Interview Olivier Bocquet

Un rouquin mutin par Brice Cossu

Un rouquin mutin par Brice Cossu

Un entretien mené par BRUCE LIT

Première publication le 15/10/18- MAJ le 07/06/20

Attention, entretien fleuve ! A l’heure où la presse en ligne met en début d’article le temps de lecture restants à l’intention des lecteurs plus pressés, chez Bruce Lit on se la joue entretien en profondeur avec l’un des scénaristes les plus doués de sa génération.  En moins de 5 ans, l’homme a ressuscité Fantomas dans un thriller noir et romantique,  détourné le sordide de la littérature de Camilla Lackberg pour en faire un « Feelgood Thriller », donné une fin mémorable au TRANSPERCENEIGE de Lob et Rochette avant de scénariser l’autobiographie de ce dernier dans le déjà classique AILEFROIDE qui vient de remporter cette semaine le grand prix Ouest France-Quai des Bulles.

Et ce n’est pas fini, car avec Brice Cossu au dessin, il triomphe avec FRNCK dans des aventures pour enfants qui séduiront les plus grands ! Voici, pour vous chers Bruce Liseurs, l’interview ultime (en attendant la prochaine) de  Olivier Bocquet mené par internet interposé et pour laquelle vous avez répondu massivement sur le FB du blog : oui, on veut lire ça en entier, sans saucissonnage en deux parties.  

You want it, you got it -Bruce

Non mais des fois qu'on croit pas que j'use de superlatif à la légère... (C) Casterman

Je ne suis pas le seul à user de superlatifs…
(C) Casterman

Salut Olivier : depuis le temps que je vante tes œuvres sur le blog, il était temps que tu passes à la casserole d’autant plus que, ce n’est pas un secret, ta compagne, Vero Cazot, est déjà passée au Bruce Lit Detector deux fois l’année dernière : prêt ?

I was born ready. Non en fait les gens qui disent ça m’impressionnent vachement. Moi quand je suis né c’était la panique, je comprenais rien, je pleurais et tout, c’était n’importe quoi.

Comment es-tu venu à la BD ?

J’ai toujours lu de la BD, mais je ne me projetais pas dans ce métier pour une raison qui rétrospectivement me semble absurde : je dessine comme une vache espagnole. Mon scénario pour LA COLÈRE DE FANTOMAS était à l’origine destiné au cinéma, mais son destinataire (Thomas Langmann, qui avait les droits) n’a pas jugé utile de le lire. Par dépit, j’ai envoyé le dossier à des éditeurs, et là, miracle : si tu as une bonne histoire, elle voit le jour. C’est aussi simple que ça. En revanche t’as intérêt à avoir une autre source de revenus les premières années… voire pour toujours.

Ta bio Casterman précise que tu as fait Sexeur de poussins….

Oui. Ça intéresse beaucoup les gens, ça. Tu leur souffles sur le cul pour détecter par des signes subtils si c’est un mâle ou une femelle. Mâle : à la broyeuse. Femelle : aux travaux forcés. Le tout c’est de ne pas s’attacher. Si tu commences à leur donner un nom, c’est foutu. Cela dit, il ne faut pas forcément croire tout ce qu’on lit sur internet. Ne perdons pas de vue que quand on demande à un auteur de fiction d’écrire sa bio, il peut être tenté d’appliquer le précepte de John Ford dans L’HOMME QUI TUA LIBERTY VALANCE : « Print the legend ».

Comment ta famille a réagi à ton choix ? Le monde de la BD est assez terrifiant ! La plupart des artistes crèvent de faim ! D’autres jettent l’éponge !

À 6 ans, j’ai dit à mes parents que je voulais être clown. À partir de là, ils ont cessé d’espérer. Je me rappelle quand même que, quand j’ai quitté un job parfaitement chiant chez EDF en leur disant « maintenant je vais vivre de mon écriture », ma mère m’a répondu « et après tu feras quoi ? ». Pour l’instant, j’ai la chance de ne pas avoir eu à répondre à cette question.

Tu formes un couple avec Vero CAZOT. Vivre avec une scénariste, c’est pas trop risqué  ?

Non, c’est bien. Je pense que ce serait plus difficile de vivre avec une personne qui a un boulot plus normal, avec des horaires normaux, des relations sociales normales… On comprend très bien quand l’autre est inaccessible, plongé dans son petit monde intérieur, ou quand il désespère de son travail, se sent nul, illégitime et veut tout arrêter. Et on travaille sur des histoires tellement différentes qu’on ne se trouve jamais en concurrence. En revanche, on peut échanger sur nos travaux en cours et c’est parfois très libérateur. Cela dit, quand on s’est rencontrés on a réalisé qu’on travaillait tous les deux sur le même pitch : une histoire d’amour avec un homme invisible. La version de Vero était meilleure que la mienne, c’est devenu LES PETITES DISTANCES.

En 5 ans de carrière, tu as sorti 14 albums, un roman et reçu 5 prix ! En dehors du fait que le chiffre 5 semble te convenir, c’est quoi la méthode Bocquet ?

Le roman est sorti en 2009 ou 2010, je crois. Mais ma méthode est simple : je m’enthousiasme, et après je regrette. Je me dis toujours « ça va, c’est rien, j’écris ça en un mois »… mais comment je peux me mentir à ce point ? Je suis un laborieux, je ne devrais pas travailler sur plus d’un projet à la fois, c’est ça qu’il me faut. Et un chat et du soleil et de l’amour. Pas des années entières passées devant un ordinateur sans prendre de week-ends ou de vacances. Ça n’empêche pas que si je compare ma biblio à celle de plein (PLEIN) de scénaristes de BD, en fait je publie peu. Je n’ai pas assez de bonnes idées pour écrire plus. Enfin, pas assez d’idées qui valent la peine d’abattre des arbres pour faire de la pâte à papier. Parfois les histoires sont plus percutantes racontées à une poignée de potes autour d’un plat de pâtes.

En dehors d’écrire des BD, en lis-tu ?

Avec Vero, on doit acheter en moyenne une ou deux BD par semaine, peut-être plus (on en revend plein, et on achète souvent d’occasion), donc oui, je lis pas mal de BD. Mon maitre absolu, mon guide en tout, mon exemple de vie, l’homme que j’aurais voulu être, c’est Bill Watterson. Je l’ai découvert dans mon adolescence et j’ai acheté religieusement tous les recueils de CALVIN ET HOBBES en VO, année après année, avec mon argent de poche. Je les relis très régulièrement. FRNCK n’existerait pas si Calvin n’existait pas. J’ai aussi beaucoup d’amour pour CUL-DE SAC de Richard Thompson. J’ai tous les Peanuts aussi, et je les ai tous lus, dans l’ordre. J’adore cet univers drôle et mélancolique que Shulz a construit. Je pourrais sans doute vider toute ma bibliothèque et ne garder que ces trois séries de comic strips, et les cases de Gary Larson pour THE FAR SIDE. Le comic strip, selon moi, c’est un genre parfait, qui contient tout. La quintessence de la BD. Dans mes derniers coups de cœur, je citerais Vero Cazot… Et en ce qui concerne la BD, eh bien… même réponse. Et ne va pas croire que le fait qu’on couche ensemble altère mon jugement. Rien à voir.

Et de temps à autre Bocquet signe du Spirou (C) Dupuis

Et de temps à autre Bocquet signe du Spirou
(C) Dupuis

Un autre prodige, Jérémie Moreau a reçu le Fauve d’or à Angoulême l’an dernier : c’est un espoir pour ton métier, cette consécration à 30 ans ?

Je ne sais pas. Je ne crois pas qu’un prix, quel qu’il soit, représente grand-chose en réalité. Ça peut bien sûr donner une visibilité temporaire à une œuvre (BETTY BOOB a largement bénéficié du Prix de la BD Fnac par exemple et, malgré les conseils des libraires, je n’aurais peut-être pas lu l’excellent bouquin de Moreau s’il n’avait pas été récompensé), mais qui se souvient du Fauve d’Or de l’an de l’an passé ? D’il y a deux ans ? Trois ? Quasi personne. C’est pareil dans tous les domaines.

Qui a eu la Palme d’Or, le Prix d’Interprétation, l’Oscar, le César, le Molière, le Goncourt, le Nobel ? Ça n’intéresse en réalité que des milieux minuscules, qui se rassurent en se faisant des cadeaux. Attention : le fait que ça ne concerne que des petits milieux ne rend pas les prix moins importants, et certaines carrières peuvent être lancées ou relancées grâce à eux. Pendant quelques années il est sans doute plus facile de travailler quand on a un Fauve d’Or, par exemple. Mais ça n’empêche pas de relativiser…

Rochette, par exemple, est un miraculé. Si Bong Joon-Ho n’était pas tombé sur une édition pirate coréenne du TRANSPERCENEIGE, si le film n’avait pas connu un succès international, à quoi ressemblerait la carrière de Rochette aujourd’hui ? Une poignée de « vieux » auteurs vendent encore super bien, mais la plupart sont simplement en galère. Et pour les auteurs « entre deux âges », ceux qui ne peuvent plus se permettre de travailler dans les conditions de leurs débuts parce qu’ils ont des enfants, un logement à payer, etc, la question se pose tous les jours de savoir s’ils doivent arrêter. Pardon, je dérive de la question. Pour ceux que ces questions intéressent, je conseille d’aller voir le travail du SNAC ou de la Ligue des Auteurs Professionnels.

Bientôt chez Titan Comics ! (C) Titan Comics

Bientôt chez Titan Comics !
(C) Titan Comics

– LA COLÈRE DE FANTÔMAS (2013-2015)

VF : Dagaud

VO : Titan Comics

Publiée en trois parties entre 2013 et 2015, puis rééditée en version intégrale, LA COLÈRE DE FANTÔMAS met en scène dans une atmosphère sombre et violente les aventures de Fanômas contre le commissaire Juve. Épaulé par le dessin surdoué de Julie Rocheleau,  Bocquet signe un premier scénario récompensé par le prix Interpol’Art de Reims, le Prix Bédéis causa Albéric-Bourgeois (Quebec) et le Prix Cutting Edge de la meilleure bande dessinée étrangère.

Ce qui frappe en lisant ta bibliographie, c’est que tu sembles être un champion de l’adaptation. Tu commences ta carrière avec… Fantômas ! C’est pas banal !

Ça m’a sans doute rassuré d’arriver dissimulé derrière un personnage immense… et en fait c’était une connerie, parce que pour la plupart des gens, Fantômas c’est le passé. C’est ringard et poussiéreux. Mon dossier est resté sur le bureau des éditeurs pendant 7 mois avant d’être lu. J’ai d’ailleurs reçu la même semaine le coup de fil de Dargaud et de Casterman. C’est Dargaud qui a emporté le morceau au final.

La littérature, les films, Fantômas est un mythe littéraire aussi fort que Sherlock Holmes. Tu t’es tapé l’intégrale des romans et les De Funès ?

Au moment où j’ai travaillé dessus, il n’y avait que les 12 derniers romans publiés chez Bouquins, je les ai lus intégralement, ainsi que les 4 premiers trouvés chez des bouquinistes. C’est un vrai boulot car ils n’ont ni queue ni tête, c’est écrit n’importe comment, ça n’a aucune structure, aucune cohérence, ça tire à la ligne… Mais au final c’est tellement plein d’idées géniales que l’effort en valait la peine. C’est un coffre à jouets pour quiconque aime jouer.

J’ai aussi vu les De Funès, les Feuillade, la mini-série d’Antenne 2 du début des années 80, le film de 1932, celui de 1947, la pièce avec Romane Bohringer, j’ai écouté des fictions radio, lu des BD brésiliennes… J’ai un peu fait le tour de la question et j’ai réalisé qu’à peu près tout le monde (en dehors de Feuillade) est passé à côté du potentiel du personnage des romans. Franchement c’est un putain de scandale : on a un joyau français de la dimension de Batman, et personne ne prend la peine de lui donner l’écrin qui lui convient. C’est ce que j’ai essayé de faire, j’avais des ambitions délirantes pour notre Fantômas : réhabiliter un méchant aussi charismatique que le Joker ! J’aurais bien aimé que cette BD devienne un film.

Fantômas est un vrai salopard qui assassine, torture et exécute. Tu expliques dans ta préface que le premier super-vilain de la littérature populaire est français !

Oui, vingt-cinq ans avant les superhéros américains. Et je prétends que les américains s’en sont inspirés. Personne ne m’a contredit jusqu’à présent ! Il faut savoir que Fantômas était très connu aux États-Unis. La Fox a produit une vingtaine de films librement adaptés des romans de Souvestre et Alain entre 1920 et 1921, qui ont été diffusés et rediffusés pendant des années dans les salles américaines. Chez nous, pour des questions de droits, ils portaient le titre « Les exploits de Diabolo ». Et quinze ans plus tard — en 1936, deux ans avant la naissance de Superman — arrive le tout premier super héros des comics américain. Intégralement vêtu de noir, le visage masqué, il s’appelle The Phantom. Et ce serait une coïncidence ?

Ton œuvre est marquée par un certain humanisme et optimisme. Avec Fantômas, tu es en totale rupture avec toi-même !

J’aime bien l’outrance et le ricanement aussi. J’aime le côté grandiose, outré, démesuré de ce personnage. Et j’aime par-dessus tout le fait qu’il soit un Méchant Sans Cause. C’est comme la pub Orangina Rouge des années 90 : Pourquoi est-il si méchant ? Parce que ! Mais tous ceux qui s’opposent à lui, finalement, sont des cœurs tendres. Juve, Fandor, Lady Beltham, Jeannette, le clodo Bouzille… J’aime beaucoup la relation vacharde entre Juve et Jeannette, sa servante (que j’ai inventée, d’ailleurs. Dans l’œuvre originale il s’agissait d’un homme un peu neutre). On sent tellement de complicité entre eux. J’avais prévu de développer leur relation dans les suites… qui ne verront peut-être jamais le jour. J’avais même envisagé un spin-off sur Jeannette. Mais bon, si déjà on pouvait faire la suite de Fantômas…

Tu lui as donné une certaine aura romantique : Fantômas est un homme sans visage dont l’humanité se manifeste uniquement par amour…

Voilà ! Même lui c’est un cœur tendre, finalement. Mais un cœur tendre blessé. Sa seule « faiblesse », c’est son amour, et ce que raconte cette trilogie au fond, c’est comment il va supprimer l’amour de sa vie afin de devenir un surhomme. Un homme sans point faible.

La fin du monde, la préhistoire, les tueurs en série, ton écriture s’aventure souvent dans des zones où l’humanité se dilue. En as-tu conscience ?

Je n’y avais jamais pensé comme ça. D’ailleurs j’ai un prochain projet qui se situe aussi dans cette zone-là, je m’en rends compte maintenant. J’avais plutôt tendance à me dire qu’un lecteur non averti ne pourrait pas imaginer que l’auteur de TERMINUS est aussi celui de FRNCK. Eh bien je me trompais. Un moteur de fiction très puissant pour moi, c’est « la personne ordinaire dans une situation extraordinaire ». Je n’aime pas du tout, par exemple, les films où un gars est poursuivi sans raison par des tueurs sanguinaires et comme par hasard se trouve être un ancien tireur d’élite qui sait piloter un hélicoptère et dont le meilleur pote est un hacker. Je préférerais par exemple que ce soit une pauvre factrice complètement dépassée par l’énormité de ce qui lui arrive et qui n’a pour se défendre que sa connaissance du service postal. Naturellement, une « situation extraordinaire » ça pousse un peu vers les extrêmes, et il semblerait que « l’humanité qui se dilue », ça me parle. Mais je vais me surveiller, maintenant !

Cela dit, je crois que j’aime bien confronter mes personnages à des situations où ils ont le choix. Je veux dire par là que quand tu débarques en pleine préhistoire ou dans une société post-apocalyptique, tu as en mains la possibilité de choisir ta voie, sans être contraint par le Code Civil ou le Code Pénal. L’argument « on fait comme ça parce qu’on a toujours fait comme ça », ou « parce que c’est dans la loi » ne tient plus. C’est à toi de décider de ce qui est juste. C’était très présent dans Terminus, par exemple. À la fin du bouquin, nos héros n’ont tué personne et laissent à chacun le choix de sa destinée. Et pourtant, je ne pense pas qu’on puisse dire que c’est un livre mou, ou consensuel. C’est un livre sombre, violent et moralement compliqué.

Worki in progress de la grande Julie Rocheleau (C) Julie Rocheleau

Work in progress de la grande Julie Rocheleau
(C) Julie Rocheleau

Que ressens-tu pour Lady Beltham à la fois victime et amante du monstre ?

C’est un personnage complexe, j’ai bien aimé le travailler et j’aurais bien du mal à avoir un avis tranché sur elle. De prime abord on pourrait y voir une sorte de prototype des femmes abusées qui restent avec leurs abuseurs car elles sont sous leur emprise. Mais on ne le voit jamais la menacer, la frapper, ou même tenter de la manipuler. Son ascendant sur elle relève plus d’une sorte de magnétisme inexplicable, de fascination… Elle jouit d’être au contact d’une telle puissance. Et quand on creuse, on réalise qu’elle est ambitieuse, manipulatrice et égoïste. Elle dit qu’elle désapprouve les activités de Fantômas, mais pourtant collectionne les articles de journaux sur ses faits d’armes. Elle est objectivement complice, en réalité. Finalement, tant que les méfaits de son amant ne la visent pas personnellement, elle s’en accommode très bien, je trouve.

Fantômas tue ses propres hommes à coup de pied de biche, collectionne les têtes coupées, affronte son fils Fandor ; mazette, tu veux traumatiser tes jeunes lecteurs ?

Je trouve que tout ça est fort joyeux, en fait. Il y a quelque chose de grand-guignolesque, renforcé par le dessin de Julie Rocheleau. Je crois que le lecteur n’y croit pas vraiment, il prend du plaisir à voir ces horreurs parce qu’elles sont too much, comme une fontaine de sang qui jaillit d’une gorge dans un film de sabre japonais. Et puis il y a toujours un contrepoint humoristique, comme lorsque Fantômas embroche la cuisinière en plein tribunal. La réplique qui suit l’exécution est là pour provoquer chez le lecteur un rire à proportion de l’horreur que montre l’image. Encore une fois, le dessin de Julie aide beaucoup à prendre de la distance. Imagine la même histoire racontée par Larcenet. Ça pourrait être génial, mais on en sortirait traumatisés.

FANTÔMAS est un album sans concession : violent (la bagarre finale se termine sous une guillotine), à l’ambition artistique élevée : couleurs chaudes pour un personnage glacial et lettrage travaillé. En outre les couvertures sont très inquiétantes. Quelle a été la réaction de Dargaud ?

Le patron de Dargaud de l’époque, Philippe Osterman, a dit quelque chose qui m’a marqué quand il a vu les premières planches de Julie. Il avait lu mon histoire avant, il l’aimait bien. Et là, alors qu’il était bluffé par le talent de Julie, il a dit à Pauline Mermet (notre éditrice) et à moi : « C’est superbe. Vous avez décidé de faire de l’art, et ça va être un album magnifique. Je respecte ça et on vous soutiendra sans réserve. Mais vous venez peut-être de perdre 100 000 ventes. ». Je ne sais pas si un dessin plus classique nous aurait permis plus de ventes, mais le fait est qu’on est loin des 100 000 ! Mais je vais te dire un truc : si c’était à refaire, je referais exactement la même chose. Je suis extrêmement fier d’avoir pu travailler avec Julie et je continue de trouver son travail sur ces albums renversant. Et je crois que tout le monde chez Dargaud aime notre FANTÔMAS tel qu’il est, « sans concession », comme tu dis.

Sûr que ça change de Jean Rais contre De Funès !  (C) Dargaux

Sûr que ça change de Jean Marais contre De Funès !
(C) Dargaux

Au final l’audace paie : l’album est bardé de prix. Cette reconnaissance si rapide, c’est stimulant ou angoissant ?

Eh bien… tu connais maintenant ma position sur les prix. On a surtout eu un accueil critique exceptionnel pour un premier album. Grâce à Dargaud qui a effectivement soutenu notre travail à fond, on a parlé de nous partout dans la presse spécialisée et dans la presse généraliste, et on a été très soutenus par les libraires. C’était vraiment ce qui pouvait nous arriver de mieux pour la suite, on avait été « remarqués ». Ça t’assure de susciter au moins un peu de curiosité quand tu sortiras un autre album. Et avec 4000 nouveautés par an, « un peu de curiosité » c’est déjà beaucoup. Quant à l’angoisse… Pour moi, l’échec est plus angoissant que le succès !

– La trilogie Camilla Lackberg (2014-2018)

VF : Casterman 

Entre 2014 et 2018,  accompagné de la dessinatrice Suisse Léonie Bischoff, Bocquet signe l’adaptation en BD de trois romans de Camilla Lackberg : LA PRINCESSE DES GLACES,LE PREDICATEUR et LE TAILLEUR DE PIERRE.

Revenez ! Ce n'est pas la Reine des neiges !

Libérée ! Congelée ! (C) Casterman

2015 est une année chargée ; tu signes coup sur coup les adaptations des livres de Camilla Lackberg, le dernier volume de FANTÔMAS et la conclusion de TRANSPERCENEIGE. Tu as fini sur les rotules ?

Clairement, oui. Cette année-là, j’ai aussi écrit le premier tome de FRNCK et développé un autre projet. J’avais calculé qu’en l’espace de 12 mois j’avais écrit quelque chose comme 580 pages de BD, dans des styles très différents. J’en étais arrivé au point où regarder mon clavier me faisait physiquement mal. Je me suis énormément calmé depuis, ça m’a servi de signal d’alarme.

L’univers de Läckberg n’a pas l’air de t’intéresser plus que ça…

Haha ! Tu as raison, ce n’est pas du tout ma came. Au départ, ces trois adaptations étaient une commande de Casterman. Après avoir lu le dossier FANTÔMAS ils voulaient travailler avec moi. Ils m’ont proposé un contrat pour trois bouquins alors que le premier tome de FANTÔMAS n’était même pas sorti, c’était une chance inespérée pour un débutant, je n’ai pas pensé une seconde à refuser. En revanche, les romans me tombaient des mains, au sens propre. Je m’endormais dessus et je me réveillais quand ils m’échappaient des mains. Je me suis dit OK, comment est-ce que moi j’écrirais ces histoires pour qu’elles ne m’endorment pas ? Et j’ai réalisé que ce que je préférais, c’était ce qui se passait entre les lignes. La psychologie des personnages, leurs relations, qui sont en filigrane dans les bouquins, m’ont donné une clé d’entrée. Léonie Bischoff, la dessinatrice, partageait ma vision des choses. Alors j’ai écrit « ma » Princesse des Glaces, en changeant plein de choses (y compris la fin ! qui change la fin d’un polar ?), on a proposé ça à Camilla Läckberg, et elle a dit oui. Après, on n’a plus jamais eu de nouvelles d’elle, ni pour cet album ni pour les suivants. Elle-même considère ses livres comme des produits, elle ne s’en cache pas, le revendique même. Elle n’a strictement aucune ambition littéraire, elle fait juste des affaires. Nos adaptations sont une virgule dans son compte d’exploitation.

Il semblerait que tu aies entrepris de rendre Erika sympathique alors qu’elle est insupportable dans les romans…

Oui. Je ne comprends pas pourquoi Läckberg charge Erika à ce point. Celle qui était son héroïne dans le tome 1 devient une mémère plaintive et relou dès le tome 2, et au tome 3 elle n’est plus qu’une figurante casse-couilles. Si les bouquins étaient écrits par un homme, ce serait vu comme ultra-sexiste. J’ignore ce qu’il advient d’elle par la suite, mais Erika telle que Léonie et moi la voyions n’était pas comme ça. Alors je lui ai inventé une autre vie. Littéralement. Ça a commencé assez doucement dans le tome 1, mais dès le tome 2 la plupart des scènes où elle figure n’existent pas dans le livre, et dans le tome 3 c’est presque 100 % inventé.

Comment travailles-tu ton adaptation : tu surlignes les pages de Lackberg au stabilo ?

Je fais exactement le contraire : je barre à grands coups de marqueur tout ce qui ne m’intéresse pas. Et ça fait beaucoup de coups de marqueur, crois-moi. Parfois j’entoure une phrase qui va devenir une séquence complète, parce que ça m’inspire quelque chose. Mais comme je disais, plus j’ai avancé dans l’écriture des tomes, plus je me suis éloigné des livres. Le plus gros du travail consistait à ça, finalement : raconter « la même » histoire, mais en la réinventant complètement. Je ne sais pas s’il reste un dixième de scènes communes entre le livre et la BD pour le tome 3. Les intrigues policières ne m’intéressaient pas, je me suis concentré sur les personnages. D’ailleurs dans le troisième roman, l’enquête policière imaginée par Läckberg est pleine de trous, ça n’a aucune logique. Si des vrais policiers menaient l’enquête plutôt que des policiers de fiction, elle serait bouclée en une journée au lieu de quelques semaines. Concentrons-nous donc sur les personnages, sur ce qu’ils ressentent, sur leurs relations. Par exemple dans le tome 2, j’ai introduit la petite fille qui mourra au début du tome 3, de façon à ce que cette mort signifie quelque chose pour le lecteur. Que ce ne soit pas juste « une mort de plus », mais qu’on soit touchés comme Erika l’est.

L'enquête de Patrik le mènera dans des situations extrêmes.... (C) Casterman

L’enquête de Patrik le mènera dans des situations extrêmes….
(C) Casterman

Tu continues ta collaboration avec une artiste féminine : Léonie Bischoff… Qu’a-t-elle apporté à ton histoire ?

Léonie a un souci du détail, de la précision, de l’intime qui est très précieux pour ce genre de livre presque entièrement fait de scènes de dialogues. Elle a une autre veine, beaucoup plus spectaculaire, qu’elle a pu exploiter dans Hoodoo Darlin’ ou dans Princesse Suplex, mais là elle s’est appliquée à être toute en retenue. Les personnages sont immédiatement réels, les lieux dans lesquels ils évoluent aussi. Mais pas dans le sens « photo-réalistes », plutôt dans le sens « habités ». Le choix des vêtements, des petits objets placés dans le décor, les prises aux murs, etc. Ça sonne vrai. On est proches des personnages. Elle a une science très sûre du placement des corps. La scène du massage dans le tome 2, par exemple, c’est du très haut niveau autant pour ce qui est de l’anatomie que pour l’atmosphère qui s’en dégage et ce qu’on comprend de la connexion entre les personnages.

Le volume 3 est sorti cette année après trois ans d’attente. Que s’est-il passé ?

Problèmes de coloristes, ce qui se voit dès la page titre : il y a six noms pour la couleur. Les conditions de travail des coloristes sont souvent ingrates. Ils et elles sont mal payé. es n’ont pas le temps, sont sur plusieurs projets à la fois… Là, on a cumulé les défections. Il y a sans doute eu des problèmes de communication avec l’éditeur, aussi. On avait du mal à avoir des infos, Léonie a beaucoup galéré pour se trouver en contact direct avec les personnes qui mettaient ses dessins en couleurs… Et en BD, selon les titres, les fenêtres de sortie sont étroites. Certains livres ont plus de chances de trouver leur lectorat à certaines dates. Si ton livre est prévu pour avril et que tu rates le mois d’avril, tu ne peux pas juste le sortir à un autre moment de l’année. Tu dois repousser d’un an.

Terminus: tout le monde descend (en varappe)

Terminus: tout le monde descend (en varappe) (C) Casterman

TRANSPERCENEIGE (2015)

VF : Casterman

Relancée par le film coréen SNOWPIERCER, la franchise TRANSPERCENEIGE  lancée  en 1982 par Jacques Lob et Jean-Marc Rochette trouve ici son épilogue.

Avec toutes les stars chez Casterman, pourquoi confier à un jeune premier la conclusion de la saga TRANSPERCENEIGE !

Peut-être parce que les stars sont encombrées de leurs propres projets. Et peut-être de leurs ego. Enfin je ne sais pas. Des dizaines de pages avaient déjà été écrites, 25 storyboardées. Mais le projet était au point mort. Rochette s’était séparé du scénariste, ça n’allait pas du tout et il était prêt à renoncer à cette suite. Je suis arrivé au départ comme un script doctor sur un projet que tout le monde voyait comme mort et enterré. Mais je suis reparti de zéro, avec comme seule base un court texte de Rochette qui avait jeté ses envies sur le papier : quelques images fortes, des thématiques qui lui tenaient à cœur, l’idée d’une cité souterraine. On a discuté une après-midi. Je me rappelle qu’il m’a demandé de ne pas toucher aux 25 premières pages, afin qu’il n’ait pas à les redessiner. Je suis rentré chez moi, j’ai écrit 25 premières pages qui n’avaient rien à voir avec ce qui existait, il les a lues… et voilà, j’étais engagé. Bien sûr il a dû tout redessiner, mais il ne me l’a jamais reproché.

Un album de cet ampleur, c’est combien de temps de travail ?

À peu près un an, par sprints réguliers de quelques jours par-ci par-là. La particularité de cet album, c’est qu’on a élaboré chaque page du storyboard ensemble. J’arrivais avec mes pages le matin, Rochette les lisait, on en discutait, et on imaginait ensemble la meilleure façon de les mettre en cases. Je prenais ses idées, il prenait les miennes, c’était vraiment un travail en duo. La séance la plus intense de toutes a été celle où on a fait la scène de Puig enfermé dans le tiroir. Elle était écrite, l’intention était claire, mais sans le dessin elle ne valait rien. Et que dessiner quand on a une quinzaine de pages d’un mec seul allongé dans le noir ? Ça nous a pris une journée de mettre en place cette séquence, on a fini en sueur, épuisés et ravis comme à la fin d’un marathon.

Rochette est un ours solitaire sans illusions sur la nature humaine quand tu choisis d’évoluer vers une dimension optimiste et humaniste ! Vous ne vous êtes pas entretués ?

Non. Rochette aime bien être bousculé, en fait. Quand ça arrive, il râle, il peste, il s’énerve, mais au moins, il ne s’ennuie pas. Je crois que le pire pour lui c’est de se trouver face à quelqu’un qui ne lui apporte rien de nouveau. Il est super ferme dans ses convictions, mais il a souvent un sourire de gamin quand tu le prends à contrepied et qu’il trouve ça bon. Il peut ne pas être d’accord philosophiquement avec une idée mais voir qu’elle fonctionne dans l’histoire qu’on raconte. De mon côté, j’aime bien travailler « les matières difficiles », et Rochette en est une. C’est sportif, mais c’est vivifiant.

Comment as-tu réussi à faire pencher la balance vers une fin teintée d’espoir pour une série si sombre ?

J’en ai ras le bégonia de toutes ces fictions où les « gentils » finissent par gagner en étant plus efficaces dans la violence que les « méchants ». Dans la première version du scénario que j’ai lue, toutes les 10 pages les héros tuaient quelqu’un, ou l’un de leurs alliés mourrait. Résultat : aucune émotion. Les morts étaient de simples péripéties. Pour moi la vie est précieuse, et encore plus dans un univers post-apo, où elle est rare. Je n’ai pas dit à Rochette que je voulais un album pacifiste. J’ai écrit les scènes les unes après les autres, et elles étaient souvent violentes, psychologiquement dures. Les personnages souffraient et pour moi ça appelait naturellement de l’empathie, une envie de les sauver, de « sauver l’humanité ». De lui laisser une chance. On a eu une discussion à propos de la fin, je lui ai dit : tous les lecteurs s’attendent à un soulèvement sanglant, à ce que la centrale nucléaire explose, à ce que les héros meurent ou au contraire à ce qu’ils vainquent par la force. Tous les scénaristes écriraient une variation de ça. Si on proposait plutôt une solution de paix ? Il a été d’accord.

Ton scénario fait beaucoup dans le symbolique : le sort de l’humanité va se jouer dans un parc d’attractions désaffecté !

Quand j’ai trouvé cette idée, j’ai été rassuré : je savais que toute l’histoire tenait debout. Qu’elle avait un sens. C’est la fin du monde oui, mais regardez comme on s’amuse ! C’est très exactement notre société. Si l’histoire s’était passée dans une simple ville souterraine, ou des tunnels de métro abandonnés ou ce genre d’endroits vus mille fois, il lui aurait sans doute manqué une colonne vertébrale et beaucoup de scènes auraient été moins fortes. En tout cas l’album n’aurait pas la même résonance.

Comme un air de Maus

Comme un air de Maus

Vous multipliez les clins d’œil au MAUS de Spiegelmann. Pourquoi la Shoah s’est invitée dans ton travail ?

Il y a des choses inconscientes qui font surface quand on écrit. L’idée des masques de souris, elle partait d’abord d’une envie de mélanger Mickey et des souris de laboratoire. Mais quand j’ai fabriqué le masque en carton pour que Rochette ait un modèle, ça a ressemblé à quelque chose qui pouvait rappeler Maus. Ce n’était pas le projet, mais une fois que ce masque était là, il était incontournable. Pourquoi les tatouages à l’entrée du parc ? Pourquoi les douches forcées ? Pourquoi quelqu’un dit que le travail rend libre ? Pourquoi les expériences médicales atroces ? Chaque fois, je tombais sur des références à la Shoah alors que je racontais ma propre histoire. Et chaque fois je me demandais s’il fallait que je les retire, mais je les ai gardées. Je ne pourrais pas expliquer avec précision pourquoi. Disons que j’ai l’impression que depuis la Shoah, quand l’humanité est poussée dans ses dernières extrémités elle finit toujours par fabriquer le même genre de monstres, par tendre vers ça. Comme si c’était devenu un modèle.

Le changement climatique semble tendre de plus en plus vers un scénario à la TRANSPERCENEIGE. Ce n’est pas dur de ne pas être contaminé par tes scénarios postapocalyptiques ?

Je suis extrêmement pessimiste quant à l’avenir climatique et écologique de la planète. Et très en colère contre la poignée de décideurs, d’industriels, de politiques, de médias qui ont concrètement le pouvoir de changer les choses mais ne le font pas. C’est à la fois un échec et un déni spectaculaires de la démocratie. Ce que j’écris n’est que le reflet de cette inquiétude. C’est la réalité qui me contamine, pas mes scénarios.

Puig connaît une fin à la Moïse devant la terre promise. Pourquoi ce détour religieux ?

Je ne pense pas qu’on ait cherché la religion. OK, il y a ce sage barbu et aveugle, son peuple qui le respecte, sa légende qui se transmet de génération en génération, cette terre promise… Ça évoque des choses, disons. Mais je voulais surtout que la fin ne soit pas simplement l’image d’un train qui file vers de nouvelles aventures. L’album s’appelle Terminus, il faut l’assumer : terminer l’histoire une fois pour toutes, donc aller au bout. Montrer ce qui arrive « après ». Aux survivants, à la planète. Finir sur un rayon de soleil, une tache de couleur. C’est Rochette qui a voulu ces fleurs, qu’il voit souvent en montagne là où rien d’autre ne pousse. C’est lui aussi qui a pensé à l’orque. Et au dernier souffle de Puig, une fin que Rochette se souhaiterait à lui-même. Si l’image de la mort de Puig ressemble à une Pieta, c’est parce que Rochette connait l’histoire de l’art. Tant de chefs-d’œuvre ont travaillé cette image qu’un artiste, même athée ou agnostique, finit toujours par avoir envie d’en réaliser sa version.

Tu en as fini avec TRANSPERCENEIGE ? Un préquel a été annoncée ainsi qu’un projet de série télé…

J’ai proposé de faire le prequel. Ça m’intéressait de raconter le premier flocon de neige. Une lente fin du monde, causée par une neige qui tombe sans s’arrêter. L’immobilisation de tout. La course pour monter dans le train. La rivalité entre ceux qui veulent en faire un sanctuaire pour la faune et de la flore et ceux qui cherchent simplement à sauver leur peau. Les factions qui se rejettent la responsabilité de la tragédie climatique. Je voyais ce premier flocon tomber pendant un mariage, au milieu des confettis, dans un pays chaud, l’Afrique ou l’Asie. Ça aurait pu être un bon album. Mais à ce moment est arrivé le projet de série télé américaine et on a eu une réunion avec Casterman. Tout le monde était hyper motivé pour ce prequel, mais quelqu’un a dit « il faut faire vivre la marque ». Ça m’a instantanément coupé l’envie. Rétrospectivement je suppose que le projet de TERMINUS consistait lui aussi à « faire vivre la marque », mais ça ne m’a jamais été présenté comme ça et pour moi ça changeait tout. J’ignore où en est ce projet, je crois que Rochette est en train de travailler dessus avec Matz, je n’en sais pas plus mais je suis sûr qu’ils vont faire du très bon boulot.

Après La princesse des glaces et Terminus, Bocquet termine sa glaciale trilogie avec cette Ailefroide  (C)Casterman

Après La princesse des glaces et Terminus, Bocquet termine sa glaciale trilogie avec cette Ailefroide
(C)Casterman

AILEFROIDE-ALTITUDE 3954 (2018)

VF : Casterman

En plus d’être un dessinateur culte, Jean-Marc Rochette est un alpiniste expérimenté dont la passion pour la montagne a failli lui coûter la vie.  Bocquet met en scène son parcours en montagne dans un récit lyrique mettant en scène toutes les ascensions d’un homme  allergique aux compromis.

À peine sorti de la glaciation du TRANSPERCENEIGE, que te voilà embarqué dans AILEFROIDE. Comment s’est élaboré ce projet ?

Pendant qu’on travaillait sur TERMINUS, Rochette m’a raconté par bribes des morceaux de sa jeunesse. J’ai trouvé que ça ferait une bonne BD, je lui ai dit qu’il devrait s’y coller. Il n’était pas convaincu : on ne trouve jamais sa vie intéressante au point d’en faire un livre. Mais j’en ai aussi parlé à notre éditrice chez Casterman, elle en a discuté avec lui et elle a su le convaincre. Il a commencé à écrire mais il a vite réalisé qu’il n’était pas scénariste — je pense aussi qu’il n’y a rien de plus dur que de raconter sa propre vie. Alors il m’a demandé de monter à bord avec lui.

Qu’est ce qui t’a motivé pour cette nouvelle collaboration avec Rochette ?

D’abord, comme je l’ai dit, je trouvais vraiment qu’il y avait matière à faire une bonne histoire. Une histoire qu’on a tous vécue : celle du passage de l’enfance à l’âge adulte, mais avec en plus le fait que ça se passe dans un décor inhabituel, où le héros risque sa vie tous les jours et voit ses amis mourir autour de lui. La biographie était aussi un genre auquel je ne m’étais jamais frotté et ça m’intéressait de voir ce que je pourrais en tirer. Et puis je me sentais une responsabilité envers Rochette et Casterman : c’est quand même moi qui les avais poussés à faire ce projet, je ne pouvais pas refuser de les aider !

Jean-Marc Rochette et le film de sa vie  (C) Crédit photo Olivier Bocquet

Jean-Marc Rochette et le film de sa vie
(C) Crédit photo Olivier Bocquet


AILEFROIDE est un projet très particulier : c’est à la fois une déclaration d’amour à la montagne et l’autobiographie de Rochette. Comment se déroulaient vos séances de travail ?

On se retrouvait chez lui, pour des blocs d’une semaine de travail. Des journées qui commençaient au petit déjeuner et se terminaient souvent autour de minuit. Très intenses. Ça s’écrivait en direct, dans une sorte de fièvre. Il me racontait sa vie, de manière aussi décousue qu’on le fait en général, et je faisais le tri, je structurais ça en séquences de scénario, en dialogues, en cases. J’ai essayé de dégager un sens de tout ça. D’organiser une vie. Pour les pages de grimpe, le plus souvent je me contentais d’écrire « page de grimpe » et de jeter quelques dialogues pour une histoire de rythme, mais en gros il se débrouillait. La plupart des autres scènes sont inventées, ou presque. Elles sont vraies dans ce qu’elles disent, mais elles simplifient, compactent, se déroulent parfois dans des endroits plus signifiants, impliquent des personnages différents, etc. À force de travailler sur l’histoire, Rochette me disait parfois qu’il sentait que la version fictive se superposait à la réalité et qu’il avait du mal à distinguer le vrai du faux. Le cerveau fonctionne comme ça. Je crois qu’au final une bonne partie de ses souvenirs ont été remplacés par ce qu’il y a dans le livre !

Pour le fond de l’histoire, je crois que j’ai apporté trois choses qu’il n’aurait pas forcément mises : j’ai insisté pour qu’on parle de sa mère, j’ai donné beaucoup de place à son pote Sempé (qui n’a rien à voir avec le dessinateur, je précise), et enfin j’ai cousu entre eux l’art et la montagne. Et ce dès la première page, quand on voit Rochette enfant, avec sa tenue de montagnard, devant un tableau de Soutine au musée de Grenoble.

Il y a beaucoup de passages didactiques sur les techniques d’escalade, pourquoi était-ce nécessaire ?

Je sais que tu n’as pas trop aimé ces passages, et je peux le comprendre. Peut-être que Rochette ne les aurait pas mis non plus. Mais moi je n’avais jamais mis les pieds sur une montagne et j’étais dans la position du lecteur le plus béotien qui soit. Il y avait plein de trucs qui étaient évidents pour lui et que je ne comprenais pas. J’ai voulu que tout soit clair, à la fois pour moi et pour le lecteur. Savoir de quoi je parlais. Et puis c’est une histoire vraie d’apprentissage et l’apprentissage passe entre autres par la connaissance du matériel, des gestes techniques et du vocabulaire. Comment ça se passe concrètement d’escalader une montagne ? D’en descendre ? C’est quelque chose qui m’intéresse, j’aurais fait la même chose si j’avais parlé de boulangerie ou d’un commissariat. Sur le dessin aussi, Rochette est très précis. Il affirme par exemple qu’ AILEFROIDE est la seule BD de montagne où les chaussures sont correctement lacées.

AILEFROIDE est une histoire très honnête. On ne peut pas dire que Rochette se mette en scène de manière avantageuse ; c’est même tout le contraire : c’est une vraie tête de lard à peine moins obtus que Joji Habu, le héros du SOMMET DES DIEUX. Tu l’as lu ?

Je l’ai lu après avoir écrit AILEFROIDE, à force d’entendre les gens me dire « Mais comment tu peux faire un album sur la montagne sans l’avoir lu ? ». Enfin, j’ai lu les trois premiers tomes — les mille premières pages, donc. Il faut que je finisse. C’est très bien mais pour être honnête, je ne suis pas certain qu’il fallait autant de place pour raconter cette histoire. Mais bon, les Japonais aiment faire des pages. Pour revenir à Rochette, il a effectivement une qualité très rare chez les gens qui font leur autobiographie : l’honnêteté. Je crois que c’est aussi pour ça qu’il me voulait à l’écriture. Pour avoir un regard extérieur. Et il a accepté mon regard sur lui, même quand ça ne le mettait pas à son avantage. Peu de gens en sont capables.

Jean-Marc Rochette enfant : un caractère bien élevé et un rapport conflictuel avec sa mère. (C) Casterman

Jean-Marc Rochette enfant : un caractère bien élevé et un rapport conflictuel avec sa mère.
(C) Casterman

En haute montagne, une simple faute d’inattention peut être fatale. As-tu senti cette même concentration dans le travail de Rochette ?

Je ne sais pas si la comparaison s’applique : la pire chose qui puisse t’arriver quand tu rates un dessin, c’est de le recommencer. Mais Rochette est effectivement très concentré quand il dessine. C’est quelque chose de très physique, il va puiser dans ses réserves. Les grimpeurs ont aussi un esprit de compétition. Ils veulent aller plus haut, plus vite, faire des exploits. Rochette a un peu ce rapport à la BD. Il ne serait peut-être pas d’accord avec moi, mais je crois qu’il vit la BD comme une compétition. Il veut se mesurer aux autres, leur montrer ce dont il est capable. Les « battre » à chaque album. Évidemment, il n’y a pas de gagnant ou de perdant une fois le livre sorti. Mais chez lui c’est un bon aiguillon.

Tu es un très bon dialoguiste : il est rare que tes personnages aient la même voix d’un album à l’autre. C’est dur de ne pas sonner comme toi même ?

Je ne sais pas comment je sonne. Mais je pense que les personnages parlent comme je parlerais si j’étais eux. Chaque histoire a sa propre tonalité, et les personnages qui évoluent dedans ont une façon de parler qui y correspond. Peut-être que si j’étais spécialisé dans le western par exemple, tous mes albums seraient dialogués de la même façon, « à la western », quoi que ça puisse vouloir dire. Pour FANTÔMAS, j’ai beaucoup joué avec la musique de la langue de 1910. Ayant lu les romans, je savais à peu près comment les gens s’exprimaient à l’époque, ça m’a plu de bricoler avec ça. Pour FRNCK, je cherche souvent une façon de tourner les dialogues qui puisse être marrante, et je suis souvent plus explicatif car je sais que je m’adresse aussi à des enfants. Pour les années 70 d’AILEFROIDE, je fais parler des ados, et une bonne partie du langage ado d’aujourd’hui n’existait pas à l époque. J’ai passé beaucoup de temps à chercher dans les dictionnaires si tel mot, diminutif ou expression était utilisé à l’époque. Par exemple, « matos » pour dire matériel, ça apparaît tout juste à cette époque. Donc quand je l’utilise, j’en fais un mot d’initié, ce qui me sert bien dans cette histoire d’apprentissage.

D’une manière générale, je me méfie des expressions à la mode. Celles qu’on utilise aujourd’hui, ou celles qu’on utilisait aux époques où se passent mes histoires. Il ne faut pas compter sur moi pour mettre des « bath » à tous les coins de page dans les années 70, ni des « ça le fait » dans une histoire des années 2010. J’aspire à une forme de « neutralité efficace » qui passera les décennies sans heurt.

La scène clé du livre est ce fameux passage où Rochette est défiguré. Lorsqu’on est un jeune scénariste face à un monstre sacré qui dicte ses mémoires, quel est le risque ? Sombrer dans le pathos ?

Le risque de sombrer dans le pathos est présent quelle que soit l’histoire. Mais j’y suis totalement allergique. Je pense que plus ce que tu as à raconter est fort, plus il faut être minimaliste. Si les émotions sont sincères, elles passent. Et là je pense à la fin du tome 4 de FRNCK, qui est l’exact opposé de ça : volcan qui explose, caverne qui s’effondre, larmes, adieux déchirants… mais pourtant je crois que le dialogue reste très factuel dans tout ça. C’est un climax à tous points de vue, mais il y a de la retenue dans ce qui est dit. La clé pour les scènes d’émotion c’est le dialogue. Poser le minimum de mots pour le maximum d’effet. Toutes les séquences de l’hôpital avec Rochette sont faites comme ça. Le mec est défiguré, il flippe, il est dans un environnement très peu rassurant. En tant que lecteur, t’es obligé de t’identifier à sa détresse. Pas la peine d’en rajouter. Et Rochette sait très bien retenir son pinceau aussi dans ces scènes-là. J’espère qu’on a réussi ces passages.

La première édition de Casterman de AILEFROIDE t’a zappé de la couverture. Que s’est-il passé ?

Les origines de l’erreur sont floues mais c’est une maquette qui est partie à l’impression, sans que je l’aie vue. C’était délicat de faire pilonner 16 000 exemplaires, donc on ils ont été mis en librairie. Je ne te cache pas que je l’ai assez mal vécu. Heureusement on a déjà eu quatre réimpressions en six mois, l’erreur est maintenant diluée dans la masse.

Sur le fil FB tu décrivais ta fierté de participer à ce que tu pressentais être un grand moment de BD. As-tu eu l’impression d’avoir dépassé tes limites ?

J’ai toujours l’impression de dépasser mes limites quand j’écris une BD ! Chaque fois je la commence avec angoisse et j’ai des moments de panique à chaque étape. Je me dis toujours que cette fois j’ai visé trop haut, que je vais me planter. Et au moment d’envoyer l’album à l’impression, j’ai toujours le sentiment d’avoir échoué. C’est l’accueil des lecteurs — quand il est positif — qui me réconcilie avec mon travail.

Le mot courage n a pas encore été inventé  (c) Dupuis

Le mot courage n a pas encore été inventé
(c) Dupuis

FRNCK (2017-2018)

VF : Dupuis

Publié en 4 volumes, avec Brice Cossu ayx dessins, FNCK raconte l’histoire d’ un enfant orphelin piégé dans un monde préhistorique où il va devoir oublier les apparats de la civilisation pour survivre.  Un choc des cultures souvent irrésistible magnifiée par une fin incroyable qui prépare une deuxième cycle.

Après tous ces drames, enfin un peu de joie de vivre avec l’univers pour enfant de FRNCK. Est-ce aussi parce que pour la première fois de ta carrière ce n’est ni une adaptation ni une commande ?

J’avais envie de raconter cette histoire depuis longtemps. De faire du Pixar, en fait. Mais « curieusement », les éditeurs sont rassurés quand on travaille sur un matériel déjà existant, ou qu’on arrive avec un projet qui ressemble à quelque chose qui a déjà fonctionné. FRNCK a essuyé cinq refus chez quatre éditeurs différents. J’étais sûr pourtant que je tenais quelque chose mais j’étais sur un genre tombé en désuétude — le dernier succès d’aventure humoristique en date était LANFEUST, soit un bond de 25 ans en arrière -, et en plus j’ambitionnais d’y ajouter de l’émotion.

Pour ne rien arranger c’était de la BD dite « jeunesse » — très difficile à vendre — et je n’avais jamais prouvé que je pouvais faire une œuvre 100 % originale… Les éditeurs n’ont pas envie de s’emmerder avec ça, c’est trop de travail pour un résultat incertain. Avec tous ces éléments posés, l’enjeu ce n’était pas pour moi de démontrer ma capacité à inventer une histoire en partant de zéro. L’enjeu c’était de faire un succès avec. Et il se trouve que, grâce à l’appui constant de Dupuis, et des libraires, c’est mon plus gros succès et de loin. Oui parce que c’est vrai, les BD tous publics c’est compliqué à lancer. Mais putain ça sert à quoi un éditeur ?

Complicité entre Bocquet et Cossu  c

Complicité entre Bocquet et Cossu
(C) Brice Cossu

Le dessin de Brice Cossu  est très énergique : il y a du comics, du Trolls de Troy, du Spirou et du manga chez lui. Qu’a-t-il apporté à l’histoire ?

Mes scénarios sont systématiquement meilleurs une fois passés sous les pinceaux de Brice. Plus drôles, plus émouvants, plus spectaculaires. Il sait composer des images ultra-complexes et ultras lisibles à la fois. Il ne pense jamais case par case, mais considère la double planche en entier. Il a aussi une banque d’expressions de visage, d’émotions assez incroyable, ça va de Tex Avery à l’Actor’s Studio. Je crois que, dans le genre graphique qui est celui de FRNCK il fait partie des tous meilleurs. Et en plus il lui arrive d’apporter des idées de scénario qui peuvent vraiment infléchir la façon dont je vais raconter mon histoire.

Après des récits très connotés adulte, tu n’as pas eu peur de perdre ton public avec cette histoire de gosse pour les gosses ?

Je ne pense pas avoir un public particulier. Je n’ai pas de « fidèles ». Je ne pense même pas que les lecteurs réalisent que c’est le même scénariste qui écrit La Colère de Fantômas, Terminus, le Prédicateur et Frnck. Ces livres ne s’adressent pas aux mêmes personnes et je serais très étonné de les voir se côtoyer dans la bibliothèque d’un particulier. Je suis à peu près certain que 80 % des lecteurs d’Ailefroide ne liront jamais d’autre livre de moi, ou alors par hasard, et probablement que ce sera Terminus, pour cause de Rochette. Cela dit, pour répondre à la fin de ta question, j’ai la prétention de penser que Frnck est une vraie série « tous publics » et qu’elle ne s’adresse pas qu’aux enfants. Elle s’adresse à tous ceux qui aiment les bons Pixar. Et ça, ça fait un paquet de monde !

Quand tu présentes ton projet à Dupuis, ils ne font pas la gueule ? On parle quand même d’une histoire où les personnages s’expriment sans voyelles et sans sous-titre !

Haha, non, ça n’a jamais été un sujet de discussion. Il y a eu des problèmes pour la traduction anglaise, il a fallu faire une exception pour le Y parce que « you » manque cruellement de synonymes et qu’on ne pouvait pas se contenter de laisser un blanc à la place du mot. Problème aussi pour l’adaptation au cinéma : tu ne peux pas demander aux comédiens de parler juste en consonnes, c’est hyper compliqué et en plus le public ne comprendrait rien. Mais je crois qu’on a trouvé une astuce qui fonctionne.

FRNCK et TRANSPERCENEIGE ne sont pas si éloignés l’un de l’autre : il s’agit d’un monde perdu où la civilisation est à rebâtir. Et tout commence dans un parc d’attractions !

Je n’avais pas fait le rapprochement. Il va falloir que je retravaille tous mes projets pour en supprimer les parcs d’attractions !

Comme dans TERMINUS, tu refuses de juger tes méchants. Chacun a droit à sa rédemption…

Le seul méchant chimiquement pur, c’est Fantômas. Je ne me compromettrai jamais à aller chercher dans l’enfance d’un personnage un trauma originel qui l’a fait devenir ce qu’il est, je trouve ça simpliste et stupide (ça inclut la mort des parents de Bruce Wayne, désolé les copains). Mais je me questionne toujours sur les motivations des gens, quels qu’ils soient. Il y en a très peu à mon avis qui se disent « je suis méchant ». Même les pires hommes politiques, les pires brutes, les pires criminels doivent bien croire qu’ils ont une « bonne » raison de faire ce qu’ils font. Même si c’est juste de l’orgueil, de la peur ou de l’ambition, même s’ils s’illusionnent complètement, ils doivent bien croire qu’ils sont du « bon » côté. Et aussi : je pense qu’on peut changer, et que c’est une des choses les plus satisfaisantes à écrire, un personnage qui change. Après il y a les fous, mais ça c’est hors catégorie.

Mettre en scène un enfant qui apprend à vivre sans portable, ni réseau social, c’était important pour toi ?

Le portable ou les réseaux sociaux, ce sont plutôt des arguments mis en avant par le marketing de Dupuis. À raison, d’ailleurs : beaucoup de parents achètent le tome 1 parce qu’ils pensent que ça va montrer à leurs gamins ce qu’est la vie sans portable, leur « donner une leçon »… comme si les parents eux-mêmes n’étaient pas complètement accro au leur ! Mais pour moi, le portable c’est surtout un objet qui va servir dans l’histoire. D’abord comme gag, puis de manière fondamentale, comme on le verra par la suite… Mais patience !

Le tome 4 finit sur un twist incroyable digne de l’ARMEE DES 12 SINGES ! Tu l’avais en tête dès le début ?

J’ai mis du temps à la trouver, à trouver le sens de cette histoire qui aurait pu tout à fait se contenter d’être une simple usine à gags comme il en existe tant (et dont certaines sont géniales). Mais je n’ai pas fait lire le dossier aux éditeurs avant d’avoir trouvé cette fin, ce sens. Donc, du point de vue de l’éditeur : oui, cette fin était prévue dès l’origine. D’ailleurs c’est ce qui lui a fait signer la série.

On retrouve souvent dans tes histoires la notion d’équilibre : la misanthropie de Rochette contre la foi en l’humain, la joie de vivre contre le sordide de Läckberg, l’honnêteté de Juve contre la fourberie de Fantômas….

Faut croire que je suis très Yin & Yang, comme garçon ! Des équilibres de ce type sont forcément instables, il y a toujours un côté qui tire plus fort, il faut sans cesse rétablir la balance… Avant que tu m’en fasses la remarque, je n’y avais jamais pensé, mais je suppose que j’ai besoin de ça pour que… pour qu’il se passe quelque chose, en fait. Si tu poses une bille sur une planche en bois, c’est une bille sur une planche en bois. Si tu transportes cette planche en bois, la bille se met à rouler dans un sens, dans l’autre. C’est un travail de chaque seconde de l’empêcher de tomber, de ne pas trébucher toi-même… Il y a du suspense, de l’imprévu, des obstacles. C’est peut-être ça pour moi, raconter une histoire : transporter une bille sur une planche dans un terrain accidenté…

Dans FRNCK, cette notion d’équilibre est encore très présente : dans le débat nature (Kenza) Vs culture (Franck), personne ne l’emporte : les deux sont complémentaires…

C’est la dynamique qui est résumée par cette phrase d’accroche, autre trouvaille du marketing : « Il a 100 000 ans d’avance sur eux mais il ne sait même pas allumer un feu. » Franck sait un million de fois plus de choses que les préhistoriques… mais il ne sait rien d’utile. Comme nous tous. On sait se servir des outils, mais pas les fabriquer. Quand je parle d’outils, je parle autant d’un ordinateur que d’un simple couteau, d’une allumette, d’un T-shirt, d’une brique, d’un robinet d’un tube de dentifrice ou… De tout, en fait. Nous ne sommes plus des fabricants, nous sommes des consommateurs. La plupart d’entre nous ne sauraient même pas faire pousser une salade sans aller acheter des pousses dans un magasin spécialisé. Lâche un mec d’aujourd’hui dans la forêt de Fontainebleau, la moins hostile de l’univers, sans qu’il puisse en sortir. Il va juste mourir de faim et d’épuisement. Ce long détour pour dire : Franck a un savoir théorique (le feu n’est pas « que » dangereux, l’hygiène c’est important, etc…), les préhistoriques ont un savoir pratique… Forcément ça crée des frictions intéressantes !

Quelques pistes pour le tome 5 ?

Le cinquième tome a été le plus difficile à écrire de tous. Vu le nombre de portes qu’on ferme à la fin du tome 4, vu le brassage d’émotions que cette fin nous a procuré, comment repartir ? On pourrait tout à fait s’arrêter là, personne ne nous en voudrait. Le tome 5 est forcément moins fort, il faut redémarrer la machine. On avait un plan prévu de longue date pour ce deuxième cycle, mais le début a été très compliqué à mettre en place, c’était comme refaire un nouveau tome 1… D’ailleurs, par plein d’aspects c’est un remake du tome 1, enrichi de tout ce qu’on sait des personnages. La fin du quatrième tome a montré qu’on n’est pas dans Rahan, qu’il ne s’agit pas juste d’aventures préhistoriques… Et naturellement le lecteur attend qu’on creuse le sillon qu’on a entamé. Ce que je peux te dire pour ce deuxième cycle c’est que le voyage dans le temps aura beaucoup plus d’importance… mais pas forcément comme tu pourrais l’imaginer. On a donc un tome 5 de mise en place avec une bonne grosse surprise qui arrive assez vite… et dès le tome 6, ça part dans une direction totalement imprévisible, mais qui, je l’espère, reste cohérente avec l’ensemble.

Un dernier mot pour les lecteurs du blog ?

Est-ce bien nécessaire ? Y en a-t-il un seul qui soit arrivé au bout de cette interminable interview ? Si oui, bravo, vous avez gagné tout mon respect !

Bocquet Final ! C) Brice Cossu

Bocquet Final !
(C) Brice Cossu

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La BO du jour : Olivier Bocquet, un homme à succès !

https://www.youtube.com/watch?v=NGbw-cz35qo

36 comments

  • Matt  

    Houlàlà…euh…j’ai abandonné au milieu. Je reviendrais lire la suite à un autre moment.
    J’avais été intéressé par la colère de Fantomas il y a un certain temps, mais je n’étais pas certain d’apprécier le dessin. Peut être que je devrais tenter.
    Pour l’adaptation des romans c’est…particulier de tout changer parce qu’on n’aime pas^^ Sommes nous encore dans ce qu’on peut appeler une adaptation à ce stade ? Ou une réécriture complète ?

  • Présence  

    Une interview extraordinaire : j’ai tout lu d’une traite sans m’ennuyer à aucun moment. Donc oui, il y a au moins un lecteur qui est arrivé jusqu’au bout. 🙂 Cette interview m’a rappelé les meilleures que j’ai pu lire dans The Comics Journal qui comptaient souvent une douzaine de pages. Il faut dire que l’introduction avec le sexeur de poussins constitue une accroche irrésistible. En plus on a même droit aux questions politiquement pas correctes que tout le monde se pose (au moins moi) : l’éventualité d’une rivalité dans un couple de scénariste.

    C’est passionnant de découvrir le degré de préparation pour écrire le cycle de Fantômas : je n’aurais jamais pensé qu’un scénariste puisse investir autant de temps (lecture + visionnage) pour être fidèle au matériau originel qui ne doit plus être connu de grand monde. L’envers du décor pour l’adaptation des romans de Camilla Lackberg est incroyable : on est dans un niveau de travail d’adaptation (ou plutôt de réécriture) dont il me tarde de savoir ce qu’en pensera Tornado.

    J’ai été tout aussi friand de la description de la dynamique de travail avec Jean-Marc Rochette. C’est très édifiant de comprendre comment Olivier Bocquet s’est mis au service de l’auteur d’expérience, à la fois pour faire entendre les 2 voix d’auteurs dans Transperceneige, à la fois pour reconstruire une biographie qui a le mérite inouï de ne pas être une hagiographie. Cette BD-là, c’est sûr, il faut que je la lise, l’interview ayant dissipé mes dernières réticences.

    J’avais déjà vu passer les couvertures de la série FRNCK, mais sans y avoir jeté un coup d’œil. Je note sur ma liste de cadeaux potentiels pour un neveu.

    Avec le recul, je me rends compte qu’il ne me vient pas de question supplémentaire à poser, et pourtant je suis très curieux de nature.

  • Eddy Vanleffe  

    Ce qu’il y a de bien avec les interviews « non offiicelles » c’est que la nature des question est très intéressante, les réponses sans langues de bois et on s’attarde bien sur les méthodes de travail, les thématiques etc…
    J’ai toujours été fasciné par Fantomas.. la version de Hunnebelle , même si elle est totalement hors sujet a le mérite d’avoir donné un putain de design au personnage (avec un rire flippant quant t’es gosse) et dès que j’ai vu la série TV avec Jacques Dufilho, ça m’a happé dans un univers bien plus proche d’un Allan Edgar Poe et de son chevalier Dupin.
    Je suis aussi persuadé qu’il s’agit d’un des plus anciens super vilains qui existe…
    une mise d’or que ce personnage.
    Du coup le bouquin m ‘intéresse évidemment…

    Pour Transperceneige, j’aimerais jeter un œil aux planches du défunt Alexis qui travaillait dessus avec Lob avant d’être interrompu par la mort… Pour le reste je suis toujours interloqué de voir que la cinéma est à ce point le « référentiel » des gens… j e connais la bd de départ depuis que je suis ado, en même temps que les trucs de Forest, Tardi, Comés etc…
    bon dans le cas du « miraculé » Rochette, Tant mieux 🙂

    un auteur à lire c’est certain.

    • Olivier Bocquet  

      J’ai une photocopie de mauvaise qualité des 13 planches dessinées par Alexis pour la première version du Transperceneige. Rien à voir avec la version de Rochette, et je ne parle pas que de dessin : le scénario démarre de façon très différente, et inclut en plus une créature très inspirée de Chewbacca (ce début du Transperceneige date de 1977. Clairement, Alexis et Lob avaient vu le film avant de commencer et ne s’en étaient pas encore remis…).

      • Eddy Vanleffe  

        Tu me fais saliver.. 🙂
        j’ai toujours énormément de tendresse pour le boulot des artistes dans lesquels je me suis investi. Cinémastock est un premier trauma et depuis j’avoue que j’ai toujours été curieux de voir ça.
        Ceci dit le bouquin ne s’est pas fait comme ça et il est très bien (marrant ce parallèle avec la Compagnie des Glaces, qui est d’ailleurs un coïncidence si je me souviens bien)
        peut être que le « Chewbacca » aurait été la « ressemblance » de trop.

  • Bruce lit  

    @Matt : j’ai beau jeu, hein, de vous demander des articles courts….Et encore j’ai enlevé un bon millier de mots et certaines questions /réponses avec l’autorisation de Olivier BOCQUET. Vous avez donc une version éditée ! Oui !
    Après sondage sur Facebook, il m’apparaissait évident que l’article soit-il devait n’être publié qu’en une fois.
    Comme Présence je suis très fan des articles rétrospectives. Je promets de faire plus court la prochaine fois avec…..Non, pour l’instant, je ne dis rien.

    Sur l’adaptation de Lackberg, je ne suis pas fan des polars suedois mais je sais que je ne pourrais pas faire l’impasse sur le troisième adaptation du duo. La réponse de Bocquet sur le rapport à sa littérature est aussi surprenante que brute de décoffrage !

    AILEFROIDE est une lecture incontournable, même si personnellement j’avais fait part à Bocquet de certaines de mes réticences vis à vis de l’histoire et du déroulé de son scénario. Ouf ! Il ne m’en a pas tenu rigueur !

    @Présence : Merci pour ce retour enthousiaste. C’est vraiment bien FRNCK. Ton neveu sera ravi ! C’est une lecture que j’offre désormais à des lecteurs endurcis et adulte qui ont beaucoup apprécié. Je suis impatient de savoir ce que réserve le nouveau cycle (comment ça, il s’en fout ?).

    @Eddy : quelques questions supprimées portaient sur l’opinion de Bocquet sur le film Snowpiercer. On n’y faisait qu’y répéter ce qui était déjà dit ailleurs. L’album TERMINUS étant dédicacé à Bong Joon Ho, j’ai préféré focaliser l’attention de nos lecteurs sur autre chose.
    Ce qui est sûr, c’est que je ne me serais pas essayé à Transpercenige sans le film que j’ai trouvé formidable.

    Je n’ai plus de souvenirs des Fantomas de De Funés. Aucun. Je ne me suis jamais essayé à sa littérature.

    • Matt  

       » j’ai beau jeu, hein, de vous demander des articles courts…. »

      J’ai pas osé le dire hein^^, parce que quand je dis des trucs, c’est mal pris des fois.
      Alors toi t’as été convaincu par son Fantomas ? Tes questions laissent penser que tu as aimé autant que tu as été horrifié par le personnage pas du tout sympathique.
      J’ai jeté un oeil sur les planches en preview sur les sites de BD et je dois dire que j’ai quand même un peu de mal avec le dessin de Rocheleau. Enfin…surtout les visages avec 2 petits points pour les yeux qui donnent un aspect enfantin au truc. A voir…

      • Eddy Vanleffe  

        les quelques dessins que j’ai vu du Fantômas me font penser à l’esthétique des affiches de cette époque. j’applaudis carrément! je salive même…

        j’adore aussi les longues interviews, parce que j’ai plein de trucs à me mettre sous la dent.

        je m’éloigne tous les jours un peu plus du cinéma en tant que truc. j’aime bien regarder des films, mais c’est du temps de jachère cérébrale.

        Je me relis du Serge Brussolo (pour toi Bruce Lit 🙂 )
        je me relis du Jules Verne, Du Moorcock (c’est de ta faute JP…)et là j’ai l’impression d’avor à faire à du contenu.
        je regrette cet été ne pas avoir craqué pour un volume de Fantômas en collection bouquins… mais bon ça ressemble à un vieux bouquiniste chez moi… j’ai encore plein de truc à lire et d’autre à acheter…

        • Matt  

          Et après tu dis que nos hiérarchisations des auteurs est futile, mais t’es toujours en train de vouloir reléguer le cinéma à un art mineur face aux BD et à la littérature^^
          M’enfin…

          • Eddy Vanleffe  

            pour moi c’est le cas! nettement, clairement et j’assume.
            mais je dis pas que c’est le mal non plus. je regarde un tas de trucs et j’adore Ray Harryhausen. mais je vais à la limite plus épaté par un documentaire sur lui que par les films en eux même…
            En fait je n’aime pas la prise d’otage qu’ fait le cinéma sur la culture populaire…
            un exemple concret?
            le fait que tous les mangas populaires sont adaptés en live. l’animé ou le manga ne suffisait pas?
            c’est d’un mal joué en plus…

          • Matt  

            Le fait qu’il y ait des films de merde, de constants remakes, ne devrait pas condamner tout l’art du cinéma non plus.
            A ce compte là, parce qu’il y a des events, des crossovers et Rob Liefeld et Charles Soule, alors la BD c’est naze.^^

            Enfin ce sont tes goûts. Mais bon…
            Je constate que l’effort que ce blog fait pour réhabiliter la BD ou les comics que beaucoup considèrent comme des trucs d’attardés, ben ça risque de devenir hypocrite si à côté on crache à la gueule d’une autre forme d’art de manière globale sans faire du cas par cas.

          • Eddy Vanleffe  

            Tu veux m’entraîner sur un terrain conflictuel qui n’a pas d’issue.
            Je préfère les arts écrits que les arts visuels. c’est comme ça que je suis fait.
            En BD je vais être plus attentifs aux scénaristes qu’aux dessinateurs.
            Ça ne veux pas dire que je les déteste…
            déjà j’aime la solitude. ce que fait un gars dans son coin, va plus me toucher que le consensus d’une multitude.
            Le cinéma, je le sais est un art incroyable et rien que le cheminement d’un script jusqu’à la salle de projection tient du miracle.
            Je regarde un tas de trucs mais il est vrai que ça fait des années que je ne me dis plus dit au sortir de n’importe quelle bobine: » C’est tout?  »
            les terrains sont de plus en plus balisés et j’ai du mal à être surpris…
            le tout m’amuse grandement, le temps que ça dure à l’écran.
            j’ai tendance à trouver l’écriture et le ton plus original dans les séries télé même. j’aime bien développer les trucs, que ça prenne son temps.
            j’aime quand les thèmes ont réellement abordés…
            les adaptations de BD-un terrain sur lequel je pense pouvoir asseoir une opinion-sont pour moi des appauvrissements automatiques. jolis et distrayants mais bon. sortons un peu des comics pour parler de la franco-belge. Seuls ou Valérian sont des fragments de la mine que constituent les bds de départ et je ne parle pas des spirou ou d’Asterix…
            Je passe des bons moments devant l’écran, je le répète et quand je lis vos atricles,je suis d’accord avec vos analyses et vos arguments, c’est juste que j’y suis moins sensible…. du coup ça a tendance à toujours m’étonner de voir qu’il faut un film pour qu’on parle d’un livre.
            John Carter a au moins servi à ça: la réédition des livres du guerrier de Mars… 🙂

          • Matt  

            Rooh mais je veux pas t’entrainer dans quoi que ce soit. Je ne suis pas le père fouettard qui cherche la merde. Je trouve juste ça dommage de tout rejeter en bloc. Tu parles surtout des adaptations de BD en plus. Pas de ciné indépendant. C’est sûr qu’en général c’est appauvri les adaptations.

          • Eddy Vanleffe  

            Le ciné indépendant, je manque vraiment de pertinence et de compétence pour en parler je dois dire…
            c’est une histoire de sensibilité.
            Je dois dire que j’ai une certaine attirance pour le théâtre que ce soit pour le texte et pour la performance sportive.
            j’ajoute que je n’échangerais jamais un de mes livres dont vous êtes le héros contre un jeu vidéo.
            l’écran n’est pas ma came en général. pourtant je suis sans cesse dessus, comme tout le monde comme si j’étais pris en otage…
            je cois que je me sèvre doucement… grâce à ma nouvelle marotte: le néolithique…

      • Bruce lit  

        Oui, j’ai été convaincu par le Fantomas, je lui mettrai 3 étoiles et demi. En fait la manière de raconter l’histoire de Bocquet m’a plus intéressé que l’histoire en elle-même. Je n’e m’attendais pas à un personnage si mauvais et un ton si sombre. Tu as aussi la petite vidéo que j’ai posté quasiment à ton intention pour Fantomas. Il m’a fallu du temps pour m’habituer au dessin de Julie Rocheleau car elle aussi fait un grand écart avec l’univers tendre et chaleureux de Betty Boob.

  • David Brehon  

    Oui, tu as bien fait de publier cette interview d’une seule traite. Échange passionnant avec des questions intelligentes que l’on aimerait rencontrer plus souvent dans les médias officiels.

    • Bruce lit  

      Oh je sais pas…
      J’ai toujours aimé les Itws dans Rock’n’folk.
      Grâce à Youtube, je me surprends à redécouvrir Patrick Sabatier : je le trouve assez incisif dans ses itws, notamment celles pour Gainsbourg. Bien loin de l’image de faux-cul que j’en avais.

      • Tornado  

        Ah c’est marrant j’ai revu cette itw il y a deux ou trois semaines !

  • Tornado  

    J’aimerais bien me lire « La Colère de Fantomas ». Ça m’intrigue. Je ne connais que les versions DeFunès qui ont bercé mon enfance. Mais je suis fan. Je les ai encore regardées cette année !
    Je vais essayer de voir si je trouve cette intégrale en librairie, pour la feuilleter, avant de me décider. Si c’est traité dans l’esprit de l’époque, ça devrait me plaire.

  • JP Nguyen  

    Bon… eh bien… j’ai tout lu et j’ai rien lu !
    J’ai lu toute l’interview mais aucune des BD évoquées… Dans le tas, c’est peut-être Fantomas qui me tenterait le plus… ou peut-être Ailefroide.
    C’est une chouette interview, généreuse et sans tortillage de cul.

  • Bruce lit  

    @jP : tes filles vont adorer FRNCK.
    @Tornado : merci du passage. Je sais que l’exercice de l’interview ne te botte pas. Peut-être peux tu tenter aussi son Spirou. C’est une lecture qui ne m’a jamais tenté Spirou. On demandait ton avis plus haut sur les premiers commentaires (Matt+ Présence).
    @Omac : Je ne qualifierai pas Ailefoide d’humaniste car JM Rochette est avant tout un solitaire qui se sent bien loin des hommes. Je sais que l’on en a déjà parlé. C’est un vrai misanthrope (sans jugement de valeur à son égard, il m’a même écrit un petit mot ce matin en -off).
    Merci en tout cas d’avoir lu cette itw jusqu’au bout qui m’a demandé autant d’élaboration que de travail à ce pauvre Olivier.

    • Jyrille  

      @Bruce: je n’ai pas lu le Spirou de Bocquet (je ne vois même pas duquel il s’agit), mais on parlait de cette série hier avec Matt et Eddy. Maël et moi sommes fans, et on n’est pas les seuls (on a remarqué qu’un jeune cousin de 10 ans s’y était mis, on l’a aiguillé lorsqu’il est passé à la maison). Mes classiques : QRN sur Bretzelburg, Le dictateur et le champignon, Spirou à NY, Spirou à Moscou, Z comme Zorglub, Le repaire de la murène.

      • Bruce lit  

        Je n’ai jamais lu un Spirou de ma vie.

        • Jyrille  

          Il faut.

  • Matt  

    A propos, Bruce disait dans le dernier FR de JP que le caméléon de Marvel ressemblait à Fantomas. Mais ce ne serait pas une référence évidente ? Le mec aux mille visages.
    Personnage hélas rarement bien utilisé (ou utilisé tout court) le caméléon, mais j’aime bien le concept. Il a peut être davantage sa place dans un comics d’espionnage de Black Widow que chez SPidey comme je le disais dans mon article sur les kiosques Spidey qui proposait une histoire sympa avec le caméléon.
    Il peut complètement être intéressant ce perso. Le mec super doué dans ce qu’il fait mais avec comme prix la perte complète de son identité, avec des sursauts d’humanité qui se manifestent lorsqu’il incarne d’autres personnes.

  • nico  

    Magnifique entretien, je l ai lu d une traite.
    J ai lu Transperceneige peu de temps après avoir découvert le blog et ça a été une claque énorme. La fin de Terminus m a profondément ému… put#&n que c est beau!!!
    En tout cas cet interview me donne vraiment envie de découvrir les autres œuvres de monsieur Bocquet.

  • Patrick 6  

    Woaw ! Un boulot de fou aussi bien pour toi Bruce que pour Oliver Bocquet, puisque cette interview a dû s’étaler sur des heures ! Une belle disponibilité. Bravo à vous donc.

    Je ne connais cet auteur que par les différents articles publiés ici-même (il y en a quelques-uns mine de rien ^^) mais forcément cette interview donne envie d’en savoir plus !
    Terminus a l’air trés intriguant mais, comme dit à l’époque, j’ai un peu de mal à priori avec le dessin… Par contre Fantomas éveille carrément ma curiosité puisque le biais qui a été choisi est aux antipodes du film avec Jean Marais (dont je suis fan ! Les 3 sont un pur bonheur).
    Je note au passage que les « Bandes annonces » pour BD tendent à se généraliser (ce que j’ignorais) une idée amusante et originale.

    Bref merci et encore bravo 😉

  • Bruce lit  

    @Patrick : un article Fantomas ?
    Oui, c’était un boulot fou, ça en valait la peine.

    @Nico : merci du coucou

  • matt & Maticien  

    superbe itv. la longueur est dans ce cas révélatrice du talent ? 😉

    je ne sais pas s’il faut toujours prendre ses décisions suivant les sondages pour autant;)

    j’ai eu le sentiment à la lecture qu a un moment le scénariste se découvre un peu plus dans l’échange. cela donne une belle unité à l’ensemble : l interviewé, l’intervieweur et lecteur partagent une découverte.

    Bravo

    • Bruce lit  

      Les sondages permettent une interaction sympathique avec les lecteurs du FB. La plupart du temps, ma décision est déjà prise…
      Bidon ? Ben, comme tous les sondages, non ?

  • Jyrille  

    Je pense que c’est l’interview la plus complète et la plus intéressante du blog jusqu’ici. Elle va rester un mètre étalon à mon avis ! J’ai franchement adoré. La preuve, j’ai envie de tout lire ! Je ne connais rien de tout ça ou presque. J’ai très envie de m’acheter Ailefroide et le dernier Terminus (depuis le temps), mis tout le reste ou presque me donne envie. J’avoue que les adaptations de polar norvégiens (suédois ?) que je n’ai pas lus ne m’attirent pas trop…

    En tout cas tout est top, et je découvre Olivier Bocquet qui semble avoir une philosophie de vie qui me correspond bien (ou disons ses points de vue…). Super beau boulot, Bruce. Et super réponses.

    La BO : génial. Fan.

    • Bruce lit  

      Ah merci Cyrille.
      Les prochaines interviews notamment celles de Madron seront découpées en séquence et seront plus digestes.

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