FANTÔMES D’AMOUR

Focus : Moto Hagio

Un article de LUDOVIC SANCHES

Cet article se base sur l’ANTHOLOGIE MOTO HAGIO, une collection de neuf récits publiés sous la forme d’un coffret de deux volumes en 2013 par Glénat. Indisponibles depuis un certain temps, ces deux tomes ont été réédités séparément en cette année 2024 tandis que l’œuvre de Moto Hagio est célébrée lors du 51éme Festival International de la Bande Dessinée par une masterclass et une exposition au Musée d’Angoulême.

Si d’autres récits de Moto Hagio ont été traduits depuis (comme LE CLAN DES POE aux éditions Akata), cette anthologie constitue une porte d’entrée idéale dans l’œuvre de la mangaka. Les deux volumes qui la constituent se distinguent par une approche thématique, le premier intitulé DE LA RÊVERIE privilégie des histoires dans lesquelles dominent l’imaginaire et le fantastique tandis que le second DE L’HUMAIN est centré sur l’exploration des sentiments affectifs. Pour les besoins de cet article, je passerai en revue chacun des récits en respectant non l’ordre du sommaire de ces recueils mais plutôt celui de la chronologie de leur publication originale au Japon.

© Glénat

PAUVRE MAMAN (mai 1971)

Moto Hagio commence à publier ses premiers récits à l’âge de 20 ans dans le magazine mensuel Nakayoshi en 1969. PAUVRE MAMAN est donc une de ses premières œuvres et on y décèle déjà l’audace dont pouvait faire preuve la toute jeune mangaka, encouragée par une rédaction qui les incitait à oser rompre avec une ligne éditoriale jusque là très stricte et des histoires très sages destinées à un jeune lectorat féminin.

Preuve de cette audace: PAUVRE MAMAN est publié dans un numéro spécial de Bessatsu Shôjo Comic sur le thème de la fête des mères, ce qui laisse rêveur face à la noirceur d’un tel récit : en effet, son jeune héros assiste à l’enterrement de sa mère des les premières pages. Peu de temps après, un jeune homme nommé Martin vient rendre visite à la famille en deuil, croyant en fait retrouver la mère qu’il a connue pendant sa jeunesse encore vivante. Il apprend une fois arrivé sur les lieux qu’elle est décédée quelques jours plus tôt. On trouve ici le premier motif central et récurent de son œuvre: Martin espérait en fait revoir son amour de jeunesse mais celle-ci a désormais disparu, ce qui le plonge dans une tristesse et une intense mélancolie, l’être aimé devenant un fantôme revenant hanter les lieux et les souvenirs de l’amoureux inconsolable. Mais très vite, il rencontre le pauvre garçon en deuil et les circonstances troubles et même tragiques de la mort de la mère vont lui être révélées. Le jeune enfant incarnant une image de l’innocence de plus en plus ambigüe et inquiétante, qui semble toute droit sortie d’une nouvelle d’Henry James. Cette figure de l’innocence détruite et/ou pervertie, cachant des abimes de noirceur derrière son visage angélique, reviendra aussi dans d’autres récits de la mangaka.

© Glénat

LE PENSIONNAT DE NOVEMBRE (novembre 1971)

C’est un récit important dans l’œuvre de Moto Hagio car il s’agit en quelque sorte du brouillon de ce qui deviendra un des ses mangas les plus célèbres, LE COEUR DE THOMAS (traduit chez KAZE MANGA en 2012, aujourd’hui épuisé) qui sera publié au cours de l’année 1974 et qui est aujourd’hui considéré comme un des précurseur du genre shonen-ai ou boy’s love, ces shojos mettant en scène des histoires d’amour entre garçons. Erik, un jeune adolescent intègre un lycée pour garçon visiblement situé en Allemagne. Trés vite, il y rencontre un autre élève dont tout le monde dit qu’il lui ressemble beaucoup, Thomas, l’idole de l’établissement et son ami Oscar, arrogant et manipulateur, qui devinent vite ses rivaux. Mais Thomas comme Erik cachent tous deux des blessures liées à leur histoire familiale et quand elles seront révélées, il sera trop tard et l’issue sera tragique. A l’image de l’enfant tourmenté de PAUVRE MAMAN, les héros du PENSIONNAT DE NOVEMBRE semblent totalement dénués de l’insouciance que devrait leur conférer leur jeune âge, déjà plongés dans les tourments des sentiments qui seront poussés au paroxysme dans LE COEUR DE THOMAS, le héros éponyme se suicidant alors des les premières pages du livre. LE PENSIONNAT DE NOVEMBRE introduit aussi le motif du double, le sosie, le jumeau agissant comme un révélateur des passions et déclenchant le drame. On le sait, Moto Hagio a cité ici comme influence le film de Jean Delannoy, LES AMITIÉS PARTICULIÈRES (1964), d’après le roman de Roger Peyrefitte, il est intéressant d’ailleurs de voir à quel point les auteurs de manga de cette génération ont pu être directement ou indirectement inspiré par le cinéma français (Clouzot, Melville, la Nouvelle Vague…). On y retrouve aussi un certain culte de la beauté avec ces héros androgynes aux cheveux blonds et aux mèches bouclées d’une splendeur éthérée, quasi-surnaturelle. Les intrigues d’école et de pensionnat reviendront aussi dans LE CLAN DES POE, les deux héros, Edgar et Allan intégrant un établissement dans l’Allemagne de l’Ouest des années 50. 

LE PETIT FLUTISTE DE LA FORET BLANCHE (novembre 1971)

Une histoire à priori très simple et classique d’amitié imaginaire mais qui débouche encore une fois sur une révélation dramatique, le tout raconté sous la forme d’un souvenir d’enfance, donnant à ce petit conte une forte tonalité mélancolique: Maria, une petite fille, est attirée dans la forêt par le son d’une flute et découvre un petit garçon avec qui elle va nouer une brève complicité. Le conte fantastique prend place aux abords d’un château bordé d’une foret merveilleuse, lieu magique propice aux événements les plus mystérieux selon une conception romantique et panthéiste qu’on retrouvait dans la littérature du 18eme et du 19eme siècle. Même si graphiquement les compositions des planches des shojo manga des années 70 évoquent fortement les tendances décoratives de l’Art Nouveau, on peut aussi penser à des inspirations picturales issues du romantisme allemand, beaucoup de ces histoires prenant place dans un cadre de vieille Europe plus ou moins idéalisée, les paysages de forets et de montagne rappelant les toiles de Caspar David Friedrich et les enfants aux visages de poupon semblent sortir d’une peinture de Philipp Otto Runge. Chez Moto Hagio, les peintures, les portraits d’enfants précisément, semblent un moyen de faire ressurgir les morts d’outre-tombe, on retrouvera cette idée dans un des épisodes du CLAN DES POE.

© Glénat

NOUS SOMMES ONZE (septembre/novembre 1975)

La shojo manga moderne des années 70 aura pour particularité de faire sortir le genre de ses thématiques habituelles. Moto Hagio, dont les lectures de jeunesse avait été marquées par la découverte des œuvres de Ray Bradbury, d’Isaac Asimov ou d’Arthur C. Clarke, s’aventure pour la première fois dans la science fiction avec une courte histoire publiée en 1972 mais c’est avec NOUS SOMMES ONZE que Hagio frappe un grand coup et cette longue nouvelle aura un succès retentissant. Dans un futur lointain, un groupe de jeunes gens issus de différentes planètes intègre une école de pilotes spatiaux et doivent passer un examen qui consiste à survivre dans une station orbitale. Quand ils pénètrent dans l’engin, ils devraient former un groupe de dix mais un onzième participant à semble-t-il rejoint le groupe. Tres vite, les difficultés se multiplient et le mystère sur l’identité de l’intrus s’épaissit mais les jeunes élèves devront malgré tout s’allier pour pouvoir survivre jusqu’au bout. A le relire aujourd’hui, NOUS SOMMES ONZE est une indiscutable réussite: l’intrigue sous forme de huis clos et son suspense entretenu par de nombreux rebondissements fonctionnent toujours aussi bien selon une efficacité feuilletonnesque qui pose ici Hagio en digne héritière d’un Tezuka qu’elle a lu et admiré pendant sa jeunesse. Le cadre de l’école et le motif du huis clos permet dans un contexte de science fiction de retrouver l’atmosphère des histoires de pensionnat comme dans LE COEUR DE THOMAS, ces jeunes gens forcés de cohabiter laissant s’exprimer leurs sentiments, permettant d’explorer toutes leurs ambivalences et leurs rivalités de classe ou entre ethnies différentes. Dans NOUS SOMMES ONZE, le petit groupe inclut notamment le personnage de Flore qui s’énerve immédiatement des qu’on lui fait remarquer qu’elle est la seule fille de ce groupe de garçon. Tres vite, nous comprendrons que Flore vient d’une planète où l’on nait avec les attributs des deux sexes et c’est une fois passé à l’âge adulte que l’on vous attribue un genre. Littéralement sur la planète de Flore, on ne nait ni femme ni homme, on le devient. Flore revendique alors la liberté de choisir son genre et Hagio, de fait, de traiter des contraintes et des injonctions qui enferment les femmes dans un carcan social comme un écho aux préoccupations féministes de son époque (après le premier mouvement féministe qui permet aux Japonaises d’obtenir le droit de vote en 1947 émerge une seconde vague du féminisme dans les années 70). Ici le fantastique et la science fiction permettent de transgresser ces limites et autorise une forme d’utopie émancipatrice. Dans des œuvres ultérieures et plus personnelles, la question de l’identité féminine sera abordée de manière plus grave et complexe. NOUS SOMMES ONZE apparait comme le récit le plus lumineux et le plus optimiste de cette anthologie.

EST & OUEST, UN LOINTAIN HORIZON (décembre 1976/février 1977)

Suite au succès de la publication de NOUS SOMMES ONZE, Hagio enchaine sur une suite qui reprend l’histoire exactement là où elle s’était arrêtée dans le récit original. On y retrouve les mêmes personnages mais le récit diffère assez vite: au huis clos de NOUS SOMMES ONZE succède un récit ample et épique, la collaboration et la cohabitation entre différentes planètes qui faisait le socle de l’utopie mise en place dans cet univers se retrouve mis en danger par la menace d’un conflit imminent visant à faire tomber le jeune roi Baseska, devenu l’ami de Tada et Flore, les deux héros principaux. Sur fond de complot et d’intrigues politiques, le récit riche en péripéties prend peu à peu une tonalité plus dramatique que seules viennent tempérer les intermèdes comiques sur le couple de héros dont la romance est traitée de manière légère et joyeuse. Le roi Baseska trahi par ses proches, la jeune princesse Tutu assoiffée de vengeance semblent tous deux crouler sous le poids d’un destin trop grand pour eux. Même le traitre, le ministre Bapa, prend une dimension tragique, quand suite à sa défaite, il préfère se donner la mort. Hagio avait dans un premier temps l’intention de donner d’autres suites à NOUS SOMMES ONZE mais finit par y renoncer.

© Glénat

UN RÊVE IVRE (aout 1980)

Ce qui semble au début être une courte romance teintée de science fiction devient une nouvelle variation sur le thème du double, du recommencement et de la destinée. Deux histoires s’entremêlent: dans le futur, deux pilotes d’un vaisseau spatial finissent par tomber amoureux, dans le passé, une princesse s’amourache d’un bel esclave. Hagio ici semble revendiquer son amour pour l’œuvre de Jean Cocteau, celui de L’ÉTERNEL RETOUR (réalise par Jean Delannoy en 1943) et de ORPHÉE (1950) sur le thème de la persistance des mythes à travers les époques, les amours tragiques se répétant encore et toujours. Les personnages deviennent les jouets d’un destin qui les dépassent et que leurs sentiments amoureux précipitent malgré eux dans une tragédie inéluctable. En même temps, leur amour, leurs rêves les connectent à un monde supérieur, spirituel, quasi-divin qui semble annihiler toutes les frontières entre les genres et les époques, au delà des limites du corps et du temps.

MON CÔTÉ ANGE (janvier 1984)

Les thèmes du double, de la gémellité et des liens familiaux sont traités de manière particulièrement troublantes dans ce récit fantastique dans lequel deux sœurs siamoises s’opposent, la beauté angélique de l’une vampirisant l’autre au sens littéral, faisant d’elle une créature monstrueuse au visage cadavérique. Quand un médecin propose de séparer les deux jeunes filles, la sœur monstrueuse croit enfin trouver la liberté et se débarrasser de sa jumelle qu’elle ne peux s’empêcher de haïr. Concise et reposant sur une intrigue simple et avare en rebondissement, cette histoire se clôt sur un final glaçant, ce qui en fait un des récits les plus marquants de ces recueil. La beauté en tant qu’elle n’est qu’apparence trompeuse et vue comme la face visible d’une forme de monstruosité cachée était un des sujets des mangas d’horreur, le genre horrifique étant, rappelons le, tres populaire dans les revues pour jeunes filles et ces histoires avait souvent pour thèmes les relations amoureuses ou familiales. Mais si un Kazuo Umezu par exemple dans BAPTISM (publié des 1974 dans Shojo Comic) traitait le thème des relations mère/fille avec une débauche de scènes sanglantes et grand-guignolesques, Hagio avec une grande simplicité, privilégie la psychologie des personnages et son histoire n’en est que plus dérangeante.

© Glénat

LE COQUETIER (mars 1984)

Là ou le shojo manga des années 60/70 avait élu comme cadre privilégié de beaucoup de ses histoires une Europe fantasmée et idéalisée, parfait décor pour les récits romanesques et les élans romantiques de ses personnages, LE COQUETIER prend place dans un Paris de l’Occupation reconstitué avec un certain réalisme. L’intrigue est complexe: on y suit Louise, une jeune danseuse allemande travaillant dans un cabaret parisien et se prostituant occasionnellement. Elle va faire la rencontre accidentelle d’un jeune résistant qui va essayer de la protéger et tomber amoureux d’elle, ce qui va, on s’en doute, précipiter leur perte. Mais un jour, Louise rencontre un jeune garçon, Raoul, vagabond et orphelin, qu’elle recueille et finit par héberger chez elle, après avoir compris que celui-ci survit lui aussi comme il peut, Hagio évoquant ici directement la prostitution infantile et la pédophilie. Dans cette atmosphère étouffante et délétère, la figure du jeune garçon, une nouvelle fois, cache sous les apparences de sa beauté fragile une âme sombre et meurtrie, liée à une histoire familiale tragique (comme l’enfant de PAUVRE MAMAN) et que le contexte de la guerre précipite vers le crime et la mort. Le récit oppose le Mal individuel, celui qui fait sombrer Raoul tel un ange déchu, à celui de la barbarie de la guerre et du nazisme qui corrompt et détruit tout. Bien que conservant beaucoup des aspects du style de Moto Hagio, LE COQUETIER semble se rapprocher des histoires réalistes typique du gekiga des années 60/70 et son climat trouble et sa noirceur désespérée rappelle, toutes proportions gardées, certain mangas récents de Suehiro Maruo, a la différence prés qu’Hagio reste extrêmement pudique et allusive sur les aspects les plus sordides de son récit.

© Glénat

LA PRINCESSE IGUANE (mai 1992)

Plus que jamais ici, le recours au fantastique et à l’imagerie du conte de fées (la princesse iguane demande à une sorcière de la transformer en un être humain pour pouvoir épouser l’homme qu’elle aime) est trompeur: il s’agit sans doute du récit le plus personnel et émouvant de cette anthologie et qui surprend d’autant plus que son point de départ un peu naïf (une mère accouche de son premier enfant et sa petite fille ressemble à une affreuse bestiole, elle a le visage d’un iguane) dépasse peu à peu la métaphore attendue sur la relation mère/fille et la dépression port-partum pour livrer un récit condensant sur peu de pages toutes les thématiques de son auteur (le double, la famille, la sororité, la maternité, la condition féminine, la perte, le deuil…).

Suprême délicatesse: le ton de l’histoire et le graphisme de Moto Hagio se font d’autant plus léger et en apparence fantaisiste alors que le fond est triste et la dimension autobiographique évidente. Hagio exorcise ici les rapports conflictuels qu’elle a eu avec sa propre mère, le sentiments d’être rejetée, incomprise et que ses sœurs lui étaient préférées, dans une famille stricte avec un père autoritaire mais souvent absent. Ce n’est pas pour rien que la famille est toujours toxique et monstrueuse dans les mangas de Hagio, dans LE CLAN DES POE, la descendance était celle d’une caste de vampires et faire partir de la famille, c’est littéralement en mourir. Le recours au merveilleux n’est pas ici qu’un simple procédé: il semble symboliser l’œuvre de Moto Hagio dans son ensemble, l’imaginaire, la fiction comme moyen d’exorciser ses démons et de guérir ses souffrances.

Les récentes et nouvelles publications ainsi que les diverses célébrations autour de l’œuvre et la personnalité de Moto Hagio ouvrent peut-être la voie à une nouvelle visibilité du shojo manga de cette époque car il faut rappeler que parmi les mangakas de cette génération, peu d’entre elles ont vues leurs œuvres traduites en français, même la plus connue, Riyoko Ikeda, à part LA ROSE DE VERSAILLES et TRÈS CHER FRÈRE, ses autres mangas restent inédits chez nous, même chose pour Keiko Takemiya qui ne fut publiée en France pour la première fois qu’en 2021. On ne peut que se réjouir que cette lacune soit enfin comblée.


33 comments

  • Eddy Vanleffe  

    Bon je n’irais pas par 4 chemins
    Merci et bravo
    Moto Hagio, j’en parle autour de moi depuis des années. Je l’ai découverte dans un dossier de ATOM qui est rapidement devenu une référence pour l’information sérieuse sur les Manga en France.
    J’ai rapidement été fasciné par sa carrière et dès que j’ai pu (c’est à dire depuis 6 mois) tout ce que je peux lire d’elle et ça écrase la plupart de mes lectures depuis un certains nombre d’années.
    Elle fait parti des auteurs qui ont fasciné ce que sont les shojos manga dans ce qu’ils ont de plus ambitieux, esthétiques et poétiques.
    Elle pave le voie des CLAMP (oser la fantasy, la SF, le fantastique) de kaori Yuki et même les autrices de Joseï mais je ne me risquerais pas de trop citer de noms puisque c’est un pan que ne lis pas trop (je tombe toujours sur des trucs d’un sadisme inouï (genre Kiriko Nananan).
    Bien sûr son apport est aussi important que celui de Ryoko Ikeda, une de mes idoles.

    • Ludovic  

      Merci beaucoup Eddy ! 100% d’accord avec ce que tu dis, tu te l’imagines !

      J’adore les mangas de Kiriko Nananan, figures toi, mais en matière de mangas féminins, c’était la découverte de Kyoko Okazaki qui avait été une énorme claque pour moi ! Si je dois faire un jour un article sur un autre mangaka, ce serait sur elle, clairement !

      • Eddy Vanleffe  

        Oui l’autrice de Helter Skelter, oui bien barrée celle là aussi…
        Je suis moins client même je sais qu’elle est très importante aussi.

        • zen arcade  

          Pour info et pour ceux qui l’auraient manqué lors de sa parution chez Casterman, Helter skelter vient d’être réédité par les éditions Atelier Akatombo, dont on peut saluer l’initiative de rendre à nouveau disponible une oeuvre essentielle d’une mangaka qui ne le fût pas moins.

  • zen arcade  

    Les deux volumes sont dans ma pile à lire.
    Je reviendrai sur l’article après les avoir lus mais d’emblée je dis bravo à cette mise en avant ici d’une des autrices les plus importantes de l’histoire du manga.
    La BO : je ne suis pas un inconditionnel de Kate Bush mais j’aime beaucoup ce morceau. Et puis Bush + Brontë + Hagio, ça va très bien ensemble.

    • Ludovic  

      J’espère que cette lecture te plaira autant qu’à moi !

      et oui le choix de Kate Bush ma paraissait plus qu’évident !

  • Nikolavitch  

    Notons que les rapports très compliqué de l’autrice avec sa mère (qui n’a jamais accepté ni tenté de comprendre sa profession) sont au coeur de certains récits, comme Pauvre Maman et La Princesse Iguane.

    Et l’expo à Angoulème était formidable. De très, très belles planches, permettant de mettre le nez dans la technique.

    • Fletcher Arrowsmith  

      L’expo à Angoulême était en effet juste exceptionnelle tant qu’à la fin j’étais déçu de voir que son oeuvre a été peu traduite en VF. Son NOUS SOMMES ONZE ! m’intrigue au plus haut point.

      Une superbe découverte (mise en page, finesse du trait, choix des compositions…).

      • Ludovic  

        Fletcher, cette lacune éditoriale sur l’œuvre de Moto Hagio est en passe d’être quand même réparée : BARBARA IKAI une œuvre plus récente d’Hagio vient d’être publiée chez Akata (avec aussi un autre manga de chat plus destiné aux enfants), LA CŒUR DE THOMAS sera réédité en 2025, de quoi faire découvrir cette autrice à de nouveaux lecteurs enfin !

        • Eddy Vanleffe  

          Le Coeur de Thomas YES!!!!

          • zen arcade  

            Akata annonce également pour 2025 « 10 billion days and 100 billion nights’, une oeuvre de Moto Hagio qui date de 1977 et qui est le seul shônen de sa longue carrière.

      • Eddy Vanleffe  

        La pénétration du manga en France atteignant l’âge de raison, (depuis 1992-et je parle du format papier en partant de l’arrivée d’Akira puisque « le Cri qui tue » reste quand même une expérience sans lendemain), on est passé par plusieurs phases, la Hype première avec une actu brulante, une sorte de phénomène de tassement, puis une invasion des librairie intensives où un titre chassait l’autre sans que l’on ait du recul afin de coller avec les succès japonais.
        Depuis quelques années (2022?) on passe une vision plus globale avec une revalorisation patrimoniale.
        Delcourt, Le lézard Noir, Isan, Vega, Naban, Mangetsu ont entamé une vision plus « auteur » en entrainant les éditeurs plus installés comme Glénat ou Panini pour proposer des titres souvent plus « deluxe » plus « classique »
        La collection HERITAGES chez AKATA a été la première attaque en territoire français de Moto Hagio qui a débloqué la réédition des Anthologies de Glénât exactement comme le coup de projo sur RUMIKO TAKAHASHI il y a quelques années a permis la réédition entière de la MERMAID SAGA .
        Ikegami est redécouvert en ce moment aussi.
        etc…
        il n’y a plus qu’à attendre une réédition des plus grands shojos en belles version (pas des photocopies dégueulasses quoi!)
        aura-t-on un jour Candy Candy?

        • Ludovic  

          De toute façon, il y a sans doute encore des pans inexplorés de l’histoire du manga, le shojo classique souffrant d’une double peine, le peu de considération envers ce genre face à l’hégémonie du shonen et son statut de manga de « patrimoine » (terme épouvantable, c’est comme quand on me parle cinéma de patrimoine) ce qui le met dans une niche encore plus invisible pour le lectorat…
          C’est comme le gekiga des années 60/70 dont beaucoup d’auteurs m’ont marqués en tant que lecteur et qu’on a découvert grâce au travail de certains éditeurs, souvent des indés qui font preuve d’une vraie audace !

          • Eddy Vanleffe  

            J’ai une vraie tendresse pour Hiroshi Hirata et son trait à l’encre de chine.

            je trouve bizarre cette « hégémonie » du shonen sans doute du aux succès de mastodonte des Nekketsu depuis Naruto qui sont des rouleaux compresseur puisque chaque titre sur la fin trouve un successeur aussi écrasant que le précédent.
            Naruto/Bleach=>one Piece/Fairy Tail=>My Hero Academia/Seven Deadly sins=>Demon Slayer/Tokyo Revengers/Jujutsu Kaisen.
            Ce phénomène ressemble à l’arbre qui cache la forêt mais pourtant cela ne veut pas dire que des mangas tirent très bien leur épingle du jeu dans une sorte d’entre deux.
            C’est souvent ceux là qui m’intéressent d’ailleurs.
            Le manga papier en France, c’est le milieu des années 90. c’est un peu normal que la « greffe » des titres plus anciens soient plus difficiles d’accès.
            Il a fallu d’abord user les titres connus par leurs itération animées comme Albator ou Goldorak ou Lady Oscar etc..puis les Tezuka
            Les shojos ne sont pas les seuls à ne pas percer Ashita no Joe a mis énormément de temps à trouver son chemin. Cyborg 009 a été stoppé.
            Glénat a publié une collection BUNKO (moche) qui a tenté et planté et refroidis les éditeurs pendant dix ans facile.
            Mais désormais le lecteur de manga français possède son propre historique, sa propre mémoire et donc sa prorpe nostalgie.
            Ce sont les Ranma 1/2, Dragon Ball,, Yuyu Hakusho, Beck, City Hunter qui ont les honneurs des beaux formats et dans ce cortège le manga classique a trouvé une niche et parmi ces derniers; le shojo qui nus intéresse ici.

          • zen arcade  

            « C’est comme le gekiga des années 60/70 dont beaucoup d’auteurs m’ont marqués en tant que lecteur et qu’on a découvert grâce au travail de certains éditeurs, souvent des indés qui font preuve d’une vraie audace ! »

            On ne pourra jamais assez remercier l’excellence du travail des éditions Cornelius en la matière.
            IMHO et le Lézard noir (même si leur récente évolution éditoriale les écarte de plus en plus du manga de patrimoine) font également du très bon boulot et je m’en voudrais de passer sous silence les quelques albums japonais publiés par Atrabile.
            Parmi les grands anciens, je me rappelle que c’est Vertige Graphic qui m’a permis de découvrir Yoshihiro Tatsumi et que c’est Ego comme x qui a le premier publié en français l’immense Yoshiharu Tsuge.

    • Ludovic  

      Je n’ai pas eu la chance de voir cette exposition malheureusement, juste des comptes rendus et des photos par ci par là mais oui ça avait l’air assez magnifique !

  • Fletcher Arrowsmith  

    Bonjour Ludovic.

    Merci pour cette rétrospective et surtout m’apprendre la publication de ces deux tomes que je vais rapidement me procurer. Coup de coeur pour cette artiste essentielle à Angoulême (comme mon fils d’ailleurs). Nous étions désespéré de ne pas pouvoir lire NOUS SOMMES ONZE !

    Sur la gémellité, je l’associe à ses personnages androgynes, que l’on retrouve beaucoup dans les mangas. C’était criant dans les planches proposées à Angoulême.

    Superbe article en tout cas, que je mets en favori pour y revenir plus tard, après lecture.

    La BO : je connais peu Kate Bush voir pas du tout. Cela passe bien avec ta prose.

  • Fletcher Arrowsmith  

    Ah et si je peux faire un léger aparté, en ce moment sur grand écran, l’adaptation d’un des meilleurs mangas actuels : BLUE GIANT.

  • Jyrille  

    Merci beaucoup Ludovic pour la présentation, car je ne connais pas du tout cette autrice. Ni même toute la production japonaise de ces années-là. Finalement, ces histoires de jeunes enfants beaux aux cheveux bouclés, dans une ambiance mélancolique, c’est exactement ce qu’il se passait dans CANDY, le dessin animé de mon enfance. C’était donc un peu la mode de ces shojo si je comprends bien.

    J’ai récemment écouté le podcast sur les Shojo de l’émission Blockbusters (France Inter) et j’avoue ne pas avoir retenu grand chose, c’était un peu ardu à suivre. Je suis presque certain que Hagio y était cité. En tout cas tu donnes envie de découvrir, surtout en sachant que Clouzot et Melville sont pour moi bien au-dessus des autres réalisateurs français 😀 Et que les multiples références au romantisme, à Poe et sans doute Baudelaire ne sont pas pour me déplaire. Je verrais donc possiblement, même si je m’en tiens à mon régime strict d’achats pour le moment ou presque.

    La BO : top. Suis fan. C’est a priori la bonne ambiance et c’est effectivement contemporain, 1978.

    • Eddy Vanleffe  

      Merci pour la lien Jyrille.
      j’ai écouté les premières minutes et je suis totalement d’accord avec l’animateur à un petit détail près…on devine un prisme politique dès qu’il ouvre la bouche et c’est effarant. aujourd’hui TOUT doit être politisé…
      Je vais écouter ça en entier parce que ça promet de synthétiser tout ce qu’il y a à dire sur le sujet quand même…
      parler de CLAMP dès la première minute et de leur rayonnement à l’époque de leurs sorties ( Je peux vous dire que la fin de X a été attendue…très très attendu… jusqu’à ce qu’on jette l’éponge…
      Je me demande si en laissant ce manga inachevé, elles n’ont pas sapé un peu de leur aura…

    • Ludovic  

      Merci Jyrille !

      En tant de cinéphile, j’essaie évidemment de faire des ponts avec le cinéma dans mon article (difficile de m’en empêcher) mais j’ai toujours été amusé par le fait que fréquemment dans des entretiens, les mangakas fassent référence au cinéma français, même parmi les plus modernes, Naoki Urasawa par exemple citant Clouzot et LE SALAIRE DE LA PEUR parmi les films qui l’ont marqué…

      • Jyrille  

        De rien les gars, j’en apprends tellement grâce à vous. Dans le genre « patrimoine », pour le moment, je n’explore que Junji Ito, mais j’ai aussi Lone Wolf and Cub qui m’attend. Ca ne m’étonne pas pour Urasawa, je dois lire ses Monster et 20th Century Boys… je pars de loin quoi. Je viens de terminer BERSERK. J’en suis profondément triste. Je me demande si je ne vais pas faire un article. Mais pas tout de suite, je vais sans doute regarder l’anime de 25 épisodes avant ça, surtout que je dois digérer ce monument. Je le conseille à presque tout le monde, je suis certain que ça plairait à Présence.

        • Eddy Vanleffe  

          Bon j’écoute le podcast d’une heure 30 et si tu bazarde les sempiternels commentaires sur le sexisme, ça ne fait plus qu’une demie-heure.
          Il FAUT qu’on passe impérativement par ce prisme et cela peu importe si on raconte n’importe quoi.
          ils abordent les « proto-shojos » d’entre deux guerre sans en citer un seul titre, un seul auteur et en SUPPOSANT le contenu de l’époque…
          ben…pas très informatif tout ça.
          Ensuite les intervenants ne parlent que de LEUR ressentis estimant que ça prouve ci ou ça…
          quand on parle de NANA comme quasi première héroïne, elle n’a pas du regarder bien les rayons en question. a l’époque KAORI YUKI (Angel Sanctuary/ compte CaIn etc…) marchait sur l’eau et toutes les dessinatrices dans les conventions qui faisaient signer leurs croquis copiaient dessus à mort. Il y avait aussi YUU WATASE dont FUSHIGI YUGI était un e succès de librairie. J’étais dans les commerces manga 24/24, je me rappelle très bien des ce qui étaient des succès.
          Je dois rementionner CLAMP (mais souvent avec des héros masculins, donc peu pertinents pour l’identification et encore)
          FRUIT BASKET est un classique etc…
          Mais ça, c’est à tout le manga plus ambitieux que cela a fait du tort.
          ça revient depuis 4-5 ans…c’est bien.

          un truc à savoir aussi Banana Fish est un Shojo
          Junji Ito a souvent publié dans des shojos aussi (Tomié, je crois bien en est un…)

          • Ludovic  

            Oui oui, enfin de toute façon comme je le dis à un moment dans mon article, le manga d’horreur a été cousin du shojo manga (mêmes thèmes, même magazines de publication) et Junji Ito s’est inscrit dans cette tradition, il a souvent revendiqué l’influence de Umezu par exemple !

          • Jyrille  

            Merci Eddy pour le retour ! J’ai eu un peu les mêmes sentiments que toi en l’écoutant, au final je n’ai pas retenu grand chose sauf qu’en effet, comme le dit Ludovic, Ito faisait du shojo et le manga d’horreur plaît aux filles (ma fille est le meilleur exemple, elle est fan de films d’horreur depuis toujours).

            Merci beaucoup aussi pour ton historique didactique qui me semble très réaliste. J’entends très peu parler de Matsumoto hors AMER BETON alors que pour moi SUNNY est une oeuvre majeure.

            Mais félicitons-nous que l’on puisse découvrir d’anciennes oeuvres, cela remet plein de choses en perspective et c’est toujours excitant de voir de nouvelles choses même si elles ont cinquante ans.

          • zen arcade  

            Tout Taiyô Matsumoto est majeur.

  • JB  

    Merci pour ce panorama !
    Des récits à la fois sous influence avec plusieurs inspirations du cinéma français citées, mais également d’une incroyable modernité, j’ai l’impression, sur les thématiques de genre et d’orientation.
    X : j’en suis resté à la conclusion de la série animée, ça me suffit ^^

    • Ludovic  

      Oui c’est ça qui me fascine dans le manga des années 70 et le shojo en particulier : l’audace des thèmes abordés et leur modernité sous le vernis en apparence désuet du romantisme et des ornements décoratifs.

  • Bruce lit  

    Amen to that brother ! Ton article synthétise avec brio toutes les qualités de cette autrice remarquable capable de tutoyer Tezuka. LA PRINCESSE IGUANE est une histoire prodigieuse que j’ai fait découvrir à ma fille.
    Mais globalement toute l’anthologie de l’humain est hors du commun.
    Cependant, j’ai bcp plus de mal avec l’anthologie de la rêverie où je trouve Moto moins percutante. Pour tout dire j’ai trouvé que NOUS SOMMES ONZE était assez bancal dans l’écriture. Mais il est vrai que je n’affectionne pas la scifi.Son versant réaliste m’a bcp plus parlé.
    La BO : blocage total sur cette artiste

    • Ludovic  

      Merci beaucoup Bruce !

      Oui je trouve moi aussi qu’elle est encore plus forte sur ces histoires qui sondent l’âme de ses personnages (même si elle le fait parfois en utilisant le prisme du fantastique ou du merveilleux) mais ce sont les histoires dans lesquelles elle exprime le plus sa sensibilité personnelle et ça se sent ! LA PRINCESSE IGUANE est vraiment un exemple magnifique de ce point de vue là !

  • Présence  

    Je découvre Moto Hagio avec cet article : merci pour cette présentation.

    En arrivant à la fin de l’article, j’ai cru qu’il n’y avait pas neuf histoires de chroniquées tellement la lecture en a été aisée, il a fallu que je recompte pour constater que le compte y est.

    Nous sommes onze : de la science-fiction par une autrice et en manga et de haut vol, impressionnant.

    La suite de chroniques permet de se faire une idée des différents thèmes récurrents de l’autrice, ainsi que de leur degré de maturité, tout aussi impressionnant.

    • Eddy Vanleffe  

      Je passe pour conseiller DESTINATION TERRA de Keiko Takemiya (shonen pour le coup) en tant que classique de la SF féminine.

    • Ludovic  

      Merci, Presence !

      oui ce double recueil d’histoire me permettait aussi de faire un bon tour d’horizon de l’univers de Moto Hagio, c’était un choix idéal pour un article comme celui là !

      Ravi que ca t’aies plu !

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