Heureux qui comme Ulysse (MIDNIGHT NATION)

Midnight Nation par J.M Straczynski et Gary Frank

Un article de JB VU VAN

VO : Top Cow Productions

VF : Semic, Delcourt

Un visuel très éloigné de ce qu’est MIDNIGHT NATION !
© Top Cow Productions
© Semic

Cet article portera sur les 12 numéros de la série MIDNIGHT NATION (et le numéro spécial paru dans la revue WIZARD). La série régulière est écrite par J. Michael Straczynski et illustrée par Gary Frank. Le numéro spécial est illustré par Michael Zulli. La série a été éditée en France par Semic dans la revue MIDNIGHT NATION puis dans une série de 3 albums. Declourt a également publié une intégrale de cette série dans la collection Contrebande. A noter : nous devons la traduction à un certain Alex Nikolavitch…

David Grey est l’un des rares inspecteurs de Los Angeles à se préoccuper des laissés-pour-compte. Au lieu de fermer les yeux sur le meurtre du jeune coursier d’un dealer, Grey poursuit l’enquête qui le mène vers un trafiquant aux étranges alliances. En effet, des êtres verdâtres et marqués de stries noires lui servent d’hommes de main. Lorsqu’il fait une descente chez le dealer, David Grey voit son équipe massacrée mais parvient à abattre le coupable. Mais le véritable meneur des créatures, les Marcheurs, prend un soudain intérêt pour cet inspecteur. À son toucher, Grey s’évanouit. Lorsqu’il s’éveille, les personnes autour de lui paraissent intangibles. En effet, il a basculé dans une autre facette de la réalité, où se retrouvent tous les êtres et toutes les choses abandonnées. Une mystérieuse guide, Laurel, lui explique qu’il a perdu son âme et n’a qu’une année pour la récupérer avant de lui-même devenir un Marcheur. Pour cela, il doit traverser tout le pays pour se rendre à New York. Durant cette Longue Marche, de nombreuses embûches et rencontres attendent Grey et Laurel.

De l’autre côté du miroir
© Top Cow Productions

MIDNIGHT NATION est une série dont j’adore les auteurs. Lorsque le comics sort en France, j’avais surtout découvert Gary Frank dans son run sur HULK en tandem avec un autre immense scénariste, Peter David. MIDNIGHT NATION lui permet un trait moins humoristique, plus adulte. Quant à J. Michael Straczynski (que je me permettrai d’écourter en JMS !), c’est le créateur d’une des meilleures séries de SF, BABYLON 5 (inspiration majeure de la saga MASS EFFECT). Les lecteurs français ont également découvert son RISING STARS aux débuts fracassants, qui aura également une influence notable (LES 4400 et HEROES lui doivent beaucoup !). Bref, avant même de lire une page, j’étais déjà client !

Pourtant, la lecture de Midnight Nation peut s’avérer frustrante. Entre le départ de Los Angeles et l’arrivée à New York, chaque numéro met Grey face à une nouvelle épreuve ou à un nouveau personnage, sans que le héros (ou le lecteur) ne comprenne les leçons à en tirer. Et les commentaires cryptiques de Laurel n’aident pas… Mais comme les autres travaux de JMS, MIDNIGHT NATION demande une vue d’ensemble. Et, contrairement à certains comics ou certaines séries qu’il signera ultérieurement (SUPERMAN: GROUNDED ou CRUSADE), Straczynski arrive au bout de son histoire !

Sauver l’être aimé des Prétendants…
© Top Cow Productions

C’est ainsi à une véritable odyssée que se livre David Grey pour retrouver son âme et sa vie. Et le protagoniste de JMS est proche du héros d’Homère à plus d’un titre. Maudit par Poséidon pour avoir aveuglé son fils Polyphème, Ulysse ne pourra retrouver son île qu’au prix de longues souffrances et après avoir fait face à de nombreux dangers. Mais surtout, le vainqueur de Troie perd ses compagnons, ses navires, ses possessions, jusqu’à sa mémoire au fil de son aventure. Lorsqu’Ulysse retrouve Ithaque, c’est d’ailleurs sous l’identité d’un mendiant qu’il revendique son identité et sa famille. David Grey perd lui aussi sa place dans la société en basculant dans le lieu intermédiaire, la dimension des laissés pour compte. Lorsqu’il finit par revenir dans son monde, c’est seul et pratiquement nu qu’il réapparaît.

Grey a également sa propre Pénélope. Pourtant, le couple paraissait moins solide que celui d’Ulysse, puisque David et sa femme Sarah sont séparés au début du comics. Mais David attire l’attention des Marcheurs sur son ex-femme et doit la secourir. Sous la torture psychologique des Marcheurs, Sarah tombe elle-même dans le lieu intermédiaire jusqu’à ce que David vienne à son aide et la ramène à la réalité. Bien qu’elle ne perçoive pas sa présence à ce moment, à la fin de la série, Sarah explique à David que cet évènement l’a persuadée d’être présente pour lui et de le retrouver.

Comme un air de déjà vu
© Top Cow Productions

Mais la Longue Marche du héros est surtout une nouvelle occasion pour JMS d’utiliser le thème du Walkabout (ou bout d’brousse pour les fans de Crocodile Dundee). Rite de passage à l’âge adulte des aborigènes d’Australie, le Walkabout consiste en une traversée des vastes étendues du continent. Les fans de Superman penseront notamment au SUPERMAN : GROUNDED de JMS. L’histoire se déroule après la Saga de la Nouvelle Krypton et le héros se remêt à peine de la disparition des kryptoniens lorsqu’une femme l’interpelle en public et l’accuse d’avoir laissé mourir son mari (mort durant une opération chirurgicale). Constatant qu’il a perdu l’humanité de vue, Superman entreprend alors de traverser les Etats-Unis à pied pour retrouver les valeurs du pays. Dans BABYLON 5, l’un des personnages, le Dr Franklin, commence lui-même à parcourir toute la station spatiale Babylon 5 après avoir réalisé qu’il était accroc au stimulant. Il cherche ainsi à retrouver son véritable moi, qu’il finit d’ailleurs par rencontrer sous la forme d’une hallucination (longue histoire).

La quête initiatique du Walkabout chez JMS sert ainsi à se retrouver soi-même. MIDNIGHT NATION donne véritablement corps à ces retrouvailles. Dans le 8e numéro, David et Laurel doivent faire face à une véritable ordalie, une série de combats que David ne peut remporter seul. Cette série de sacrifices physiques et psychologiques (David doit accepter de laisser Laurel souffrir à sa place) le conduit vers un oracle inattendu : une version plus âgée de lui-même. Après la confusion d’usage entre les 2 David, le second révèle au héros le dénouement de la série : il ne retrouvera pas son âme et tuera Laurel. Une prédiction qui poussera paradoxalement David vers ce futur, malgré toutes les tentatives qu’il fera pour échapper à cette destinée. Mais comme dit le dicton, le diable est dans les détails…

7 cercles à traverser ?
© Top Cow Productions

Mais ce voyage d’un homme accompagné d’un guide rappelle un autre récit majeur de l’Occident : la DIVINE COMÉDIE de Dante Alighieri. Si sa première partie, L’ENFER, est la plus connue, il s’agit cependant d’un triptyque que complète LE PURGATOIRE et LE PARADIS. Dans ce récit qui a radicalement modifié la représentation de l’au-delà judéo-chrétien, le poète est conduit à travers l’enfer, le purgatoire et le paradis par plusieurs guides successifs. Chaque territoire est constitué de cercles (7 pour les enfers, 7 pour le purgatoire et 10 pour le paradis)

Vous allez me dire, quel rapport avec MIDNIGHT NATION ? Personnellement, je trouve déjà intéressant que le chemin du héros soit le reflet inversé de celui de Dante. En effet, Grey part de Los Angeles, la cité des Anges, pour aller jusqu’à New York, décrit comme un véritable enfer sur Terre. De plus, des éléments visuels me semblent renvoyer au poème de Dante. Dans le 4e numéro, Laurel et David s’arrêtent dans un camp dressé en bas d’une crête. Ils y trouvent plusieurs personnes qui ont en commun d’être tombés dans le lieu intermédiaire pour n’avoir pas suffisamment osé prendre des risques ou changer leur nature. Lassé de les entendre et malgré leurs conseils, David gravit la crête et découvre plusieurs autres camps, qui apparaissent comme des cercles dans la nuit. Devinez combien apparaissent à l’image ?

Enfin, le but ultime de la quête de David s’avère être de déjouer la fatalité et de faire revivre l’espoir. Le mot revient à plusieurs reprises. Évoqué par Laurel et Lazare lors du départ de Los Angeles, l’espoir est présenté comme ce qui distingue nos héros (surtout David) des Marcheurs dans MIDNIGHT NATION n°1/2. Lorsque David vient en aide à Sarah, il la sauve d’une tentative de suicide en lui rendant espoir en la vie. Enfin, malgré la prédiction de son moi futur, David reste persuadé de pouvoir sauver Laurel. En empruntant le chemin inverse de Dante et en traversant l’Enfer dans le sens contraire, David Grey quitte le domaine infernal en franchissant métaphoriquement la porte des Enfers qui indiquait à Dante d’abandonner toute espérance en y entrant.

De Gethésmani…
© Top Cow Productions

Enfin, le long périple de David et Laurel s’avère au final être un chemin de croix. Lorsque le duo arrive à New York, Laurel est clouée sur une roue. Mais ce n’est pas le seul élément qui rapproche la belle du Christ. Dès le premier numéro, Laurel, agent de Dieu, tente d’éviter la charge d’une nouvelle Longue Marche, renvoyant à l’agonie de Jésus dans les jardins de Gethsémani, où le Christ demande à Dieu de lui épargner les souffrances de la croix. Ce n’est pas la première fois que JMS évoque cette scène biblique, qui fait l’objet d’un épisode de BABYLON 5 : “Les Jardins de Gethsémani.

Il est cependant à noter que Straczynski est athée, bien que la religion apparaisse souvent dans ses récits sans forcément être diabolisée. Dans le cas de MIDNIGHT NATION, je serais tenté de dire que ces références lui permettent de créer une figure “messianique” bien humaine, ne devant rien au Paradis ni à l’Enfer. En effet, David Grey n’évolue pas au fil de l’histoire : il est dès le départ près à se sacrifier pour des inconnus. C’est moins sa ténacité à lui que celle de Laurel qui semble être éprouvée. Dans ce Comics, Dieu et sa création – tel que présenté par le camp adverse – sont imparfaits. Le ciel et l’enfer sont tous les 2 prêts à miser des vies humaines pour résoudre un débat philosophique. Si le choix final de David semble marquer la victoire de Dieu, la réalité me semble différente. En effet, David est explicitement abandonné tant par le Divin que par le Diable et devient le sauveur des exclus. C’est ainsi de la seule humanité que vient le véritable Sauveur. Une conclusion qui, encore une fois, rejoint celle de la Guerre des Ombres de BABYLON 5.

… au Golgotha
© Top Cow Productions

Beaucoup de références, un propos intéressant et moins manichéen que les comics de Jim Starlin sur le même thème, mais MIDNIGHT NATION n’est cependant pas exempt de défaut.

Un problème mineur : le numéro ½ publié dans WIZARD est un peu trop inspiré de SANDMAN avec une bibliothèque d’œuvres jamais réalisées. Plus grave, la durée du périple, censé durer un an, ne se fait jamais vraiment ressentir, d’autant plus que les héros mettent 2 numéros à partir et arrivent à New York à la fin du 8e numéro. La deadline d’une année paraît ainsi peu significative. La révélation finale sur la nature des Marcheurs rend également problématique la transformation progressive de David et ses soudaines crises de violence. L’intervention du futur David rend inexplicable la réaction de Laurel : on se demande ce qu’ont vu les prédécesseurs  du héros lors de cette étape. Beaucoup d’incohérences qui ne gâchent cependant pas le plaisir de la lecture, mais qui la rendent bien moins brillante qu’elle n’en avait l’ambition.


La BO du jour

33 comments

  • JP Nguyen  

    J’ai encore les fascicules VF de Semic. Belle analyse, notamment la comparaison avec Dante, que je connais mal.
    En étant taquin, on peut trouver un aspect prémonitoire à ce récit, concernant le paysage politique français : là aussi, les Marcheurs sont devenus fantomatiques 😉 !

    • JB  

      Ça dénonce ^^ J’espère n’avoir pas été trop saoulant sur les références. Sinon, perso, j’ai à la fois les fascicules et les albums Semic. Par contre je ne sais plus si les fascicules avaient le n°1/2.

  • Eddy Vanleffe  

    L’un de mes comics préférés, l’un des seuls qui m’a fait pleurer d’ailleurs. la chute est magistrale du même acabit qu’un bon Shyamalan.
    ces effets miroirs, de voyages aux Enfers, ces références bibliques sont les condiments d’une lecture sophistiquée mais pas aride.plus humaine que cérébrale. David et Laurel sont des très bons personnages.
    le voyage en un an n’est pas très prégnant…il faut juste se pencher sur les saisons décrites et ça devient raccord de mémoire.

    • JB  

      Après, le problème en lisant/voyant trop des comics et séries JMS est qu’on commence à voir les lignes de la matrice. Par exemple, difficile a posteriori de ne pas trouver des ressemblances entre la rencontre des 2 David ici présents et celle de Spidey et son homologue du futur dans Amazing Spider-Man 500

      • Eddy Vanleffe  

        ce que JMS a produit pour Marvel j’ai toujours trouvé ça en deçà de ce qu’il écrit ailleurs…
        j’ai un souvenir vague de son passage sur SM passé le premier arc…

        • JB  

          En globalité, j’aime beaucoup Bullet Points et ai versé une larme sur Silver Surfer Requiem.
          Pour des bouts de comics, j’adore la période Romita Jr de son Spidey (ça part en vrille à partir de l’ère New Avengers qui correspond plus ou moins à l’arrivée de Deodato) et son Supreme Power (inachevé)

          • Eddy Vanleffe  

            le suprême truc, c’est trop trop trop lent au bout de dix huit épisodes on a toujours rien..même si des scènes sont top ‘l’épisode 1 en gros)
            Bullet points, je devrais le lire un jour (une de mes lacunes ça…)
            et oui le SM période JRJR c’est cool et période déodato c’est bien moins emballant (avec un démarrage sur les chapeaux de roue dans le cringe avec la liaison Gwen/Osbourne)

  • Fletcher Arrowsmith  

    Bonjour JB,

    tu viens de proposer là une extraordinaire analyse de l’œuvre de JMS que je préfère. Tu me permets de découvrir des thèmes que je n’avais pas vu ou abordé de cette façon (Dante, Walkabout dont je découvre l’expression, l’Odyssée). Réellement passionnant.

    Je possède également les VI semic. Le 1/2 n’est paru que dans le premier semic book lors de la première ré -édition de la série en France (après les VI donc). La parution n’ pas duré 12 moins également s’étalant d’octobre 2000 à juillet 2002.

    Etrangement ce que tu cites en défaut n’en sont pas à mes yeux tout simplement car, si je reprends une de tes comparaisons et références, MIDNIGHT NATION n’a pas la même densité que le SANDMAN de Neil Gaiman. Il y a mine de rien un côté easy reader et une approche clairement feuilletonesque que JMS exporte de son expérience sur BABYLON5.

    Si je pousse plus loin je me demande également si ce ne sont pas les plus belles planches de Gary Frank, épurée mais fourmillant de détails et surtout des visages (bouches notamment) et expressions sur les visages plus naturelles et travaillées que depuis quelques années. Le personnage de Lauren est magnifique, dessin à l’unisson de sa description.

    Une particularité de la série : la cover du numéro 9, sorti en décembre 2001, montre les 2 twin tower ce qui avait valu une légère polémique à l’époque car post 11 septembre.

    • JB  

      A l’époque, niveau Gary Frank, Midnight Nation se mélangeait un peu avec Kin dans mon esprit. Sinon, j’avoue que je préfère la première moitié de Rising Stars à Midnight Nation

      • Eddy Vanleffe  

        KIN c’était plus simple mais bien sympa ce concept d’évolution parallèle des Neandertal.
        fin ouverte dommage….
        RISING STARS, bon on va pas se mentir c’est à des années lumières au dessus d’un tas de trucs mais
        1-la valse des dessinateurs détruisent identité du titre.
        2-JMS doit vraiment consulter pour son trauma sur Watchmen
        3- la seconde partie part un chouia en vrille et peine à retenir l’attention

        par contre il y a des moments de pure magie comics et de moments de poésie absolue….

        • JB  

          La révélation de l’identité du tueur, l’image des fantômes en transparence à travers la page finale d’un numéro, le combat Bright/Patriot et plus généralement la fin du siège de Chicago, la rédemption de Joshua…

          • Eddy Vanleffe  

            les fantômes en transparence,je m’en suis pas remis….
            j’avais la sensation de lire un trucs vraiment novateurs avec des idées graphiques qui bousculaient….
            Même si j’aime bien chambrer JMS, il manque cruellement d’auteurs de ce style à la fois dans l’indé et dans le mainstream, parce qu à l’époque le vase communiquant fonctionnait très bien et donnait envie de sauter de l’un à l’autre sans complexe…

  • Patrick 6  

    Gary Frank je ne suis pas fan, par contre les Proclaimers j’adore 🙂
    J’ai connu ce groupe par ce morceau et par le très mignon film Benny & June 🙂 (la vidéo en somme)

    • JB  

      Comme je suis un inculte en matière de musique, j’ai découvert (ou redécouvert, je devais l’avoir entendue avant) cette chanson avec le départ de David Tennant de la série DOCTOR WHO.

  • Bruce lit  

    Quel enthousiasme !
    Je crois avoir lu les 3 premers chapitres avant de tout remiser à plus tard ! Je n’aimais pas les dessins. J’avais péniblement été jusque bout Supreme Power que j’avais trouvé chiant.
    Visiblement j’ai eu tort.

    • JB  

      C’est vrai que si tu n’accroches pas avec le style de Gary Frank, MIDNIGHT NATION et SUPREME POWER seront laborieux. ^^ Et c’est vrai que SUPREME POWER prend son temps. Beaucoup. Beaucoup trop.

  • Tornado  

    Je l’ai lue il y a un bout de temps. Plus de 10 ans.
    Je n’avais pas hyper accroché, mais sans détester du tout. Je l’ai d’ailleurs gardée (édition 3 tomes Semic, achetés dans une station service le temps des vacances !).
    Je m’étais rué dessus après avoir lu le Spiderman de JMS et je tachais d’ailleurs de chopper tout ce qu’il avait fait (je n’ai pas aimé du tout BULLET POINT, j’ai renoncé à SUPREME POWER pour cause d’inachevé et je n’ai toujours pas commencé RISING STARS…).
    Le fait-est que je n’avais pas du tout capté toutes les références relevées par JB. Superbe article pour le coup, qui me conforte dans le fait d’avoir gardé cette maxi-série !

    J’ai retroué mon commentaire amazone, au cas ou (c’est un vieux commentaire, faut pas faire le difficile…) :
    Cette histoire se développe dans une ambiance à la frontière du polar façon Dashiell Hammet et des nouvelles de Stephen King. L’ambiance fantastico-horrifique de l’ensemble est saupoudrée de réflexions sur la foi, l’abandon de Dieu et la puissance de l’amour, avec un soupçon de fin du monde.

    En lisant cette maxi-série, je me suis fait une réflexion : Les séries de la génération Top Cow/Image comics (label créé par Todd McFarlane, Jim Lee & Co. dans les 90’s) ont pris un petit coup de vieux.
    Que ce soit dans la forme avec la mise en couleur infographique de base à l’heure où les comics découvraient Photoshop, ou dans le fond, les choses ont beaucoup évolué depuis. Derrière des airs « anti-manichéen », cette série est en fait très inoffensive. Et tout comme dans Spawn et consort, c’est tout plein de bondieuseries !
    Dans l’histoire qui nous intéresse ici, où il est tout de même question de créatures démoniaques, tout le monde est au final plutôt bien gentil. Et rarement aura-t-on vu de préposé à la méchanceté aussi inoffensif que le démon voleur d’âmes qui hante les pages de Midnight Nation !
    Finalement, s’il n’y a pas comme par le passé les gentils bien gentils contre les méchants bien méchants, il y a à la place, des gentils bien gentils qui affrontent des gentils un peu moins gentils… D’où une étrange manière douce dans le manichéisme !
    On s’aperçoit à l’arrivée que tout cela est lié à une époque révolue et que depuis, les auteurs (notamment à travers le label Vertigo) ont fait évoluer le médium à un niveau nettement supérieur. Les séries moins anciennes et désormais cultes, telles Preacher, Locke & Key, Fables, Transmetropolitan ou Scalped , vont beaucoup plus loin dans la toile de fond. Les personnages sont plus complexes, plus fouillés, plus humains… Et les questions religieuses, si elles n’ont pas disparu, ne tiennent plus le haut de l’affiche, ou alors sont-elles davantage subversives (Preacher).
    Néanmoins, l’ensemble se lit très bien et on passe un bon moment. Les personnages, même s’ils sont archi-archétypaux, sont attachants. Et l’histoire, malgré le manque de finesse, tient tout de même bien la route.
    Une bonne lecture. Pas inoubliable et plus inoffensive qu’elle voudrait nous le faire croire, mais une bonne lecture tout de même. »

    • JB  

      Ah, pas d’accord sur la gentillesse des personnages ni sur la bondieuserie. La figure diabolique tue un indic sans regret, envoie ses sbires pousser l’ex du héros au suicide et fait vivre un enfer à un type dans l’idée de l’emporter sur Dieu. Ce dernier n’en ressort pas non plus grandi puisqu’il envoie à chaque fois l’ancienne amante du Diable (avant la chute de ce dernier) accompagner chaque humain soumis à cette épreuve, histoire de les tourmenter tous les 2. Et qu’Il laisse tomber l’humain qui rend enfin espoir à l’humanité. Je trouve ça plus nuancé que le simple « Toutes les croyances sont néfastes » de Jim Starlin.

      • Tornado  

        Comme quoi il faudra que je relise le tout ! 🙂

        • Tornado  

          Ce qui est rigolo dans mon commentaire, qui date d’une décennie, donc, c’est que je dis que les publication Top Cow ont pris « un petit coup de vieux ». Alors qu’aujourd’hui je pense carrément que c’est devenu atrocement illisible ! 😀
          C’est la période qui a le plus mal vieilli de toute l’histoire des comics à ce jour je trouve.
          Cela-dit, Gary Frank c’est pas Rob Liefeld. Et si on fait abstraction de la charte graphique avec cette mise en couleur aseptisée, ça passe très bien.

          Pour en revenir à ton article il offre quand même pas mal de matière dans la perspective de redécouvrir la série. Rien que pour ça je suis content de l’avoir gardée. A l’époque, mon petit doigt me chuchotait de la garder au cas ou… ^^
          Parce que je me suis débarrassé de plein de truc de JMS : BULLET POINT que j’ai trouvé raté, REQUIEM qui est anecdotique et surestimé je trouve, THOR et FF qui sont inachevés, ainsi que SUPREME POWER que je n’ai même pas lu.

          J’ai gardé tout le run de Spidey (même si je pense comme tout le monde que c’est moins bien avec l’arrivée de Deodato (qui n’y est pour rien, d’ailleurs)), MIDNIGHT NATION, Dr STRANGE ainsi que trois séries que je n’ai pas encore lues : SUPERMAN A TERRE (inachevé…), RISING STARS et THE TWELVE.

        • JB  

          J’ai aussi pour projet de me lire Wonder Woman : L’Odyssée (on y revient), même si ça a aussi tourné court si je me souviens bien.

        • Tornado  

          Se faire le spécialiste des séries abandonnées en cours de route… Il s’est grillé ce type. Désormais je fuis en voyant son nom. C’est un revirement de situation considérable !
          Quel gâchis. C’était probablement l’auteur le plus doué de sa génération.

        • JB  

          Faut voir, je ne sais pas ce que donnent ses titres chez AWA. Sidekick était un peu bof, Protectors Inc. assez sympathique même si déjà vu.

        • Tornado  

          J’ai oublié SUPERMAN EARTH ONE : revendu aussi.

  • Tornado  

    La BO : Des relents de punk dans l’interprétation qui font que ça ne passe pas du tout ! 😀

  • Présence  

    Super : une série que j’ai souvent été tenté d’essayer, sans jamais franchir le pas, certainement parce que j’ai découvert JM Straczynski sur le tard et pas forcément avec les bonnes histoires.

    Le chemin du héros soit le reflet inversé de celui de Dante : intéressant comme ligne directrice d’un récit. Je pense que je n’aurais pas été capable de m’en apercevoir.

    Straczynski est athée, bien que la religion apparaisse souvent dans ses récits sans forcément être diabolisée. – Une remarque fort édifiante. J’avais remarqué sa propension à utiliser des éléments bibliques, mais je ne savais qu’il est athée. Ce penchant m’avait complètement sorti de Requiem, avec une transposition trop basique du principe du sacrifice de sa vie.

    Un propos intéressant et moins manichéen que les comics de Jim Starlin sur le même thème : Starlin n’aime pas les religions organisées et on peut supposer que cela provient de sa vie personnelle, ou peut-être de l’image hallucinante pour un européen des télévangélistes. Pour autant, ses héros ont souvent une vie spirituelle, une richesse intérieure qui dépasse la simple intelligence.

  • Matt  

    ça fait envie.
    Le dessin ne me dérange pas, même s’il fait très Top Cow avec un style très américan tout en muscles et en ombres avec une coloration informatique pas top, mais c’était l’époque un peu qui voulait ça. Et ça tient plutôt la route visuellement.
    L’intégrale Delcourt est devenue chère, et je ne sais pas dans quel état vont être les tomes Semic d’époque donc bon faut voir, à l’occasion.

  • Jyrille  

    Merci pour la présentation JB, je ne connaissais pas du tout. En lisant le pitch, je pense immédiatement au Neverwhere de Neil Gaiman et au Talisman de Stephen King. Ca peut être marrant… mais je trouve les dessins plutôt laids.

    Par contre j’apprends plein de trucs (super le Walkabout), y compris sur Jésus et Babylon 5 (jamais regardé). C’est super ! Un grand merci pour ce bel article.

    La BO : un classique que j’ai découvert très tard mais jamais aimé.

    • JB  

      Babylon 5, il faut se fader une première saison un peu laborieuse (et accepter des effets spéciaux datés) avant que ça démarre vraiment.

  • Surfer  

    « Un propos intéressant et moins manichéen que les comics de Jim Starlin sur le même thème »

    « Je trouve ça plus nuancé que le simple « Toutes les croyances sont néfastes » de Jim Starlin. »

    Cela dépend des comics.
    Starlin est effectivement très critique avec la religion. Dans la croisade cosmique le manichéisme est poussé à son paroxysme.
    Dans The Clult, je trouve que c’est nécessaire car il veut dénoncer l’intégrisme religieux. Il lui est donc difficile de trouver une quelconque nuance ou concession à cette doctrine.
    Malgré tout, l’intérêt que porte Starlin aux figures christiques ou démiurgiques lui a permis de développer des personnages avec des psychologies complexes. Warlock par exemple est loin d’être manichéen. Il est un messie allégorique et c’est pourtant un Super-héros.
    Je rejoins donc Présence lorsqu’il dit que les héros de Starlin ont souvent une vie spirituelle, une richesse intérieure qui dépasse la simple intelligence.

    • JB  

      Mon gros problème avec Starlin est surtout qu’il se répète : Dreadstar ou the ‘Breed reprennent exactement les mêmes arguments sans variation

      • Surfer  

        Sur cet aspect tu n’as pas tort. Et que dire de ses miniséries estampillés Infinity…Une répétition à la limite de l’indigestion .

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