Black Hole Sun (Le Trou Noir)

Bullshit Detector : Le Trou Noir

Un article de NORMAN T RAY

LE TROU NOIR est un film américain des studios Disney sorti en 1979, réalisé par Gary Nelson, (UN VENDREDI DINGUE, DINGUE, DINGUE (FREAKY FRIDAY)), avec des effets spéciaux de Peter Ellenshaw (oscarisé pour MARY POPPINS) et une musique de John « JAMES BOND » Barry, avec Maximilian Schell, Anthony Perkins (PSYCHOSE), Ernest Borgnine (LA HORDE SAUVAGE, et, oui, SUPERCOPTER…), Robert Forster (JACKIE BROWN), Timothy Bottoms, Yvette Mimieux (LA MACHINE À EXPLORER LE TEMPS), et les voix pour les robots de Roddy McDowall (LA PLANÈTE DES SINGES) et Slim Pickens (DOCTEUR FOLAMOUR)

Revoir LE TROU NOIR en 2025, c’est comme revisiter un souvenir d’enfance, un Noël où on attendait un diamant, et où le paquet contenait le proverbial morceau de charbon dont on ne savait pas quoi faire…  J’y ai cru, pourtant, au TROU NOIR. Dans les pages du journal de Mickey, on nous promettait du « lourd » en termes de science-fiction, genre dont le jeune fan de LA GUERRE DES ÉTOILES que j’étais était devenu friand. 

Des robots rigolos, un robot méchant, et ce type qui débarquait avec deux pistolets lasers pour buter du vilain robot pourpre aux têtes de soupières, comme un Yan Solo déchaîné contre des gardes impériaux dont mon jeune esprit n’avait toujours pas capté que non, ce n’étaient pas des robots… LE TROU NOIR avait été vendu comme un digne successeur de LA GUERRE DES ÉTOILES ! 

Je rêvais de V.I.N.C.E.N.T. et de ces aventures extraordinaires… que mes parents ne m’avaient pas emmené voir. D’où la sensation d’avoir loupé un film mythique… bon, jusqu’à ce que je le voie, à l’âge adulte, après avoir oublié son existence pendant des années… ou autrement nommé le syndrome du « ah oui y avait ce truc qui a existé à un moment donné »… 

Une voix off qui dit des trucs qu’on ne comprend pas, un acteur qui mâche du chewing-gum donc il est américain, un robot, pas de doute, on a à faire dès les premières minutes à un futur chef d’œuvre… 

Minute 3:30 : « Mon Dieu, en provenance directe de l’Enfer de Dante !”, s’écrie Ernest Borgnine en regardant une image du fameux « Trou Noir ». 4 minutes : « à chaque fois que je vois quelque chose dans ce genre je m’attends à voir un gars en rouge avec une fourche et des cornes ». Il y avait déjà un fusil de Tchekhov de trop, là… 

Où Disney apprenait, bien des années avant ses errements modernes, qu’il ne suffisait pas toujours de simplement balancer du pognon à l’écran pour avoir un succès. Car visuellement, le film demeure irréprochable. 

En dehors des fonds verts visibles et des câbles par trop visibles des comédiens « en apesanteur » et des robots qui volent, le film fournit du grand spectacle, que ce soit le visuel du trou noir lui-même ou l’impressionnant vaisseau-cathédrale, le Cygnus, avec une rosace que n’aurait pas renié Notre-Dame. Bruce a parlé de « vaisseau tour Eiffel », ça se défend aussi… 

Le vaisseau Palomino découvre ainsi le Cygnus, vaisseau réputé perdu depuis vingt ans, en orbite stable d’un redoutable trou noir. Seul reste à bord le commandant de bord, Némo… euh, pardon, Hans Reinhart, secondé par un robot peu sympathique, Maximilian. Difficile en effet de ne pas penser à la figure du capitaine de 20 000 LIEUES SOUS LES MERS face à cet homme barbu et charismatique, dont la décoration de la salle à manger avait déjà un siècle de retard en 1979… Il finit d’ailleurs comme le bon capitaine de Verne… enfin, durant sa première mort. Je me comprends. 

On a clairement à faire à un film qui ne sait pas ce qu’il veut être. On y trouve à la fois des robots marrants émotifs (et qu’on peut contacter par télépathie !) qui font des concours de tirs (ou ils comparent basiquement la longueur de leurs b… respectives comme des collégiens dans un vestiaire), et des « zombies ». La classification « PG », une première pour un « Disney » scellera son sort au box-office. 

Les combats avec pistolets lasers sont foirés. Comment ont-ils pu rater ces scènes alors que même des séries B fauchées faisaient mieux ? Une musique ridicule à ces moments-là (John Barry, qu’est-ce qui t’est arrivé ?), et des robots statiques et maladroits en face, qui touchaient leurs cibles à coup sûr durant les exercices, et qui soudainement ne touchent plus rien. Aucune tension, aucune chorégraphie d’action ni même une tentative de mise en scène, une incompétence complète en la matière totalement inexplicable ! 

Le film prend dans ses vingt dernières minutes un aspect de film-catastrophe, avec le Cygnus se dirigeant en plein dans le trou noir, et se désagrégeant au fur et à mesure. Un final très réussi et des plus spectaculaires, alors que les héros restants cherchent à s’échapper du vaisseau en ruine. Le film aurait peut-être gagné à être ce qu’il était censé être au départ, un film catastrophe. 

La conclusion ? Je spoile. Les cinq dernières minutes font dans l’ésotérisme pur. Maximilian fusionne avec Reinhart et se retrouve chef des Enfers, sur une montagne entourée de flammes, alors qu’on aperçoit les membres de son équipage, un plan séquence aussi beau qu’incompréhensible dans le cadre d’un film qui se revendiquait du genre de la science-fiction. Vous vous rappelez des fusils-mitrailleurs de Tchekhov du début ? Ben voilà. 

Et puis soudains apparaissent les alcôves du paradis dans lesquelles un ange diaphane plane. Les survivants du Palomino ont franchi le trou noir, sont-ils au paradis ? Celle-là, je ne l’ai pas vu venir. De la science-fiction bondieusarde, quelques décennies avant le remake de BATTLESTAR GALACTICA… 

À propos de Chekov, il peut être utile de rapprocher LE TROU NOIR d’un autre film sorti dans la vague post-GUERRE DES ÉTOILES, également en 1979, STAR TREK LE FILM. Les deux films affichent des effets spéciaux assez extraordinaires, un scénario beaucoup trop court pour la durée de leur métrage, et une fusion homme/robot en fin de métrage, sans parler d’une balade musicale autour d’un gros vaisseau spatial. 

Au final, LE TROU NOIR est à voir une fois dans sa vie, pour sa direction artistique proprement démentielle et l’ambition générale du projet, et aussi pour voir ce qu’il ne faut pas faire en science-fiction.  

Des personnages principaux on ne saura finalement presque rien, ils seront portés uniquement par le charisme, ou non, de leurs interprètes. Pourtant ils n’étaient pas nombreux, cinq sans compter les robots…  Le film aura au moins eu la politesse de ne durer qu’une heure trente-et-une, et de n’avoir généré aucune suite ni projet de remake… Et rien que ça, c’est déjà précieux ! 

À noter que l’adaptation en bande dessinée sera signée par un certain… Jack Kirby ! 

5 comments

  • JB  

    Merci pour cette présentation !
    Dommage. Et pourtant j’ai une haute tolérance pour la scifi nanardesque à gros budget (la bataille spatiale de Moonraker est un plaisir coupable…)
    Je crois avoir vu le film une fois étant gosse et n’en ai gardé qu’une impression de longueur. Je m’en souviens plus comme extraits d’un docu sur les Méchants de Disney, avec quelques scènes marquantes : les héros qui découvrent la vérité sur ce qui est arrivé à l’équipage en démasquant l’un des drones, et le terrifiant Maximilian et sa lame tournoyante s’avançant lentement vers l’un des personnages qui se planque vainement derrière un dossier. Des scènes fortes et chocs, probablement parce qu’elles laissent les images parler plutôt que de nous noyer sous les commentaires des protagonistes…

  • Tornado  

    Profondément en désaccord sur le principe. Je l’ai toujours aimé bien que ça commence à faire quelques années que je ne l’ai pas revu.
    C’est comme pour le premier film STAR TREK : c’est du space opera mystique et contemplatif.
    Dans mon souvenir le scénario était chouette quand même, avec une touche gothique fascinante et une très, très grosse atmosphère (je le préfère à LA FORTERESSE NOIRE par exemple, alors que ce dernier est un film culte à cause de son réalisateur). Ce n’est pas un roman, ça va à l’essentiel et ça passe essentiellement par le pathos. Du cinéma, quoi.
    C’est kitsch mais ça fait son époque. Ça participe de son charme comme un film de la Hammer ou un Edgar Poe chez Corman.
    Pour le coup faudrait que je le revoie mais jusqu’ici je n’ai jamais compris pourquoi on descendait le film, le scénario et la musique. De mémoire je suis fan des trois et ça reste un chouette moment de cinéma bis qui sort des sentiers battus.

  • Nikolavitch  

    Super casting, super ambiance, beaux visuels, quelques scènes marquantes, mais tellement écrit avec le cul qu’il y perd sa… singularité.

    à une époque on trouvait facilement la BD par Kirby, je l’ai pas prise à l’époque, je regrette assez, maintenant.

  • Maya  

    Pour être honnête, je n’ai aucun souvenir de ce film, je ne crois pas l’avoir regardé. Par conséquent, je n’ai pas compris ton article.

    En revanche, le casting est super et la BD semble vraiment géniale.

    Peut-être à voir au moins une fois.

  • Bruno. ;)  

    Ah ouais, moi aussi, le Comic-Book me fait un peu de l’oeil : j’aurais adoré le trouver, à l’époque.
    ARF ! C’est vrai que c’est pas mal trouvé, la référence à la Tour Eiffel !

    Sinon, je serais moins abrupt sur l' »œuvre » cinématographique, que j’ai (aussi !) raté lors de sa sortie, et n’ai découvert qu’à l’âge presque mûr (mais pas encore complètement, même si les avis des proches demeurent très partagés…).

    C’est un film évidemment lourdement impacté par la production, qui manifestement est tiraillée entre plusieurs impératifs contraires (voire carrément antinomiques, pour le « Director » moyennement talentueux…), et dont les nombreux compromis inévitables -les robots-poubelles volants, preuves « vivantes » des compromis hasardeux susnommés…- empêchent ce Space-Opera très esthétiquement stylisé d’assoir correctement sa nature.
    Par moment proprement lyrique, à d’autres terriblement sombre, puis tout soudain abominablement infantile… L’empathie du spectateur est durement malmenée pour arriver à fonctionner à plein, débranchée à répétition par décidément trop d’à-coups narratifs, à chaque rupture de style, scénaristique ou tout simplement de mise en scène (parfois effectivement très bâclée, comme les affrontements au pistolet-laser, pointés dans l’article.).
    Mais ceux qui ponctuent la trilogie originelle de G. Lucas ne sont pas mieux chorégraphiés : le décorum, d’avantage froid-réaliste (toutes proportions gardées…) nous pousse simplement à plus facilement en ignorer les incohérences, puisque l’intro typographiée (!!) nous a bien conditionné à penser qu’on allait voir un film de guerre spatiale « sérieux ».

    La valeur émotionnelle du film de Disney, typique des réalisations colorées de romantisme et d’aventure, transcende néanmoins ses défauts cinématographiques intrinsèques, pour peu qu’on soit demandeur de grand spectacle ; ce qu’est avant tout ce galimatias d’influences créatives, aux carrefour artistiques et techniques des époques.
    … Et bon sang ! Cette intro !!!

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