The Nightmare Returns (Tribute Alice Cooper)

Hail to Hell : un tribut à Alice Cooper par Eric McFadden

Un article de BRUCE LIT

Distribué par Bad Reputation

A celui qui rock, nous te saluons !
©Bad Reputation

HAIL TO HELL est un hommage acoustique à notre père à tous : Alice Cooper. Il s’agit d’un album de reprises minimalistes avec pour la plupart des morceaux une batterie, un banjo ou une guitare et une basse. L’artwork ne comporte pas de livret mais une belle pochette cartonnée avec une préface où McFadden clame son amour pour la musique du Coop’ et des photos sympathiques.

La tracklist est la suivante :

Welcome To My Nightmare
Is It My Body
Last Man On Earth
Laughing At Me
Crazy Little Child
Millie And Billie
Man With The Golden Gun
Billion Dollar Babies
I’m The Coolest
Former Lee Warmer
It’s Me
Blue Turk
Desperado
Ballad Of Dwight Fry

Rien ne pourra venir contredire cette affirmation valable pour tous types de musiques : qu’importent le look, l’attitude, les frasques ou la pyrotechnie, sans les chansons, un artiste n’a que peu de chances de durer. La beauté, le glamour, la voix, la silhouette, les fringues, les scandales, tout ça s’estompe avec le temps. La musique jamais. Et dans ce domaine, Alice Cooper a écrit des perles du rock, de véritables diamants dont les disques sont les cartes au trésor dans une discographie souvent inconstante.

Tout le monde reconnaîtra les talents de Showman de Cooper, ses spectacles qui ont fait rêver les jeunes Madonna, Lady Gaga et Michael Jackson, la gentillesse de Vincent Furnier qui bénéficie avec Paul McCartney ou David Gilmour de l’une des réputations les plus flatteuses du show-business, mais peu évoqueront la substance des disques d’Alice Cooper : des chansons qui n’appartiennent qu’à lui, une formidable articulation entre le rock horrifique, le music hall, le théâtre, le cinéma et la culture geek.

Je pense que tu vas aimer ça

Alice Cooper est un interprète sous-estimé, capable de prendre jusque 6 timbres de voix selon son producteur Bob Ezrin pour donner à ses morceaux une couleur originale sur des arrangements absolument démentiels. Dans les pires moments de sa carrière, sa voix parvient toujours à extraire une ligne mélodique quel que soit le chaos de sa vie personnelle ou la qualité de ses musiciens.

Tributaire des musiciens qui l’accompagnent pour le meilleur ou pour le pire, Cooper a toujours été constant sur un point : ses paroles figurent parmi les plus rusées et spirituelles du rock. Un talent que lui envièrent tour à tour John Lennon son copain de biture, Johnny Rotten son plus grand fan et surtout Bob Dylan qui, excusez-du-peu, le qualifiait de songwritter le plus sous estimé du rock.

C’est tout ceci qu’Eric McFadden cherche à mettre en lumière dans ce tribute. L’homme n’est pas le premier venu : il a enregistré plus d’une vingtaine d’albums en solo, signé auparavant un tribute acoustique à AC/DC et accompagné à la guitare la crème de l’intelligentsia rock : Eric Burdon des Animals, Joe Strummer, Living Colour ou encore Bo Diddley.

Du picking acoustique en lieu et place des stridences électriques.

Les Tributes au Coop’ sont nombreux et souvent de très bonne facture mais celui-ci est indéniablement le plus téméraire ; passé le légendaire WELCOME TO MY NIGHTMARE qui ouvre l’album et interprété façon bayou ou BILLION DOLLARS BABIES , McFadden opte pour ne pas jouer les tubes d’Alice. Pas de 18 donc, ni de STEVEN ou encore SCHOOL’S OUT mais des chansons méconnues qui prouvent la connaissance jouissive de Mc Fadden du répertoire du maître !

Mon Dieu : l’homme connait les pépites des albums Zappa : la magnifique LAUGHING AT ME tout en flamenco qui n’est pas loin de surpassser l’originale en émotion, le MAN WITH GOLDEN GUN la chanson qu’Alice fut déçu de ne pas voir retenue pour le James Bond du même nom et le DESESPERADO qu’il composa à la mémoire de son grand copain Jim Morrison.

Si le style est minimaliste, Mc Fadden fait preuve de goût avec une interprétation sobre mais habitée. Il transforme WELCOME TO MY NIGHTMARE en ballade poisseuse où l’on imagine des rites vaudous et des caïmans rodeurs, il transforme IS IT MY BODY en picking jouissif , il interprète magnifiquement au banjo LAST MAN ON EARTH la seule bonne chanson de de WELCOME 2 MY NIGHTMARE.

Sortir des sentiers battus

Fermez les yeux, sortez les jeux de cartes, vous êtes dans un trippot enfumé de la prohibition et CRAZY LITTLE CHILD, déjà merveilleusement interprété par le maître, est votre hymne toujours avec ce banjo démoniaque et cette voix chaude et brigande.

McFadden se rappelle que MILLIE AND BILLIE est le seul duo que le Coop’ interpréta avec une femme. L’option Western est retenue pour une ballade country terriblement touchante sur cet amour de deux psychopathes enfermés en psychiatrie renforcé par l’usage d’une mandoline menaçante.
Et grâce soit rendue à jamais pour ressusciter l’une des plus belles chansons de Cooper : FORMER LEE WARMER où McFadden transpose le calvier Eighties de l’originale en arpèges délicats sur le couple et en flamenco sur le refrain. On pense parfois au FOOL ON THE HILL des Beatles. C’est exquis ; on entend l’ancienne version en dégustant cette relecture.

Ok Eric, Now You Have My Attention !

IT’S ME bénéficie d’un arrangement là encore à la mandoline qui permet d’enfin écouter la beauté de cette mélodie sans l’arrangement heavy forcé de l’original. Après une escale Jazzy pour BLUE TURK plus classique, le Tribute se termine sur une version efficace mais moins marquantes que ce véritable défilé de merveilles de l’immortel BALLAD OF DWIGHT FRY. Le solo de mandoline et de guitare acoustique fait tout de même la différence.

C’est sans doute le seul point noir du disque : si ces reprises brillent dans leur ensemble chacune prises séparément, l’ensemble semble parfois sous-produit et mollasson. Pourtant, McFadden réussit sans théâtre et artifices à s’approprier ce répertoire du pays des merveilles d’Alice aussi bien vocalement que musicalement. Il passe le neuvième cercle de l’enfer haut la main et signe un disque brillant qui mériterait bien un deuxième essai et -pourquoi pas- un duo avec le Patron.

Dieu a rendu l’amour fou pour que l’on se sente moins seuls.

22 comments

  • zen arcade  

    Je vais me faire remonter les bretelles mais il va falloir que j’avoue que je n’ai jamais écouté Alice Cooper.
    Je suis incapable de citer le moindre titre de sa discographie, excepté Black juju mais c’est parce que Lydia Lunch et Rowland S. Howard en ont fait une magnifique reprise pour leur projet Shotgun wedding.

    • Bruce lit  

      Oh la reprise de Lydia Lunch, on la retrouve sur Welcome to our Nightmare, un fabuleux double album de reprises par des groupes indies dont les Flaming Lips, Chris Connely de Ministry et Tyla des Dogs d’Amour. Un disque que j’affectionne profondément.

      • Jyrille  

        Ah tiens il faut que je l’écoute, ce Tribute. Avec le fils, on est particulièrement fans d’une reprise des Smashing Pumkins (je ne connais presque pas l’originale, d’ailleurs je n’ai pas écouté l’album dont elle est issue), CLONES (WE’RE ALL).

        Et d’ailleurs Bruce tu m’avais partagé une autre bonne reprise, celle des Melvins avec Jello Biafra de HALO OF FLIES.

        Sinon, je viens de les réécouter, je ne connais vraiment que 4 Alice Cooper que j’aime beaucoup, et même si j’ai aussi tenté les deux premiers, je ne pense pas retourner vers eux de sitôt. Les quatre albums se suivent : KILLER, SCHOOL’S OUT, BILLION DOLLAR BABIES et WELCOME TO MY NIGHTMARE. Si ça peut te donner des idées, Zen…

        • Bruce lit  

          Salut Cyrille
          CLONES est l’unique bonne chanson de l’album catastrophique FLUSH THE FASHION. Alice est à l’époque au plus mal et a remplacé sa consommation affolante d’alcool pour la cocaine. Il sort des albums dans l’indifférence générale avant de renaître grâce au hard rock glam des 80’s. Voici l’originale https://www.youtube.com/watch?v=P1h38gC23bw

          Une autre reprise formidable de CLONES sur l’album dont je parlais à Zen Arcade
          https://www.youtube.com/watch?v=2QuKhLqC8Hs

          • Jyrille  

            Merci pour les liens. Pas convaincu par la reprise (c’est quoi cette batterie toute cheap ? Je ne connaissais pas du tout ce groupe), je prèfère celle des Smashing. Et je ne trouve pas ce tribute sur Spotify (pas grave).

            https://www.youtube.com/watch?v=ZE1SVflK45w

  • Présence  

    Cool : cette pochette l’avait fortement intrigué quand tu l’avais postée sur facebook.

    Je suis entièrement d’accord avec toi pour la qualité des chansons d’Alice Cooper, en particulier pour ses paroles. J’aime beaucoup les histoires qu’il raconte, son sens du drame, et son ironie souvent macabre, toujours très sophistiquée.

    J’ai écouté ces reprises grâce à ton article et je partage également ton avis sur le manque de relief de l’ensemble, indépendamment de la belle voix du monsieur.

  • Eddy Vanleffe  

    Marrant, je viens de regarder hier soir DARK SHADOWS de Tim Burton où Alice chante deux chansons et c’est vraiment un bon passage du film.
    Ballad of Dwight Fry m’a bien marqué du coup.

    Sinon je l’ai déjà dit, je ne suis pas très versé dans la branche américaine du rock, du coup Alice, je connais plus le personnage que les chansons.
    ici je suis d’avantage convaincu d’aller me chercher un des albums originaux que celui-ci….

  • Jyrille  

    Bon alors Bruce tu commences mal : Alice n’est pas mon père. Et sûrement pas notre père à tous. Si je devais dire ça, je parlerais de Iggy ou Bowie et beaucoup se soulèveraient d’indignation et ce serait complètement normal.

    Bref.

    Merci pour la découverte, je ne connais pas du tout ce monsieur. Et je ne connais pas tous les titres repris ici. Je jetterai donc une oreille à l’occasion, peut-être bientôt, en tout cas, via cet article : tu dis toi-même que dans sa globalité, l’album est mou…

    « La musique jamais. » Aaaaah là on est d’accord ! Tu alimentes même l’eau à mon moulin…

    « les albums Zappa » : qu’entends-tu par là ?

    • Bruce lit  

      Ah ah
      J’entends par là qu’Alice Cooper a une place déterminante dans la culture geek et il n’est pas exagéré de dire que sans lui la culture geek n’aurait pas le même visage. Son influence dans ce domaine est à mon sens même plus importante que celles d’Iggy ou Bowie, mais ça se discute 🙂
      Les albums Zappa : Alice a été découvert par Frank Zappa. Ses deux premiers disques paraissent donc sur la maison de disques de ce dernier Straight Recors et le premier est supposément produit par celui-ci (qui n’en avait rien à foutre). Malgré un son pourri et des arrangements aux abonnés absents, ces deux albums contiennent des titres très intéressants.
      Le groupe ne décolle qu’en signant chez Warner avec un apprenti producteur : un certain Bob Ezrin.

      • Jyrille  

        Merci pour les précisions. Il me semblait bien que les deux premiers albums (que j’ai écouté une ou deux fois) avaient un lointain rapport avec Zappa mais je n’étais plus sûr. Et lorsque tu dis ça, j’ai l’impression que tu parles de ses albums (à Alice) qui sonnent très Zappa (or il n’en existe pas à ma connaissance 😀 ).

  • Tornado  

    Je n’ai pas encore eu le temps d’écouter toute la playlist mais ce sera fait.
    En écoutant WtmN (dont je suis fan total à la base), on sent tout de suite que c’est de la belle ouvrage. Comme tu le dis le ratio minimalisme/élégance sonne très juste.

    Rayon anecdotes il y a des choses que j’apprends, par exemple l’admiration de Dylan pour le coop’.
    Par contre tu es certain que Lennon était copain de biture avec lui ? Il me semble que quand Lennon venait bringuer aux USA il s’acoquinait exclusivement avec Harry Nilsson. Idem : était-il vraiment pote avec Morrison ? Là aussi j’ai surtout lu que Cooper était fan dans l’ombre.

    Dans la liste il y a évidemment d’autres chansons que j’aurais aimé trouver. Mais en même temps pas sûr que PASS THE GUN AROUND, que je vénère par exemple, serait meilleure avec d’autres arrangements que ceux d’origine.

    • Bruce lit  

      Coucou Tornado.
      John Lennon faisait partie des Hollywood Vampires ce groupe d’alcooliques constitué par Alice dont les règles étaient simples : être le dernier debout. Les membres de ce groupe étaient Harry Nilson, Ringo Starr, Keith Moon.
      Cooper était ami avec Morrison, oui. Il est prouvé que Morrison lui rend hommage dans ROADHOUSE BLUES : « je me suis levé ce matin et je me suis servi une bière » est une réplique d’Alice que Jim a réutilisée.

      PASS THE GUN AROUND : une splendeur.

  • Patick 6  

    Alors à la base ce n’était pas gagné : je n’aime pas les tribute albums (et encore moins les tribute bands) ! La pochette m’a, un instant, fait craindre la relecture de l’album WELCOME dans le même ordre… Ce qui l’idée la plus stérile du monde (des groupes ont fait ça pour CURE notemment)
    Bon au final rien de tout ça, dieu merci.
    Les reprises sont originales et souvent éloignées des originaux (au moins sur la forme) ce qui est une très bonne chose. Le banjo colle finalement très bien aux chansons de Cooper, leur donnant, comme tu le dis, un côté poisseux et étrange.
    Moralité je sors plutot convaincu de l’écoute des liens que tu as partagé ici. Je m’y risquerai à l’occasion !
    Par contre je partage ton inquiétude de fin d’article : je me demande ce que donne ce genre de musique sur la durée d’un album…

    • Bruce lit  

      En musique d’ambiance, ça le fait. Et en tant que fan absolu, aussi.

  • Jyrille  

    Je viens d’écouter les titres que tu as mis dans l’article : ce n’est pas du tout ma came. C’est un peu de l’americana, c’est trop acoustique pour moi ou alors pas assez habité. Mais c’est bien fait…

  • Fletcher Arrowsmith  

    Bonsoir,

    je découvre tout dans cet article, ne connaissant Alice Cooper que de nom. Incapable de savoir ce qu’il a fait.

    Donc compliqué de comparer mais un avis globalement positif sur les quelques écoutes de ce tribute que j’ai tenté. Je crois que c’est le côté acoustique qui m’a surtout séduit.

    • JB  

      Pas mieux, je ne connais Alice Cooper que par son rôle (muet ?) dans Prince des Ténèbres

      • Jyrille  

        Juste au-dessus, en réponse à Zen Arcade, je vous donne mes conseils d’albums 😉

    • JB  

      Lu attentivement, ma playlist de ce week-end est toute trouvée !

    • Fletcher Arrowsmith  

      Merci Bruce pour ce lien. J’ai commencé à parcourir cet article fleuve, très intéressant.

      Je crois que je confonds Alice Cooper et Marilyn Manson, autant les personnages que leur musique.

      Maintenant pas complètement certains que cela me plaise mais il ne faut jamais dire jamais, être aware comme dirait JCVD (que j’ai vu hier soir dans Chasse à l’homme d’ailleurs). J’écoute bien AMNESIAC et LOUISE ATTAQUE, je peux donc, sur un malentendu, apprécier Alice Cooper 🙂

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