La vie est un songe !

Ayako Volume 3 par Osamu Tezuka

En raison de la pauvreté et de la mauvaise qualité des scans, les images utilisées seront celles des éditions anglaises et japonaises!

Ne pleure pas ma belle...

Ne pleure pas ma belle…©Delcourt

Dernier acte de la vie tragique d’Ayako, petite fille née de l’inceste et qui, pour taire la honte de sa puissante famille, aura vécu 22 ans emmurée vivante.

La voila libre désormais d’arpenter le monde , riche comme Crésus. Mais pour aller où ? Et faire quoi ?

Tezuka continue d’être fidèle à une fine psychologie de l’être humain . Ayako est totalement traumatisée, une enfant emprisonnée dans un corps d’adulte, sans aucune échelle de valeur morale.

Elle, fruit du tabou absolu, prisonnière d’une humanité indifférente, faillible, égoïste. Elle qui a tant rêvé d’amour, la voila souhaitant le faire à toutes les personnes qu’elle pense aimer sans aucune retenue morale.

Elle paie des enfants des milliers de yen pour jouer avec eux à la balançoire , elle dort dans une caisse et souffre d’agoraphobie. Et en bon tragédien, Tezuka remet Ayako sur la voie de sa sombre destinée.

Celle-ci va rencontrer tous les acteurs de son malheur et le destin sera aussi terrible qu’ironique à l’égard de la famille Tengé. Mais là où d’autres auteurs se seraient fourvoyés à ne verser que dans le mélo, façon Candy, Tezuka traite sa héroïne comme un personnage secondaire et verse dans ce troisième opus dans la politique.

Une femme du monde qui aura vécu hors du monde

Une femme du monde qui aura vécu hors du monde©Delcourt

En mêlant fiction et réalité , il raconte la corruption du Japon d’après guerre où les organisations mafieuses ont une avenue pour reconstruire le pays à leur convenance.

Tezuka ressort « le héros » de l’histoire avant qu’il ne devienne un vulgaire assassin : Jiro.

Il brosse avec ce personnage une figure ambivalente de bandit , d’assassin en proie au remords . Entièrement voué à la rédemption de ses crimes commis envers la fillette, il rappelle avec sa petite moustache , ses cheveux gominés, son code de l’honneur, son emprise de père jaloux et son aura la famille Corléonne du Parrain.

Des retrouvailles inatendues

Des retrouvailles inatendues©Delcourt

Tezuka avant de conclure son intrigue multiplie les personnages secondaires avant que tout s’emboîte avec une maestria implacable.

Tous les acteurs du drame se retrouvent enterrés vivants sous une grotte et vont régler leurs comptes loin du regard d’une société qu’ils ont souillé de leurs crimes. C’est impitoyable, sans concession, parfois suffoquant.

Ayako n’est pas sans rappeler Sigismond le héros de Calderón dans La Vie est un songe : un enfant soustrait à la civilisation et élevé comme une bête. Sa libération ne fera qu’accélérer le processus de destruction dont les acteurs du drame voulaient se protéger .

On ne ressort pas intact de ce cauchemar mis en scène par un auteur qui a souvent mis en scène des récits de science fiction et des contes pour enfants. Après un récit de 700 pages, Tezuka a livré une saga sur plusieurs génération , sans la moindre fausse note, sans la moindre faute de goût , avec une fin complètement synchrone avec l’ensemble du récit.

Une femme fatale qui s'ignore

Une femme fatale qui s’ignore©Delcourt

Récit historique , mafieux , tragique psychanalytique et sexuel , Ayako est tout cela à la fois et bien plus.

Tezuka détourne tous les codes du mélo familial pour livrer une fable où les hommes ne sont plus que des ombres menaçantes dans un univers en ruine . Comme les prisonniers de la Grotte de Platon , esclaves de leurs passions et de leurs pulsions, ils cherchent le sens de leur existence . Et Ayako  finit dans une grotte !

Un album hors du commun, une héroïne inoubliable. Les gens de Delcourt ne se sont pas trompé en l’éditant , eux qui publièrent un certain Alan Moore et son Watchmen.

2 comments

  • Bastien  

    Bonjour,
    Je viens de finir ce tome qui est très intéressant.
    Tezuka délaisse un peu Ayako pour se concentrer sur le Japon des années 70 et particulièrement la violence et la corruption de Tokyo.
    Seul petit regret est la conclusion qui est trop rapide à mon gout.
    J’ai trouvé la lecture de cette saga très bonne, même si l’ambiance est très lourde (durant les deux premiers tomes, on respire beaucoup mieux dans ce troisième tome).
    Merci pour cette découverte.
    Bonne journée.

  • Bruce lit  

    Salut Bastien,
    Je n’avais pas trouvé la conclusion trop rapide. Le sort de tous les personnages est séllé, Ayako redevient une ombre, la fin est parfaite comme dans tout ce que j’ai lu de Tezuka. Heureux que tu ais aimé en tout cas.

Répondre à Anonyme Annuler la réponse

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *