout le monde me parle de ma connaissance de Paris, tout ça : c’est totalement usurpé : j’ai été à moitié aveugle pendant des années, je voyais pas le nom des rues…J’ai retrouvé la vue grâce à une opération.
Le Punk, c’était programmé pour mourir vite comme toutes les choses importantes. L’Héroïne a tué le Punk Rock, c’était notre quotidien. Il était évident que l’Héroïne serait très présente dans le roman parce que très présente dans la vie des gens, voilà, c’est aussi simple que ça…Simon n’est pas vraiment Junk, sinon il ne se préoccuperait pas vraiment d’Anoushka, juste de sa dose.  Il  y a un chapitre sur les Dealers de l’époque, je l’ai vécue ou observée. Tout est vrai avec quelques personnages déguisés, notamment le manager de Vince Taylor.

Anoushka a disparu ©Le Passage

Anoushka a disparu
©Le Passage

Tes positions sur le Punk et  La vie en rock dans BEST puis ROCK’N’FOLK t’ont souvent valu d’être taxé de  réactionnaire.  En te lisant, c’est plus nuancé : c’était pas mieux avant mais c’est bien pire après !

(Attentif) Très bonne définition, j’aime beaucoup, ça me va !

Ton écriture est très imagée : beaucoup de vocabulaire rock, de jargon de toxico (Corinne pour Cocaïne, Hélène pour Héroïne) mais aussi un très bel exercice de style : on ne sait pas où commence le verbe de Simon un ado de 1979 et où finit celui d’un Eudeline de 2020….

Je parle comme le roman l’exige, c’est aussi simple que ça. J’ai voulu que le langage soit celui de 1979 ! Il n’y a pas un objet, une expression, une pensée qui soit postérieure. J’ai fait très attention à ça, notamment sur les disques que je cite, j’ai horreur des anachronismes. Le seul que je me suis permis, c’est le discours de George Marchais sur l’immigration   qui survient quelque temps après. C’est une licence poétique, voilà !

Tu écris que le Paris Punk est un village, une grande famille : dans ton livre on ne s’y drogue jamais seul…

Je n’y avais jamais pensé , ta remarque est bien ! Ça se passait comme ça : même rechercher le produit chez le Dealer, c’était pas un truc de solitaire. En général, c’était fréquent que tu ailles chercher ta dose avec un ami , pour se soutenir, je suppose. En 1979, tu avais encore du Deal en appartement. on trouvait  de la blanche pure héritée de la French Connection.  C’est pour ça que Johnny Thunders (le guitariste des New York Dolls dont il a été dit qu’il a précipité dans la dope tous les gamins qui le trouvaient cool -Nda) était toujours à Paris. Avec le Brown Sugar, un espèce de machin jaunâtre comme dans la chanson des Stones qu’il fallait dissoudre dans du citron et dans du vinaire, c’est le Deal de rue qui apparaît.  La consommation d’Héroïne  est devenue un truc plus solitaire.  

Tu adresses un clin d’oeil presque invisible à Gainsbourg et sa chanson LES PETITS RIEN : »Elle me donne peu. J’en ai conscience, mais pour moi c’est déjà beaucoup ce presque rien »…

Inconscient le clin d’oeil. Je suis tellement fan depuis toujours… Le style, c’est qui reste quand tu as tout oublié. Moi au début j’étais Yves Adrien et après Jean-Jacques Schuhl, des influences évidentes. Gainsbourg, c’est digéré. Le truc de l’écriture, c’est que les trucs ressortent et tu ne sais pas d’où ça vient.


Piquer une trentaine de 33 tours aux BHV pour acheter de la poudre, c’est du vécu ?

Bien sûr ! Avec Riton, il passait chez moi, me proposait son plan et comme un con je le suivais…

Parler de JJ Goldman avec Eudeline à un apéro ? Fait ! Ce monde part vraiment en burnes...  ©Bruce Tringale

Concours de lunettes noires 
©Bruce Tringale

Tu es clean depuis combien de temps ?

De l’héro depuis très longtemps, ça se compte en décennies. La clope, c’est plus difficile à arrêter que la dope.
J’ai continué à visiter les centres de Désintox, notamment celle de Montévideo (une clinique de désintoxication situé à …Boulogne-Billancourt. Eudeline en a tiré un duo avec Daniel Darc à l’époque de AMOURS SUPRÊMES. -Nda) mais en tant que visiteur de mon ami Daniel Darc. Sa maison de disques lui payait son séjour quand ça commençait à marcher, avant ils s’en foutaient. Il aimait bien, ça lui faisait des vacances et il avait toujours du ravitaillement.  Ils planquaient leur truc avec Joey Starr sous la table de nuit.
Daniel, pendant toute une période, quand on a enregistré ensemble, tous les jours il arrivait, il achetait de la Coke.  Au début, ça semble idéal pour décrocher de l’Héro, mais quand tu la fixes, c’est une autre affaire.  Daniel, je lui ai sauvé la vie…pffff….Plusieurs fois il a failli devenir  sourd et aveugle devant moi. Son corps était très usé…On le pensait indestructible, il était très affaibli les derniers mois. On pensait qu’il allait se remettre. Et puis, voilà…

Simon déguise l’overdose d’un de ses amis, Maxwell, en crise cardiaque sur un banc : tu étais où le 03 juillet 71, le jour de la mort de Jim Morrison ?

C’est marrant, je repensais à ça il y a quelques jours. Ma mère était dans la cuisine : « Patrick, il y a un mec des Rolling Stones qui est mort … »
J’ai rencontré peu de temps après les acteurs de cette mort : Hervé Muller, les gens du Rock’nRoll Circus (le bar où le corps du chanteur des Doors a été découvert. Une overdose d’héroïne maquillée en crise cardiaque- Nda) . Jamais réussi à y rentrer au Rock’nRoll Circus sauf un après midi… Que de la musique de minets, James Brown, tout ça…

James Brown de la musique de minet ?!

Oui, un jour il faudrait que je raconte tout ça. C’est comme les Mods en Angleterre , tu as eu la première génération. En France, tu as les Drugstores et puis ça disparaît. Il y a une résurgence 5 ans après, tu as des jeunes mecs très prolos qui mettaient des costards qui venaient de chez Jean Raymond avec des Westons et des ceintures en crocos et qui écoutaient du James Brown. Moi j’étais habillé sur mon 31, pas du tout dans le style minet.

Tu aimais Morrison ?

Je m’en fous de Morrison, ses poèmes, pour moi c’est du pipi de chat…J’aime les Doors, les textes des chansons, sur scène il était grandiose. LOVE STREET, c’est génial. Je lui rends hommage en écrivant LOVE LANE, la face B de POLLY MAGOO un mélange de PENNY LANE et LOVE STREET.

Es-tu un lecteur de BD ? J’ai repéré une coquille dans ANOUSHKA 79 : Le fameux crabe de Hergé c’est dans LE CRABE AUX PINCES D’OR et non dans LES CIGARES DU PHARAON….

La BD Franco-belge, oui j’en ai lu. Pour la coquille, t’es sûr ?

Oui…

Ok, ben merde, j’aurais dû vérifier (contrarié). J’ai tellement lu Hergé…, j’ai tellement découvert le monde avec lui…Ma mère avait tous les Tintin. J’ai découvert l’Amérique avec Tintin.

C’est pas grave !

Si, c’est grave ! (Silence)

 Il y a un passage terrifiant où tu décris une montée puis une descente d’acide…

L’acide c’était regarder Dieu en face. Ce que je raconte avec les œufs sur le plat qui dansent le Twist, c’est du vécu. Quand l’Acide est arrivé, j’étais encore trop gamin. J’ai fumé un peu de Shit, c’était le truc du Golf Drouot, le Cannabis et tout ça….L’acide c’était la drogue des hippies, j’en ai pris après à la fin du Punk Rock, c’était une porte de sortie à l’héro.

Tu as aimé Pink Floyd, le groupe qu’il fallait détester chez les Punks ?

C’est un peu une connerie cette déclaration de Rotten, il l’a regrettée ces dernières année,  des choses que tu relativises avec le temps.

ANIMALS, c’est du Punk, Patrick !

Non, non j’m’en fous de ce disque. Pink Floyd ça s’arrête pour moi avec DARK SIDE OF THE MOON, point ! ATOM HEART MOTHER, je respecte. Je n’ai pas de problèmes avec ce groupe. Ils avaient une image hippie, ça pouvait pas coller avec les gamins qui n’avaient que les Stooges et les Pistols à la maison. Même les disques de Bowie, ils les cachaient. Rappelle-toi des Clash qui ne voulaient plus des Beatles en 1977. Une connerie. Joe Strummer m’avait confié regretter cette phrase, c’était démagogique.

Et puis Chris Thomas a mixé aussi bien le Floyd que les Pistols

Absolument !

Si ton ami Daniel Darc était le poète Punk par excellence, tu en es l’écrivain. Je me suis toujours posé la question de la construction de votre culture littéraire assez pointue dans un emploi du temps, on l’a vu, essentiellement axé sur la dope.

On avait déjà beaucoup lu avant. Une fois que tu as eu ta dose, il te reste un peu de temps quand même. J’ai moins lu dans les années 80 avec l’arrivée des écrans. Et puis j’ai commencé à perdre la vue. J’ai commencé à porter mes lunettes noires pour imiter Dylan ou Polnareff qui étaient aussi myopes que moi.


Eudeline + Despentes + Daniel Darc = Mauvaise Etoile

Certains passages ne manquent pas d’humour, notamment celui où tu racontes que l’héroïne était coupée avec des épices pour tajines et la coke à de l’aspirine…

Ben oui, tout ça est rigoureusement exact !

Comme Iggy Pop tu as connu la rue avant d’être remis en selle par Despentes dont l’admiration t’a servi de déclic. As-tu déjà rêvé d’une vie rangée ?

J’ai pas eu le choix de cette vie là, tu sais… Dès 13 ans, c’était l’explosion de musique la plus forte que tu puisses imaginer. Je ne me suis jamais demandé ce que j’allais faire une fois grand, tout s’est enchaîné très vite. Si j’avais été encouragé par mon père, j’aurais pu reprendre mes études s’il m’avait poussé au lieu de laisser son fils dehors. Il était con et vieux. Je n’ai pas changé d’avis sur lui, il était bête et stupide. Sa mort est le plus beau jour de ma vie. Ma mère m’en veut encore de cette phrase.

Si tu avais eu un enfant, l’aurais-tu laissé écouter Johnny Thunders ?

(Ému, il cherche ses mots) Le gosse, ça a failli, j’ai refusé plein de fois, quand j’ai dit oui, ça a raté…les regrets, les remords…
Johnny Thunders ?  j’aurais essayé de lui faire découvrir des choses bien mais cela aurait été stupide de lui imposer mes goûts. Thunders, nous a tous précipité dans la dope, je l’ai dit. Mais au final, ce n’est ni sa faute, ni celle de Keith Richards ou de Lou Reed : tout le monde à son libre arbitre.

Tu suis la scène Française actuelle ? Biolay, Angèle, Luciani ?

Biolay a du talent, il sait composer, écrire. Bien.
La gamine, Adèle, Angèle, là ? Sa place est au cinéma, elle va exploser. Sa musique ? Non !
Luciani, c’est pas la pire, un revival Blondie pas trop mal fait.

Les Liminanas ? 

Non… Je déteste pas, c’est très bien. c’est bien que ça existe. Pas mon truc, le disque ne m’a pas ébloui mais je suis content pour eux.

Alister me confiait ne pas vouloir se compromettre à écrire pour les autres. Et toi ? 

J’ai écrit pour Elodie Fregé, très belle personne, très belle fille (LE SEXE DES ANGES, introuvable sur Youtube -Nda).
Tu sais, je vais te dire un truc : avec Alister, on a envie d’écrire pour les autres, on ne demande que ça, mais c’est un tel panier de crabes que c’est impossible, c’est que du relationnel de putes.  Tu crois que j’aurais pas aimé écrire pour Polnareff, mon héros absolu ? J’ai mis 15 ans à oser jouer PLEASE LOVE ME sur scène, tellement j’étais pétrifié.
Avec un ami que j’adore, Philippe Jakko, on a essayé de faire une association  pour placer des chansons. J’adore ce mec, 1er prix de conservatoire, il chante juste comme Goldman, (!) il a un talent fou.  Il a réussi à vendre des musiques pour Christophe Maé. Il a eu un tube enorme avec une merde, il le reconnait lui-même : YAKALELO, c’est lui, il s’est acheté sa maison avec…
Quand on s’est rencontrés, il pensait que j’allais lui cracher à la gueule, tu vois ? Lui, le mec de YAKALELO.
On a parlé de musique classique, le mec avait travaillé avec Boulez.

Les punks, tu l’écris, étaient fascinés par la violence et les gangsters. Quelle différence ferais-tu avec le gangsta rap ? 

Bon…Déjà, je suis d’accord avec l’idée que ce sont des mouvements urbain, tout ça…Mais ce ne n’est pas la même histoire. Je vais te dire un truc social terrible : les Punks venaient de la petite bourgeoisie, ils avaient lu deux ou trois livres, vu deux ou trois films. Ce n’est pas un hasard si dans le rap, les meilleurs, s’appellent Joey Starr ou Mc Solaar, des gens qui ont un minimum  de culture… Je peux pas reconnaître une légitimité à des analphabètes comme Booba. 

Avec Christophe, sur scène : La ligue des Dandys Extraordinaires !  ©D.R  Avec l'aimable autorisation de Patrick Eudeline.

Avec Christophe, sur scène : La ligue des Dandys Extraordinaires !
©D.R
Avec l’aimable autorisation de Patrick Eudeline.

En lisant ANOUSHKA 79, j’ai eu plein de morceaux en tête en dehors des sempiternels Iggy et Lou Reed.  On essaie ?

-JJ Burnel : UN JOUR PARFAIT

Bien,sans plus ! Mais j’aime bien le mec, j’aime bien Burnel, on a souvent traîné ensemble au moment de l’album qu’il produisait pour Taxi Girl. Je connaissais moins les Stranglers.

– Christophe : MINUIT BOULEVARD

J’aurais pas choisi celle-là. De Christophe, j’adore les premières j’adore REVIENS SOPHIE, jusqu’en 1972. Les disques avec JM Jarre, bien sûr, MAMAN, c’est vraiment ce que j’aime, celui avec Alain Z Kan ( un chanteur des années 80 qui a disparu dans le métro et le beau-frère de Christophe-Nda), mais après je m’en fous un peu. 

-Johnny : RENDEZ-VOUS EN ENFER

Pareil, le grand génie c’est entre 64 et 70. Quand il s’associe avec Goldman et Berger, je comprends sa décision.

J’ai toujours aimé Goldman, c’est mon plaisir coupable !

C’est ton problème ! (Sourire)  J’ai pas un grand respect pour Goldman, mais s’associer à lui c’était intelligent de la part de Johnny. Goldman, c’est un bon faiseur, il ne me transcende ni par les textes, ni par la musique, mais il chante très juste, IL SUFFIRA D’UN SIGNE, SISTER JANE, ce sont des vrais tubes. Je respecte son succès à ce stade, il n’y a pas de hasard mais à côté il y a plein de gens plus talentueux qui sont restés dans son ombre. 

-Perry Blake : ANOUSHKA

‘Connais pas

-Alister : MAUVAISE RENCONTRE

 Il peut me téléphoner de temps en temps, je ferai des trucs pour SCHNOCK sans problème. Je l’ai invité à un concert Alister, il est venu, c’était très bien.  Musicalement aussi, c’est très bien.

-Taxi Girl : PARIS

(Ému) Bien sûr…Celle-là est particulièrement bien (Silence)

-Patrick Eudeline : MAUVAISE ETOILE

J’ai raté la voix sur cette chanson. Je me suis vraiment emmerdé sur les arrangements, j’ai tout fait sur cet album avec parfois des gens du groupe Tanger dessus.

La dernière grande rock star ? 

(Sans hésiter) Amy Whinehouse et Pete Doherty, aussi malgré tout. Je connais très bien le lascar, il joue de la guitare comme une merde mais il a écrit des chansons extras.

Notre entrevue se termine vers 15h30. Eudeline  pose facilement pour quelques photos.  Celui qui a souvent été traité d’homme du passé par est un tissu de contradictions passionnantes à déceler : durant notre entrevue, l’écrivain de la défonce sirotera à peine un petit verre de Canisse.  L’homme des formules chocs aura toujours été très respectueux et à l’écoute. A l’ancienne, il joue avec son paquet de clopes, son Zippo et souffre de ne pas fumer au comptoir. Pas une seule fois il ne sortira son téléphone portable, concentré sur ses réponses.  Eudeline ne rit jamais mais plaisante beaucoup. Et à la fin il me donne une leçon d’informatique sur comment créer sa musique sur ordinateur, lui, le vieux Punk !
Nous nous quittons au métro Guy Mocquet.  Alors que je m’apprête à aller underground, je jette un dernier regard sur sa frêle silhouette. Celui qui chante la Mauvaise Etoile est en pleine lumière.  Il s’achète un journal et s’apprête à marcher dans ce Paris dont il aura tutoyé les caniveaux et les clubs.  SUCH A PERFECT DAY, je suis content de l’avoir passé avec lui…

Eudeline par l'artiste Edwige Dupont.

Eudeline par l’artiste Edwige Dupont.

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La BO du jour :

Pour toi, Patrick : Taxi Girl chez Sidney…(« vous êtes que deux maintenant ? » « Ouais, on était entouré de gens inutiles qu’on pouvait plus entretenir »)

45 comments

  • David  

    Sacrée rencontre. Un monde très éloigné du mien. Si j’avais pu être présent, je pense que je n’aurais pas parlé. Je l’aurais observé et écouté. Merci pour la dêcouverte d’un dinosaure du punk français.

  • Surfer  

    Je ne connaissais pas du tout le musicien / personnage.
    Merci pour la découverte intéressante, malgré le fait que je ne partage pas grand chose avec lui. La dope, le mouvement Punk… Un univers que j’ai su éviter.
    Je garde un très mauvais souvenir de mon 1er voyage scolaire à Londres et de ma rencontre avec des Punk.
    Dire que James Brown fait de la musique pour minets et qu’à côté de ça on adule Polnareff m’a beaucoup fait rire.
    Désolé pour les admirateurs de « L’Amiral »

    • Gilles NV  

      Il faut savoir qu’à la.fin des 60’s début 70’s c’était exclusivement les minets qui écoutaient effectivement James Brown et qu´il était pour nous l’antithèse de la musique pop rock qui nous passionnait. c’est ce qui nous a éloigné de ce génie que je n’ai découvert que plus tard. CQFD !
      Gilles

  • Patrick 6  

    Et bien voilà une interview parfaitement passionnante !
    Pour le coup je regrette de n’avoir pas pu venir ce jour-là, mais je vois qu’au niveau photo tu t’en es très bien sorti sans moi 😉 – celle avec le concours de lunettes noires est très réussie-

    En tous cas je vois qu’Eudeline est un classieux loser magnifique qui a vécu de l’intérieur toute la saga du Rock en France (et pas seulement en tant que spectateur). C’est carrément un témoignage passionnant de toute une époque cette interview ! La classe.

    J’aime bien le passage ou Darc et Starr planquent leur drogue sous leur table de nuit alors même qu’ils sont en desintox ^^
    « Je peux pas reconnaître une légitimité à des analphabètes comme Booba » ahah voilà de la musique à mes oreilles !

    Bon je dois admettre que je suis très largement passé à côté de sa prose post Best (et pour cause je suis allergique à Rock&Fuck). Dans les années 90 l’orientation de R&F n’était pas la mienne : Rap et Grunge. Pas ma came à l’époque. (Manœuvre enfoiré oui ^^) mais bon du coup pas d’Eudeline pour moi… A tort manifestement.

    J’aime beaucoup ta formule « c’était pas mieux avant mais c’est bien pire après » ça résume tout à mon avis ^^

    Pour finir bravo à Edwige son portrait arrache carrément !

  • Manu  

    Musicalement, ça ne me touche pas du fait que ce ne soit pas mon univers. Mais en revanche, le bonhomme est très touchant. Ta description de ses comportements est très pertinente, et on sent bien qu’il a réussi malgré tous ses ennuis à rester digne et fidèle a ses convictions. J’apprécie beaucoup ce genre d’entretien intimiste.
    Taxi Girls : j’ai juste envie de dire « au secours! » mais le titre est très a propos

  • Présence  

    Superbe portrait réalisé par Edwige.

    Je n’avais jamais entendu parler de Patrick Eudeline : c’est donc une découverte totale pour moi. C’est très enrichissant de découvrir ainsi les souvenirs d’un tel survivant, d’un témoin d’une époque, ou plutôt d’un participant d’une époque comme le fait observer Patrick 6. Je regarderai différemment les Hélène et les Corinne.

    L’héroïne était coupée avec des épices pour tajines et la coke à de l’aspirine… – Ça me rappelle également que mes copains ne pouvaient pas savoir ce qu’il y avait réellement dans les petites barres dans du papier aluminium.

    Le déroulement de l’interview est impressionnant, à la fois de culture, de respect pour un monsieur qui fait partie de tes idoles, et de questions moins consensuelles.

  • Steve  

    Interview passionnante
    Mec passionnant
    J ai été son voisin pendant 2 ans mais trop timide pour lui parler.
    Je l ai croisé pas mal dans mon bar rue Lepic.
    Pareil
    Émouvant d anecdotes et de franchise
    Vive le punk, le vrai

  • Bruce lit  

    @David :Sacrée rencontre. Un monde très éloigné du mien.
    Encore heureux ! Eudeline n’a jamais promu de vivre comme lui une existence borderline. Comme il le dit dans l’intw, le choix s’est imposé de lui-même. Je crois beaucoup en la fonction Shaman du rock comme Jim Morrison l’avait théorisé. L’artiste expérimente d’abord pour lui-même mais aussi pour la société les expériences les plus extrêmes pour les retranscrire à un public « en sécurité ». Chaque partie y trouve son compte, mais, rappelons-le, le rock, cette frange tout du moins, celle en quoi croit Eudeline, est une musique dangereuse qui implique de vivre ce danger. Certains appelleront ça du romantisme, d’autres la vie en rock, les derniers parleront de crise d’adolescence.
    @Surfer : A bien des égards, Polnareff est rock. Il est celui qui fait la 1ere une de Rock’n’Folk . A cette époque, il est scandaleux : un chanteur Androgyne à la voix suraigue et des compositions pop brillantes capables profondément originales ne s’alignant en rien sur les tables de la loi des Beatles. En montrant son cul dans la France de Pompidou, il choque.
    Sur les propos de Patrick, je pense qu’il retraduit le terme de Minet pour l’ado qu’il était.
    @Patrick : je ne cracherai jamais sur Rnf. Je leur dois toute ma culture rock et mon envie d’en écouter encore et encore. Aujourd’hui tout est facile, mais il y a 40 ans, il fallait ce journal pour te parler de binaire. Best et RocknF ont posé les tables de la loi. A nous ensuite de les suivre ou de nous en détourner.
    @Manu : je copie colle ta réaction pour le prochain article sur Patrick Rondat 😉
    @Présence : Oui, Edwige y a mis tout son coeur. Pour info, il existe plusieurs versions de ce portrait dont un trash où j’avais demandé que Eudeline soit serti d’une couronne de seringues et de capotes. Patrick a préféré la soft version. C’est une grande chance effectivement d’avoir pu passer autant de temps avec un Monsieur qui n’a pas compté ses minutes avec un minus comme moi.
    @Steve : Eudeline a déménagé : il en avait marre qu’on lui vole ses instruments. Tu peux les lui rendre stp ?

    • Manu  

      Je me doutais que tu me dirais ça 😀

  • Eddy Vanleffe  

    Pour le coup l’interviewer m’interpelle plus que l’interviewé, cette fascination récurrente pour ces figures des paumés magnifiques, ces morts martyrs…pas moins de huit questions sur l’addiction et ce coté en transit permanent entre enfer et paradis
    Je suis à peu près persuadé que Rock n’ folk en veut à Doherty, d’avoir atteint ses 28 ans…il peut pas signer le livre d’or du club 27, il auraient tellement aimé avoir un héros de plus..
    c’est un monde qui m’a beaucoup fasciné, mais qui aujourd’hui me glace d’effroi
    depuis nos échanges, Bruce je me suis assez souvent posé la question si finalement j’aimais le rock, parce que ce rock là, je ne l’aime pas …
    Concernant monsieur Eudeline, on sent le mec instruit avec un solide bagage musical et des goûts aiguisés, mais pas dogmatique comme certains. une bonne surprise donc.

  • steve  

    Ahahah
    Juré c est pas moi!
    Pour moi c est le rock comme je l aime
    Les soirées qui finissaient en nuit
    Déambuler, boire, rencontres hasardeuses
    Ce qui me plaisait c était d avoir la musique à fond, voir les gens danser, parfois danser soi même…
    le clip me rappelle des bons souvenirs avec toi bruce
    Le gibus… les rares fois où j y suis allé c était des soirées tremplin
    Moins rock and roll que par le passé
    Je me souviens des soirées cave brit pop, de la loco, du bus palladium à sa réouverture et des soirs avec mes potes dans le 5 eme ou les rues et ruelles n avaient plus aucun secret, des concerts sur les quais avec mon frérot ou on reprenait du Alice on chains!
    Eudeline est vraiment classe dans ses réponses
    Je le pensais vraiment plus dur à interviewer car ses articles toujours très détachés et amers parfois
    C est drôle de voir comment ce type a réussi a faire du rock un monde périphérique qui tournait autour de lui et cela sans aucune prétention
    Vie vécue à 100 à l heure…
    respect à vous Eudeline et toi Bruce
    Ça a l air d être une belle rencontre

    • Bruce lit  

      @ Steve Les soirées loco…et les retours à pied, barbes , pigalle, gare du nord avant le train de 05.02 pour Epinay Villetaneuse. Les bourrés, les travelos, les putes, les jeux d’arcade, les sex shop, le Whisky Coca offert par la loco, s’hydrater ensuite dans les pissotières dégueulasses, les allers et retours entre les étages, la playlist alternative que le DJ ne passa jamais, les pogos, les chemises déchirées, rentrer chez soi torse-nu le noctamblagues, les cordes pétées pendant les concerts et les filles bien entendu…Je ne changerai rien de tout ça pour l’or du monde.

      @Eddy : c’est une vision du rock radicale et l’interview de Eudeline le montre, assez fatale. Pourtant, pour moi, fan de James Dean qui pensais vivre vite et mourir jeune, il y a quelque chose de l’espoir là-dedans : l’écriture c’est encore la vie. On peut avoir survécu à tout ça et être en vie. Quant à la question d’être heureux là-dedans, elle se pose à tout à chacun, rocker junkie ou fonctionnaire.
      Sur Doherty, vraiment je ne sais pas d’où tu sors ça, car au contraire, via la journaliste Bugsy présente dans le clip MAUVAISE ETOILE avec son tatouage BABY SHAMBLES, le journal a soutenu l’ex Libertines de bout en bout. J’ai vraiment l’impression que tu projettes plus que tu ne constates, l’ami 😉

      • Eddy Vanleffe  

        Je me suis mal exprimé dans mes images et mes exagérations….
        je me doute bien que personne n’ait été réellement attristé par le fait que Machin Doherty ait continué à vivre,
        mais c’est un monde que je sens tellement en besoin d’idoles martyres que j’ai l’impression que dès qu’ils en trouve un à leur goûts, ils y plaquent leurs mythologie…
        Je n’argumenterais pas plus.
        Doherty, Whinehouse…j’arrive pas à leur mettre un piédestal quelconque… ils doivent sans doute posséder la patte que je ne comprends pas…

        C’est pas grave. ^^

        • Bruce lit  

          @Eddy
          Pas la peine de t’excuser. Nous sommes ici dans du Rock Urbain, celui de Lou Reed et des premiers Iggy Pop. Il s’agit d’une fraction et non d’une définition.
          Je n’ai jamais été transcendé par Pete Doherty. Par contre, Amy Winehouse m’a bouleversé.

          • Tornado  

            Ben voilà : Là je ne peux pas suivre Eudeline : Doherty a fait quoi à part s’évertuer à avoir la bonne attitude rock ? Il a fait que dalle. C’est que de l’artifice. Si c’est ça faire du rock, j’ai vraiment bien fait de continuer à défendre mes goûts.

          • Eddy Vanleffe  

            Je suis Tornado! 🙂

          • Bruce lit  

            Tu n’as pas un peu frissonné que la gars dit avoir fréquenté JJ Burnel ?

          • Tornado  

            Pfff… M’en fous moi je suis sorti avec sa cousine…

  • Jean F  

    J’attend pas Patrick. Je pense savoir pourquoi

    Toute cette longue vie au contact de diverses personnalités chopinou du rock ou autres légendes de la chanson chantée… c’est beau, c’est enviable. Forcément humainement c’est que le bonhomme a un certain talent certain. Respect minimum pour ses qualités d’homme. Well done !

    Pour ce qui est de l’artiste, l’auteur, l’écrivain rock option dandysme là y’a un soucis. Un vrai mais un finalement assez simple (selon moi): En matière de rock (ou d’écrivains rock) chez les français (contrairement à ce qui s’est passé en musique électro, par exemple) la concurrence a (selon moi) TOUJOURS été particulièrement faiblarde, poussive sinon limite pathétique… au point qu’un type comme Eudeline ou un groupe comme Asphalt Jungle ont pu passer (selon moi) pour des entités importantes de cette romantico-dramatique histoire de la nuit rock titi parisienne. Sorry, j’échange les discographies complètes d’Asphalt Jungle, Johnny, Christophe et Polanreff contre le 1er LP quasi inconnu de rockeux ricains quasi inconnus autour de leur chanteur à peine 1 chouille 1 peu plus connu: Bruce Joyner 😉

    https://youtu.be/vuOOJvTLjLw

    bisoux love

  • Tornado  

    Pour avoir lu un article de lui la veille, Ce Eudeline d’aujourd’hui est assez raccord avec l’image que je m’en faisais : Un rocker puriste à la ligne de conduite ultra engoncée dans la pensée unique façon punk, mais en même temps pétri de contradictions qu’il ose à peine susurrer !
    Parmi toutes ces contradictions, au hasard, je vois beaucoup plus de liens entre le Pink Floyd post Dark Side et Polnareff et Christophe qu’entre ces derniers et les punks par exemple ! Mais bon moi je pense en terme de musique, pas d’attitude.

    Malgré le fait que Patrick Eudline ait toujours incarné l’image de tout ce que je déteste dans le rock, de sa philosophie dogmatique à son résultat musical (le titre d’Asphalt Jungle choisi dans l’article représente pour moi le cauchemar sonore ultime), je l’ai toujours trouvé sympathique.
    Et pour cause… Il me rappelle trop mes vieux potes.
    Mon pote Francky, que j’admirais au départ parce qu’il était le batteur d’un groupe de stars locales (du rock 60’s entre psyché et punk), puis que j’ai côtoyé un temps autour de notre instrument de musique commun (il me prêtait son local et sa batterie), et puis qui est finalement devenu l’ami intime.
    Mon pote Fifi (du même groupe de stars locales…), mon colloc durant les années où j’ai vécu à Lille. Lui qui avait à l’époque à peu-près le même look que Patrick Eudline, lui qui me torturait quotidiennement en passant dans notre appart ses disques des Ramones usés jusqu’à la corde… Purée, c’est à cette époque que j’ai développé mon concept des chansons sanction ! (http://www.brucetringale.com/top-10-10-sanctions-pour-vos-amis/). Qu’est-ce qu’on se marrait ! Quand je pense que lui et d’autres potes m’ont traîné pendant des années dans des concerts garage de Lille à Bruxelles, la vache, j’en ai bavé ! 😀 (mais du coup j’ai moi-même vécu le rock de l’intérieur et effectivement y avait pas que de la rigolade quand certains succombaient à une vie un peu trop extrême…).

    Du coup, après lecture de l’article je me fais deux réflexions :
    – Je trouve qu’un type comme Eudline a eu à la fois de la chance de vivre une vie aussi intense entre la rue et les projecteurs du showbiz. Mais qu’en même temps c’est une vie quand même très violente, où la lumière côtoie en permanence l’obscurité.
    – Ce n’est pas étonnant que je ne puisse pas m’empêcher de trouver un gars aussi sympathique malgré le peu de goûts en commun. Puisque certains de mes meilleurs potes auront été exactement comme ça ! 🙂

    • Bruce lit  

      Overdoses, problèmes de santé à vie, réhab’ (le bouquin de Keith Richards décrit bien au delà de tout romantisme la désintox’ à l’héroïne, les manques, les cauchemars, le fait de se retrouver couvert de ses propres excréments), pbe de fric, la rue, les maladies, la solitude, les amis qui clamsent, oui, tout ceci fait peur. Autant une vie à la Gainsbourg peut faire rêver, autant celle de Eudeline ou de Daniel Darc font flipper. Mais le rock, c’est qu’au delà d’un destin de Junkie, l’un écrit des livres et des articles formidables (même si je ne suis pas d’accord avec sa vision du Floyd) et l’autre, Daniel, a créé des chansons inoubliables. C’est pour moi le chemin qu’il fallait traverser pour en arriver là. On écrit pas CREVE COEUR en buvant de la tisane chez Michel Drucker. On écrit pas THE WALL sans avoir viré SYD BARRETT de son propre groupe. On ne joue pas dans la FUREUR DE VIVRE en étant bien dans sa peau et avec les autres. Ce sont tous ces gens qui parviennent à transformer leurs souffrances intimes en oeuvre d’art collective qui ont mon admiration.

      Pour ASPHALT JUNGLE, c’est assez sauvage effectivement, mais on y entend pas que du Punk Brut mais une culture du rock des années 50.
      Sur MAUVAISE ETOILE, Eudeline chante assez faux sur le refrain et la première fois, je me suis dit, mec, le gars donne des leçons à tout le monde alors qu’il aurait besoin de cours de chant. Mais la chanson possède une vraie beauté, celle qui demande d’aller au delà, comme les chansons de Syd Barrett par exemple. C’est une chanson que j’aime bien fredonner seul de temps à autre.

      Le chemin pour en arriver là a sûrement été atroce et long pour Eudeline. Il est encore là, moins abîmé qu’un Renaud. Je ne partage ni ses idées politiques, ni sa vision du monde, mais il fait partie de mon paysage depuis 20 ans un peu comme un vieil oncle déglingué qui viendrait foutre un peu la merde en famille mais auquel on reste très attaché.
      Le passage sur Booba, ne me dis pas que tu n’as pas jubilé !

      • Tornado  

        Le passage sur Booba, jubilé j’ai…
        Moins le passage sur Joey Starr… Et d’autres… Mais je m’attendais à tout ça.
        Ce à quoi je ne m’attendais pas c’est Johnny = génie. Ouch ! Je pense qu’il va falloir que je revoie ma copie et réécoute toute sa discographie un jour parce que, apparemment, j’ai raté un truc…

        En tout cas c’est mon interview préférée parmi toutes celles qui figurent sur le blog. Et encore une fois, même si je déteste quasiment toute la musique défendue ici, sur l’attitude, je suis de la famille…
        Et au fait merci pour la dédicace ! 🙂

        • Bruce lit  

          Tu détestes ni Christophe et encore moins Gainsbourg. On dit aussi du bien de Biolay que tu apprécies je crois.

          • Tornado  

            Absolument. Je me suis mal exprimé. Je parlais essentiellement du punk et de ses rejetons.

  • Ed'  

    Un superbe article fort agréable à lire ! J’ignorais pour Élodie Frégé, intéressant …( et merci pour vos appréciations au dessus concernant mon travail 🙂 !) Un bon week-end à tous !

    • Tornado  

      Je n’ai pas parlé de ton travail mais, évidemment, il est fantastique (et de plus en plus d’ailleurs) !

      • Kaori  

        Rah moi aussi, j’ai oublié de le mentionner, très beau tableau !!!

  • Kaori  

    Comme beaucoup ici, je ne connaissais pas Patrick Eudeline, que j’ai découvert grâce aux partages de Bruce sur sa page.
    Bon, abordons tout de suite le sujet qui fâche : musicalement, ce n’est pas du tout mon truc !!
    Mais j’ai trouvé l’interview vraiment intéressante, comme la peinture d’une époque que je n’ai pas connue.
    Ce monsieur est un Survivor, tellement lucide et franc, c’en est touchant. Un dinosaure rescapé d’une époque révolue, alors que tous ses compatriotes ont succombé à la météorite…

    Bravo à toi Bruce, pour ton talent qui t’a permis de créer un lien avec ce personnage qui paraissait si peu loquace, et tirer de lui autant de confiance.

  • Thierry  

    Bel accomplissement cet article, Bruce! J’ai trouvé cette conversation très intéressante malgré le fait que le personnage et son milieu (punk rock français) me sont totalement inconnus.
    C’est d’autant plus touchant de te voir discuter avec tant d’empathie, et sans jugement, de sujets aussi difficiles. On voit ton métier transparaître. Merci!

  • Bruce lit  

    Pardon pour la réponse tardive, vidage de bouteilles avec Nikolavitch, le gars vient de partir…(enfoiré)

    @Thierry : je ne m’attendais pas à ce que Patrick Eudeline soit connu au Quebec. L’empathie envers Eudeline est perceptible ? Tant mieux ! Elle s’est depuis transformée en sympathie.
    @Kaori : Merci pour ta curiosité. Je me doute que ce n’est pas ton univers. Quoique…Je lui ai parlé de Saez et de ton article et Patrick s’est montré intéressé.
    @Ed’ : hey sister ! Thanx !

  • Aliénor Drake  

    Je ne connais pas bien le personnage, j’ai adoré lire to. Itv maître Bruce, qui reflète une intimité, comme une complicité entre vous 2. Ça m’a donné envie d’approfondir mes connaissances sur ce nom que je connaissais sans vraiment plus. Merci !

    • Bruce lit  

      Salut Alienor.
      Même si je n’avais pas été fan de Patrick Eudeline, j’ai adoré passer l’après midi à ne parler rock, que de rock et encore de rock. Loin de l’imga qui est donnée de lui, Eudeline est à l’écoute et capable de débattre pacifiquement et entendre des arguments diamétralement opposés aux siens. Ce qui n’est pas le cas d’un Zemmour qui veut toujours avoir raison auquel un papier dégueulasse (critiquer une personne en fonction de son physique et de son choix de vie, le même choix de vie qui amène tout admirateur de Eudeline à s’intéresser à lui, c’est aussi malhonnête que les raccourcis pratiqués par les extrêmes droite et gauche- on en parle jamais assez des conneries de l’extrême gauche, hein…) l’a comparé récemment.
      J’attends avec impatience la fin du confinement pour pouvoir remettre ça et boire beaucoup, beaucoup d’alcool avec du rocknroll dans les oreilles et chambrer Eudeline sur Pink Floyd.
      Merci de ta visite.

      • Tornado  

        Ah ouais, j’adorerais chambrer Eudeline sur Pink Floyd, sans déconner ! 😀

        • Bruce lit  

          Je pense que ça collerait bien entre vous. Vraiment, c’est un mec très attachant.

          • Tornado  

            Aucun doute.

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