Goldorak par Collectif
Un article de BRUCE LITVF : Kana
1ère publication le 1/11/21- MAJ le 23/12/21

©Go Nagai / Dynamic Planning
©Bajram / Cossu / Dorison / Sentenac
©Kana
Validée par Go Nagai en personne, GOLDORAK est la suite officielle des aventures d’Actarus et de ses amis. Il s’agit d’un projet resté aussi secret que les disques de Bowie pendant 5 ans (une prouesse en soi) porté par une équipe française composée de Xavier Dorison et Denis Bajram au scénario ainsi que de Brice Cossu, Alexis Sentenac et encore Bajram pour les illustrations et l’encrage. Yoann Guillo colorise le tout.
Parue aux éditions Kana avec une promotion digne d’un prince, GOLDORAK existe en version simple et collector. Il s’agit d’une histoire complète de 136 pages avec en bonus un cahier d’élaboration du projet reproduisant le WIP des différents auteurs, leurs motivations et leur éthique autour de ce projet.
On y remarquera notamment la lettre d’amour que Xavier Dorison adressera à Go Nagai pour obtenir son blanc seing, une photo des auteurs avec leur Goldocollection et une planche de bande dessinée de Bajram réalisée à 10 ans.
Enfin l’érudit appréciera retrouver dans les crédits ces fripouilles de Sébastien Carletti et Jean-Marc Lainé auteurs notamment des ANNÉES STRANGE.
Attention : des spoils mineurs voleront à la vitesse d’un fulguro-poing.

©Go Nagai / Dynamic Planning
©Bajram / Cossu / Dorison / Sentenac
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A bien des égards GOLDORAK et son prince Actarus auront été au manga et à l’animation japonaise en France ce que James Dean fut au rock : le déclencheur d’une infernale culture geek qui, si elle paraît évidente désormais, fit les mêmes ravages auprès des parents que le binaire considérée comme une musique de voyous et de dépravés.
Alors que l’on se demandait dans les 70’s s’il fallait laisser ses enfants sortir avec un Rolling Stone, le portrait de Goldorak, apposé à côté de celui d’Hitler était accusé de rendre les enfants violents bien avant SQUID GAME.
Les enfants français apprirent la résilience en suivant parfois clandestinement ce programme honni et se prirent de passion pour ce prince ténébreux et mélancolique au même parcours d’un Superman qui, après avoir trouvé asile sur notre planète, allait en devenir le plus fervent défenseur. Un parcours qui sera répété plus tard par Goku avec qui GOLDORAK partageait un autre point commun : les musiques sensationnelles de Shunsuke Kikuchi.
Demandez à qui aura vécu ces années magiques, il vous les racontera avec autant d’étoiles dans les yeux que s’il avait assisté à un concert des Beatles et sans doute plein de produits dérivés collectors, les mêmes que ceux du rock !
Oui, Goldorak c’est la 1ère rock star des enfants, la transformation d’Actarus le 1er clip de toute une génération. Le mythe est intact, suffisamment pour légitimer ce revival.

©Go Nagai / Dynamic Planning
©Bajram / Cossu / Dorison / Sentenac
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Après un résumé consciencieux des 75 épisodes, l’histoire peut commencer. Elle se passe une dizaine d’années après la victoire d’Actarus sur le grand Stratéguerre. Alcor est devenu un jeune entrepreneur millionnaire nettement plus sympathique que JP Fanguin. Venusia est interne en médecine. Leur quotidien est bouleversé lorsqu’un nouveau Golgoth attaque la terre.
Les survivants de Vega à la recherche de Lasernium posent un ultimatum aux terriens : ils ont 7 jours pour partir du Japon avant l’extermination du pays. Le professeur Procyon découvre médusé que l’armée a capturé Actarus et tente de mettre la main sur Goldorak.
Nos amis vont avoir du pain sur la planche durant ces 140 pages : échapper aux griffes de l’armée, retrouver le robot géant, effacer rancunes et malentendus pour enfin affronter Véga.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que les auteurs se sont refusés à la facilité. Quand beaucoup se seraient contentés de bastons homériques à coups de fan service et de splash page, Bajram et Dorison battissent un hangar scénaristique où stocker un gros jouet qui ne décollera qu’à la moitié de l’histoire.
Auparavant, fidèles au matériel de base, ils construisent à coup de petits chapitres et de titres dramatiques, une intrigue pleine d’énergie où le passé et le présent s’enchaînent sans jamais se télescoper.

©Go Nagai / Dynamic Planning
©Bajram / Cossu / Dorison / Sentenac
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En cela, rendons grâce à cette patrouille des aigles : GOLDORAK est un blockbuster où le talent écrasant de ses auteurs coexiste pacifiquement et pousse son œuvre vers l’avant plutôt que de l’enkyster dans une bataille d’égos ; une prouesse en soi quand on sait que la longueur et la pression du projet auraient pu faire basculer des auteurs moins talentueux du côté obscur.
Bajram, Dorison, Cossu, Sentenac et Guillo mettent, comme des héros de Shonen, leur énergie en commun pour un but commun. C’est bouillonnant et rationnel. Passionné et professionnel. Lucide et idéaliste.
Comme une boule de flipper, les 5 auteurs virevoltent entre tout cela sans jamais faire tilt.
Si leur Actarus est usé de cette guerre sans fin, ils nous font grâce d’un Prince d’Euphor qui jetterait son casque du haut d’une falaise pour aller traire des chèvres tandis que crève sa planète…Merci à eux donc de ne pas avoir introduit de nouveaux personnages ou de robots dont on n’aurait que faire, de ne pas avoir cloné Hydargos ou empaler Alcor….

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©Bajram / Cossu / Dorison / Sentenac
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140 pages c’est court mais suffisant pour retrouver un Alcor impétueux mais attachant, une Vénusia discrète mais brillante, une Phénicia charmeuse et intrépide et Procyon, le cinquième Beatles, bienveillant et protecteur.
D’abord ombrageux voire un peu pénible au début, plus christique que jamais avant qu’un nouvel épisode bouleversant ne vienne éclairer la nouvelle personnalité du Prince tout étant raccord avec l’ancienne : un héros qui a du sang sur les mains, un justicier qui a souvent annihilé ses ennemis sans remords, un pacifiste que sa colère a failli perdre. N’oublions pas qu’Actarus n’a jamais hésité à pulvériser ses ennemis sans trop d’arrière pensées. Cette histoire lui apporte l’addition et elle est salée.
Un superbe travail de caractérisation est fait pour Rigel lors d’une séquence pleine de justesse qui va inspirer Actarus pour la résolution du conflit.
Mais la grande réussite de l’album reste l’écriture de Vega présentés non plus comme un peuple assoiffé de sang mais comme des individus aux opinions divergentes et faussées par les événements de la série. Certains sont des conquérants orgueilleux pour qui les humains ne sont que des microbes (ils pourraient entrer chez les Xmen), d’autres sont aveuglés par leur colère d’avoir vu Goldorak tuer un membre de leur famille et enfin une faction ressent le besoin de mettre fin à cette guerre quitte à pactiser avec leur ennemi juré.
En cela, Bajram et Dorison se rappellent que même des ordures comme le général Horos étaient capables de sentiments humains et que Vegalia, voulait négocier la paix entre Actarus et son peuple.
Encore un bel exemple de changement dans la continuité. Le manichéisme souvent à l’oeuvre dans l’animé culte n’est plus de mise. Il ne s’agit plus d’une lutte du bien contre le mal mais de deux peuples avec pour enjeu la pénurie d’énergie.

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Si les nombreux dialogues font la part belle à la psychologie et aux motivations des personnages, GOLDORAK fournit son lot d’action et de combats titanesques au point de craindre pour la vie de nos amis. Le dernier affrontement dans le mont Fuji en éruption rejoint les grands affrontements dramatiques geek dans un lieu en fusion : TERMINATOR 2, le final entre Goku et Freezer dans DRAGONBALL Z et bien entendu le duel entre Obi-Wan et Anakin.
Graphiquement, c’est un régal. Cossu, Sentenac et Bajram livrent des planches détaillées jusqu’à l’obsession. On reconnait le moindre recoin de la base de Goldorak, les personnages parviennent à crever l’écran en étant à la fois dessinés en francobelge, manga et comics.
On reconnaîtra ici et là des clins d’oeils fabuleux à la culture geek : la mort de Wolverine dans DAYS OF FUTURE PAST, Goldorak à l’agonie comme Vegeta face à Freezer et le général terrien qui torture Actarus pour obtenir Goldorak n’est pas sans rappeler le Bastion de OPERATION ZERO TOLERANCE. La synchronisation nécessaire entre Actarus et son robot rappelle bien entendu celle d’EVANGELION. Nos amis poussent même le vice jusqu’à insérer le disque de Noam dans l’histoire !

©Go Nagai / Dynamic Planning
©Bajram / Cossu / Dorison / Sentenac
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Louanges enfin à Yoann Guillo qui alterne entre des couleurs douces lors des conversations entre nos héros et suffocantes lors de l’affrontement final. Son apport est fantastique sur au moins deux moments clés de l’album : la réactivation d’un Goldorak immergé et le signal lumineux d’une plante alien activée depuis la terre.
Si à quelques moments l’équipage se prend les pieds dans le tapis de sa fresque ambitieuse (on peine à croire qu’Actarus, tel un Jack Bauer revenu de Chine, soit en si bonne condition physique et mentale après des années de torture), la démonstration est brillante et le plaisir contagieux.
On aurait tort de cantonner ce revival à de la pure nostalgie. C’est au contraire un vrai travail d’auteurs pour donner au robot d’acier sa plus grande aventure et une fin émouvante.
Goldorak était à la fois capable de recul grâce à son rétro-laser et de s’éjecter de sa soucoupe pour aller de l’avant. Dorison, Bajram, Sentinac, Cossu et Guillo ne procèdent pas autrement et pulvérisent à coup de pulvonium toutes les réticences que ce projet nostalgeek pouvait susciter. Ils confirment enfin l’insolente réussite des Frenchies au pays des franchises mangas : GOLDORAK mais aussi l’inattendu NICKY LARSON de Philippe Lacheau ou le ALBATOR de Jérôme Alquié. Tous les regards se tournent désormais vers son SAINT SEIYA.

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BONUS LIT



La BO du Jour : un Opening de folie !

Je viens de tomber amoureux du dessin de Brice Cossu et non pas pour ce Goldorak (qui écrase malheureusement ses auteurs sous le titre)
mais dans LE TRIOMPHE DE ZORGLUB qui je viens d’emprunter à la bibli.
C’est rond, charmant, non dénué de sensualité, d’humanité et très dynamique.
Je vais donc prolonger sur FRNCK des mêmes auteurs pour voir si c’est aussi fun et marrant
anecdote: LE TRIOMPHE DE ZORGLUB reprend le même concept qu’un arc d’ULTIMATE SPIDER-MAN qui voit son héros faire face à l’adaptation de sa vie en film, rencontrer son acteur, le réal etc….
une très jolie Seccotine qui est devenu depuis peu un de mes persos préférés