Esprits, karma et folie (Fragments d’horreur de Junji Ito)

Fragments of horror par Junji Ito

Article de   MATTIE-BOY

Copyright Fragments of horror : Ma no Kakera © 2013 Junji ITO

Asahi Sonorama VO

Mangetsu : VF

1ère publication le 24/04/19 – MAJ le 05/07/23

Le cri de Munch version Junji Ito (couverture dépliante de Fragments of horror)

Le cri de Munch version Junji Ito (couverture dépliante de Fragments of horror)

Presque 20 ans se sont écoulés entre ce volume et LE MYSTERE DE LA CHAIR. Ito nous revient ici en forme pour 8 histoires d’horreur. Détail amusant : la couverture inspirée du tableau « le cri » d’Edvard Munch, contient des éléments de chaque histoire.

Futon : Une très courte histoire de 8 pages. Un jeune homme n’ose plus sortir de sous son futon, terrifié par des hallucinations. En effet il voit des créatures cauchemardesques dignes des plus étranges créatures Lovecraftiennes . Une de ses amies s’occupe de lui pour qu’il se nourrisse, fasse ses besoins, etc. Jusqu’à ce qu’elle voit elle aussi des choses étranges flotter dans la pièce. Pour une fois, Ito donne une explication qui s’éloigne du surnaturel pour justifier ces visions. Ce n’est pas une histoire extraordinaire (en même temps, en 8 pages, c’est difficile…) mais cela annonce la couleur pour le reste du volume : Ito s’amuse toujours avec des délires visuels insensés.

L’esprit du bois  ©Vizmedia

L’esprit du bois
©Vizmedia

Wooden spirit : Vous le savez, les japonais sont un peuple animiste. Dans les racines du shintoïsme, on trouve des esprits dans tout ce qui nous entoure. Les pierres, les forêts, les fleuves. Cette histoire parle d’un père et de sa fille qui louent une chambre dans leur maison. La locataire qui se présente semble extrêmement intéressée…mais aussi extrêmement bizarre. Elle aime les maisons, les murs, le bois. Et les propriétaires vont bientôt constater qu’elle se livre à des pratiques excentriques, comme se caresser nue contre le bois ou ce genre de trucs…
Et bien sûr, cela va entraîner des manifestations surnaturelles de la part de la maison elle-même, comme si celle-ci prenait vie sous les doigts experts de cette femme amoureuse.
C’est…particulier comme histoire. Typiquement japonais je pense, car comme je le dis, ça me fait penser aux esprits et autres Yokaï qui résident selon les traditions japonaises dans tout ce qui nous entoure. Ce n’est pas la meilleure histoire du recueil mais c’est définitivement original, et les manifestations de la maison offrent leur lot de visuels perturbants.

The red turtleneck : Vous connaissez le concept de la malédiction lancée par une sorcière gitane ? Comme dans le livre LA PEAU SUR LES OS de Stephen King  (qu’il signe sous le pseudonyme de Richard Bachman). Eh bien c’est un peu l’idée de cette histoire simple mais très efficace. Tomio consulte une diseuse de bonne aventure très séduisante qui s’avère être une cinglée qui collectionne des têtes coupées. Elle va laisser une marque sur le cou de Tomio lors d’un jeu sexuel bizarre, et va lui donner ensuite un pull à col roulé (turtleneck en anglais) pour cacher la marque. Sauf que…du sang va couler de son cou et teinter le pull de rouge (c’est bon, vous avez compris le titre ? Et la référence sur la couverture ?).

Oups, j’ai glissé… © Vizmedia

Oups, j’ai glissé…
© Vizmedia

La sorcière va lui dire que s’il ne se tient pas la tête, celle-ci va tomber. Et en effet Tomio, bien qu’il ne soit pas mort, semble avoir la tête coupée. Et il ne faut surtout pas qu’elle se détache ou il va mourir. Paniqué, il va demander de l’aide à son ex-copine. L’idée est simple mais efficace parce que Ito retranscrit très bien la terreur et les difficultés d’une telle existence où il est impossible de retirer les mains de sa tête, avec l’effroyable fatigue que ça engendre dans les épaules et les coudes au bout d’un moment. Tomio et son amie vont chercher à lever la malédiction, même s’il faut pour cela s’adresser à la sorcière qui en est responsable.

Gentle goodbye : Une histoire qui rappelle étrangement la 2ème histoire du volume Le mystère de la chair déjà chroniqué ici. C’est également une histoire très jolie qui change un peu des horreurs en tous genres. Une jeune femme du nom de Riko s’est récemment mariée avec Makoto Tamura. Après avoir perdu sa mère alors qu’elle n’était qu’un enfant, elle a toujours été hantée par la crainte de perdre son père également. Or, son mari Makoto fait partie d’une famille possédant un don très particulier. La famille Tamura a en effet l’habitude de se réunir au grand complet pour participer à une cérémonie visant à créer ce qu’ils appellent une « afterimage », une sorte de spectre d’une personne disparue. Ils ne sont pas certains eux-mêmes qu’il s’agisse réellement des fantômes de leurs proches ou d’une forme de vie éthérée créée par leur foi et leur désir de revoir leurs défunts, mais toujours est-il qu’ils vivent avec des sortes d’esprits membres de leur famille. Tout cela pour pouvoir faire plus facilement leur deuil en gardant encore quelques années le contact avec leurs morts. Le temps de leur dire un « gentle goodbye ».

Bien entendu, Ito traite ici de la difficulté de faire son deuil et vous vous doutez que ce pouvoir est à double tranchant : il est parfois très difficile de laisser partir cette « afterimage. » Et la surprise de l’histoire vient du fait que certaines personnes qu’on imaginait réelles vont s’avérer être mortes depuis longtemps. Rien de glauque dans cette histoire (si ce n’est cette situation à la fois émouvante et malsaine de vivre avec des morts), et une très belle fin. On en verserait une petite larme.

Si vous le pouviez, ne seriez-vous pas tentés de ramener les morts ?  ©Vizmedia

Si vous le pouviez, ne seriez-vous pas tentés de ramener les morts ?
©Vizmedia

Dissection-chan : Une histoire pas mal morbide d’une fille prénommée Ruriko qui rêve qu’on la dissèque. Euh…ouais. Depuis qu’elle est petite et qu’elle a disséquée une grenouille avec un copain, elle fantasme sur le fait d’être disséquée. Adulte, elle retrouve la trace de son ancien copain d’enfance qui a fini par la fuir (on le comprend. Parce que bon…elle est flippante quand même). Ce dernier est en école de médecine et elle va donc lui demander de la disséquer. Elle va aussi s’arranger pour se glisser dans un sac mortuaire pour se faire passer pour un cadavre à découper en classe. Le plus étrange, c’est qu’il semble se passer quelque chose en elle quand elle fantasme là-dessus. Son ventre gargouille et quelque chose semble bouger à l’intérieur.

C’est une curieuse histoire morbide qui met un peu mal à l’aise en mélangeant une sorte de plaisir sexuel à…ben…la mutilation. Finalement 20 ans plus tard, Ruriko obtiendra ce qu’elle veut après sa mort. Et…évidemment on découvre quelque chose d’anormal chez elle. Avec cette histoire et une autre que j’aborderai plus loin, Ito nous met mal à l’aise, non pas avec des horreurs visuelles, mais avec un comportement déviant particulièrement inquiétant. Ces histoires fonctionneront encore mieux sur les lecteurs impressionnés par l’imprévisibilité de la folie.

Les personnages dérangés de l’auteur sont vraiment inquiétants… ©Vizmedia

Les personnages dérangés de l’auteur sont vraiment inquiétants…
©Vizmedia

Blackbird : Shiro, un promeneur, est retrouvé avec les deux jambes cassées dans la campagne. Trop faible et isolé dans un coin perdu, il est resté très longtemps dans cet état, paralysé, au point que ses os se sont partiellement ressoudés dans une mauvaise position. Il explique qu’il a pu survivre grâce à de la nourriture dans son sac qu’il a rationnée. Mais la réalité est tout autre. Mais aussi trop folle pour qu’il puisse la révéler. En réalité, une étrange femme en noir aux lèvres charnues est venue régulièrement le nourrir.

Mais cette femme n’est pas une femme ordinaire. C’est une sorte d’oiseau. Elle l’a nourri en lui mâchant de la viande et en lui faisant du bouche-à-bouche. Elle ne parlait pas, et disparaissait en dépliant de grandes ailes. Alors que Shiro est à l’hôpital pour subir de la chirurgie visant à lui remettre les jambes d’aplomb, il reçoit toujours la visite de cette femme corbeau qui veut encore le nourrir. Il n’en a plus besoin mais il ne sait pas comment se débarrasser d’elle, et à force il trouve ça répugnant. Il lui est reconnaissant de lui avoir sauvé la vie mais ne tient plus à être nourri comme un bébé oiseau.

La femme corbeau  ©Vizmedia

La femme corbeau
©Vizmedia

Au bout d’un moment, elle disparait. Bien des années plus tard, alors que Shiro était parti pour une autre randonnée dans les montagnes, son cadavre est retrouvé. Et selon les témoins…un oiseau géant le dévorait morceau par morceau. Quant au lecteur, il apprend que la nourriture qui lui a été donnée par la femme corbeau autrefois était…de la chair humaine. Et comme on est chez Junji Ito, il nous réserve une révélation finale encore plus tordue.

D’une certaine façon, on pourrait voir cette histoire comme une métaphore sur le karma et l’équilibre de la vie et de la mort. Une personne survit, une autre meurt. Concept intéressant auquel Ito ajoute sa patte avec cette créature étonnante qu’est la femme corbeau, à mi-chemin entre la beauté et le cauchemar. Car il est difficile de ne pas déceler une sorte de tension sexuelle entre cet homme qui se fait nourrir au moyen d’un gros baiser goulu d’une femme malgré tout assez svelte et jolie (malgré son affreuse bouche énorme.) Le malsain côtoie encore une fois une sorte de poésie macabre.

On n’en a pas terminé avec les personnages complètements dingues  ©Vizmedia

On n’en a pas terminé avec les personnages complètements dingues
©Vizmedia

Magami Nanakuse : Oh bon sang ! C’est de la folie hystérique cette histoire. Selon votre sensibilité, vous allez en rire…ou en faire des cauchemars. Magami Nanakuse est un auteur de roman très connu. Kaoru, une de ses fans, a un jour l’occasion de rencontrer son idole. Mais elle va sombrer dans un monde de folie. On vous a déjà dit que rencontrer vos auteurs préférés n’était pas forcément une bonne idée ? Que vous pourriez être déçu par leur vrai visage ? Eh bien là…Kaoru va être servie. Déjà, elle pensait que Magami était une femme…mais c’est un travesti alcoolique complètement taré, extrêmement impoli et cruel, et qui va finir par séquestrer Kaoru dans sa cave…remplie de cellules. Car voyez-vous…Magami cherche l’inspiration dans les tics des gens. Oui, les tics, les singularités du comportement, quelque chose de spécial.

Sa cave est remplie de gens qui ont perdu la boule et hochent la tête machinalement ou croassent comme des dingues. Et Magami explique à Kaoru qu’elle ne pourra partir que si elle lui montre quelque chose de spécial chez elle. En fait…j’ai du mal à expliquer ses motivations parce que Magami est complètement dingue, ridicule et en même temps assez flippant. Encore une fois, l’imprévisibilité de la folie, le malaise d’être face à des personnes qui ont une logique qui nous échappe. Magami est une célébrité membre d’une sorte de jet-set de personnalités tarées qui évoluent en cercle fermé (les invités que Magami accueille chez lui ont l’air tout aussi dingues).
Bref euh…c’est une vraie plongée dans un asile de fous. Cette histoire n’est pas la meilleure du recueil mais elle peut mettre mal à l’aise simplement avec la folie de certains comportements. Elle peut aussi être drôle…dans un sens.

Y’a pourtant pas de quoi rire, bande de psychopathes !  ©Vizmedia

Y’a pourtant pas de quoi rire, bande de psychopathes !
©Vizmedia

Whispering woman : Encore une histoire très efficace. Une des meilleures du recueil. Mayumi est une fille extrêmement angoissée, incapable de prendre des décisions et qui nécessite un soutien permanent pour l’accompagner dans toutes ses activités. Son père, un homme assez riche et important, engage Mitsu, une aide à domicile qui sera chargée d’accompagner Mayumi dans toutes ses décisions. C’est un boulot à plein temps extrêmement fatigant mais Mitsu semble prendre ça très à cœur. Un peu trop peut-être. Plus le temps passe et plus Mitsu s’abime la santé, semble constamment épuisée et ne ressemble plus qu’à un spectre qui chuchote derrière Mayumi. Son existence s’efface au profit de l’équilibre mental de sa patiente.

On apprendra que Mitsu, dans sa vie personnelle, est paradoxalement elle-même incapable de prendre de bonnes décisions et est esclave d’un homme abusif prénommé Aga qui se contrefout d’elle et l’exploite. Elle est davantage douée pour accompagner les autres que pour s’occuper d’elle-même (ce qui est un comportement très réaliste en fait, dont certaines personnes souffrent.) On a donc ici une histoire traitant d’une relation patient/aide-soignant dangereusement symbiotique au point que Mitsu, comme si elle était en quête d’un accomplissement, s’oublie complètement afin de se sentir utile et dépérit pour la santé d’une patiente qui devient de plus en plus confiante…mais ne peut pas non plus exister sans l’autre.

Mais comme on est chez Junji Ito et que c’est une histoire d’horreur, ça va plus loin. Car Mitsu finit par mourir, potentiellement à cause de son compagnon Aga qui l’aurait battue, et comme Mitsu était de toute façon dans un état de fatigue effrayant, son corps n’a pas supporté. Seulement voilà…Mayumi qui a l’air guérie semble encore entendre des murmures par-dessus son épaule…et peut-être n’agit-elle pas tant que ça de son propre chef. Mitsu a-t-elle trouvé par-delà la tombe un instrument pour accomplir, enfin, sa propre volonté ?
Au final un très bon volume pour un retour réussi du maître de l’horreur. Son dessin est toujours aussi efficace, avec des traits gras et une gestion de l’obscurité et des ombres qui confèrent à certains décors ou expression faciales quelque chose d’inquiétant.

D’autres histoires récentes de l’auteur ne sont pas encore publiées, mais au sommaire du recueil anglais SHIVER qui est une compilation d’anciennes et de nouvelles histoires, deux sont récentes et inédites. Il s’agit de « Greased » et « Marionnette Mansion », toutes deux très bonnes (ne mangez rien avant de lire « Greased » !) Il existe aussi un volume nommé DISSOLVING CLASSROOM mais dont le concept m’intéresse moins car il me semble dépourvu d’intérêt autre que son visuel (tout tourne autour de trucs qui fondent : les gens, les visages, à cause d’une famille maudite) Toujours est-il que je suis les parutions anglaises et françaises du monsieur avec intérêt et qu’on se retrouvera peut-être à nouveau pour d’autres articles.

 Symbiose dangereuse  ©Vizmedia

Symbiose dangereuse
©Vizmedia

—–
Junji Ito c’est à la fois Lovecraft, Poe et Stephen King réunis. On ne se lasse pas de vous en parler chez Bruce Lit.

La BO du jour

25 comments

  • Eddy Vanleffe  

    comme d’hab chez Itô , ça a l’air bien barré….J’adore!

  • Kaori  

    Bon sang, il a l’air bien gore, celui-là…

    L’histoire des esprits me fait penser à SIXIÈME SENS, avec ce twist de découvrir que certains vivants sont en fait des morts. C’est le seul qui pourrait me plaire.
    Les autres, trop gore pour moi ! Et celui sur la folie me met très mal à l’aise aussi…

    • Matt  

      Oh ce n’est pas gore, détrompe toi.
      A part celui avec le tête coupée éventuellement.
      C’est souvent tordu mais il n’y a pas une goutte de sang dans wooden spirit, futon, Magami ou Blackbird…
      Dans Whispering woman il doit y avoir une image avec du sang, mais rien de choquant, c’est plus les idées que le sang qui choque.
      Même dissection-chan, malgré le thème, très peu de gore.

      Non c’est tordu et flippant, malsain, mais au final pas si souvent sanglant avec Ito.
      Ah par contre les persos fous…ouais ça peut mettre mal à l’aise. Mais bon ce sont des mangas d’horreur alors forcément si de base c’est pas ton truc…^^

      Whispering woman est super, je pense qu’elle plairait à Bruce. ça doit être la meilleure du recueil avec Gentle goodbye et Blackbird.

      • Kaori  

        « Gore » n’est effectivement pas le terme approprié.
        Pas besoin de voir pour comprendre l’horreur. En fait, c’est presque pire de ne pas voir !
        Enfin bon, entre celle qui veut être disséquée et la femme-oiseau qui te fait devenir cannibale… Hum, je vais en perdre l’appétit !!

        • Matt  

          Ito montre pas mal de trucs visuellement mais souvent tu te dis plutôt « mais…putain mais c’est quoi ? c’est dégueu » ^^
          Il a des idées farfelues et parfois ridicules mais il arrive à les rendre malsaines.
          Le mec n’a pas de limites^^

          Mais ouais bon…si tu n’aimes pas l’horreur, si tu n’aimes pas les histoires qui finissent plus mal qu’elles ont commencé…euh…c’est pas pour toi. Elles sont TOUTES comme ça ses histoires^^

          @Eddy : j’ai été surpris du soupçon de poésie à la fin de Spirale. Bon…on parle de Ito alors c’est de la « poésie » avec des guillemets. Mais il y a une sorte de résignation calme et de beauté dans l’antre Lovecraftienne souterraine, et la mort des derniers persos est plutôt « jolie » Surtout par rapport à la folie qui précède.

  • Eddy Vanleffe  

    Je suis d’accord avec Mattie
    Ito, c’est bizarre, décalé, très très très perché, tordu, c’est le roi de l’inconfort et du malaise mais il n’est pas gore au sens spectaculaire du terme…
    même si parfois on est dans la monstruosité et dans le glauque mais pas dans le « gerbatoire »…

    par contre il n’y a pas le moindre espoir chez lui… je ne connais pas d’histoire qui finisse bien, c’est un peu conte de la crypte, le perso est puni tant pis pour lui…

    mon auteur préféré dans ce genre et d’ailleurs le seul que je lis… l’horreur en BD, je n’arrive pas à prendre ça au sérieux….
    C’est pour ça que pour moi Garth Ennis est un auteur de comédies, de guerre aussi mais pour le reste… boire des bières en enfer en faisant des doigts à Satan et en parlant comme un charretier… ben pour moi c’est c’est de la farce…
    c’est valables aussi pour plein d’auteurs…

    L’île des morts, même si j’adore le dessin de Guillaume Sorel est juste trop abscon et onirique pour me faire flipper…
    Le chant des Stryges, pareil etc…

  • Bruce lit  

    The red turtleneck : tiens, me semble t’il, c’est la première fois que l’acte sexuel occupe une place dans l’univers pervers de Ito non ? Tomié, dans ma mémoire ne faisait qu’allumer.
    C’est décidé : je vais me prendre ces Itos en Anglais et suivre tes recommandations, ne pas lire ça devient très frustrant me suis-je dit en mettant cet article en forme. Et bing, je reçois ton MP ce matin à laquelle je dis ouiiiiiii (@ autres lecteurs : ceci n’est pas ce que vous croyez….) dès que je serais payé fin de semaine prochaine.
    Une question, juste pour le plaisir de la discussion Matt :Ito, comme le pointe Eddy, c’est du malsain, du vrai. En quoi le lire te déprime moins que Ennis ?

    • Kaori  

      C’est un peu la question que j’allais poser…

      S’il n’y a aucun espoir dans ce genre de lectures, pourquoi tu aimes, Matt ?

    • Matt  

      Ito c’est du malsain sans espoir mais ce n’est pas réaliste.
      Ennis ne me fait pas flipper, ni ne déclenche de malaise en moi, mais en mettant en scène d’horrible tas de merde analphabètes stupides qui violent, jurent, assassinent, et se marrent autour d’une bière ensuite sur ce qu’ils ont fait…ça me déprime dans le sens où Ennis décrit des comportement qui existent, met en valeur la médiocrité humaine et un système de société foireux qui ne marche pas et laisse toujours les petites gens dans la merde. Il me déprime parce qu’il est réaliste et/ou exagère des choses réalistes déprimantes.
      Et il semble vouloir en rire aussi…ce qui ne marche pas sur moi, ça m’attriste.

      Ito est impitoyable mais raconte des histoires fantastiques.
      Et parfois, comme dans « gentle goodbye », « les épouvantails » (dans un article à venir) ou « l’accord », il parle « joliment » du deuil.
      Remina est peut être plus déprimant car malgré la toile de fond de SF/horreur, les gens sont les vraies ordures.

      • Eddy Vanleffe  

        assez d’accord avec le Mattie…
        on est dans le « fantasma »…

    • Matt  

      @Kaori : si j’aime c’est aussi pour la folie visuelle et les concepts dingues^^ Ce n’est pas une lecture naturaliste et donc même quand il parle de la perversité de certaines personnes, il le fait avec une toile de fond à base de créature étrange, de fantômes et autres délires certes glauques mais qui contiennent aussi leur dose de divertissement et de créativité.
      Une BD ultra réaliste hyper pessimiste et triste qui finit très mal…ça risque de ne rien me laisser d’autre qu’un sentiment qu’on vit dans un monde de merde. Si on y ajoute plein d’éléments fantastiques et que ce triste constat se fait par dessus une bonne dose de divertissement irréaliste et imaginatif, c’est pas pareil^^ (mais il faut aimer le genre « horreur » aussi)

  • Présence  

    Je suis très impressionné par ce commentaire, parce que j’ai éprouvé l’impression de retrouver les sensations de lecture dont j’ai le souvenir d’un des 2 recueils que j’ai dû lire de Junji Ito. Tu retranscris toutes les émotions que ce type de lecture suscite en moi : l’inquiétude générée par des comportements déviants, l’angoisse irrationnelle provoquée par la folie imprévisible, la peur de la décrépitude corporelle et l’impuissance qui l’accompagne, la vampirisation de l’énergie vitale d’un individu par un autre…

    Sur le site de Previews World, la sortie de Smashed est toujours annoncée pour le 08 mai, sur la page remise à jour aujourd’hui. Étrange…

    https://www.previewsworld.com/Catalog/FEB192164

    Sur le site de Viz Media, il est même indiqué que le recueil est sorti le 16 avril.

    https://www.viz.com/read/manga/smashed-junji-ito-story-collection-volume-1/product/5870

    • Matt  

      Ah curieux en effet. Sur amazon ils disent 2020…
      Affaire à suivre.

      Et tu n’aimais pas ces sensations, me trompe-je ?^^ Je crois que tu n’avais pas forcément accroché aux délires de l’auteur.
      Ah j’aurais du rajouter vampirisme dans le titre de l’article^^ Les thèmes sont en effet variés (et mignons…)
      Whispering woman est vraiment marquante car il y a un côté bien réaliste au final d’une personne incapable de s’occuper d’elle-même qui se ruine la santé et se fait vampiriser son énergie (mais de manière consentie)
      La fin est cruelle aussi parce que non seulement la nana meurt, mais elle semble à présent pouvoir se servir de sa patiente comme marionnette par delà la mort. Ce qui est également cruel pour la patiente qui semble encore dépendre et obéir à une morte qui a certes enfin décidé de se rebeller, mais au détriment de quelqu’un d’autre. En bref une étude d’une relation symbiotique très dysfonctionnelle et glauque.

  • Jyrille  

    Comme toujours, merci pour le tour d’horizon, Mattie ! Tout cela m’a l’air intéressant, mais bon, Ito est introuvable… et je n’ai pas spécialement envie d’investir dans la version anglaise pour le moment. C’est intéressant ce que tu dis sur la dernière histoire, les gens qui donnent tout d’eux, maladivement. C’est assez commun je pense, beaucoup plus que ce que l’on pense, et un vrai problème.

    La BO : je ne connais pas vraiment, mais pour le coup, pour moi, c’est un gros bof. C’est pas du tout ma came.

  • Bruce lit  

    Matt !!!
    Si ce n ‘est pas déjà fait tu dois absolument lire OROCHI d’Umezu ! Je produis trop d’articles en ce moment et là j’ai pas la force d’embrayer sur le WE mais j’ai lu le 1er volume et tu vas adorer. C’est du Edgard Poe Vs Junji Ito ! Grosse, grosse claque !

    • Matt  

      Ok je note, merci pour l’info.
      Tu comptes prendre tous les volumes du coup ? Ou tu y as accès dans une médiatheque ?
      Je vois que ce sont des histoires courtes donc ça peut être sympa de se faire des retours, voir s’ils valent tous le coup. A moins qu’il y ait un fil rouge ? Parce que 18€ le tome quand même.

      • Bruce lit  

        12 € chez Aapoum.
        Il s’agit d’histoires indépendantes sans continuité. Tu as deux histoires par volumes. J’ai adoré. Le tome 1 tu peux y aller les yeux fermés.

      • Matt  

        J’ai pu lire ce premier tome de OROCHI.
        2 histoires très chouettes en effet, bien glauques, surtout la seconde qui fait effectivement penser à du Poe ou aux EC comics (parfois inspirés de Poe aussi de toutes façons)
        C’est moderne dans la forme, malgré l’âge. Les mangakas ont toujours utilisé des scènes muettes sans les tonnes de texte que les américains ajoutent toujours (encore aujourd’hui avec des voix off, etc.) Un art qui se perd le silence, même dans les films d’horreur où la musique est certes très importante mais souvent trop présente, ne laissant jamais place à un silence gênant et étrange ou juste à des bruits ambiants (le vent, des trucs qui craquent)

    • Eddy Vanleffe  

      YES!!!
      Tout Umezu est une grosse claque! du gothique à la japonaise…

  • doop  

    Vendu. Je vais aller regarder déjà sur Netflix pour me faire une idée.
    Bruce Lit me fait vider petit à petit mon compte en banque 😀 !

    • Eddy Vanleffe  

      La série Netflix a le mérite de proposer un matériel riche, mais je préviens tout de même que la réalisation a tenté de lisser avec un graphisme parfois bateau, la patte très distinctive de l’auteur.

      Mais c’est quand même bien que cela existe.
      Pour Junji Ito, je ne peux que conseiller de s’en prendre un au hasard et de plonger dans la folie.

  • Nikolavitch  

    Bon, j’ai visité l’expo Junji Ito à Angoulème (dur d’accéder, tellement il y avait de monde) et c’était une dinguerie !!!!

  • Fletcher Arrowsmith  

    Pas pu venir à Angoulême cette année (indisponible à cause du taf et boycott également de ma part). Mais j’aurais tant aimé prolonger ma découverte de Junji Ito(merci Eddy) par cette exposition.

  • Bruce lit  

    Enfin disponible en VF aujourd’hui chez Mangestu.

Leave a reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *