Le conte est bon (Les cinq contes de Bagdad)

1ère publication le 01/03/15-MAJ le 09/08/18

Les cinq conteurs de Bagdad par Fabien Vehlmann et Frantz Duchazeau

Règlements de conte en perspective

Règlements de conte en perspective©Dargaud

AUTEUR : JP NGUYEN

Edition VF : Dargaud – Collection Long Courrier

Ce one-shot de 68 pages paru en 2006 est écrit par Fabien Vehlmann et dessiné par Frantz Duchazeau, avec des couleurs de Walter.

L’histoire démarre « il y a bien longtemps », à Bagdad alors que le Calife annonce l’organisation d’un grand concours de conteurs. Mille et un participants se mesureront pour séduire la foule avec leur histoire. Le meilleur récoltera richesses et gloire tandis que le plus mauvais sera exécuté, car « on ne gaspille pas impunément le temps du Calife » !

Les concurrents ont trois ans pour se préparer, afin de concocter leur meilleur récit et parfaire leurs talents de conteurs.

Mille et un conteurs seront réunis au pays des mille et une nuits…

Mille et un conteurs seront réunis au pays des mille et une nuits… ©Dargaud

Le destin réunit alors cinq des futurs participants pour un long voyage au cours duquel ils glaneront moult histoires et légendes, enrichissant ainsi leur répertoire et perfectionnant aussi leur savoir-faire.

Cependant, leur odyssée est dès le départ marquée d’un sceau étrange, voire funeste : la devineresse qu’ils consultent avant leur voyage leur révèlent que deux d’entre eux s’épouseront et que l’un d’entre eux mourra sous les coups d’un autre. Par-dessus le marché, elle donne même l’identité du futur vainqueur ! Malgré cette abondance de « spoilers » à un stade peu avancé du récit, on suit avec plaisir les pérégrinations du quintet, toujours en quête de nouvelles histoires ou de nouvelles façons de raconter.

Ils commencent par se rendre dans un ancien monastère pour lire une fresque retraçant la vie du Christ. Mais le monastère ayant été détruit par un tremblement de terre, la fresque a été reconstruite par l’idiot du village… dans un désordre total !

Tarek rêve d’une histoire qui compte

Tarek rêve d’une histoire qui compte ©Dargaud

Ensuite, le groupe se confronte aux disciples de la secte des assassins. Ceux-ci sont réputés être des guerriers invincibles aux pouvoirs fantastiques… mais ne serait-ce que le fruit du talent de conteur exceptionnel de leur maître, qui a réussi à faire croire en leurs pouvoirs ?

Et ainsi s’enchaînent les péripéties des cinq conteurs, au fil des aventures qu’ils vivent ou des histoires qui leur sont contées, depuis l’histoire racontée dans une taverne à celle révélée par les djinns au fin fond du désert, en passant par celles répétées par des perroquets sur une île déserte.

Anouar ne s’en laisse pas conter par les assassins…

Anouar ne s’en laisse pas conter par les assassins…©Dargaud

Dans ce conte sur les contes, les auteurs gèrent très habilement les récits enchâssés et proposent une assez bonne diversité d’histoires. Mais plus que cela, c’est toute une thématique sur la fiction qui est développée.

Comment naissent les histoires et comment sont-elles transformées par le passage du temps ou les traductions approximatives ? A quoi servent les histoires ? Peuvent-elles changer le monde ? Quel crédit faut-il leur accorder ? Ne faut-il se garder de leur donner un pouvoir trop grand ? L’histoire importe-t-elle moins que le talent du conteur ? Toutes ces pistes de réflexion sont glissées de-ci, de-là, au fil du récit et interpellent le lecteur.

En tant que rédacteur de critiques, ces questions m’ont paru d’autant plus pertinentes et elles ont d’ailleurs déjà fait l’objet d’échanges plus ou moins passionnés dans les commentaires du blog et ailleurs. Mais dans cette BD, elles sont amenées avec une certaine finesse, parfois de manière implicite, parfois en dévoilant le point de vue des auteurs, d’autres fois en laissant le lecteur seul juge.

 Le récit ou la manière de raconter : qu’est-ce qui compte le plus ?

Le récit ou la manière de raconter : qu’est-ce qui compte le plus ? ©Dargaud

Je ne suis pas un grand amateur du dessin de Frantz Duchazeau : un trait vif et caricatural où les personnages semblent plus souvent esquissés que vraiment dessinés. Mais il s’acquitte tout à fait bien de sa tâche : les membres du groupe sont tous croqués de façon distincte et on voyage avec eux au fil de décors exotiques et changeants.

En fait, étant donné la nature de l’histoire, le dessin va à l’essentiel, en installant des cadres et des ambiances et laisse travailler l’imagination du lecteur pour les détails. Avec toutes ces qualités, ne manquerait-il pas une étoile au compteur ? En fait, si j’ai apprécié la lecture de cette BD pour toutes les pistes de réflexions sus-évoquées, habilement intégrées dans le récit, je n’ai pas trouvé les personnages très attachants et le petit « twist » final m’a paru tomber à plat. Ces éléments, ainsi que le dessin efficace mais peu séduisant, m’amènent à donner quatre étoiles aux cinq conteurs.

En fin de compte, les histoires changent-elles vraiment le monde ?

En fin de compte, les histoires changent-elles vraiment le monde ? ©Dargaud

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