L’ÂGE DE LUMIERE

TOM STRONG, par Alan Moore, Chris Sprouse & divers

Par TORNADO

VO : America’s Best Comics / Wildstorm / DC Comics

VF : Urban Comics

Les gros pavés de chez Urban Comics.
© DC Comics / Urban Comics

Cet article porte sur l’intégralité de la série TOM STRONG par Alan Moore, publiée mensuellement de juin 1999 à mars 2006. Soit trente-six numéros (issues #1-36).

En VF, l’intégralité de la série a été publiée par l’éditeur Urban Comics en deux très gros (et très lourds) tomes. Semic puis Panini Comics avaient jadis commencé à publier la série en albums souples, sans jamais terminer leur travail…

Dans la 1ère moitié des années 2000, Alan Moore avait fondé sa propre ligne de comics au sein de la compagnie Wildstorm. Un label nommé ABC (America’s Best Comics !), qui lui offrait une totale liberté de création et dans lequel il s’impliqua à fond à travers quatre séries principales (LA LIGUE DES GENTLEMEN EXTRAORDINAIRES avec le dessinateur Kevin O’Neil, PROMETHEA avec J.H. Williams III, TOP TEN avec Gene Ha et TOM STRONG avec Chris Sprouse), ainsi qu’une poignée de séries anthologiques souvent coécrites avec quelques confrères (TOMORROW STORIES par Alan Moore et divers dessinateurs, TOM STRONG’S TERRIFIC TALES coécrit par Alan Moore et Steve Moore et TERRA OBSCURA coécrit par Alan Moore et Peter Hogan).

Hélas, à son insu, Wildstorm fut racheté par DC Comics, éditeur avec lequel Moore avait juré de ne jamais retravailler. Il boucla ainsi toutes ses séries avant de claquer la porte, emportant avec lui LA LIGUE DES GENTLEMEN EXTRAORDINAIRES, qu’il souhaitait poursuivre en aval.

Ça commence comme dans Tarzan…
© DC Comics / Urban Comics

Au cœur de la ligne ABC comme dans toute l’œuvre d’Alan Moore, TOM STRONG occupe, avec le recul, une place toute particulière.

Cette création est en effet l’une des seules à s’écarter du principe de déconstruction et de reconstruction des super-héros, chère à l’auteur de WATCHMEN, et l’une des seules à échapper totalement à l’orientation sombre et moniste (anti-manichéenne) qui jalonne toute son œuvre.

La parenthèse ABC est de toute manière la période la plus optimiste de tout le parcours d’Alan Moore et, au milieu de cette salve de publications brillantes, TOM STRONG est encore la plus lumineuse et la plus enjouée. Elle n’en est pas moins aussi ambitieuse que les autres et elle est d’ailleurs la plus clairement orientée vers le concept qui occupe tout particulièrement Moore à ce stade : L’hommage, l’énumération, la synthèse et la remise en perspective de toute l’histoire des comics super-héroïques, à commencer par ses géniteurs directs : les romans de l’ère victorienne (à l’origine du genre steampunk), les pulps et les premiers comics d’aventure et de science-fiction.

Moore avait commencé à se pencher sur la question dans les années 90 alors qu’il réalisait ses travaux de commande pour l’éditeur Image Comics. Une série comme SUPREME (déjà en partie illustrée par Chris Sprouse), par exemple, était dédiée à cette rétrospective, ce passage en revue et cette régurgitation postmoderne de l’histoire des comics. Mais TOM STRONG marque une étape dans l’œuvre du barbu de Northampton car l’approche ne passe ici par aucune phase de déconstruction du mythe et ce dernier est au contraire embrassé de la manière la plus directe, la plus pure et la plus sincère qui soit.

Millenium City, la ville de Tom Strong !
© DC Comics

Tom Strong est donc l’archétype du super-héros. Un champion de la justice. Un agent du bien contre le mal. Il arbore sa panoplie, ses couleurs vives et son logo. Il possède ses sideckicks, sa citadelle, sa propre métropole dont il représente l’étendard, ses véhicules, ses ennemis supervilains, sa némésis et ses propres origines secrètes. C’est un parfait héros de la science en ce qu’il a gagné ses superpouvoirs (une force et une endurance surhumaine, ainsi qu’une longévité exceptionnelle) de manière scientifique (une création de ses géniteurs, morts alors qu’il était encore un enfant).

Le personnage affiche clairement ses sources, de manière ostentatoire : Ses origines ressemblent carrément à celles de Tarzan et ses attributs super-héroïques sont peu ou prou les mêmes que Doc Savage, avec tout de même une touche de super-héros pour la panoplie, tout aussi épurée soit-elle. Le constat est éclatant : TOM STRONG est bâti pour nous faire songer aux proto-super-héros, ceux des romans d’Edgar Rice Burroughs et des pulps des années 30, et ceux des premiers comics, FLASH GORDON en tête. Sa ville de Millenium City rappelle les grandes cités fictives de l’univers partagé DC, comme Metropolis ou Gotham City, et son allure art-déco avec ses dirigeables et ses ponts suspendus fait clairement référence à l’ère du diesel punk de l’entre-deux guerres. Certains de ses ennemis sont des indigènes vivant dans des temples perdus comme dans les serials des années 30 ou des méchants nazis aux capacités physiques et mentales améliorées.

On l’aura compris, Alan Moore régurgite toute l’histoire des super-héros américains depuis le début du XXème siècle. Tout comme le personnage de Jenny Sparks créé par Warren Ellis dans les pages de la série PLANETARY (parfaitement contemporaine de TOM STRONG), Tom Strong est né en l’an 1900 et a traversé tout le XXème siècle, son parcours rejoignant celui des super-héros.

Quelle (s) aventure (s) !
© DC Comics

C’est une série postmoderne et, pour le coup, Tom Strong n’est pas non plus un super-héros à l’ancienne. Il est également un père de famille, comme Thorgal, qui vit avec son épouse Dhalua (une princesse indigène civilisée née sur l’île où Tom a vu le jour), sa fille Tesla (notez la référence steampunk), son singe savant le Roi Salomon (encore un clin d’œil à toute une époque de l’histoire du comic book) et son robot Pneuman (le METROPOLIS de Fritz Lang n’est pas oublié). Soit une famille multiraciale progressiste comme une ode au droit à la différence (et nous n’avons même pas cité le petit ami de Tesla, mutant issu d’un monde souterrain). Avec cette idée moderne en tête, on perçoit à quel point Alan Moore a réussi la synthèse d’un siècle de super-héros américains en une seule et unique série (une seule entité). Et le bougre ne s’est pas privé pour aligner les épisodes comme autant de one-shots mettant en lumière chaque thème ayant jalonné le médium depuis son apparition (combat pour la justice, science-fiction, voyage spatial, aventure, piraterie, voyage temporel, horreur, menace planétaire ou extraterrestre, racisme, méchants nazis, exploration, découvertes, superpouvoirs, origines secrètes, créatures fantastiques, inventions, mondes parallèles, multivers, crossover, etc.).

Le tout est traité avec un premier degré sincère et bon enfant, tout en développant en sous-texte diverses couches de lecture (comme d’habitude avec notre auteur) comme autant de pistes de réflexion sur les constituants du médium en question, dont le plus saisissant consiste à interroger les bienfaits de l’absolutisme moral cher aux bienpensants (voir à ce titre l’arc narratif où une réalité alternative a donné naissance à un autre personnage nommé Tom Stone). En découle une lecture étonnante, à la fois légère et très dense, très accessible mais pas forcément facile, tant les éléments à saisir se bousculent dans tous les coins. Il faut dire que chaque épisode écrit par Alan Moore est intensément conceptuel, riche d’une approche à la fois précise et extrêmement sophistiquée, dont les sources, les références et les mises en abîme sont ramifiées à l’intérieur d’un tout indissociable. Il laisse par contre à d’autres auteurs, invités le temps d’un ou deux épisodes, le soin d’apporter des petits récits plus légers et superficiels, vraiment dans le ton des pulps d’antan.

La famille Strong (presque) au complet
© DC Comics

Le résultat est détonant et coloré, mais aussi très fragmenté car la plupart des épisodes ne se suivent pas et ne se déroulent pas dans une chronologie linéaire mais au contraire dans diverses époques de la vie du héros, comme jadis Robert E Howard écrivait les aventures de Conan dans un désordre chronologique parfaitement aléatoire. La continuité de la série est donc très libre et chaque épisode peut changer le statuquo. C’est vraiment très rafraichissant, d’autant que Moore ne se prive pas d’ouvrir les portes du multivers et d’envoyer son personnage à n’importe quelle époque (magnifique épisode dans lequel il découvre le premier être intelligent de la Terre à l’ère de la Pangée) et dans tous les univers alternatifs possibles, sans s’imposer aucune barrière ni aucune obligation de réalisme (le pompon revenant à cet univers parallèle de cartoon dans lequel Tom Strong rencontre son double sous la forme d’un lapin en costume évoquant furieusement le Captain Carrot de DC Comics !).

Nous sommes donc en plein dans l’Âge baroque des comics qui, après les Âges d’or, d’argent, de bronze et le Dark âge, nourrissent un discours interne sur leurs propres constituants et leur propre histoire. TOM STRONG est ainsi, avec PLANETARY, le résultat le plus abouti de cette période particulière de l’histoire des comics super-héroïques.

Deux continuités distinctes au sein d’une même série ???
© DC Comics

Cette prise de distance avec une continuité linéaire est pourtant l’élément dont souffre le plus la série au final. En cherchant à retrouver la candeur et l’humour naïf des pulps originels, Alan Moore et ses coéquipiers désamorcent l’implication émotionnelle du lecteur, qui ne suit bel et bien que les aventures de quelques personnages de papier. Le plus souvent sans enchainement de temps et d’espace, les épisodes n’offrent pas la possibilité de développer les personnages au cœur de l’action, lesquels ne disposent pas assez de mise en scène pour exister et nous faire vibrer réellement. Ils demeurent des personnages de papier sans réelle consistance et ce n’est d’ailleurs qu’à l’occasion des récits qui s’étendent sur plusieurs épisodes (trois ou quatre étant le maximum sur toute la série), que les enjeux sont les plus intenses.

C’est sans doute la raison pour laquelle Alan Moore a conçu le spin-off TOM STRONG’S TERRIFIC TALES dans lequel des petits épisodes de huit pages reviennent sur l’enfance du héros et sur ses liens avec les autres personnages.

Qui plus-est, dans cette édition VF en deux tomes de l’éditeur Urban Comics, les trois-quarts du second tome ne sont… pas écrits par Alan Moore ! Certes, la liste des remplaçants est on ne peut plus prestigieuse (Geoff Johns, Brian K . Vaughan, Ed Brubaker, Joe Casey, Steve Moore, Mark Schultz (déjà aussi ennuyeux que dans CINEMA PURGATORIO), et même Michael Moorcock en personne le temps d’un dyptique consacré à son thème favori du champion universel !), mais tous ces épisodes ne sont en définitive qu’une séries de petits récits légers et inoffensifs qui ne marquent guère les mémoires. Idem pour les épisodes de TOM STRONG’S TERRIFIC TALES qui mettent en scène les aventures de l’héroïne très pulp JONNI FUTURE (seule partie de ce spin-off à avoir été publiée en VF par Semic) écrit par Steve Moore, dynamique et chamarré, joliment dessiné par Arthur Adams, mais vraiment trop superficiel pour rivaliser avec la plume du maitre.

Heureusement, Alan Moore revient à l’écriture de la série pour son dernier épisode, un crossover avec la série PROMETHEA et une conclusion à l’univers partagé ABC. Là, au détour d’une séquence dédiée à la véritable origine secrète de Paul Saveen (la némésis de Tom Strong), l’auteur de WATCHMEN s’applique enfin à injecter de l’émotion à son personnage principal, le temps d’une scène magnifique et bouleversante, superbement soutenue par le dessin expressif de Chris Sprouse, lui-même revenu dans sa série après que la plupart des auteurs cités plus haut aient travaillé avec d’autres artistes invités (Jerry Ordway, John Paul Leon, Pascal Ferry, Shawn McManus, Peter Snejbjerg, Duncan Fegredo, Paul Gulacy). L’occasion également de nous rappeler oh combien Tom Strong a de l’allure sous ses pinceaux, et à quel point son duo avec l’encreur Karl Story fait des étincelles et représente tout le sel visuel de la série, en parfaite harmonie avec son sujet.

J’ai placé ci-dessous une planche de cette scène, où l’on peut apprécier la justesse de l’attitude corporelle et la grande expressivité des réactions du personnage principal.

(Texte en partie effacé pour vous éviter les spoilers…)
© DC Comics

Même avec ses défauts, TOM STRONG par Alan Moore demeure une série hautement recommandée. Pour avoir lu deux fois le contenu du premier tome (à plusieurs années d’intervalle), j’ai pu saisir à quel point la richesse du concept permet à l’ensemble d’être relu en y trouvant à chaque fois une nouvelle couche de lecture, en y découvrant continuellement de nouvelles références, de nouvelles portes d’entrée et de nouvelles idées, entendu que la culture personnelle de chaque lecteur s’intensifie naturellement avec le temps et qu’il peut ainsi revenir avec un bagage sans cesse plus important et y trouver de nouvelles choses à se mettre sous la dent.

Avec ce postulat en tête, vous pouvez aussi vous douter que ce seul article ne fait qu’effleurer la richesse d’un tel contenu (n’étant pas un docteur ès comics, pas mal de références ont certainement dû échapper à votre serviteur), qui gagne également en densité lorsque l’on a lu les autres séries ABC, avec lesquelles des liens subtils sont tissés, sachant que tout n’a pas encore été traduit et publié en VF (à ce jour, il nous manque encore les deux-tiers de TOM STRONG’S TERRIFIC TALES, la moitié de TERRA OBSCURA et les trois-quarts de TOMORROW STORIES…). J’attends impatiemment leur publication et soyez assuré que, si elles voient le jour à temps, je reviendrai pour vous en toucher quelques mots…

Voici les seuls albums publiés à ce jour, des séries ABC encore partiellement inédites en VF, respectivement tirés de TERRA OBSCURA (Panini Comics), TOM STRONG’S TERRIFIC TALES (Semic) et TOMORROW STORIES (Comics USA).
© DC Comics / Wildstorm / ABC comics

La BO : Coldplay : ADVENTURE OF A LIFETIME

30 comments

  • JP Nguyen  

    « La parenthèse ABC est de toute manière la période la plus optimiste de tout le parcours d’Alan Moore et, au milieu de cette salve de publications brillantes, TOM STRONG est encore la plus lumineuse et la plus enjouée »
    TOM STRONG est la seule série que je n’ai pas essayée dans la ligne ABC. J’ai lu le tome 1 de la Ligue, 2 ou 3 tomes de Promethea et quasiment tout Top 10, sauf la mini SMAX.
    Pourtant, le dessin de Chris Sprouse m’a toujours fait de l’oeil. Je me souviens avoir découvert son trait dans une autre oeuvre de Moore, JUDGEMENT DAY, chez Awesome, dans l’univers de Rob Liefeld.
    Vu de loin, j’avais catégorisé TOM STRONG comme un remake de Doc Savage et, n’ayant point d’attirance pour le perso original, je n’avais pas envie d’en lire une variation.
    Ton article est très incitatif toutefois tu mentionnes que « En cherchant à retrouver la candeur et l’humour naïf des pulps originels, Alan Moore et ses coéquipiers désamorcent l’implication émotionnelle du lecteur, » et ça pourrait bien être un frein pour que je parte en chasse du gros pavé Urban…
    La BO : c’était le choix de Bruce, c’est ça ? 😉

    • Tornado  

      Et oui, dans tout ce projet ambitieux et rétrospectif, Alan Moore n’a pas tellement eu le temps de dévlopper ses personnages. N’ayant pas lu sa partie des TOM STRONG’S TERRIFIC TALES inédits en VF (mais que fait Urban ?), qui revient sur le passé du personnage principal et de sa fille, je ne sais s’il en profite pour corriger le tir.
      A noter que Chris Sprouse n’illustre qu’une petite moitié de la série. La seconde étant dévolue à des auteurs et des artistes invités.

  • JB  

    Merci pour cette présentation des comics TOM STRONG. Dans cette optique d’hommage aux pulps, je trouve assez malin de la part de Semic de coupler la publication de cette série avec PLANETARY qui va dans la même direction.

    À noter : Chris Sprouse n’est lui-même pas étranger des science heroes idéalistes : il avait déjà illustré la série HAMMERLOCKE qui était dans la même mouvance.

    Dans la même idée, il me semble que TOM STRONG a un ancêtre direct avec la série Steelgrip Starkey and the All-Purpose Power Tool. Dans ce comics d’Alan Weiss (qui travaillera également sur TOM STRONG !), l’un des personnages veut créer une légende américaine moderne et fait du personnage éponyme un héros porté par la science, tout de rouge vêtu.

    • Tornado  

      Merci pour ces compléments d’info.
      Comme je l’ai dit en fin d’article : « n’étant pas un docteur ès comics, pas mal de références ont certainement dû échapper à votre serviteur » 🙂

      • JB  

        Pas des références « manquées », juste des cousins éloignés

  • Matt  

    « Cette création est en effet l’une des seules à s’écarter du principe de déconstruction et de reconstruction des super-héros, chère à l’auteur de WATCHMEN, et l’une des seules à échapper totalement à l’orientation sombre et moniste (anti-manichéenne) qui jalonne toute son œuvre. »

    ça, ça m’intéresse vachement. Avec le temps j’avoue que ça me lasse les déconstructions d’Alan Moore. Envie de lire un truc plus positif de sa part.

    « Tout comme le personnage de Jenny Sparks créé par Warren Ellis dans les pages de la série PLANETARY »

    Elle est pas déjà morte dans PLANETARY ? C’est dans THE AUTHORITY non qu’elle est encore là ? Et même STORMWATCH avant. Euh…juste pour être chiant…

    « dont le plus saisissant consiste à interroger les bienfaits de l’absolutisme moral cher aux bienpensants »

    Aaah, intéressant ça.

    Je note les soucis d’implication émotionnelle vis à vis des personnages qui passent d’une époque à une autre en fonction des épisodes ne suivant pas une continuité linéaire.

    Mais je note surtout le coup des 3/4 des épisodes du tome 2 qui ne sont pas d’Alan Moore. Euh…c’est bof ça.
    C’est possible de ne lire que le tome 1 ? Bon si ça me plait on verra si je prends le 2eme, mais vu que ce sont des one shot, le tome 1 peut se suffire à lui même ?

    • Tornado  

      Avec le recul, je ne saurais être formel.
      Je pense que le principe même des récits one-shot/indépendants fait que tu peux effectivement t’arrêter quand tu veux. Mais il me semble que j’avais été frustré de ne pas avoir la suite lors de l’arrêt de Paninouille (qui correspond à la fin du tome 1 d’Urban), sachant que Moore offre un final en bonne et due forme à la série. Et sachant aussi que Moore ajoute à chaque fois une pierre à son édifice.
      Si dans le tome 2, l’essentiel est écrit par d’autres auteurs, il s’agit quand même d’excellents auteurs, et chacun de leur récit est par contre beaucoup plus léger et directement plus fun que ceux d’Alan Moore. Ce n’est pas mauvais du tout, au contraire.

      • Eddy vanleffe  

        les 4 tomes de panini c’est le tome1 de Urban?
        parce que comme ça j’achète directement le tome 2

        • Tornado  

          Ah oui. A la page près il me semble !

          • Eddy vanleffe  

            cool: économies!
            un truc qui me ravit dans ma collection, c’est qu’elle ne ressemble à rien…
            ma bibliothèque est un visage ridé qui raconte ma vie de lecteur… ^^

  • Eddy vanleffe  

    la ligne ABC fut sans doute le travail de fond le plus ambitieux d’Alan Moore. c’est à prendre dans son ensemble comme un essai sur la littérature et le flux des idées à travers le temps. Chaque élément a sa place.
    La littérature de SF comme point de départ. dans LGX, il développe un anima mundi autour des concepts de Verne, Swift, Burroughs en transformant ça en univers partagé à la Marvel
    il enchaîne avec les pulps sur Tom Strong avec son héros qui tient autant de Tarzan que de Doc Savage que de Capitaine Flam (orphelin élevée par deux être étranges issus de la technologie de ses parents ).
    Promethea est celui que j’ai le mons compris je l’avoue, c’est touffu.
    enfinTOP 10 s’adapte au média le plus moderne pour Alan Moore en 2000, soit les séries TV à la Hill Street Blues et EMERGENCY ROOM. le tout forme un gros boulot sur la pop culture du XXème siècle, d’où ça vient et où ça va… (Merci le boulot génial des éditoriaux de Semic à l’époque…je suppose Jim Lainé…)
    Je trouve qu’il y a quand même une dimension déconstruction/reconstruction dans Tom Strong par le regard du jeune lecteur représenté en cartoon alors qu’il est dans le monde réél ou par l’empilement jouissif d’emprunts aux archétypes de l’époque tout en assumant le modernité de la mixité etc…
    Mais tu dis déjà tout ça très bien ^^
    Dommage que le second tomme surtout composé de récits secondaires…. je vais quand même sans doute racheter tout ça…
    Pour la dispute avec DC….il a quand même mis le temps à réagir…puisqu’il a lancé la seconde série LGX, des spin off pour Tom Strong et même Tomorrow Stories ou les forty-niners et pour finir sponsorisé sa fille au sein du giron de Wildstorm avant de partir finir LGX chez TOP SHELF
    je me demande si ce n’est pas parce qu’il n’arrivait pas à vendre FILLES PERDUES son gros délire porno/freudien sous absinthe.

    • Tornado  

      La fin de PROMETHEA est dans le dernier épisode de TOM STRONG (qui fait office de fin à tout l’univers ABC). Mais c’est quand même une fin très elliptique (sauf pour Tom Strong)…
      Il est clair que cet univers partagé ABC mérite de multiples lectures successives parce que ça forme une belle entité, d’une richesse impressionnante. C’est chouette au final que ça n’ait pas duré trop longtemps, car c’est déjà très dense !

  • Jyrille  

    Merci d’avance Tornado pour la future lecture : étant donné que j’ai les deux pavés Urban qui m’attendent, je reviendrai une fois lus 😉 Par contre j’ai une question : j’avais eu en cadeau une édition Panini de quelques épisodes nommés TERRA OBSCURA. Celui-ci : https://www.bedetheque.com/BD-Tom-Strong-HS-Terra-Obscura-81376.html

    En les feuilletant, je n’ai pas réussi à retrouver où cela apparaît dans les éditions Urban (car cela m’étonnerait qu’ils n’y soient pas). Tu as une idée ?

    La BO : tu ne m’auras pas, je l’ai déjà écoutée avec l’article Kao / JP, c’est bon, je déteste, c’est pas pour moi.

    • Tornado  

      Non, TERRA OBSCURA n’a pas été réédité par Urban.
      Panini n’en avait édité que la moitié. Mais telle une « première saison », cette moitié se suffisait à elle-même avec un début, un milieu et une fin. Je l’ai lue. Le début était vraiment chouette, mais le dernier tiers complètement raté (on sentait qu’Alan Moore ne participait plus à ce stade). Par contre il fallait lire TOM STRONG avant TERRA OBSCURA, et non le contraire !
      Je pense que tu peux lire tranquillement mon article à ce stade. Il n’y a pas de spoiler puisque la série n’a pas vraiment de fil narratif linéaire.
      La BO : JP et Kaori ne l’avaient pas choisie 🙂 . Sans être un chef d’oeuvre, je la trouve fun et j’ai trouvé qu’elle collait vraiment bien comme choix ici (au 2nd degré bien sûr). Et c’était rigolo de la placer en BO étant donné l’allergie de mes chers amis puristes… 😅

      • Jyrille  

        Merci, je dois donc le garder précieusement ! Comme je te l’ai dit, c’était un cadeau, il y a longtemps maintenant, donc je n’ai pas eu le choix… J’apprécierais d’autant plus ton article une fois que j’aurais lu les deux tomes, ce n’est pas du tout une peur des spoilers 😉

  • Présence  

    Une des seules séries à s’écarter du principe de déconstruction et de reconstruction des super-héros : je ne me l’étais pas formulé aussi clairement, mais ce premier degré m’avait également marqué.

    L’hommage, l’énumération, la synthèse et la remise en perspective de toute l’histoire des comics super-héroïques, à commencer par ses géniteurs directs : les romans de l’ère victorienne (à l’origine du genre steampunk), les pulps et les premiers comics d’aventure et de science-fiction : 100% d’accord.

    Héros de la science : je m’étais fait les mêmes remarques concernant l’héritage de Doc Savage.

    Tom Strong n’est pas non plus un super-héros à l’ancienne […] une famille multiraciale progressiste comme une ode au droit à la différence : c’est là où je me suis dit que la déconstruction ou peut-être plutôt la reconstruction était à l’œuvre. Il ne s’agit pas de copié-collé, mais d’un regard du début du début du 21ème siècle sur les situations classiques des romans d’aventure du XXème siècle. Moore les revisite en les débarrassant des éléments belliqueux, colonialistes, misogynes, etc. Comme tu l’évoques, ces récits comportent un deuxième degré de lecture, avec une réelle richesse.

    Mark Schultz : t’en rajoutes un peu. Il n’est pour rien, dans Cinema Purgatorio. 🙂

    Ce seul article ne fait qu’effleurer la richesse d’un tel contenu : je suis allé jeter un coup d’œil à mes commentaires qui datent d’une dizaine d’années, et je redécouvre la richesse que tu évoques, entre les différents genres revisités par Alan Moore et les nombreux artistes, ainsi que par les scénaristes invités que tu cites, et les artistes tout aussi prestigieux (même mon chouchou Howard Chaykin est de la partie pour 8 pages).

  • Tornado  

    Reconstruction seulement ? Peut-être. Mais pas de phase de déconstruction en tout cas. Pas comme d’habitude : Ici Moore assume et embrasse le genre super-héros au premier degré. Il ne crée pas un avatar abâtardi ou une allégorie. C’est bien un super-héros du bien contre le mal, avec tous les archétypes formels. Il ne fait que moderniser le fond en le débarrassant, comme tu le soulignes, de tous les éléments datés et gênants.

  • Fletcher Arrowsmith  

    Bonjour Tornado,

    j’aime beaucoup TOM STRONG. A mettre dans le haut du classement des meilleurs récits de super-héros.

    C’est frais, moderne et cela jour habilement avec la continuité sans pour autant en avoir les lourdeurs. Le côté pulp est à peine effleuré ce qui en fait, avec son dessin nette et claire et les couleurs chatoyante, un comics accessible. En fait je trouve que Alan Moore avec TOM STRONG est arrivé au parfait équilibre entre comics pour tous et comics ambitieux. Car en effet comme tu le soulignes, quand on gratte un peu, des niveaux de lecture et des références il y en a un paquet mais cela ne bloque pas le plaisir de la lecture :

    En découle une lecture étonnante, à la fois légère et très dense, très accessible mais pas forcément facile, tant les éléments à saisir se bousculent dans tous les coins. Il faut dire que chaque épisode écrit par Alan Moore est intensément conceptuel, riche d’une approche à la fois précise et extrêmement sophistiquée, dont les sources, les références et les mises en abîme sont ramifiées à l’intérieur d’un tout indissociable.

    Une réelle réussite.

    J’ai du mal à comprendre les légères remarques sous jacentes sur le fait que ce n’est pas du 100% Moore. Le scénariste maitrise sa production et quand il laisse son bébé à d’autre, il le fait en toute connaissance de cause. Il sait choisir ses nounous. Comme pour les débuts de SPAWN, cela permet d’apporter une parenthèse agréable, sans couper la lecture de la trame principale, si cette dernière existe en fait. De plus cela apporte une autre vision, à un univers, et des variations intéressantes.

    Néanmoins sur TOM STRONG il y a quand même une approche, une fondation de la série qui peut surprendre dans les thèmes portés. Sous l’apparence de la famille et du super-héros modèle voire parfait, Alan Moore évoque quand même immédiatement des sujets comme la colonisation, l’Eugenisme, les classes sociales (Pneuman en major d’homme, un certain élitisme donneur de leçon de la part de TS) voir la place de la femme. C’est très subtil et par forcément évident au départ.

    Un axe de lecture ne m’a pas plus emballé que cela dans TOM STRONG : la mise en abyme du média à travers les aventures de Tom Strong en bd à travers les yeux de Jimmy Turbo et les Strongmen of America.

    La BO : pas ma came du tout.

    • Tornado  

      Merci pour tes compléments d’analyse.
      Tu as raison sur tous les points que tu relèves, y compris sur la mise en abyme du média qui apporte encore une couche de lecture mais qui casse régulièrement le récit. C’est également l’un des éléments que je regrette lorsque j’écris que les personnages restent au final « des personnages de papier » : Ils ne sont pas vraiment écrits comme des vraies personnes. Du coup, il est difficile de s’y attacher comme à des personnages racontés au 1° degré.

  • Matt  

    Question bête mais éternelle : la qualité des tomes Urban ? Le papier, tout ça ?
    Toujours aussi épais j’imagine, mais papier mat ou glacé ?

    • Tornado  

      Ce sont de fort belles éditions en papier glacé (format deluxe). mais quand même très lourdes et fatigantes à lire. En 3 tomes, ça aurait été un peu plus cher, mais plus agréable. Si j’avais été l’éditeur et que je n’avais pas les contraintes et les restrictions d’un vrai éditeur (le beure et l’argent du beure), j’aurais publié la série en plusieurs tomes, en incluant les spin-off TOM STRONG’S TERRIFIC TALES et TOM STRONG PRESENTE TERRA OBSCURA, toujours inédits en VF dans leur intégralité…

      • Eddy vanleffe  

        C’est un peu l’évolution actuelle du marché, les livres sont cher et le public en veut pour son argent, la seul solution pour personne n’ait l’impression de perdre: blinder les bouquin à mort…
        en roman, plus un livre ne fait moins de 600 pages…
        la mode est aux intégrales, aux cycles etc…on ne verra plus de trucs comme le avant à 250 pages, on fait des recueils aussi.
        les revues et Bruce nous l’a un peu expliqué, la mode est aux gros trimestriels de type Mook…

        j’étais très réticent au départ mais il faut avouer que les Monibus de Panini ont su me séduire parce que quand on veut un truc ponctuel, mais volumineux en entier, c’est quand même un format finalement économique (dans le FF de Byrne on a au moins l’équivalent de 3 intégrales pour le prix de 2)
        ça reste un peu chiant à lire…faut pas le lâcher quand tu t’endors (sinon tu ne te réveilles plus jamais)

        • Jyrille  

          Heu pourtant tu as plein de livres (le dernier Joey Starr par exemple) qui doivent pas faire 200 pages écrit gros. Et ça coûte 20 balles.

          Et j’achète encore des K. Dick à 250 pages, en livre de poche.

      • Matt  

        ça ne me dérange pas tant que ça les gros tomes épais. Ce que je n’aime pas c’est quand c’est à cause du type de papier.
        Je sais que chez Urban un tome de 300 pages c’est presque aussi gros qu’un omnibus de 600 pages chez Panini.
        Quitte à ce que ce soit gros, autant que ce soit justifié par le nombre de pages…

        Le problème de faire plein de tomes c’est qu’après les couvertures cartonnées prennent toute la place dans les étagères.

        L’intégrale de WEIRD SCIENCE des EC comics en un seul tome prend quasiment 2 fois moins de place que les 3 tomes séparés.
        Si je ne prenais pas des tomes « intégrale » épais pour quasi toutes les séries, j’aurais vraiment besoin de doubler la place réservée à mes livres avec une autre étagère complète.

        ça ne me dérangerait même pas d’avoir du format souple pour éviter les couvertures si épaisses. Mais tout le monde trouve que ça fait cheap le souple. Il y a un truc vrai, c’est que les reliures ne peuvent pas être aussi solides qu’avec des hardcover. Mais en attendant, je vois que ma collection SCALPED en format souple prend moins de place que la réédition en intégrales hardcover, malgré le fait qu’ils aient compilé 2 tomes en 1.

        Au bout d’un moment, la place c’est important aussi. Même si c’est pas ultra confortable à lire.

        • Eddy vanleffe  

          Quand Urban a débarqué, tout le monde s’est aligné sur l’imitation format gros volume de type intégrale franco-belge.
          le souple, le kiosque, le pas cher, ça a disparu.
          comme les fans ont en général entre 35 et 60 ans et qu’ils passent leur temps à briquer leurs étagères de musée, ça n’a pas fait trop gueuler… les jeunes ont fui vers le manga à 5/7 balles.
          l’argument qui revient c’est que le manga , t’as moins de pages, c’est noir et blanc, c’est petit et ça revient à aussi cher avec leurs 72 tomes, mais ils ne prennent jamais en compte le gars qui a 15 euros sur lui… il ne trouve plus un seul comics à ce prix là, du coup il achète un manga, voir deux…

      • Matt  

        J’en parlais à un pote qui vit dans un 30m² à Paris et…voilà quoi.
        Si tu veux pas que ta bibli prenne tout ton espace chez toi…les gros tomes épais c’est non seulement économique mais ça prend moins de place avec moins de carton de couverture^^
        Bien sûr ce ne serait pas un souci pour quelqu’un vivant dans 200m²…
        Mais voilà quoi.
        Souvent les gros tomes ont des reliures de bonne qualité aussi, parce que…pas le choix, pour supporter le poids. Donc c’est un objet qui va durer dans le temps.

        Pour le format souple, avec zéro carton (ou une épaisseur de couverutre tellement négligeable), aucun besoin de faire de gros tomes épais, ça peut bien marcher pour les one shot, un peu comme la collection Flesh & Bones de Glénat (Bikini Atoll, tout ça, j’en ai parlé)

        C’est finalement le format « 6 épisodes en hardcover » qui est chiant pour moi. Voilà t’as une série de 24 épisode, t’as 4 tomes, avec autant d’épaisseur de carton que de pages…
        Non, faut minimum 12 épisodes façon Marvel Deluxe, sinon plus.

        • Tornado  

          Il y a un juste milieu. Les 9 tomes de BLACK SCIENCE avec 4 épisodes à chaque fois, c’est déconné. Ça prend une place folle pour peu d’épisodes au final. Je trouve qu’on s’est fait avoir. Je ne veux plus acheter ce genre de collection à 15€ les 4 épisodes qui prennent de la place…

      • Matt  

        Je fais une exception avec Hachette pour Marvel même si leurs couvertures sont épaisses mais bon…ils corrigent les fautes de trad de Panini (ou du moins ils allègent les expressions à chier de qui vous savez) et ils publient par arc, par histoire, pas comme les intégrales Paninouille toujours à cheval sur des histoires et qui obligent à tout acheter.
        Et en plus, ils savent mettre les épisodes dans un ordre chronologique lors d’un crossover et ils mélangent les séries, publient du X-factor si besoin pour l’histoire alors que Panini c’est d’un côté Uncanny X-men dans une intégrale, d’un autre côté la série X-men de 1991, même quand c’est censé se chevaucher pour une meilleure compréhension…
        Pour moi ils font un job bien meilleur que Panini.

        • Matt  

          C’est vraiment dommage pour le papier mat sur le Conan moderne.
          Je pense que les ventes doivent être moins bonnes, alors que Marvel je ne serai pas surpris que ça cartonne.

  • Bruce lit  

    J’ai toujours hésité avec cette oeuvre. Je n’aime pas du tout le physique du personnage, les Pulp’s et leur nostalgie je m’en fous tout comme les 1ers super héros. Et puis Alan Moore n’a rien fait qui me convienne depuis LOST GIRLS.
    Ton article détaillé le vend bien avec ses qualités et ses paradoxes. Tout ceci fait référence à une littérature que j’ai toujours évité, ça ne va pas me parler. Et puis ces jours-ci Moore m’est très antipathique après ce documentaire approuvé par ses anciencs collaborateurs (dont Bissette et Lan Davis) qui démontrent que c’est un mythomane, affabulateur et manipulateur qui se victimise beaucoup mais qui persécute aussi ses équipes créatives. PAs de sous-titres pour toi hélas https://www.youtube.com/watch?v=C9QQmcCg9s0&fbclid=IwAR0aCpPnW9BQuvrRiC0S8myzOxZoXnfDn1NJrTNfoAnPWY0AI9A6dTAF3Pw

    Bon et la BO, je ne ferai pas de commentaires…

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