Le défi Nikolavitch : Douze surhommes en colère

Le défi Nikolavitch : Douze surhommes en colère

Un article d’ALEX NIKOLAVITCH

Première publication le 10/01/23- MAJ le 25/02/24

Chaque mois, Alex Nikolavitch, traducteur, romancier, essayiste, scénariste et contributeur de Bruce Lit est mis au défi de répondre aux plus grandes énigmes de la culture populaire.
C’est Cyrille Munaro qui illustre ce nouveau défi. Lecteur de BD franco-belge, de comics et de mangas depuis tout petit, Cyrille a mis toutes ses influences aux services d’histoires parodiques tels que COQ-MAN & POUSSIN, GAGORAK, ou de nombreux strips dispersé sur le net, dont certains sont dispo sur son blog ainsi que les bons de commande de ses albums.

J’étais en train de mener une opération délicate de démontage et remontage d’un biglotron défectueux, avec un tournevis minuscule qui ne tolère pas la moindre once de tremblote (inutile de dire que c’était pas gagné), vu que je soupçonnais la roubélure de plastronium de flotter légèrement dans son logement, lorsque le téléphone sonna sur un ton furibard, me fit sursauter et envoya tout valdinguer, veaux, vaches, cochons et pot au lait, ainsi que le tournevis, trois vis d’un quart de millimètres et ma concentration avec. Inutile de dire que je décrochai le combiné d’une humeur assez approximative.
« Allô ? » demandai-je d’une voix sans réplique ni aménité, n’attendant aucune réponse, visant à arrêter net dans sa course un taureau sous exta.
« Lavitch, elle est où ma chronique ? »

C’était la voix, du même tonneau danaïde que la mienne, de notre bien aimé rédacteur en chef, Jonah J. MonsieurBruce. J’avais affaire à forte partie, et je développai donc les plus belles ressources d’une rhétorique fleurie visant à lui faire comprendre les potentialités auto-ludiques d’un extincteur à neige carbonique bien manié pour peu qu’on l’utilise d’une façon certes réprouvée par la morale et Télérama, mais qui ferait lever un sourcil intéressé à un artiste japonais spécialisé dans les histoires pour adultes (avec ou sans tentacules).

Vision d’artiste de la scène.
Dessin de Larry Lieber,
©Marvel

Il répondit à ma salve par une autre, en forme d’éructations à faire pâlir un Prunelle ou un Haddock des grands jours, une bordée d’insanités quasi céliniennes d’assez haute volée, force était de le reconnaître, dont je parvins à extraire deux informations cruciales :
– Primo, j’étais sérieusement en retard pour la prochaine chronique visant à agrémenter les pages de ce blog que vous suivez avec une régularité qui vous honore ;
– Deuzio, j’avais réussi par mes facéties à l’énerver plus qu’il ne l’était déjà et il me conviait à une rencontre sur le champ, mais en ville.

Le soupçonnant de vouloir me provoquer en duel, j’hésitai un bref instant entre planquer sous mon manteau une batte cloutée modèle Negan ou un Hattori Hanzo, avant de m’apercevoir que je n’avais ni l’un, ni l’autre de ces ustensiles chez moi. C’est donc les poings dans des poches crevées de mon paletot que je m’en allais et que je me présentais au rendez-vous, façon John Rimbaud.

Je lui trouvai une petite mine en arrivant, la lippe tremblante, l’œil injecté, une sorte de crispation générale de sa personne. Puis je compris… Il tentait une imitation de Ben Stiller dans MYSTERY MEN, sans doute le meilleur film de super-héros de tous les temps, et il me fallait admettre que c’était assez réussi.

Je décidai de jouer l’apaisement, soudain rendu inquiet par la veine énorme que je voyais palpiter follement à son front marmoréen et altier : il finissait par ressembler à un héros de shonen ou au gros plan d’un bras d’action hero du cinéma des années 80 et, à son âge, l’AVC n’est jamais loin, et dans ce cas-là c’est An Voiture Cimone, comme on dit.

« Bon, okay, crache ta valda, mec. C’est quoi, la question du jour ? »
« Non mais tu te fous de ma gueule, Niko ? C’est quoi cette intro grotesque qui bouffe déjà plus d’un feuillet et demi de mon article ? »
« Ah, tu veux un truc sur la dimension méta des comics d’aujourd’hui ? »
Là ça sembla lui couper la chique.
« Quoi ? Mais non ! Je t’avais demandé un truc sur la colère. Est-elle indissociable du super-héros ? »

Des fois, c’est pas beau à voir.
Dessin de Todd McFarlane,
©Marvel Comics

Ah, oui. C’est vrai.
Zutre.
Donc…
La réponse est non, bien sûr.
« QUOI ? »
Non, ce n’est pas indissociable. Il y a plein de super-héros dont la colère n’est pas une clé de compréhension. Superman lui-même, pour commencer, ou Reed Richards. Le premier est souriant par essence, il vise à montrer le meilleur de nos potentialités, lorsque l’autre est un cérébral, une sorte d’anguille à sang froid, un pur intellectuel pas mal déconnecté des contingences.

Bon, on est bien d’accord que ce sont des cas particuliers, et qu’un peu tous les autres sont concernés. Enfin non, pas Pater Parker, lui son moteur, c’est le sentiment de culpabilité. Mais sinon, oui, presque tous les autres. Et la colère chez, genre, Speedball on en parle ?

Pourquoi particulièrement la colère, d’ailleurs, qui comme chacun sait est un péché capital, ce que nous rappellent opportunément le vieux sorcier SHAZAM et son jeune protégé Billy Batson, pourquoi ce défaut particulier et pas, par exemple, la luxure, l’avarice ou la gourmandise ?

Bon, sur la gourmandise, c’est simple, c’est parce que tous les super-héros ne peuvent pas être Matter Eater Lad dans la LEGION OF SUPER-HEROES. Sur l’avarice, on a déjà l’ONCLE PICSOU, et sur la luxure, HARVEY WEINSTEIN, dont force est de constater qu’il fait beaucoup plus super-vilain, à l’arrivée. D’ailleurs, l’orgueil est souvent une tare de vilains, ou de héros tout à fait borderline (NAMOR à la barre).

Qu’est-ce que la colère a donc de si particulier ?
Narrativement, elle pousse à l’action, ce qui est toujours intéressant dans des comics où le pif-paf est de règle. De plus, elle conduit à l’impulsivité et à faire des erreurs. Dans un médium fonctionnant comme un feuilleton, ces erreurs peuvent avoir des conséquences à long terme. C’est toujours utile pour relancer le récit plus tard lorsqu’il s’essouffle (Wanda, quelqu’un ?).

Le mode de publication peut donc favoriser ce trait de caractère chez les personnages. Mais, bien sûr, il n’est pas le seul à entrer en ligne de compte. Parfois, la colère n’est qu’un passage, un instant de perte de contrôle né des circonstances. Parfois, elle est plus fondamentale. Et parfois elle est absente. On imagine très mal un Kurt Wagner, par exemple, péter complètement un câble. Ce n’est pas du tout dans sa nature.

« Quand dieu du tonnerre fâché, toujours faire ainsi. »
Dessin de Jack Kirby,
©Marvel Comics

Si on repart vers les sources mythologiques de nos héros (vous savez que c’est une de mes marottes, et oui, cette parenthèse est un placement produit dénué de toute vergogne) (mais de fait, quand il s’agit d’analyser des tropes, ça vaut toujours le coup d’aller regarder plus loin), la colère prend de la place. Loin de la version policée de Kirby, le Thor des EDDAS est sujet à des accès de colère dévastatrice. Hercule, quant à lui, n’aurait pas eu à accomplir ses travaux si sa rage n’avait pas tué. Jusqu’au Yahweh de l’Ancien Testament qui parfois pète sérieusement un câble, et même son fils, pourtant le gentil de la bande, a un moment de rogne épique contre les marchands du temple. Dans les légendes irlandaises, les accès de furie belliqueuse des guerriers épiques s’accompagnent de contorsions effrayantes faisant ressortir des muscles pas prévus dans le manuel. Si vous voulez voir à quoi ça ressemble, Monsieur Bisley reçoit sans rendez-vous dans les pages de SLAINE.

Et on ne parlera même pas d’Achille, qui ne l’était pas. Chill, je veux dire. C’est peut-être un « a » privatif, tiens, maintenant que j’y pense (étymologie non contractuelle, ne faites pas ça chez vous). Sa colère à lui est resté proverbiale. Le vieil Homère (le Homère d’alors, par opposition à celui d’aujourd’hui) a noirci pas mal de pages à ce sujet, qu’on étudie même encore à l’école. « Chante, ô Muse d’Achille fils de Pélée la funeste colère » et tout le carnage qui s’ensuit. Mais vous avez étudié ça à l’école. Bref, vous savez.

Dans d’autres domaines, on retrouve une utilisation de la colère chez Songoku (qui a par construction plein de parallèles avec les super-héros de comics) qui, sous sa forme simiesque, est un être enragé et terriblement puissant (contrastant avec le caractère doux, affable et naïf de sa forme humaine). La colère, chez lui, est une ombre, une tare secrète au départ. Le contraste avec Vegeta n’en est que plus saisissant d’ailleurs : ce dernier est plein de morgue et de colère en permanence, et c’est vraiment de façon sporadique qu’il montrera être capable de noblesse, d’amour et d’abnégation.

Dans un autre univers, lointain, très lointain, on notera que la famille Skywalker a un sacré problème avec ça. Anakin dissimule mal la sienne (comme dans le cas de Vegeta, elle est corrélée à son orgueil en prime) et lorsqu’il lui donne libre cours, les bornes cessent d’avoir des limites. En tant que Vador, sa colère alimente ses pouvoirs et il s’enferme dans un joli cercle vicieux, ce qui était visiblement le plan de papy Palpy.

Si la fifille semble y avoir échappé (peut-être grâce à une excellente éducation, parce que bon, ce hippie d’Obi-Wan, est-ce vraiment l’homme de la situation ?), Luke laisse souvent ressortir ses frustrations et, si ses mouvements d’humeur n’ont pas l’ampleur de ceux de papounet, il n’est pas toujours bien loin de se barrer en vrille. Simplement, il a sans doute meilleur fond, et son moment de miséricorde est l’aboutissement d’un processus long.

Quant au dernier de la bande, Kylo/Ben, c’est un fanboy de Vador qui se laisse aller à tous les défauts du grand-père et pète tout pour un oui, pour un nom. Je crois qu’Anakin l’aurait envoyé paître en lui disant un truc du genre « va, fan Kylo ».
Ce qui est intéressant, c’est que chez ces trois personnages, la colère s’exprime à chaque fois différemment et sa gestion devient un élément de caractérisation fort.

Après, les Skywalker ne sont pas des super-héros, puisque Vador, on sait tous que c’est un mix entre Darkseid et Fatalis (auquel cas Luke est Orion et Kylo, Captain Victory sans ses Galactic Rangers) (Kirby, Kirby, lama sabachthani ?).

Ce qui nous ramène à nos illustrés (« il serait temps », me souffle Jonah J.) et à leurs héros. Donc, gros cliché, la colère. Gros outil de motivation et de caractérisation des personnages. Ça gueule, ça cogne à qui mieux-mieux et ça s’invective dans nos illustrés préférés comme lors d’un match de catch, avec des émotions bien surjouées.

Mais, chez ces personnages, la colère est-elle dans leur nature ? Chez Orion, par exemple, c’est quelque chose d’ontologique, quasiment, le reflet de son ascendance maléfique. Le héros doit combattre ce qu’il est fondamentalement pour devenir quelque chose de meilleur. Notons qu’Orion a été créé par Jack Kirby, bagarreur notoire dans son enfance, et sujet par la suite à des coups de sangs homériques (on raconte que les employés de Marvel encadrèrent l’impact de son poing dans un mur à son départ pour DC, avec la légende « Kirby was here »). On va faire un jeu à boire, dans les personnages qui suivent, notez ceux qui sont créés par Kirby et ceux dont la colère est un trait fondamental et non pas la résultante d’un traumatisme unique.

La colère est de toute façon mauvaise conseillère pour certains.
Dessins de David Mazzucchelli
©Marvel Comics

La colère comme motivation, on la retrouve chez Bruce Wayne (qui affecte la froideur, mais est bien habité par une colère rentrée), chez Matt Murdock (que la gère très mal et trouve des exutoires en se mettant en danger, soit en tant que Daredevil, soit dans ses rapports avec les femmes. Frank Castle en a fait un moteur à mouvement perpétuel et ne cherche même plus à s’en cacher, contrairement aux deux autres. Chez des personnages de ce genre, la colère, même rentrée, est en effet indissociable de l’action.

Chez d’autres, c’est un peu différent. La colère est la modalité de base du personnage, avant toute autre chose, avant même sa façade sociale méticuleusement maintenue. Elle prend le pas. Si Batman et Daredevil peuvent se laisser aller à des mouvements d’humeur, qui sont l’expression fugace de ce qui les agite à l’intérieur, la carapace se referme toujours très vite.

Mais prenons Hulk, et là c’est pas tout à fait comme ça que ça marche (exemple choisi complètement au hasard, comme vous vous en doutez). Hulk, dans la plupart de ses incarnations, c’est… une incarnation de la colère, justement. Une rage brutale, destructrice, sans limite. Pas de faux semblants avec lui. Tout ce que Bruce Banner a encaissé dans l’enfance puis par la suite est digéré et recraché comme ça (un vomi vert, donc, façon L’EXORCISTE). Et dans les incarnations où le titan vert est un poil de meilleure humeur, c’est le résultat de longues thérapies dont l’effet demeure fragile. Il suffit pas grand-chose (une nouvelle exposition aux rayonnements, un changement de scénariste, un éditeur qui veut revenir aux bases, une calamité de ce genre) pour que paf, hurlements, gros poings dans la gueule, destructions massives, voitures lancées à la tronche des passants ou des adversaires et ainsi de suite.

Il est pas toujours énervé : parfois Hulk sait se montrer joyeux luron.
Dessin de Bernie Wrightson,
©Marvel Comics

On retrouve un comportement parfois similaire chez le meilleur ennemi de Hulk, à savoir Ben Grimm. Quand Ben Grimm fait les gros yeux (bleus), y a des travaux publics à envisager derrière. Il fait pas semblant. Mais si la colère, chez Grimm, lui fait faire bien des choses, elle n’est que sporadique. Oui, c’est un sanguin qui monte facilement en régime, et il a de sérieux comptes à régler avec la vie. Mais, fondamentalement, c’est un bon gars, un type qui a le cœur sur la main. La colère est chez lui un trait de personnalité fort, mais je ne crois pas qu’elle le définisse. Malgré son abord rugueux, il est même capable d’une grande tendresse (parfois maladroite, certes). Sérieusement, si Johnny Storm et le gang de Yancy Street le trollaient moins, il serait sans doute beaucoup plus affable, allez savoir. Tout comme Kirby aurait eu moins de coups de sang si Marvel et DC… enfin bref.

Le cas Wolverine (lui aussi meilleur ennemi de Hulk) est un peu plus complexe, se situant par moments un peu entre les deux. La colère, chez lui, ces crises de rage meurtrière une fois lancé dans l’action, est aussi l’expression de son animalité, c’est une réaction instinctive à la menace. Tout comme Batman, il va tenter de canaliser ça, mais contrairement à celui-ci il n’a pas une croisade perpétuelle sur le feu pour lui donner une direction. Mais le problème numéro un de Wolvie n’est pas de maintenir une quelconque convention sociale. Il n’en a rarement quoi que ce soit à carrer. Si on lui laissait le choix, il s’installerait dans une cabane au Canada, tapie au fond des bois, à regarder les écureuils trottiner sur le seuil. Les problèmes commencent quand on vient le chercher. Est-ce à dire que la colère de Wolverine n’est pas un feu primaire, contraire aux personnages précédents, mais le simple effet de la confrontation entre son animalité, capable d’être parfaitement paisible et harmonieuse, et la société absurde des hommes ? Possible. Peut-être est-ce pour ça d’ailleurs que sa tentative d’adopter les codes d’honneur japonais pour se dompter lui-même n’a pas toujours été fructueuse : civiliser la bête est peut-être un contresens, lorsque le problème vient justement de ses contacts avec la civilisation.

C’est lorsqu’il apprivoise la société des hommes au lieu de tenter de s’apprivoiser lui-même que Wolverine peut devenir directeur d’école…

Les raisons de la colère.
Dessin de Derek Aucoin,
©DC Comics

Déclencher une colère brûlante chez un personnage est un moyen de relancer une série pour les scénaristes, lorsqu’ils ont la sensation qu’elle patine un peu. Pour souffler sur les braises, ils ont paradoxalement recours à la technique dite du « frigo ». C’est Gail Simone qui a proposé l’expression « to fridge » pour la désigner, en faisant référence à un épisode de GREEN LANTERN où Kyle Rainer retrouvait sa petite amie morte et stockée dans le frigo, histoire de redonner un peu de peps à l’intrigue. Simone dénonçait, à juste titre, la facilité scénaristique qui consiste à s’en prendre à la fiancée du héros pour le motiver, ce qui la réduit à un personnage-fonction. Si la demoiselle en détresse menacée par tout ce qu’il est possible d’imaginer est un trope classique des couvertures des pulps, puis des comics dès l’origine (Moulton a créé Wonder Woman notamment en réaction aux scènes où Lois Lane, personnage de femme forte par ailleurs, se faisait attacher pour être secourue par Superman), poussé toujours plus loin après la disparition du comics code. On notera que malgré la chute de Gwen Stacy et les autres avanies suivantes (de mémoire, Mary-Jane et Tant May sont également mortes une fois chacune au moins) (rassurez-vous, elles vont mieux depuis), Peter Parker n’a pas sombré dans la colère brute. Chez lui, la colère est envers lui-même. La culpabilité domine.

On notera que l’inimité durable et violente entre Wolverine, cité plus haut, et Sabertouffe, remontait canoniquement au meurtre de Silver Fox, petite amie indienne du premier, par le second. La continuité Marvel étant ce qu’elle est, c’est devenu vite beaucoup plus compliqué que ça. Elle était pas vraiment morte, les deux adversaires se connaissaient et se détestaient depuis beaucoup plus longtemps que ça, d’ailleurs Logan n’était pas Logan et ainsi de suite (oui, c’était déjà le bazar quand on savait quasiment rien des origines du personnage, et après ça a été pire)(l’amnésie et les implants mémoriels c’est bien pratique pour ça, hein, on peut faire ce qu’on veut derrière).
J’en étais où, moi ?

« Bonne question », me lâche mon rédacteur en chef d’un ton où percent tour à tour l’aigreur, le sarcasme et l’envie de me mettre à la porte sans préalablement ouvrir cette dernière, sauf qu’on est dehors et ça le frustre visiblement, entraînant des crispations de ses poings.

The Clobbering times, they are a changin’
Dessin de Jack Kirby,
©Marvel Comics

Bon, cette bordée d’exemples sont là pour montrer que rien n’est univoque. Oui, la colère est un élément majeur de nos illustrés, comme la vengeance (mais elle est à la base d’une bonne partie de la pop culture depuis l’émergence du roman feuilleton il y a deux siècles et même avant), mais ce n’est qu’une brique parmi d’autres. Et même elle, elle s’exprime de façons bien différentes selon les personnages et les situations. Il n’y a pas une colère, mais des colères, tout comme le super-héros en tant que genre n’est pas un bloc monolithique.
« Tiens, ça fait longtemps qu’on l’a pas vu, le Monolithe Vivant, maintenant que j’y pense. »
« C’est un super-vilain, ça compte pas. »

Voilà, c’était encore une de ces questions à laquelle, en fait, je n’avais pas vraiment répondu. Il aurait fallu commencer par définir la colère, en catégoriser les manifestations, pourquoi pas la différencier de la rage, faire un tableau de quel super-héros, et justement, vous voyez le tableau. Moi pas, j’aurais sans doute tout envoyer bouler avant, en poussant des cris gutturaux et simiesques.

Je ne sais pas qui, de Jonah J. MonsieurBruce ou de moi propose d’enterrer la hache de guerre.
« Bon, sur ces bonnes paroles, un petit café ?
– Tu crois pas que va nous énerver ?
– Ah, ta gueule. »


13 comments

  • JP Nguyen  

    Arf, un défi sans alcool !
    Pour prolonger la discussion, je mentionnerai l’évacuation de la frustration chez des personnages puissants mais qui retiennent leurs pouvoirs. J’ai en mémoire un numéro des New Warriors où Firestar balance la dose à un gros malabar (Super Nova ?) en listant mentalement tous les trucs qui lui ont récemment pourri la vie…
    Après, comme dit dans l’article, c’est un moteur bien pratique dans l’intrigue.
    On peut remercier la colère de Namor qui balance à l’eau le bloc de glace contenant Captain America ou regretter celle d’hercule chez Stern/Buscema qui attaque seul les Masters of Evil, excédé d’obéir à la Guêpe.
    Bel article. Et bravo pour le dry january, volontaire ou pas.

    • Nikolavitch  

      Ah, j’avais pas pensé au Dry January, tiens. Mais ça tombe bien.

  • Fletcher Arrowsmith  

    Hey meilleurs vœux au blog, à toutes les lectrices et lecteurs ainsi que les contributeurs et ceux qui les supportent au quotidien.

    Super défi avec quelques punch lines qui augurent d’une années à venir exceptionnelle. Déjà avec les MYSTERY MEN, tu mets tous le monde dans ta poche.

    Mais la colère fait partie des hommes (et des femmes) et pas comme on voulu nous le faire croire que de 12. Moteur scénaristique facile mais tellement humain. D’ailleurs je vois que tu prends plus facilement exemple chez Marvel que chez DC, surement par la différence de leur approche des personnages.

    Super le rattachement à la jeunesse de Kirby.

    La BO : j’ai tenu 1min33 après …… (je retiens quand même le titre du single, il fallait le trouver celui là).

    • Nikolavitch  

      Kirby est un cas d’école pour ça. Lors de son premier départ de Marvel, dans les années 40, il avait promis de casser la gueule à Stan Lee si jamais il le recroisait… il n’ont rebossé ensemble que 15 ans plus tard…

  • JB  

    Le cri de guerre de Mr Furieux n’est-il pas « La colère prend le dessus » ? (Génial, ce film, et pourtant j’ai beaucoup de mal avec Stiller)

    Tant d’exemples utilisant des créations/co-créations du King. La représentation de la colère dans les comics doit beaucoup à Kirby !

    Merci pour cet article comme toujours aussi divertissant que savant

    • Nikolavitch  

      « Mais cette fois…. c’est vrai ! »

      c’est clair. Kirby a pas hésité à mettre en scène des sentiments négatifs, quand Lee, par exemple, était plus prudent là-dessus.

  • Présence  

    Quelle belle rentrée : un article d’Alex pour débuter !!!

    C’est quoi cette intro grotesque qui bouffe déjà plus d’un feuillet et demi de mon article ? – Je me disais aussi, ça fait vraiment diversion. 😀

    Un article très intéressant (comme d’habitude) : je n’aurais jamais pensé à rapprocher cette étude des péchés de la caverne du sorcier Shazam, et pourtant ça s’impose comme une évidence, respect.

    Bon sang : Slaine, Orion, Wolverine, autant d’évidence. Du coup, le développement sur Hulk n’en prend que plus de saveur, et encore plus avec cette magnifique illustration de Bernie Wrightson.

    Le syndrome de la femme dans le frigo : un épisode inoubliable des aventures de Kyle Rainer, peut-être pas très fin, peut-être pas aussi caricatural que ce que Gail Simone a monté en épingle.

    Bienvenu à Cyrille Munaro qui a bien su rendre compte de la stature d’Alex.

  • Jyrille  

    Moi je dis que commencer l’année avec un Défi Nikolavitch, c’est une très bonne idée. Et encore une fois un sujet pertinent ! J’ai adoré l’introduction pleine de verve et oui, MYSTERY MEN le film c’est génial.

    Je suis épaté par le nombre de jeux de mots que tu distilles ici (j’adore celui sur Kylo Ren). Serait-ce JP qui t’aurais contaminé ?

    Le coup du frigo, c’est devenu très connu non ? Un trope dont se sont emparé les féministes je crois (à raison…).

    La BO : un Killing Joke que je ne connais pas mais il est cool.

  • Tornado  

    Et ben, ça commence fort !
    Quelle verve. Qu’est-ce que c’est vivifiant !

    Moi qui pensais que l’élément « colère » dans les comics était une tare de naïveté tonitruante, voilà que j’apprends qu’il s’agit en réalité d’une technique de narration conceptuelle éprouvée. J’en ai le bec cloué ! 😶

  • Kaori  

    Rah mais que c’est bon de commencer la lecture du blog par un article aussi drôle et intéressant !
    J’ai adoré les jeux de mots, les exemples et leurs illustrations. En plus tu mentionnes Gail et ses femmes dans le frigidaire, ça ne pouvait que me plaire !
    J’ai aussi fait quelques recherches google pour parfaire ma culture, c’est toujours chouette 🙂
    Je crois comprendre ne pas être la seule pas fan du tout de Kylo Ren. Je n’ai jamais réussi à pardonner au personnage son acte à la fin de l’épisode VII. Autant j’apprécie Anakin et Luke, autant le dernier, là, c’est pas possible. Je crois d’ailleurs que c’est ce qui m’a empêché de rentrer dans cette dernière trilogie. Ce personnage est un non-sens à lui tout seul. Ou alors j’ai mal compris pourquoi il a mal tourné…

    Bref !
    Sur ce, bonne année à tous les afficionados du blog !

  • Geoffrey  

    Peter Parker a quand même vécu le  » Back in black » après la mort de Tante May avant le navrant One More Day. Et il était très remonté. Au point de remettre le costume à la Venom qui traumatise MJ même quand ce n’est pas le symbiote, il en avait rien à cirer sur le moment. Parker est plus borderline qu’on ne le pense de prime abord : sans la mort de son oncle, pas certain qu’il ne soit pas devenu un super-vilain (ou un énorme connard sans retenue morale ).

    • Nikolavitch  

      Mais justement, il y a eu la mort de l’oncle Ben, et même lorsqu’il dérape, il regrette sincèrement. Y a beaucoup de tristesse rentrée chez Peter.

  • Eddy Vanleffe  

    Salut les aminches!
    J’ai bien lu cet article en temps et en heure.
    J’ai été réjoui et j’ai bien ri out du long. Il faudra faire un recueil de ces articles non? …
    Je lis en ce moment un livre de chez Omake books sur le cinéma des plagiats (C’EST PRESQUE PAREIL de Claude Gaillard chez Omaké Books) et j’avoue prendre un plaisir de fou à me marrer tout en apprenant des trucs sur la pop culture…. Je serai client!

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