What god wants, god gets (God told me to)

1ère publication le 05/01/16- Mise à jour le 03/03/24

Gold told me to par Larry Cohen

Article de BRUCE LIT

God told me to (Meurtres sous contrôle en V.F) est un film de 1976 écrit et réalisé par Larry Cohen. Cohen est resté dans l’histoire Geek pour être l’inventeur de David Vincent et ses Envahisseurs.

Cet empereur  de la série B est également célèbre pour avoir développé dans les années 80 avec William Lustig le personnage de Maniac Cop.
Il a obtenu un succès grand public en 2002 avec le Phone Game de Joel Schumacher (le réalisateur adoré des Batmaniaques).

Larry Cohen se tape l'affiche !

Larry Cohen se tape l’affiche !

Cet article révèle des Spoilers de nature divine….

Malgré son budget famélique, son esthétique de série TV, et ses acteurs oubliés depuis (Tony Lo Bianco, Deborah Raffin, Sandy Dennis), revoir God told me to est une expérience dérangeante notamment de par son ouverture n’étant pas sans rappeler un triste vendredi de novembre : dans les rues de New York, une dizaine de passants sont abattus par un Sniper.
Lorsque notre héros, le lieutenant Peter Nicholas lui demande les raisons de ces meurtres, le Sniper lui répond que c’est Dieu qui le lui a demandé avant de se suicider.

L’enquête de Nicolas prend un tournant inattendu lorsque quelques jours plus tard, d’autres américains biens sous tout rapport tuent aveuglement des civils, des flics mais aussi femmes et enfants ! Il s’agit d’individus, calmes, sereins, qui affirment, sans une once de méchanceté avoir tué au nom de Dieu. Nicolas découvre alors qu’il ne s’agit pas d’un phénomène d’Hystérie Collective puisqu’il va rencontrer Dieu en personne et apprendre la choquante vérité sur lui même !

Un honnête homme affronte Dieu. Des analogies troublantes...

Un honnête homme affronte Dieu. Des analogies troublantes…
Source Imdb ©Bach Film

God told me to ne vous donnera pas de frissons façon Exorciste, pas de tension à couper au couteau comme pour La Malédiction ou Rosemary’s Baby. Les effets spéciaux sont souvent dignes d’une production d’Ed Wood,  le film est platement réalisé, les acteurs sont bons sans êtres très charismatiques et l’affrontement final entre Dieu et Nicolas fait plus sourire que frissonner.
Côté musique, on peut apprécier quelques thèmes à cordes façon Bernard Hermann, qui selon la légende aurait visionné le film pour en écrire le score avant de mourir.

Voir ce film reste instructif notamment pour le fan de Preacher. Garth Ennis est cinéphile et ne peut pas ne pas avoir vu God told me to. Dans les deux cas, il s’agit de mettre en scène deux personnages croyants sur les traces d’un Dieu meurtrier pour l’arrêter et lui demander des comptes. Le Verbe s’incarne dans la chair humaine pour demander la mort d’innocents qui n’ont d’autres choix que de s’exécuter en….exécutant. L’expérience sera bien sûr éprouvante pour Jesse Custer et ses amis embarqués dans un Road Movie douloureux et sanglant.

Peter Nicolas quant à lui découvrira au cours de son enquête que Dieu n’est pas cette entité bienveillante incarnée par le Christ. Ni ce Dieu jaloux qui guida Moïse vers Israël au prix du sang Égyptien et Juif mais le transfuge d’ une race d’Aliens qui kidnappe les femmes à bord de soucoupes volantes pour les inséminer et donner naissance à des hybrides dotés de pouvoirs paranormaux.

Comme un air d'X-Files !

Comme un air d’X-Files !
Source Timeout ©Bach Film

C’est dans ces scènes paranormales que Cohen se montre le plus à l’aise. La paranoïa totale des Envahisseurs revient au galop, avec notamment le même plan de David Vincent au volant de sa voiture face à un UFO. Des femmes nues sont retrouvées dans les bois et racontent des histoires abracadabrantes de lévitations, de viol et de kidnapping alien avant de finir en asiles psychiatriques.

Cohen utilise alors son médium, le fantastique et la série B pour choquer son auditoire avec des images incroyablement crues pour l’époque (et même aujourd’hui) avec l’image d’un vagin ouvert en gros plan pour suggérer le viol des vierges porteuses. Le réalisateur récidivera à la fin de son film lorsque son Jésus se dénudera face à Peter pour montrer en lieu et place de sa blessure au torse, un vagin suggérant son hermaphrodisme ! Mais comment s’y est il pris pour baiser contourner la censure impitoyable de l’époque ?! Voici un mystère quasi divin !

Sous fond d’aliénation des esprits et d’effets cheap, Cohen livre une charge virulente contre la religion et son dogme. L’humanité tue du visible au nom de l’invisible. Croit adorer un Dieu d’amour qui vient d’un autre planète et qui ne pense qu’à l’asservir.  Les victimes sont tuées du fait de l’absence de tout esprit critique, de toute rationalité, de toute compassion, d’une confiance aveugle envers un au delà théorique. Et ce formidable paradoxe de tuer au nom d’un Dieu qui martela comme commandement de ne pas tuer.

Face à ce fanatisme et ce Dieu violant ces propres préceptes, Peter Nicolas, croyant modéré voit sa vie basculer dans son enquête et ses convictions. Il rappelle un Kurt Wagner chez les Xmen qui n’avait choisi de la religion que le volet humaniste et pris de doute existentiel après avoir vu le Beyonder, un être quasi Divin, disposer de l’humanité comme les jouets de ses jeux capricieux durant la Secret War. Tout comme le Homelander de Garth Ennis.

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Alienation ou Alien Nation ?

Cette paranoïa née de la Guerre froide prend encore tout son sens dans l’Amerique post 11 Septembre ou la France post 13 novembre : l’ennemi est un adversaire infiltré qui a adopté tous les codes de notre société pour mieux la détruire au nom d’un Dieu vengeur auquel il convient d’obéir aveuglément en tuant des innocents en guise d’offrande. Des Envahisseurs à Battlestar Galactica (que Bendis a pillé pour son Secret Invasion), cette théorie du complot qui raconte aussi bien nos peurs que les risques pour notre démocratie annonçait aussi bien les grands jours du genre fantastique comme ceux plus amers remettant en cause l’existence de la Shoah ou du 11 Septembre.

De cet enfant monstrueux qui fit la gloire de la série X-Files, Larry Cohen peut s’affirmer le père. Il est définitivement le cinéaste du mensonge, du doute et de la désillusion. Voici une fable bien acide où dans tous les cas, l’être humain est perdant, condamné à être un enfant imparfait justifiant ses atrocités par une phrase vide de sens : ce n’est pas ma faute, mais celle de Dieu. Dans le meilleur des cas, il adore un mensonge. Dans le pire, il est prisonnier d’une destinée à laquelle il ne peut échapper comme Peter Nicholas.

En posant l’horreur dans notre quotidien, en interrogeant notre marge de manœuvre face à la loi, en mettant en scène un homme intègre-mais faillible-debout face à une société avachie dans son confort, en questionnant la notion d’héritage spirituel transmise à nos enfants, ces meurtres sous contrôle restent une curiosité pour tous ceux qui se réclament de l’horreur selon Cronenberg ou Chris Carter.

Dérangeant à défaut d’être effrayant ce God told me to, pose la liberté de l’homme en exergue comme le Preacher d’Ennis.  Avec sa fin terriblement grinçante, Cohen se garde bien de répondre de la bâtisse d’une société idéale. En tant qu’artiste indépendant, il ne fait que briser la première pierre de l’asservissement spirituel. Pour le reste, c’est à nous de se démerder. Mais ça on avait l’habitude…


Larry Cohen présente son film

17 comments

  • Patrick 6  

    Les Envahisseurs, X-files, Preacher… En voilà de belles références !
    En tous cas tu m’as très bien vendu le film (qui sent bon les délires expérimentaux et psychédéliques des années 70) je vais essayer de le trouver quelque part, même si mon petit doigt me dit que ça va être tendu…

    A noter que la photo de la femme nue m’évoque très fortement le tunnel du « métro » de Cosmos 1999 ! Décidemment ce Cohen a très bon goût 😉

    • Bruce lit  

      « Oppression » 1/4
      Un tueur armé d’un fusil tire sur la foule au nom de Dieu. Ce n’est pas un nouvel attentat djihadiste, mais le point de départ d’un film de Larry « Les Envahisseurs » Cohen de 1976 : « God told me to ».
      Lorsqu’un flic part à la recherche de Dieu pour le traduire en justice, le doute n’est plus permis : se pourrait ‘il qu’en plus d’avoir influencé « X-Files », ce film soit le papa de Preacher ? Réponse chez Bruce Lit !

      La BO du jour : Larry Cohen dénonce l’aliénation de la religion ? Le papa de Pink Floyd aussi dans sa charge contre le télévangélisme et ses prophètes aliens contre qui il cassa ce qui lui restait de voix : » Dieu veut des croisades et des Djihads » en 1992 ! Jeff Beck à la guitare. https://www.youtube.com/watch?v=OMRrS_zYKDg

      @Patrick : j’ai eu la chance trouver ça en médiathèque ! A propos, un article sur les Envahisseurs M. Faivre ?
      Tiens ! on a vu 3 épisodes de la première saison des Misfits hier ! On s’est régalé ! La série tient la route sur la longueur ?

      • Jyrille  

        Je n’avais jamais entendu parler de ce film, mais comme Patrick, tu l’as très bien vendu. Un remake par Gaspar Noé pourrait aussi être pas mal. En te lisant, j’ai aussi eu l’impression d’y voir une référence à l’Invasion LA de Carpenter (qui est arrivé bien plus tard). Quant à Larry Cohen, je ne connais donc que ses Envahisseurs.

        Pour Misfits, c’est génial sur deux saisons seulement. La troisième s’essouffle au fur et à mesure. J’ai laissé tomber à ce moment.

      • Patrick 6  

        @ Bruce : Comme beaucoup la série Les Envahisseurs a bercé mon enfance, mais je l’ai revu il n’y a pas si longtemps et j’ai été un peu dérangé par le coté redondant et systématique de chaque épisode… Mis à part lors de la dernière saison il y a très peu d’évolution…
        Concernant Misfits, Jyrille a tout à fait raison, les saisons un et deux sont excellentes (même s’il y a déjà une petite baisse de niveau sur la 2eme) mais la saison 3 est très nettement moins réussie (le changement de casting y est sans doute pour beaucoup) … Je crains le pire pour la 4 et 5 que je n’ai tout simplement plus suivies.

  • Présence  

    Quel étrange film et quelle intrigue spécialement conçue comme une charge contre la croyance en Dieu.

    Quel coup d’œil ce Patrick 6 ! Un petit tour sur l’article wikipedia consacré à ce film confirme effectivement que le réalisateur à utilisé des maquettes génériques de Cosmos 1999 pour cette séquence.

    J’ai l’impression que la censure s’était bien relâchée pour les films américain dans les années 1970. Par exemple Massacre à la tronçonneuse date de 1974.

    • Bruce lit  

      @Jyrille et Pat 6 : j’ai déjà ressenti une baisse de rythme à l’épisode 3 mais globalement, ceci me fait penser à une série TV qui pourrait être écrite par Garth Ennis. J’y trouve tout ce que je cherche dans une série de super héros. Pour l’instant.
      @ Présence: un dictionnaire de la censure en France est sorti il y a quelques années. Des interviews assez intéressantes, pointait les corrélations entre la fin de la Censure d’Etat autour d’une oeuvre (contestable par l’opinion et diffusable sur le marché noir) et l’apparitions de lobby d’opinions et d’appartenance attaquant tout ce qui viendrait heurter leur sensibilité.

  • Bruce lit  

    Le teaser de Présence
    « Oppression » 1/4
    C’est Dieu qui m’a dit de tirer ! En 1976, God told me to (un film de Larry Cohen) tire sur la foule, sur la croyance en Dieu, sur l’identité sexuelle, avec une liberté de ton réjouissante.

  • Tornado  

    Oh purée, un film de genre que je ne connais pas du tout !

    Avec le recul, les années 70 regorgent de films à la fois kitschissimes (les marques du temps), mais d’une crudité et d’une impertinence aujourd’hui impensable. Au hasard, deux exemples : La petite Megan qui s’enfonce un crucifix dans le vagin dans « L’Exorciste », ou cette scène viscérale que plus personne aujourd’hui ne serait capable de tourner dans « Un justicier dans la ville », lorsque Charles Bronson vomit sur son palier après avoir tué sa première victime.

    Garth Ennis est-il sur facebook ? cette influence probable mériterait qu’on lui pose la question ! 😀

    • Jyrille  

      Je suis tombé sur un téléfilm d’action vraiment pas mal du tout il y a quelque temps (avec Rosario Dawson) où un type lambda se met à tuer des gangsters pour sauver sa copine, et lorsqu’il en torture un pour a première fois , il se met à vomir. Je n’ai jamais vu un justicier dans la ville cela dit.

  • JP Nguyen  

    Bon, sur ce coup-là, je passe. Peu de chance que je mette la main dessus et encore moins que je trouve une occase de le visionner…

    En faisant des recherches, j’ai trouvé un lien (ténu) entre Larry Cohen et le monde des comics : en 2003, il a porté plainte pour plagiat sur le film La ligue des gentlemen extraordinaires, avançant que le film était basé sur un de ses scripts (faut dire que l’adaptation était tellement peu fidèle au comics d’Alan Moore et Kevin O’Neill).
    Et du coup, Alan Moore fut sollicité pour démentir l’accusation de plagiat ! Cette expérience lui fut très désagréable et contribua à sa décision de ne plus avoir son nom associé aux films adaptant ses œuvres…

  • Bruce Lit  

    Non, Ennuis n’a pas de FB.
    Personne ne connaissait ces acteurs ?

  • Tornado  

    Ennuis ? C’est un lapsus ? 😀 !

    Ah sis si ! Je connais Tony Lo Bianco ! Un acteur de second rôle très présent dans le cinéma de genre des années 70 et 80 !

  • Lone Sloane  

    Tu as été chercher un plan, Bruce. Inconnu au bataillon mais qui donne envie d’aller communier avec cette déité malfaisante. En consultant la fiche IMDB, j’ai vu qu’il y avait l’incroyable Richard Lynch dans le casting, une des gueules de psychopathe les plus mémorables des séries et films de sêrie B voir Z américains. Il incarne un tueur en série de chauffeur de taxi dans un des épisodes les plus réussis de Starsky et Hutch
    http://www.imdb.com/name/nm0528433/?ref_=tt_cl_t8

    • Bruce lit  

      @Tornado : il s’agit du lapsus du correcteur d’orthographe de ma tablette….
      @Lone (in the dark) : Oui, la fiche technique du DVD mentionnait le parcours de ce Lynch là.

  • midnighter  

    découvert dans les années 80 grace à canal +; les débuts de canal + c’ était quand meme quelque chose

    • Bruce lit  

      Ah ? Je ne savais pas qu’il était passé sur Canal, sûrement grâce à Dionnet. Je suis aussi très nostalgique des années Canal.

  • Eddy Vanleffe  

    Je ne comprends pas pourquoi je confonds toujours ce film avec LIFEFORCE….

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