FLAM PAS QUICHE

Une revisite du dessin animé CAPITAINE FLAM

Un commentaire composé de l’élève JP NGUYEN

Back to the Future (c) Toei Animation

Produite en 1978-79 par TOEI Animation, CAPITAINE FLAM est l’adaptation animée de CAPTAIN FUTURE, une série de romans de SF écrits par l’américain Edmond Hamilton dans les années 40 et 50. Diffusée en France en 1981 sur TF1, elle a marqué toute une génération de jeunes téléspectateurs, notamment grâce à son générique composé par Jean-Jacques Debout, interprété par Richard Simon avec des paroles écrites par Roger Dumas, un texte sur lequel cet article se propose de revenir pour une relecture parfois narquoise mais bienveillante de ce dessin animé devenu culte.

Après quelques notes entraînantes et un bruitage futuriste, le générique s’ouvre avec la voix off de Dominique Paturel, très familière pour qui a grandi dans les années 80 car il fut le doubleur de moult personnages du petit écran, tel le machiavélique JR Ewing/Larry Hagman dans DALLAS. Il est à noter que Flam, lui, était doublé par Philippe Ogouz, la voix de Bobby Ewing, le frère de JR. Le rapport avec la choucroute ? A peu près aucun, quoique Flam peut aussi être l’abréviation de Flammkeuche, la tarte fine et flambée alsacienne…

Au fin fond de l’Univers, à des années et des années-lumière de la Terre, veille celui que le gouvernement intersidéral appelle quand il n’est plus capable de trouver une solution à ses problèmes, quand il ne reste plus aucun espoir : le Capitaine FLAM !

Flam : pompier de service (c) Toei Animation

Las ! Comme le Boss l’avait déjà pointé dans son article, la base du Capitaine était établie sur la lune, où ses parents, William et Elaine Newton avaient élu domicile avant de décéder, confiant leur fils, Curtis, aux bons soins de leur équipage d’androïdes. Il reçut une éducation et un entraînement intensif pour se préparer à être un aventurier d’exception pour défendre l’humanité contre toutes les menaces venues de l’espace…

Du reste, si le Capitaine avait habité dans des contrées astronomiquement éloignées, cela n’eut point facilité son intervention aux cours des treize crises planétaires qui furent autant de prétextes à ses aventures, à chaque fois découpées en quatre épisodes de 22 minutes.

Enfin, l’image de « dernier recours » évoquée dans cette accroche pourrait sous-entendre un côté « arme atomique »/ »dégâts collatéraux » alors que le Capitaine était plutôt proactif et préférait des solutions non-létales lorsque cela était possible…

On attaque ensuite le premier couplet :
Capitaine Flam tu n’es pas
De notre voie lactée
Mais tu as traversé
[Capitaine Flam]
Cent mille millions d’années
Pour sauver de ton bras
Les gens de Mégara

Le Comet, vaisseau spatial rebaptisé Cyberlab en VF (c)Toei Animation

Cohérent dans son erreur, le parolier localise toujours notre héros dans une galaxie lointaine, alors que, boudiou, c’est un gars bien de chez nous ! En outre, ces paroles rajoutent de la confusion en mélangeant joyeusement deux arcs de la série.

Ainsi, les cent mille millions d’années, sont une référence à la troisième aventure, Départ pour le Passé. Recevant un appel à l’aide émis par une civilisation disparue, Flam remonte le temps à plusieurs reprises et met fin à une guerre entre les planètes Mars et Katan. Cette dernière étant condamnée, Flam entreprend d’aller chercher dans le passé suffisamment de takyonium, le carburant qui permettra d’envoyer toute la population de Katan vers la lointaine Deneb, pour s’y établir.

Quant à Megara, c’est la capitale de la planète Denef (avec un f, les trads n’étaient pas toujours inspirées sur les noms de planète, même si on a échappé à la crise Dener), Denef, donc, où se déroulait la première aventure du capitaine : L’Empereur de l’Espace. Confronté à un adversaire capable de se dématérialiser, Flam y était aussi à la merci d’un rayon de « rétrogradation d’espèce » pouvant le transformer en singe.

Enfin, la puissance physique suggérée par « sauver de ton bras » induit doublement en erreur puisque le Capitaine brille souvent par son intellect et s’appuie sur tout un équipage, mais bon, on y arrive juste après :
Il y a dans ton Cyberlab
Et dans ton Cosmolem
Ton petit copain Ken
Il y a aussi
Tu vois
Ta douce amie Johan
Fregolo et Mala
Qui ne te quittent pas

Hey, ils n’ont pas fait l’appel en entier ! (c) Toei Animation

Si le listing des véhicules utilisés par Flam est correct (le Cyberlab étant le vaisseau principal et le Cosmolem un engin d’exploration plus petit), la présentation du casting reste incomplète. Déjà, « ton petit copain Ken », c’est un peu équivoque quand il ne s’agit que d’un gamin qui s’incruste souvent dans les aventures animées du captain (dans les romans, il apparaît beaucoup moins).

L’expression désignant la « douce amie Johan », agente de la police des planètes, est plus exacte dans la nature de la relation évoquée, bien que qu’elle soit souvent cantonnée au rôle de demoiselle en détresse et que Curtis Newton ne soit pas très entreprenant pour faire avancer leur relation…

L’énumération des compagnons (les Futuremen, dans les romans) omet Crag, le robot noir et rouge à la très grande force physique et le professeur Simon Wright, meilleur ami du père de Flam et dont il ne subsiste que le cerveau, transporté dans une petite machine flottante…
Mala, malgré une apparence humanoïde, est aussi un être artificiel possédant des talents de métamorphe. Fregolo est sa mascotte, tandis que Limaille, également passé sous silence, est la mascotte de Crag.

Dernier manquant à l’appel : Ezla Garnie, le vieux colonel, qui, dans mon souvenir, joue un peu les commissaires Gordon de service…
Omissions, ambiguïtés… seront-elles corrigées dans le dernier couplet ?
Capitaine Flam tu n’es pas
De notre galaxie
Mais du fond de la nuit
[Capitaine Flam]
D’aussi loin que l’infini
Tu descends jusqu’ici
Pour sauver tous les hommes

Sauver tous les hommes… et les femmes, et surtout Johan ! © Toei Animation

Non, le parolier persiste et signe, et c’est assez normal : il faut bien se rappeler qu’on est dans le générique d’un programme destiné à la jeunesse et plutôt pour les petits garçons avides d’action et de sauvetages cosmiques. Une version plus proche des intrigues n’aurait pas résonné aussi fortement aux oreilles des enfants… Imaginez :
Capitaine Flam tu es bien
De notre galaxie
Souvent t’as des ennuis
[Capitaine Flam]
Pour toujours rester en vie
Et dénouer le récit
Brillamment tu raisonnes

Nan, ça n’envoie pas assez de rêve… Allez, on termine par la dernière envolée !
Capitaine Flam oui c’est toi
Un jour qui sauvera tous ceux
De Mégara !

A nouveau, il est bon de rappeler que Flam fera bien plus que sauver la seule Mégara. Il ira traîner son scaphandre sur Bama, Ariel ou Alveola, autant d’astres inventés alors que son homologue de papier explorait plutôt notre chez système solaire car ses aventures avaient été écrites dans les années 40… Et si l’on peut déceler dans CAPTAIN FUTURE des emprunts à FLASH GORDON ou DOC SAVAGE, l’œuvre d’Edmond Hamilton influencera à son tour certains créateurs. Par exemple, son INTERSTELLAR PATROL publié en 1928 constitue une des sources probables d’inspiration, parmi d’autres, pour le STAR TREK de Gene Roddenberry. D’ailleurs, CAPTAIN FUTURE lui avait été commandité par Leo Margulies et Mort Weisinger, responsables de Better Publications, qui souhaitaient lancer un nouveau titre Pulp orienté SF. Le pitch d’origine prévoyait entre autres que le Captain soit un nain à grosse tête, affublé d’un trio de compères assez différents de Crag, Mala et Simon Wright. Ainsi, même si l’idée de départ n’est pas de lui, Edmond Hamilton est sans conteste le vrai père du personnage.

Le générique passe sous silence les ennemis du Capitaine, il est vrai peu charismatiques (c)Toei Animation

Contrairement à d’autres séries, je n’ai jamais réussi à me fixer un RDV cathodique régulier avec le Capitaine. J’ai souvenir d’une diffusion le samedi après-midi, entrant parfois en conflit avec les options choisies par mes sœurs ou mon paternel. Du coup, ne pouvant que rarement suivre l’intégralité des histoires découpées en quatre parties, j’en ai gardé une image fragmentaire, où domine l’impression de bizarrerie. Même si le héros gagnait toujours à la fin, il pouvait subir tout un tas d’épreuves dérangeantes pour le jeune JP, tel le transfert de son esprit dans une créature aquatique dans l’arc Les cinq mines de Gravium… Surfant sur la vague du Space Opera post STAR WARS, Capitaine Flam ne proposait pas tout à fait la même chose et les intrigues, rétrospectivement, étaient bien moins répétitives que, disons, celles de Goldorak ou X-OR.

Plus tard, lorsque la série me fut accessible en téléchargement ou en DVD, l’animation un peu datée m’a maintenu à l’écart de ce personnage pour lequel, paradoxalement, je ne me suis jamais vraiment enflammé. Une nouvelle adaptation BD, qui sort en septembre 2024 pourrait être l’occasion de me ré-intéresser à ce FUTURE du passé, archétypal mais loin d’être tarte, à part peut-être pour les alsaciens !

Bon(s) voyage(s), Capitaine ! © Toei Animation

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La BO du jour :

Et si Johan faisait sa déclaration à Curtis en chanson ?

10 comments

  • JB  

    Merci pour le partage de ces souvenirs ! Je crois que je partage un peu ton expérience : j’arrivais rarement à voir plusieurs épisodes consécutifs d’une série donnée à l’époque, donc le format histoire en 4 parties devait m’avoir refroidi. J’avais récupéré et redécouvert la série en DVD au début des années 2000, sans déplaisir mais sans rien en garder non plus. Une approche cérébrale moins marquante que les aventures rocambolesques d’un Cobra, peut-être, ou moins romantique et tragique qu’un Albator ? J’ai appris à apprécier le genre pulp plus tard, trop tard après le visionnage probablement.

  • phil  

    cool, merci pour cette madeleine
    Avec Goldorak et loin devant bien d’autres dessins animés il fut dans mon top 2, gamin, partant même à la piscine à la bourre pour avoir le générique de fin 🙂

    Que de souvenirs!

  • Ludovic  

    bon vu mon âge, j’imagine que comme beaucoup de lecteurs de ton article, JP. l’effet nostalgique va jouer à plein.

    je regardais beaucoup Capitaine Flam quand j’étais gamin (même si mon animé fétiche de mon enfance restera Goldorak) et il se trouve que lors de la dernière fête du court métrage organisée tous les ans dans les salles de cinéma, on a pu assister à un programme spécial animation japonaise et revoir en salles le temps d’une séance les premiers épisodes de Goldorak, d’Albator et donc… de Capitaine Flam ! c’était très chouette, l’effet madeleine était la, mais la salle de mon petit cinéma de ville était bien remplie, beaucoup de parents ayant emmené leurs enfants, pas mal d’entre eux découvrant sans doute ces épisodes à cet occasion ! c’était très amusant comme expérience, j’ai pu constater que j’avais beau connaître par cœur les paroles du générique de Capitaine Flam (mais qui ne les connaît pas ?) j’avais peu de souvenirs en fait de la série, je n’avais jamais revu un seul épisode depuis mon enfance, ça ne me rajeunit pas !

  • Nicolas  

    Belle rétrospective pour un D.A qui a bercé notre jeunesse. à nous, au Ministère des Vieux Croutons 😉 Des thèmes divers abordés au travers du divertissement : l’évolution des espèces, l’eugénisme (le mystère des hommes-animaux), le trafic de drogue interplanétaire, le besoin vital en air pur de mondes menacés, etc.. En fait une série bien d’actualité quand on y réfléchit.

    Une belle série.

    Et le générique de fin qui nus a tant intrigué, en fait un hommages des Japonais aux souvenirs d’enfance d’Edmond Hamilton.

  • Nikolavitch  

    Gros fan du Captain quand j’étais gamin, d’autant qu’il y avait de chouettes concepts dans la série, ce qui m’a conduit par la suite à me pencher sur l’oeuvre d’Edmond Hamilton, une grosse influence en SF (difficile de ne pas voir l’écho de ses Loups des étoiles dans le tandem Han Solo/Chewbacca, par exemple, surtout sachant que la scénariste de l’Empire contre attaque, Leigh Brackett, n’était autre que madame Hamilton à la ville, et une autrice de SF reconnue par ailleurs, ainsi que la scénariste du Grand Sommeil version Mitchum et de Rio Bravo)

    • Glen Runciter  

      Roooh, confondre « Le grand sommeil » de Michael Winner et « Le privé » de Robert Altman.

      • Nikolavitch  

        ah, j’ai pas revérifié mes refs…

  • zen arcade  

    Capitaine Flam était de très loin mon dessin animé préféré à l’époque de sa première diffusion sur les ondes de la RTBF dans l’émission Lollipop animée par le tout jeune Philippe Geluck.
    Je préférais largement le sense of wonder positif de la série au romantisme pesant d’Albator ou à la répétitivité de Goldorak.
    Capitaine Flam faisait vraiment rêver.
    Ca et la première série Galactica, diffusée également à la RTBf au début des années 80, c’est ce qui a suscité en moi l’intérêt pour la science-fiction.
    Par contre, je suis complètement imperméable à toute la vague de nostalgie qui entoure ce type de productions. Tout cela, ce sont de beaux souvenirs d’enfance mais ils font mieux de le rester.

  • Sébastien Zaaf  

    Hello JP et merci pour ce retour en nostalgie. Je subodore que les génériques de cette époque étaient écrits en vitesse après visionnage du premier épisode sans plus. Ce qui n’altère pas la qualité de certains. Capitaine Flam reste mon dessin animé préféré avec une certaine qualité scientifique et des aventures que je trouve encore marquantes comme l’Empereur de l’espace, les 5 mines de gravium, les semeurs de givre… Et une bande-son jazzy très plaisante. Quelques méchants qui me sont restés notamment Calonne, fils du meurtrier des parents de Curtis et son équipe, sorte de négatif de l’équipe de Flam. Il y avait un côté assez didactique dans les explications scientifiques. Là où Actarus et Albator pouvaient parfois sombrer dans la mièvrerie avec un sentimentalisme facile et Cobra dans une gaudriole érotico-comique pré City Hunter, Flam restait un modèle de droiture intellectuelle avec la raison pour boussole et la science comme bannière. Du coup je vais ressortir le coffret… Direction Mégara et Deneb.

  • JP Nguyen  

    Merci à tous pour vos retours chaleureux et vos ajouts sur cet article où j’ai parfois ressenti le syndrome de l’imposteur, n’étant pas un ultra fan ni grand connaisseur du dessin animé. Le générique m’a servi de fil rouge et j’ai consulté plusieurs sources sur le net pour ne pas raconter trop de bêtises.
    Sébastien, tu fais bien de mentionner les musiques ambiance jazzy, un autre marqueur de la série.

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