The Seeds, de Ann Nocenti & David Aja
Un article de PRESENCEVO : Dark Horse Comics
VF : Futuropolis
1ère publication le 08/03/22 – MAJ le 28/07/22
Ce tome contient une histoire complète, indépendante de toute autre. Il regroupe les 4 épisodes de la minisérie, dont les deux premiers sont initialement parus en 2018, écrits par Ann Nocenti, dessinés, encrés et mis en couleurs par David Aja qui a également réalisé le lettrage. C’est la première fois que les épisodes 3 & 4 sont publiés.
Elle est en train de me quitter. C’était une bonne fille, une bosseuse. On ne peut pas contrôler les filles sauvages et peut-être en attendais-tu trop d’elle. Astra est une journaliste : elle est train de prendre des photographies du mur de séparation entre la zone où elle habite, et la zone B dans laquelle les gens vivent sans technologie de communication. Elle pense au premier commandement du journalisme : il y a toujours deux facettes à chaque histoire. Elle estime qu’une approche plus juste serait de dire une cinquantaine de facettes. Elle voit un monsieur en train de regarder des photographies accrochées au mur : il explique qu’elle ne l’a pas quitté, mais qu’elle est partie pour sortir de ce monde pourri où elle était en train de devenir aveugle à forcer de travailler à regarder des écrans. Une enfant assise sur la bordure de trottoir, avec un masque à gaz sur le visage, indique que son père a fait le mur parce qu’il en avait assez de vivre dans l’ombre des gratte-ciels, dans l’ombre des nantis. Une autre jeune femme indique que son idiot de mari est passé de l’autre côté, comme un abruti parce qu’il n’est pas possible de revenir en arrière.
Astra continue de prendre quelques photographies, puis elle les envoie à son journal Scoop Weekly, et se décide à rentrer car un message diffusé par haut-parleur annonce une neige acide. Dans une chambre d’hôtel à bas prix, un homme avec un masque à gaz intégral regarde une femme nue se lever du lit. Elle a un gros idéogramme tatoué dans le dos et elle rattache son soutien-gorge. Elle se rend aux toilettes en s’appuyant lourdement sur ses deux cannes anglaises. Ils papotent. Lola demande à Race pourquoi il la quitte s’il l’aime : il doit récolter des graines. Il remarque que ses doigts tremblent. Elle s’est rhabillée et installée sur son fauteuil roulant. Elle lui demande s’il veut son numéro de téléphone portable. Il répond qu’il n’a pas de téléphone et qu’ils ne fonctionnent pas là où il va. Elle en déduit qu’il se rend de l’autre côté du mur, et lui souhaite bonne chance avec ça. Astra est arrivé dans les bureaux du journal, et elle se rend dans celui de Gabrielle la rédactrice en cheffe. Cette dernière lui indique que son histoire de famille brisée par le passage de l’autre côté du mur est ennuyeuse. Astra répond que cette histoire Club Death sent l’intox. Pour Gabrielle peu importe : si elle peut annoncer qu’il existe une drogue qui permet de voir sa mort, alors les lecteurs achèteront quoi qu’il en soit. Il suffit parfois de publier une histoire pour que les gens lui apportent de la réalité : une histoire inventée de toute pièce devient un mythe, et le mythe devient réalité. Gabrielle a besoin d’un scoop et vite.
En fonction de sa culture comics, le lecteur peut être attiré par cette histoire soit pour Ann Nocenti, scénariste d’épisodes inoubliables de DAREDEVIL dessinés par John Romita junior et Al Williamson, de la série KID ETERNITY avec Sean Phillips, de la série RUBY FALLS avec Flavia Biondi, soit pour David Aja, dessinateur de la série HAWKEYE de Matt Fraction, ou encore parce que ce récit est supervisé par Karen Berger. Il peut aussi être attiré par les pages après avoir feuilleter le tome, ou simplement par le texte de la quatrième de couverture, pourtant assez cryptique. De fait, la dynamique de la série est rapidement installée : un futur très proche, une ville séparée en deux avec une zone sans technologie informatique, la présence probable (mais pas certaines) d’extraterrestres, une journaliste qui doit rapporter un scoop, une prostituée en fauteuil roulant, un (peut-être) extraterrestre amoureux, sans oublier les abeilles et les graines. Oui, il y a bien une intrigue : l’enquête d’Astra sur les potentiels extraterrestres. Oui, l’intrigue est menée à son terme avec une résolution en bonne et due forme.
La scénariste sait insuffler une personnalité dans chaque protagoniste, par le biais de petites touches, à la fois leurs réactions, à la fois quelques brèves réflexions dans des cartouches. La narration visuelle s’avère effectivement très séduisante. L’artiste a choisi d’utiliser une seule couleur : un vert de gris. Il s’en sert aussi bien pour ajouter des précisions sur les sources de lumières, renforçant ainsi l’ombrage, que pour faire apparaître des éléments non délimités par un trait encré, ou encore pour créer une zone de contraste accentuant l’effet de profondeur. Aja renforce de petites zones colorées en vert par l’équivalent d’une trame de points, renforçant l’impression d’ombre, dans un degré entre le noir complet, et le simple vert. Du coup en première impression, les pages dégagent une ambiance un peu chargée, et un peu pesante, vaguement déprimante. Du côté avec la technologie, ce n’est pas la joie. Dans la deuxième page, le lecteur découvre un haut mur avec des barbelés au sommet, un véhicule militaire blindé, la silhouette de deux soldats en train de patrouiller avec casque, gilet pare-balle et arme automatique. Il y a des graffitis sur le mur. Les murs de la chambre d’hôtel donnent l’impression d’un revêtement craquelé et moisi par endroit, avec également quelques tags. Il en va de même pour ceux de la salle de bain. La salle de rédaction de Scoop Weekly est plus propre, mais plongée dans une pénombre laissant supposer que certains éléments ont commencé à être gagnés par l’usure. Il en va de même pour le court passage dans la boîte de nuit, et dans la ruelle à l’arrière. Le dessinateur a l’art et la manière pour laisser supposer que ce milieu urbain n’est plus de première jeunesse. Cela devient explicite en passant dans la zone B de l’autre côté du mur avec des bâtiments décrépits, des déchets, des gravats.
L’artiste accentue encore cette sensation de malaise, ou plutôt de mal-être latent avec une maîtrise extraordinaire du niveau de détails, et avec la densité des zones de noir. À la simple lecture, les dessins donnent l’impression générale d’une photographie dont les contours auraient été simplifiés en augmentant les contrastes pour obtenir des traits un peu plus épais, et des surfaces intérieures dépourvues d’aspérité. Mais quand il laisse son regard s’attarder sur une case ou une autre, le lecteur prend conscience que l’artiste a su gommer les détails superficiels, donnant l’impression d’une grande précision, tout en allégeant la représentation, puis en passant en mode impressionniste avec la couleur et les trames. Cela conserve tout le naturel des personnages, tout en empêchant de les regarder avec insistance, comme si on les dévisageait longuement. Les pages combinent une apparence très claire, avec une impossibilité de saisir les menus détails, des cases ouvertes sur les paysages, avec une vision très cadrée dans des pages découpées sur une base de 9 cases de la même dimension, en 3 cases pour chacune des 3 bandes. Cette forme renforce la bizarrerie de certaines cases : une femme uniquement vêtue d’un soutien-gorge allant aux toilettes avec des cannes anglaises, un monsieur tout nu assis sur un fauteuil avec un masque à gaz lui couvrant le visage, un fusil dans la main gauche, pointé à la verticale, des agneaux dans un enclos, des porcs dans un autre, un squelette dans une combinaison d’astronaute dans un module s’étant écrasé sur une planète, etc. Sans oublier le motif géométrique récurrent de l’hexagone régulier.
Il est possible que le lecteur finisse par se demander si l’assemblage de tous ces éléments hétéroclites a bien un sens. Finalement quel sens donner à la prolifération des abeilles ? Pourquoi des (peut-être) extraterrestres avec insémination de femmes et trépanation ? Et puis cette zone sans technologie de communication informatique ? Dans le même temps, cela provoque un ressenti déstabilisant, avec un peu de fin du monde (mais ce n’est pas sûr) des comportements bizarres, mais adaptés à l’environnement et à l’état de la société, des rapprochements saugrenus (par le biais du leitmotiv des hexagones), provoquant des résonnances avec le monde contemporain, et des artefacts culturels des quatre décennies passées. Ce n’est pas une écriture de type automatique, mais il y a une composante proche de l’onirisme.
Le lecteur peut être tenté de relever ces éléments presque superflus : la réflexion sur l’éthique du journalisme et les prophéties auto-réalisatrices, la neige acide qui renvoie à la pluie acide, le mur séparant la ville évoquant celui de Berlin avant 09 novembre 1989,la prolifération des abeilles à une époque où on craint leur disparition, l’éventualité de coloniser d’autres planètes mais réservée aux riches, la peur de la technologie informatique, le passage d’avions dans le ciel pouvant épandre toutes sortes de produits chimiques à l’insu de la population, et bien sûr les théories du complot telle que la présence d’extraterrestres sur Terre.
Sous cet angle, cette bande dessinée renvoie le lecteur à un mélange d’informations et de rumeurs sensationnelles composant le bruit de fond de sa vie, ou en tout cas de celle de la scénariste. Une mythologie diffuse, invérifiable, dépassant l’individu, échappant à l’expérience directe, mais avec des effets très concrets au quotidien.
En découvrant cette histoire, le lecteur espère bien qu’il s’agit d’une œuvre d’auteurs : il n’est pas déçu. Ann Nocenti raconte bien une histoire avec une intrigue, mais avant tout elle évoque une forme de mythologie du quotidien mêlant réalisations technologiques rendues possibles par une science inaccessible au commun des mortels, et rumeurs aussi improbables que séduisantes. David Aja parvient à donner corps à ces ressentis avec des dessins combinant extraordinairement une précision palpable, avec une liberté onirique, dans une mise en page rigide qui offre une grande liberté de mouvements, et une des environnements très ouverts.
La BO du jour
Un autre manifeste des Petits Gris
« En fonction de sa culture comics, le lecteur peut être attiré par cette histoire soit pour Ann Nocenti, scénariste d’épisodes inoubliables de DAREDEVIL ….soit pour David Aja, dessinateur de la série HAWKEYE »
Dans le mille, c’est exactement pour cela que cette mini-série me fait de l’œil depuis sa sortie en VF. Elle est d’ailleurs dans ma Wantlist.
Merci Présence pour cette review qui me conforte pour mon futur achat . Comme d’hab une analyse très complète et pertinente de l’œuvre 👍.
La BO: Des STRANGLERS je ne connais que GOLDEN BROWN et ALWAYS THE SUN…le morceau présenté aujourd’hui est sympa.
Il va aussi falloir que je mette 1 ou 2 albums du groupe dans ma Wantlist Discogs. Si l’un de vous a un Album à me conseiller je suis preneur.
Bonjour Surfer,
ta remarque sur mon commentaire me rassure un peu, parce que j’ai eu beaucoup de mal à le rédiger, à saisir le fond de récit. J’ai la sensation de n’avoir pas bien réussi à le restituer. Ce qui ne m’a pas empêché de prendre grand plaisir à ma lecture.
T’inquiète ton analyse est parfaite. D’après ce que je comprends le récit est suffisamment cryptique pour que chacun ait sa propre compréhension. Un peu comme un film de David Lynch 😀. C’est ce qui m’intéresse 👍. Et puis tu as précisé qu’il y a une réelle intrigue à l’histoire avec une fin en bonne et due forme. C’est ce qui compte.
Je suis moi même aussi peut-être un extraterrestre donc je peux facilement comprendre tout ça 😀😀😀
il me semble que tu n’aimes pas trop l’ambiance punk alors je te conseillerais plutôt leurs albums
THE RAVEN qui souvent cité comme l’un de leurs tout meilleurs…
et si tu aimes la musique très acoustique nous avons également LA FOLIE (ecore un peu psyché mais bien calmé quand même) ou EUROPEAN FEMALE et ses guitares andalouses….
Merci Eddy je vais essayer ça. 👍.
Et oui je n’aime pas le Punk. C’est peut-être pour cela que je n’avais pas franchi le cap.
L’association des Stranglers avec le mouvement punk relève du malentendu.
Ils ont déboulé au même moment que le punk, c’étaient de sacrés sales gamins et y a souvent eu de gros boxons dans leurs concerts à leurs débuts mais musicalement, ça ne relève pas du punk.
Pour ma part, je trouve qu’ils n’ont jamais fait mieux que leur premier album Rattus norvegicus.
J’ai aussi une vraie tendresse pour le single Strange little girl qui ne figure sur aucun album.
Rattus est aussi mon préféré perso, mais bon comme je les aime tous, je suis mauvais juge.
Un deuxième avis très positif après celui de Phil Cordier, posté il y a quelques temps sur son blog.
Le côté monochrome me freine un peu. Ça et l’impression d’avoir une série Arte en BD, avec la crainte d’un récit très cérébral, pessimiste et donneur de leçons. Je tenterai quand même, sans en faire un objectif prioritaire.
L’article de Phil Cordier :
http://philcordier.blogspot.com/2018/07/the-seeds-et-daredevilnocenti-rules.html
Cérébral : oui, mais aussi très axé sur la transmission et le partage de ressentis.
Pessimiste : un peu.
Donneur de leçons : non, c’est plus un ressenti des forces systémiques pas toujours explicites qui pèsent sur la vie de chaque individu, qui la modèlent.
Je veux faire confiance à Ann Nocenti qui brosse là encore un univers de dingo…
David Aja bien évidemment est une valeur sûre aussi…
Exactement les caractéristiques qui m’ont attiré.
Il m’a fallu être très patient : 2 épisodes parus en 2018, puis rien pendant 2 ans, jusqu’à la publication du recueil complet en janvier 20231. J’ai bien craint que la fin ne verrait jamais le jour.
j’ai eu vent de l’imbroglio éditorial mais j’attendais sagement une VF, il faut avoir que j’ai une « wish list » énorme comme tout le monde et que je m’accommode grandement des délais pour pouvoir étalonner mes achats…
là je viens de voir que NEXUS était prévu chez Delirium… (priorité absolue!!!)
Si au départ je suis allergique au style narratif de Nocenti, je remarque que sur ses derniers scénarios, elle a progressé dans la forme pour aboutir à quelque chose de plus moderne et moins ampoulé. J’ai bien aimé son one-shot sur Poison Ivy par exemple. Alors pourquoi pas, notamment pour les planches de David Aja qui sont effectivement à couper le souffle et cette lecture en gaufrier tellement efficace et rassurante (structurée).
La BO : Ah ben ça faisait longtemps ! Je n’aurais jamais pensé aux Stranglers en écoutant ce titre sans en avoir la référence. J’accroche pas du tout. Ça ferait bien dans un film par contre.
Entièrement d’accord avec Présence.
De plus, ce récit de Nocenti résonne aujourd’hui avec l’actu affreuse de ces dernières semaines. Il peut aussi s’en dégager un côté âpre qui peut dérouter et je peux comprendre qu’on n’adhère pas ni au propos, ni à sa mise en image. Un poil exigeant mais si on accroche, passionnant.
Merci. J’ai également beaucoup apprécié cette capacité à être en phase avec les angoisses sous-jacentes de l’être humain occidental, tout en sous-entendu et en ressentis.
je ne peux qu’être d’accord avec toi 🙂
Les allergiques à Nocenti doivent fuir car c’est la somme de tout ce qui a toujours fait le coeur de ses interrogations, de ses thematiques préférées, et de ses angoisses
J’aimais beaucoup (euphémisme) quand elle diluait du super héros dans du sociétal (ou l’inverse) mais c’était plus dur, voire quasi illisible, quand elle se lachait trop (Kid Eternity) donc on pouvait ici craindre le pire, surtout que tu mets très bien en avant un dessin, pour superbe qu »il puisse être, qui créé une sensation de froid, de malaise
mais c’est là que Karen Berger joue son rôle et fait son taff d’editor, permettant à Nocenti de remodele’r son récit pour qu’il ne parte pas dans tous les sens
A la première lecture j’ai été un peu déstabilisé, voire décu par la profusion, et à la relecture tout est passé, Ce récit est dérangeant, et plus dense qu’il n’y parait
Ce récit est dérangeant, et plus dense qu’il n’y parait : entièrement d’accord.
Kid Eternity, ça date de 1993-1994, presque 30 ans. Depuis Ann Nocenti a exercé d’autres métiers, vécu dans d’autres pays : je pense qu’elle a beaucoup évolué en tant qu’être humain, et également en tant qu’autrice.
https://www.babelio.com/livres/Nocenti-Kid-Eternity-Book-One/984310/critiques/1414739
Tout ce qu’elle a écrit récemment n’est pas du même tonneau du Semences / Seeds.
Les épisodes de Catwoman (2012/2013), la minisérie Katana (2014) : pas très enthousiasmant.
Klarion (2013/2014) : pas lu.
Ruby Falls : un peu léger
https://www.amazon.fr/gp/customer-reviews/R142B1NYCEFHIG/ref=cm_cr_dp_d_rvw_ttl?ie=UTF8&ASIN=1506714951
entièrement d’accord : Catwoman était naze, Klarion peut etre pire, en tout cas par rapport à mes attentes
Ruby Falls léger mais très sympa quand même
Bon, je l’ai lu deux fois :
La première fois en VO où je n’ai rien compris.
La deuxième fois en VF cette semaine où j’ai compris mais j’ai détesté.
Un style frigorifique, des visages gommés de toutes expressions et des personnages vidés de leurs émotions. Il en résulte une histoire où le lecteur se trouve coincé dans un montage déstructuré souvent insupportable avec des personnages qui dissertent comme chez Azzarello : on a l’impression de ne saisir qu’un bout de leur conversation et de partir avant la fin.
Les enjeux sont littéralement nuls (au sens qu’à la fin du récit, il ne s’est quasiment pas passé grand chose) et j’ai trouvé les dessins d’Aja inexpressifs et plats.
La seule scène qui m’a fait croire que le truc démarrait c’est la première conversation entre la journaliste et sa rédac chef cynique.
Au final, cette zone sans technologie, ces aliens au demeurant très humains à tel point que ça n’a pas grande importance (ça pourrait être juste des mecs déguisés en fait) et ces abeilles ne m’ont pas parlé du tout. Flop de l’année. Bac à soldes.
En fait en ce moment les seules bs où le personnage est au centre de l’intrigue t et vecteur d’émotions, ce sont les manga mon vieux…
l’écriture américain tend à se normaliser effectivement avec un ton bizarrement neutre, reflet d’une pensée qui ne parvient à vouloir être clivant et y perd ses failles et son humanité….
les concepts son souvent alléchant les univers recherchés mais peuplés de robots qui parlent tous de la même façon , professent les mêmes mantra faisant les mêmes constats…
on pourrait se détourner du super slip pour l’offre indé mais ces dernières années, je m’y fait chier encore plus…
Vous me fournissez une liste de curiosités et je vais butiner là dedans mais je rechigne à acheter…
La production de comics indépendants est pléthorique, et on trouve facilement des comics avec un ton très marqué. Rien que la semaine dernière, j’ai lu le tome 7 de Ice Cream Man : horrifique, avec des personnages qui ne son ni insipides ni interchangeables. J’ai également lu Hey kids! Comics! Saison 2 d’Howard Chaykin : ni fade, ni impersonnel, et c’est un euphémisme de taille.
Je confesse un GROS filtre pour ma culture, je me renseigne essentiellement sur la VF et à part des truc squi ont déjà un age certain « Stary Bullets, le prochain Nexus, American Flagg…les dernier trucs que je vois ne m’inspirent pas énormément…
une autre maladie que je constate aussi dans ce que j’ouvre, on dirait souvent des pitchs de série TV
Il ne s’est quasiment pas passé grand chose : il est vrai que ce n’est pas un récit d’action ou d’aventure.
Flop de l’année : ne sois pas si défaitiste, l’année ne vient que de commencer, il y en aura encore beaucoup d’autres et certainement des pires. 😀
L’enjeu : pour ma sensibilité, l’enjeu est l’appréhension du monde dans lequel nous devons vivre aujourd’hui, les paramètres et les spécificités qui nous sont imposés, sans existence d’alternative.
Des bouts de conversation évoquant les dialogues d’Azzarello : ça m’a fait la même impression, mais j’ai beaucoup aimé 100 bullets.
Un style frigorifique : je partage aussi ce ressenti.
Alors je vais plus loin. Ann Nocenti c’est quand même un socle en écriture intelligente, humaine et sensible.
Je n’attends pas de THE SEEDS un truc musclé mais une raison de comprendre pourquoi elle a raconté cette histoire et honnêtement c’est très faible.
Tout au long de ces 4 chapitres j’ai cette impression de dilution d’un potentiel dans une marmite où ça ne prend pas.
J’ai moi aussi aimé 100 BULLETS mais là les dialogues pour Nocenti sont les plus ennuyeux de sa carrière. Et pourtant dieu sait que j’aime les silences en BD et la concision.
C’est toi qui le résume le mieux : »Il est possible que le lecteur finisse par se demander si l’assemblage de tous ces éléments hétéroclites a bien un sens. » Non, aucun.
Je pense par exemple à cette mention en passant de la neige acide : ça produit immédiatement un effet d’écho ou de résonance en moi, me renvoyant à l’inquiétude diffuse engendrée par les pluies acides quand j’étais jeune. Ann Nocenti a 65 ans, plus âgée que moi donc, pour autant ces dialogues incomplets éveillent des souvenirs, des thèmes qui me sont familiers. C’est en cela que je perçois la peinture d’un ressenti du monde comme il va, et que ça fait sens pour ma petite personne.
Bruce mon ressenti fut proche à la première lecture puis je me suis dit « tu l’as lu tard, sans attention… » J’ai relu et pensé quasi tout le contraire de toi,sauf la froideur des dessins mais ils collent au sujet
Top de l’année. Bien sur l’étagère centrale 🙂
Je l’ai lu au top de ma forme samedi après-midi et disposé à trouver ça génial. Il m’a fallu une heure pour en venir à bout. Même pour THE FILTH de Morrison j’ai eu plus de plaisir de lecture. C’est dire.
Ah non ! On ne peut pas accepter ces propos ! 😀 😀 😀
The Filth, c’est quand même 13 épisodes, beaucoup plus long, et autrement plus compliqué. Je n’ai pas eu besoin d’aller relire 5 fois l’article wikipedia sur les Sephiroth (ספירות) avant d’écrire le présent article. 🙂 🙂 🙂
C’est incompréhensible mais il y a des séquences chocs, d’autres funs : je me rappelle encore des attaques de paquebot à coup de canons à sperme, la traversée d’une planète avec pour seule boisson un réservoir de pisse et le singe qui a tué Kennedy. Encore un complot. Hum…
C’était pas mal en termes de complot, et très fort en termes de concepts visuels mémorables : ta remarque m’en a fait souvenir d’autres comme la main qui écrit ou le président des Etats-Unis avec une poitrine de femme, Man Green & Man Yellow, Tex Porneau, l’appel à l’aide laissé en lettres de sang sur un tampon hygiénique.
Voilà.
On n’y comprenait rien, ça a finalement fini au bac à soldes (parfois je regrette) mais au moins visuellement on ne s’ennuyait jamais.
Bonjour Présence,
Entre ton avis, celui de Bruce et l’article de Phil Cordier sur son blog je ne sais toujours pas quoi penser de THE SEED.
Ton article, à la description très clinique, confirme l’apprêté de l’oeuvre mais également sa difficulté d’accès. J’ai été déçu des derniers comics de Nocenti que j’ai eu entre les mains notamment chez DC dans l’horrible New 52.
Après je l’intéresse à la progression de David AJA, un des enfants de David MAZZUCCHELLI dont les planches présentées ici me rappelle fortement CITY OF GLASS ou BIG MAN pour le traitement de la couleur.
Maintenant est ce que j’ai envie de lire, quelque chose d’hautement cérébral ? Même Lynch m’a ennuyé récemment (d’ailleurs Bruce y a gagné un film) et je fuis désormais la production de Grant Morrison ou autre Hickman.
Mais ce côté graphique m’interpelle tout comme le nombre de page restreint, 4 numéros uniquement. Le fait que tu signales qu’il y a bien une « fin » est également un argument qui peut me décider.
La BO : je n’avais jamais écouté les STRANGLERS. Pas ma came pour un mardi matin.
Je ne sais toujours pas quoi penser de THE SEED : c’est tout l’intérêt des différents points de vue sur le site de Bruce, il n’y a pas qu’une seule façon d’envisager une œuvre.
Difficulté d’accès : tout les lecteurs s’accordent sur ce point. J’écoutais hier le podcast de Comixity, où Darkseid Sam indiquait qu’il avait fait face à cette même difficulté.
La froideur évoqué par Bruce, l’effort nécessaire pour être en phase avec la narration : deux manières d’exprimer cette caractéristique cérébrale.
Avec l’influence des complots et des Fake News sur la réalité, tu aurais presque pu faire un papier sur le BAD WORLD de Warren Ellis !
Je suis client de Nocenti (aucun avis bon ou mauvais sur Aja), et ce que je vois et lis m’intéresse. Je pense me laisser tenter !
BAD WORLD est une lecture qui m’a presque mis la nausée, non pas que cela ne soit pas excellent, mais c’est une plongée sans bonnet et sans tuba dans les abîmes profonds de la tare humaine…
Avec le recul je persiste à penser que certaines lectures de l’auteur éclairent sur ses penchants quand même…
C’est surtout qu’il met en avant les manières ahurissantes dont les ricains tentent de réécrire la réalité par des théories farfelues afin de tenter de maîtriser leur environnement. Ce sont les dernières pages qui donnent les raisons de ce tour d’horizon : un drame personnel, un meurtre commis par le voisin de Warren Ellis dont seul une infraction à ses habitudes a empêché l’auteur d’être lui-même victime.
Certaines lectures de l’auteur éclairent sur ses penchants quand même : sûrement en ce qui concerne les centres d’intérêt, pas sûr en ce qui concerne les actions.
Je me souviens de Scars d’Ellis & Burrows, et je ne pense pas que Ellis passerait à l’acte pour autant. J’ai lu beaucoup de Garth Ennis, et je ne m’attends pas pour autant à ce qu’il finisse par être accusé des pires exactions, ou plutôt de ce type d’exactions dans la vie réelle, que ce soient celles décrites dans ses récits de guerre, ou dans Crossed.
Chaque fois que je me remets à compulser les faits divers dans un quotidien, je me rappelle que la réalité est bien plus horrible que la fiction.
houlà je ne crois pas non plus que ce soit aussi simple et direct, mais l’auteur fait la démonstration d’une fascination pour certains comportements notamment lié à la facilité (et déconnexion) qu’amène la technologie et une manière de décrire certains milieux interlopes…
évidemment qu »‘un auteur de gore n’est pas un tueur en série pour autant….
plutôt à la manière de certains chanteurs qui parlent parfois de leur propres pulsions à travers leur façons d’écrire et de décrire…
N’ayant pas lu Bad Channels, j’ai un peu peur de parler à côté de la plaque.
La démonstration d’une fascination pour certains comportements notamment lié à la facilité et à la déconnexion : on peut être fasciné parce que ça répond à une pulsion, comme on peut aussi être fasciné par la monstruosité. Par exemple, j’avais beaucoup aimé un clip canadien montrant des individus se mettant à insulter des passants dans la rue, comme on peut le faire sur internet grâce à la déconnexion et à l’éloignement. Cela ne m’avait pas fasciné pas parce que je suis tenté de le faire, mais par la manière dont ça présente autrement ce genre de comportement. Une sorte de prise de recul qui permet de voir la monstruosité ou l’anormalité qui s’est banalisée.
Il y a cette étrange fascination à regarder un accident de la route également.
Je suis tout à fait d’accord. par écrans interposés, certaines choses peuvent nous fasciner et ça ne fait pas de nous des « tordus potentiels » non plus.
la seul chose c’est que parfois chez les artistes certaines failles sont trop profondément explorées et que certains sont amenés à glisser…
à la relecture, certaines phrases revèlent un autre sens.
ce midi mes jeunes collègues songeaient à s’ouvrir des comptes MYM afin de partager des photos de pieds…(ça me parait déjà dingue) et se faire un peu d’argent puisque c’est du contenu payant. Je discute avec elles et elles me disent que pas mal de filles postent des contenus plus osés pour se payer des trucs. Bien sûr, elles ne feront jamais ça. sans transition, elles se scandalisent du prix du billet pour la Grèce…elles ne réalisent pas que le glissement est déjà là. Bien entendu que 95% d’entres elles ne feront jamais rien, mais la tentation, l’occasion, le besoin et la demande de plus en plus exigeante des « clients » …
Patatras!
A la relecture, certaines phrases révèlent un autre sens. – Je comprends mieux ce que tu voulais dire. Je me suis déjà rendu compte que je suis incapable de déceler ce genre de chose. Je me souviens qu’il en avait été question à propos de la chanson L’aigle noir, et de son possible sens profond.
Compte MYM : je ne connaissais pas du tout, ce n’est visiblement plus de mon âge. Je suis aller consulter google pour en savoir plus. Une forme de marchandisation du corps immédiate par écran interposé : un autre exemple qui me permet de mieux comprendre, je t’en remercie.
Pas encore lu The seeds (c’est dans ma pile).
Pour la BO : le morceau me faisait flipper quand j’étais ado. Ca et l’album suivant The gospel according the men in black, ça me faisait vraiment peur.
J’adore ce morceau.
Cette bd me fait de l’oeil depuis que je la vois sur les étals, et ton article ne va pas m’aider à me retenir de l’acheter… en même temps, je ne suis pas certain d’être totalement convaincu, même si tous les thèmes me parlent et que les auteurs me plaisent (je viens de découvrir Nocenti sur presque tous ses épisodes de DD et Aja sur les 5 épisodes de Hawkeye). Dilemme. En tout cas je suis extrêmement heureux de savoir désormais de quoi il retourne. Une bd qui a une forte résonance avec celle d’hier sur le Bureau de la Vérité.
La BO : toujours pas mis aux Stranglers mais ce titre me plaît beaucoup.
Je ne suis pas certain d’être totalement convaincu : c’est effectivement une lecture qui sort de l’ordinaire, et je ne suis pas certain d’avoir réussi à en transcrire le caractère réel. Comme le fait observer Tornado, l’écriture de Nocenti sur cette histoire est plus moderne, ou plus mature que sur Daredevil, moins chargée en textes.
Du sombre, de l’étrange, du mystérieux (en un mot du goth)… La classe absolue ! Ce comics est pour moi ! Levez c’est pesé ^^ Well done Mister Presence 😉