Ladies With Gueules (Interview Anlor + Elvire DeCock)

Ladies With Guns – Tome 2

Une interview de BRUCE LIT

VF : Dargaud

1ère publication le 28/09/22 -MAJ le 19/12/22

She’s a ladies…
©Dargaud

L’an dernier, je vous clamais mon enthousiasme pour le 1er volume de LADIES WITH GUNS scénarisé par Olivier Bocquet. A l’occasion de la parution du Tome 2 en septembre dernier, il était temps de dégainer une interview pour son illustratrice surdouée Anlor et l’étincelante coloriste Elvire DeCock (C’est bon? C’est suffisamment Stan Lee comme accroche?).

Anlor, Elvire bonjour. C’est vraiment avec LWG que je vous ai découvertes. Pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?

Anlor : Après avoir travaillé dans l’animation, je me suis tournée vers la BD depuis plus de 10 ans. J’ai dessiné les séries AMERE RUSSIE, A COUCHER DEHORS, CAMP POUTINE, LES INNOCENTS COUPABLES ; des histoires mêlant aventure et chronique sociale ou historique.

Elvire : La bande dessinée s’est manifestée sous les traits d’une vocation tardive de mon côté. Je suis sortie de Saint-Luc Bruxelles en 2005 et ai eu la chance de publier mon premier album dans la foulée, TIR NAN OG, au dessin et à la couleur, puis un dyptique, L’HERITAGE DES TAIRONAS chez Dupuis. Et depuis 2015, je me consacre entièrement au boulot de coloriste, donc toujours le même médium, mais à un poste différent.

Comment êtes-vous arrivées à bord de cette aventure et surtout quelles ont été vos réactions en découvrant le script de Bocquet ?

Anlor : Le scénario d’Olivier Bocquet avait été accepté par Dargaud, et avec l’éditrice ils cherchaient une artiste -oui, ils préféraient une femme pour se saisir de ce western féminin-  capable de le mettre en images. Ils ont tous deux pensé à moi. De mon côté, je n’avais pas particulièrement fait mes armes sur le genre western. Mais j’ai tout de suite dit oui en découvrant cet angle de vue particulier qui mettait à l’honneur les habituels personnages secondaires que sont les femmes dans l’Ouest, et en sentant le souffle bien pimenté qu’Olivier avait prévu d’y instiller. Ca promettait d’être assez amusant et novateur !

Elvire : De mon côté j’ai été contactée par Anlor qui avait apprécié mon travail sur LES FRERES RUBINSTEIN chez Delcourt. Il me semble avoir réfléchi au moins DEUX secondes avant de lui dire « oui avec grand plaisir ! ». Je connaissais son travail et l’envie d’y mettre des couleurs s’est fait sentir irrésistiblement. Le script, je l’ai découvert petit à petit même si on m’avait briefé avant. Mon petit plaisir de coloriste, c’est de découvrir un album au fur et à mesure, pour me laisser des surprises. Il m’arrive souvent de pouffer en ouvrant certaines pages ou de penser très fort « bien joué les loulous je kiffe ! » C’est assez agréable de fangirliser ses collègues en fait !

La cavalcade impitoyable
©Dargaud

LWG a été un succès critique et commercial. Quels ont été les défis à relever pour ce deuxième épisode ?

Anlor : Transformer l’essai. Densifier les personnages, garder le rythme tout en posant enfin quelques moments de respiration dans la narration après ce premier tome en apnée. Et bien entendu continuer à travailler sur les clichés pour mieux se les réapproprier à notre façon et surprendre le lecteur.

Elvire : Ne pas refaire les mêmes ambiances que dans le tome 01 MAIS réussir à caser une séquence-très-jaune-qui-pête quand même ! Accessoirement, essayer d’encore plus fusionner le trait et la couleur pour coller encore plus à la narration d’Anlor.

L’action se fait ici -un peu- plus discrète pour creuser la personnalité de certains personnages et préparer la conclusion de l’histoire. Anlor, je voulais te dire à quel point tu étais douée aussi bien pour mettre en scène action et dialogues. On ne s’ennuie jamais en te lisant, il y a toujours un angle de caméra original et plein de détails amusants dans tes planches…

Anlor : Merci Bruce ! Le storyboard n’est pas une étape à prendre à la légère, c’est là que je creuse les indications d’Olivier pour donner du sens à chaque case, à chaque cadrage, et faire en sorte que le regard circule aisément dans la page. C’est aussi le moment de bosser le découpage et la composition des pages pour parfois appuyer le sentiment dominant de la séquence : calme, oppression, rythme saccadé etc. seront ainsi soutenus et amplifiés par ces cases à tendance horizontale ou verticale, avec ou sans cadre, nombreuses ou clairsemées, régulières ou chaotiques… il faut convoquer toute la grammaire de la BD, et parfois la réinventer.

Avant/Après
©Dargaud

Elvire, comment approches-tu la colorisation des planches d’Anlor ? Tu y vas tout-de-go ou te concertes-tu avec elle ?

Elvire : On est un peu entre les deux. Anlor me fournit des instructions précises mais pas contraignantes. C’est à dire qu’elle va me mentionner des ressentis (une tension qui monte ou un malaise qui s’installe par exemple) et me donner quelques infos non-négociables (le mec de la case 3 est blond, son cheval est alezan). Le reste est à ma charge et ma libre interprétation. Je rigole souvent en disant que j’y vais comme une grosse bourrine, mais c’est un peu vrai : je ne réfléchis pas vraiment. Ou plutôt j’y vais à l’instinct en laissant le dessin me diriger et en construisant l’ambiance au fur et à mesure. Certaines pages sont évidentes, d’autres plus capricieuses.

Il y a des moments formidables où tes couleurs font des merveilles : l’ambiance cotonneuse des banques imaginaires que les Ladies veulent braquer qui s’opposent à la violence de leurs actions.

Elvire : Merci beaucoup ! Oui, la couleur a son propre rythme. On ne le dit pas assez mais mettre en couleur, c’est aussi raconter une histoire. Car la couleur induit une réaction du lecteur qui est principalement dans le ressenti immédiat. Et c’est sur cette immédiateté qu’on peut jouer pour créer quelque chose qui apporte au récit du rythme en plus ou de la dissonance par exemple. Ce sont sur ces ruptures ou ces accompagnements que j’essaye de jouer.

Use Your Illusions
©Dargaud

Les personnages élaborent leurs plans dans une sorte de projection psychique telle que l’on peut en voir chez les Xmen. Comment as-tu envisagé ces scènes ?

Anlor : Ca c’est avant tout l’insatiable imagination d’Olivier. Je dois dire qu’il trouve toujours des moyens de réveiller et de surprendre le lecteur pour le garder bien embarqué dans le récit. Ces effets de style sont parfois inspirés du cinéma, parfois élaborés pour l’occasion, parfois aussi de simples flash-back ou flash-forward posés au bon endroit. Ce sont en tout cas autant de moments qui obligent à réfléchir et à s’investir vraiment dans la narration pour la décoder, ce qui nous fait sortir d’une simple lecture passive : c’est au final assez jouissif comme expérience de lecture.
La scène que tu évoques fait vraiment partie de cette catégorie : à la lecture du scénario, j’ai même pensé que ça allait trop loin et qu’on allait perdre nos lecteurs. On en a parlé, il m’a convaincu de tenter le coup. Dès que j’ai eu storyboardé cette séquence, j’ai vu qu’elle fonctionnerait au-delà de nos espérances, moyennant un petit effort de lecture active.

Il y a des gueules pas possibles qui interviennent dans LWG. Sais-tu où tu as été les chercher ?

Anlor : Oh, ça et là. Vraiment, ça sort du crayon, de l’imaginaire, parfois de l’imaginaire collectif ; l’idée étant d’essayer de ne pas tourner autour des mêmes faciès, ce qui n’est pas toujours aisé. On retombe vite dans des petits systématismes, qu’il faut alors traquer pour renouveler la galerie. Ensuite, j’y ajoute les expressions corporelles et faciales, c’est toujours une étape sympa qui demande d’entrer un peu dans la peau du personnage. Au final ça donne une bonne galerie qui s’étoffe de façon exponentielle !

LWG est souvent qualifié de Western Tarrantinesque féministe. Êtes-vous d’accord avec cette étiquette ?

Anlor : Alors, bien entendu il y a quelque chose de tarantinesque dans la façon de jouer avec les codes du western et de la pop culture. Sans doute aussi dans notre volonté de ne pas renier la violence et de la mélanger à une forme d’humour. Quant à l’étiquette féministe, on ne l’a pas revendiquée lorsqu’on a démarré ce projet. Mais il semble que rien que mettre des héroïnes au cœur d’un western, genre réputé traditionnel en BD, ce soit un acte féministe. Soit. C’est pour mon plus grand bonheur ! Mais je pense qu’on est surtout dans l’air du temps  sur ce sujet.

Vous nous parlez de vos influences BD/ Comics/Mangas ?

Anlor : Culturellement, je suis vraiment de l’école franco-belge. Mais j’ai découvert l’immense culture comics il y a quelques années (merci Daredevil, qui m’a ouvert la porte), et depuis je gratte la surface et je m’émerveille de ce que je découvre.  Je lis moins souvent de manga mais j’y prends vraiment plaisir aussi. Ces trois piliers permettent  explorent différentes grammaires et narrations qui nous enrichissent de nouvelles nuances. Inépuisable enthousiasme !

Elvire : Je suis de la génération Akira. Je parlais de vocation tardive, et bien, ce sont les mangas qui m’ont mis le pied à l’étrier de l’envie dessiner et de raconter des histoires. Mes références dessin baignent dans un maëlstrom de mangas et de franco-belge, entre Oda, de Crécy, Wendling, Hermann et Samura. Sur la couleur, je peux citer Mattoti qui reste mon phare dans la nuit quoi qu’il arrive mais par la force des choses, j’avoue que mes références de coloriste me viennent principalement de cette bonne vieille histoire de l’Art et que j’ai une passion pour des photographes comme Saul Leiter ou Harry Gruyaert. Parfois, repasser par les classiques ou s’inspirer d’un autre médium, c’est s’éviter de réinventer l’eau tiède.

Ladies With Machine Gun
©Dargaud

Elvire, le métier de coloriste est assez ingrat. On loue toujours les scénaristes et les dessinateurs mais le nom des coloristes n’apparait que très rarement sur les couvertures. C’est encore le cas ici… En ressens-tu une quelconque frustration ? 

Elvire : Ingrat, non je n’irais pas jusque là mais je suis d’un naturel heureux. Dans un monde idéal, j’adorerais avoir mon nom sur la couverture, ne mentons pas. Mais en vrai, je crois que je n’y accorde plus tellement d’importance. Je travaille au sein de plusieurs équipes extrêmement agréables (et celle des Ladies est vraiment aux petits oignons ! ) où l’on me laisse globalement faire tout ce que je veux à deux trois pages près. Le lecteur ne me connaît pas mais j’ai la reconnaissance de mes collègues. Il y a effectivement des questions qui se posent sur la place hybride du coloriste en BD – ni vraiment exécutant, ni vraiment auteur – qu’il faudra bien résoudre un jour. Même si je pense que ça ne peut se résoudre qu’au cas par cas tant que l’éditeur ne prendra pas sur sa propre part pour la donner au coloriste sans prendre sur celles de ses co-auteurs. Mais la réalité c’est que je suis une coloriste bien plus heureuse que je ne l’étais en tant que dessinatrice. Et que je ne regrette tellement pas ce choix. Mon nom n’est pas sur la couverture de LADIES WITH GUNS mais cela ne m’empêche pas de ressentir la poussée d’adrénaline du contentement artistique à chaque sortie.

Quels sont les personnages avec lesquelles vous avez le plus d’affinités ?

Anlor : J’ai un petit faible pour Abigail, l’enfant esclave. Quand on y réfléchit, c’est elle qui fait naître l’histoire en aimantant une à une les 4 autres ladies autour de sa cage où elle est coincée. Et elle est touchante de naïveté et de détermination.

Elvire : Les cheveux de Kathleen. C’est roux, ça pimente les planches d’une note acidulée et ça semble doué de vie propre. Pour le reste, mon âme appartient entièrement à Cassie Coltrane.

Dans la vie, qu’est-ce qui vous donnerait envie de prendre les armes ?

Anlor : L’injustice. Et puisqu’on en a parlé plus haut L’inégalité entre hommes et femmes en est une. J’ai tendance à être bien plus éveillée à cette cause depuis que j’ai deux garçons, et que je vois qu’on peut en parler et agir pour espérer mieux par la suite. Bon, ça ne s’appelle pas franchement prendre les armes, tout au plus un petit relevage de manches, mais dans les luttes chaque geste compte.

Elvire : Je rejoins Anlor sur le fait que chaque geste compte et que l’effort doit être collectif. Après avoir consacré un peu de temps au militantisme actif au sein du SNAC BD et du Collectif des Créatrices de BD contre le sexisme il y a quelques années, rien n’est plus juste. On peut prendre les armes tant qu’on veut, tant que la mentalité elle-même ne change pas en profondeur, on restera dans une boucle infernale si les gens ne sont pas convaincus qu’il faut changer.

Le volume 3 est en bonne voie ?

Anlor : Une dizaine de pages déjà finalisées en NB sur la soixantaine qu’on prévoit pour le T3. Olivier avance en parallèle sur le scénario, pour garder une bonne dynamique. Donc clairement, tout est en chantier mais on est à fond dessus.

Un dernier mot pour nos lecteurs ? 

Anlor : Si vous n’aimez pas les westerns parce que c’est boomer, tentez quand même celui-là. Il pourrait vous surprendre.

Elvire : Et puis si vous n’aimez pas le jaune, vous pourriez être surpris quand même aussi.

Anlor
©Dargaud/Rita Scaglia
Elvire

La BO du jour

34 comments

  • Matt  

    ça a l’air bien sympa tout ça.
    J’aime beaucoup les couleurs aussi.
    Mais je pense attendre la sortie du tome 3 si c’est la fin de l’histoire.

    C’est vrai qu’on ne parle pas souvent des coloristes. Alors que c’est pas évident comme taf, pour m’y être essayé moi-même à mon humble niveau.

  • Bruce lit  

    Salut Matt.
    Je pense que tu devrais aimer. Bocquet est un super scénariste que tu retrouveras l’an prochain pour la reprise de…SODA !
    Quant au rôle de la coloriste, je suis sûr que Présence se régalera des propos d’Elvire à son retour de congés.

    • Matt  

      Hello Bruce
      La reprise de SODA ? Ah…intéressant.

      Bon après je me méfie des reprises. Des fois ça trahit trop, même si c’est le jeu de se réapproprier le truc. Mais moi j’ai mes souvenirs nostalgiques donc si ça s’éloigne trop…
      Enfin on verra.
      Tu avais fini par tous les lire ou pas les SODA ?

      • Bruce lit  

        Pas tous non. Je ne les trouve qu’au compte goutes mais tous ceux que j’ai lus m’ont vraiment plu.
        Sur la reprise, elle est nettement moins polémique pour Dupuis que celle de Gaston. Et j’ai entièrement confiance dans le talent de Bocquet pour faire un truc à la hauteur.

        • Eddy Vanleffe  

          De ce que j’ai entendu dire, SODA sera un préquelle revenant sur son arrivée à New York. Avec Gazotti au dessins…
          j’aurais aimé un tome 14 posthume mais ça ne vient pas, même si l’artiste avait plus ou moins confirmé le terminer…

          • Jyrille  

            Ah, ça m’intéresse beaucoup moins qu’un tome 14. A priori le scénario de ce dernier était quasiment terminé par Tome, et il doit conclure l’histoire commencée au tome 13. Alors une préquelle, pas sûr d’avoir envie de tenter.

          • Matt  

            Peut être une explication sur la perte de ses doigts enfin ? On n’a jamais su pourquoi.

          • Eddy Vanleffe  

            Comme Jyrille, j’aimais bien que tout ne soit pas expliqué et ça me tente moyen-moyen…

          • Matt  

            Le tome 2 était déjà une préquelle du tome 1.
            ça pourrait reprendre après, sur son entrée dans la police ou un truc du genre.
            Pourquoi pas, si c’est bien fait.

  • Tornado  

    Un article déguisé en ITW ou une ITW déguisée en article ? Ah ? un ITWticle !
    C’est bien : On a une critique positive d’un album à travers l’ITW. Je commence à comprendre le principe !

    Les planches sont magnifiques. Bravo au duo d’artistes ! C’est vraiment impressionnant et incroyablement pro. Celle de la caverne m’a retenu baba pendant un moment. Quel boulot ! La comparaison entre le noir & blanc et la couleur est bienvenue aussi.

    La BO : Ah ben oui !!!

    • Bruce lit  

      Je retiens le concept d’ITWticle. C’est vrai qu’une interview, c’est aussi un article en moins à écrire, on fait bosser les autres…hé…hé…hé.
      Cette maudite version de WordPress ne permet pas d’agrandir les planches, c’est vraiment pénible.

  • Jyrille  

    Super interview, franchement passionnante dès que ça parle technique et ressenti. Parce que les planches sont chouettes et les couleurs impressionnantes à ce que je vois ici. Je ne suis toujours pas attiré par le titre (ou alors à l’occasion…) mais je suis heureux de savoir que le succès est au rendez-vous.

    Tu ne leur as pas demandé si elles avaient vu la série télé GODLESS ?

    « On peut prendre les armes tant qu’on veut, tant que la mentalité elle-même ne change pas en profondeur, on restera dans une boucle infernale si les gens ne sont pas convaincus qu’il faut changer. » Complètement d’accord avec ça. Merci.

    La BO : classique. Justement, on l’aurait pas déjà utilisée comme BO du jour ?

      • Jyrille  

        D’où ma question sur un recensement possible de ces BO…

        • Bruce lit  

          Oui, Cyrille, en vérité je te le dis : le recensement est impossible car il s’agit d’un lien Youtube.

          • Tornado  

            Franchement, qu’un article publié des années après reprenne une BO déjà entendue ou même un titre déjà choisi, je ne vois vraiment pas le problème.
            J’avais choisi « La cape et les pets » comme titre de mon article sur le film MYSTERY MEN. J’étais trop content de ce choix et je pensais l’avoir trouvé comme un grand. Et paf ! Bruce me demande de changer parce qu’il avait eu la même idée sur un de ses anciens articles que j’avais complètement oublié. J’étais trop déçu ! 🙂
            Il n’y a pas de copyright sur nos article. C’est juste un blog, pas un truc pro.
            Bref, les doublons ne me choquent vraiment pas. Je ne vois pas le problème (tant que ça reste espacé et fortuit, bien sûr).

          • Jyrille  

            Ah mais ça ne me pose pas de problème, c’est juste que je trouve ça bien d’avoir un aperçu de tout ce qu’on a publié, et surtout, lorsque je choisis un titre, ça me chagrinerait d’en proposer un que j’ai déjà mis (bon, dans ce cas, c’est vrai que le recensement ira vite ^^)

    • Olivier Bocquet  

      Bonjour, je suis le scénariste de LADIES WITH GUNS, et c’est précisément GODLESS qui m’a donné envie d’écrire cette série. Pourquoi ? Parce que, même si j’ai pris du plaisir à voir GODLESS, ce feuilleton était vendu comme un western « féminin »… ce qu’il n’est pas.
      C’est une histoire de mecs, avec un hors-la-loi, un shérif, un journaliste ambitieux, un homme d’affaires, et ce sont leurs actions qui guident l’histoire. Il se trouve que l’histoire en question se passe dans une ville habitée presque exclusivement par des femmes, mais elles ne sont là que pour panser les plaies, enseigner la lecture, et subir les rivalités masculines. À la fin elles participent bien au gunfight mais, clairement, elles ne sont jamais les personnages principaux – en tout cas pas les moteurs de l’action – et restent la plupart du temps bien sagement dans leurs rôles de femmes de western…
      J’imaginais tout autre chose. Je ne l’ai pas vu sur l’écran. Alors je l’ai écrit.

      • Jyrille  

        Bonjour M. Bocquet, merci pour le retour ! Je suis totalement d’accord. La série reste excellente mais elle n’est pas du tout un western féminin (à part dans le gunfight final).

        • Tornado  

          Et MORT OU VIF de Sam Raimi ? Y avait un peu de l’idée (et bien en avance sur son temps), non ?

          • Olivier Bocquet  

            Pour MORT OU VIF, c’est Anlor qui m’en a parlé, je l’ai donc vu après.

      • Fletcher Arrowsmith  

        Bonjour Olivier Bocquet, sympa de vous voir ici et de répondre à nos interrogations.

        Comme Tornado, j’ai également pensé à MORT OU VIF. Il y a surtout une énergie féminine qui se dégage de LWG, des filles presque garçons manqués mais qui reste femme finalement.

        Les influences cinématographiques se voient dans les cadrages d’Anlor.

        Si j’avais une question : a t il été plus facile d’écrire ce second tome après le succès du premier, avec peut être un peu moins de pression ? Comme expliqué à Bruce, j’ai trouvé le premier tome un peu trop « rushé », comme pris par l’urgence qu’il n’y aurait peut être pas de suite. Bruce me rassure avec à priori un ton plus posé et surtout plus d’introspection dans le tome2.

        • Olivier Bocquet  

          Bonjour Fletcher,
          L’histoire a toujours été prévue en (au moins) 3 tomes. Le deuxième était déjà aux 3/4 dessiné (et écrit) quand le premier est sorti, donc zéro pression de ce côté-là ! Mais pour la question du rythme de ce tome 1, nous avons fait comme nous avons pu avec les contraintes d’un album de 62 pages qui devait introduire 5 personnages principaux et des antagonistes, tout en n’étant pas qu’un album de présentation. Je voulais en plus prendre du temps avec cette cage, et déployer une grosse scène de bagarre à la fin (14 pages, presque entièrement dans une seule pièce… Bravo Anlor, au passage).
          Le résultat est sans doute imparfait, mais il faut toujours faire des choix.
          La réalité de l’édition franco-belge fait qu’on découpe souvent les histoires en tomes. Il faut donc (selon moi) que chaque tome ait son rythme propre (et sa propre histoire), tout en s’inscrivant dans une histoire plus longue et un rythme global. C’est toujours frustrant pour moi de voir des lecteurs qui pensent qu’ils ont « tout lu » après un tome, car clairement ce n’est pas le cas : j’essaie de faire en sorte que chaque tome soit meilleur que le précédent, ou en tout cas enrichisse le précédent, et que l’ensemble soit supérieur à l’ensemble des parties.
          Dans une autre série dont je suis l’auteur (Frnck) je sais par les chiffres que toute une partie du public s’est arrêtée au T.1 en pensant « ouais sympa », mais que ceux qui ont continué on découvert bien plus que ce qu’ils attendaient. Les gens sont prêts à suivre des séries TV dont on leur dit « ça décolle au milieu de la saison 2″… J’aimerais qu’ils aient la même curiosité pour les séries BD ! (en tout cas les miennes, pour les autres je m’en cogne ^^).
          La seule chose que j’espère, c’est faire un premier album qui donnera envie de lire la suite, et des suites qui ne font pas regretter d’avoir continué.
          Et pour finir, puisque je suis ici sur un site où chacun dit ce qu’il pense : je ne trouve jamais que les gens qui n’aiment pas mon travail on tort. Moi-même je n’aime pas le travail de beaucoup de gens, et je n’ai jamais tort !

          • Fletcher Arrowsmith  

            Merci de ta réponse Olivier. Complète, intéressante et franche. Tout a fait d’accord avec toi sur les saisons 1 et les séries. C’est clair que le lectorat, trop habitué au binge watching Netflix est devenu trop exigeant. Quand on pense au temps qu’il a fallu pour avoir des saga complètes de THORGAL ou BLUEBERRY, ce n’est pas un premier tome, qui plus est très prometteur, qui doit faire peur.

            Agréable comme discussion, car ce problème de rythme je l’ai réellement ressenti, étant au départ rentré complètement dans ce premier tome, limite convaincu à l’avance de ce que j’allais savourer : un western bien féminin rock and roll sous influence Tarantino et Peckinpah.

            Bon il ne me reste plus qu’à embarquer de nouveau avec tes Ladies with guns, tu le vends bien.

  • JB  

    Le western, un genre trop rare et un univers si souvent masculin qu’effectivement, des personnages féminins ressortent d’autant plus. Envie de découvrir tout ça et merci à l’équipe créatrice !
    Je me demande s’il n’y a pas une influence ciné pour certaines scènes. La mitrailleuse lourde m’évoque Pour une poignée de dollars ou la Horde sauvage

    • Bruce lit  

      Oui, JB l’influence ciné est clairement assumée par Bocquet.

  • Surfer  

    Le coté Western Tarantinesque, n’est pas pour me déplaire 👍😉.
    Tarantino a su, comme personne d’autre avant, féminiser une violence jusque-là réservée aux hommes…Et c’est jubilatoire 😀.
    Boulevard de la mort en est l’exemple parfait.

    Les visuels que tu présentes sont impressionnants de détails et les couleurs sont superbes.

    La BO : Top 👍. Je ne connaissais pas la version de Lee Hazlewood…elle est très bien aussi. Merci pour le lien et la découverte 😉

    • Bruce lit  

      Un jour si vous êtes sages je vous ferai un article sur Lee Hazelwood.

  • Fletcher Arrowsmith  

    Bonjour Bruce,

    super interview. Cela ne me fera surement pas acheter le tome 2 de LWG mais si un jour je le voie passer en médiathèque, oui.

    J’ai particulièrement gouté aux réponses de Elvire (superbe look sur la photo) surtout que je possède à la maison les deux premiers tome de TIR NAN OG, dont il me semble que nous attendons toujours la conclusion. On ne parle pas assez des coloristes et de l’importance de la couleur (dis celui qui est en train de terminer MONSTRE de BWS en noir et blanc….). J’ai beaucoup aimé son approche.

    De même les réponses assez tac au tac de Anlor reflète bien le côté fou et Tarantinesque de LWG, même si j’ai trouvé cela brouillon dans le premier tome (peut être à cause du scénario ?).

    La BO : la Nancy Sinatra qui accueille les GI dès le début de la seconde partie de FULL METAL JACKET. Excelsior (pour rester dans du Stan Lee)

    • Bruce lit  

      MONSTRE est dans ma pal. Le scenario de LWG2 est un peu plus posé et fait exister des personnages plus discrets dans le tome1.
      Aucun souvenir de Nacny Sinatra dans FMJ.

      • Fletcher Arrowsmith  

        pour Nancy Sinatra, je parlais de la chanson, pas d’elle …. (je me rends compte que je me suis mal exprimé)

  • Eddy Vanleffe  

    Je n’arrive pas à me motiver pour me lancer dans ce western au féminin..
    J’ai l’impression de l’avoir déjà vu quelque part conne une sorte de Bandidas qui serait réalisé par Tarantino.Référence que je goute moyennement pour ma part… Je ne suis pas fan de ce pilleur de tombes…
    BELLES DE L’OUEST avec Drew Barrymore et Andy Mc Dowell m’évoque un peu le pitch.
    N’éanmoins, les couleurs sont tellement pimpantes et pleines de peps… que je vais sauter l’obstacle et le lire rapidement quand même et ainsi être plus constructif…

  • Présence  

    Génial de découvrir l’avis des autrices sur ce 2ème tome dont j’ai pu lu lire le 1er gentiment prêté par Bruce.

    Comme d’habitude, les questions sont celles que j’aurais aimé poser, sans parvenir à les tourner aussi bien.

    – Les réactions en découvrant le script de Bocquet
    – Les défis à relever pour ce deuxième épisode après le succès du 1er
    – La conception des prises de vue, avec les angles de caméra
    – La façon de construire la mise en couleurs, et le degré de coordination avec Anlor avant la réalisation des planches
    – La façon de concevoir une gueule

    Voilà qui donne fortement envie de lire ce tome 2.

    • Présence  

      Mon avis sur le tome 1 version courte – Le titre promet des femmes armées qui vont défourailler tous azimuts : l’histoire tient cette promesse, avec une verve narrative qui emporte tout sur son passage, qu’elles soient armées de revolver et de fusil, ou non. La complémentarité entre dessins et couleurs est remarquable, comme si issus d’une seule et même artiste, avec une énergie et un sens de la mise en scène peu communs. L’intrigue repose sur une course-poursuite, ce qui donne une dynamique irrésistible au récit, avec une forme de féminisme revanchard, totalement justifié par une masculinité tellement toxique qu’elle est littéralement mortelle. Un bon défouloir.

      Version longue : https://les-bd-de-presence.blogspot.com/2022/10/ladies-with-guns-t01.html

Leave a reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *