La fièvre jaune (Le giallo 3)

Encyclopegeek : Le Giallo 3

Par MATTIE BOY

Il n’était pas prévu initialement que j’écrive un 3ème article sur le giallo. Mais après visionnage de bon nombre de bobines italiennes des années 70, il s’est avéré qu’il y en avait encore plusieurs qui m’ont fait passer un bon moment.

Ce qui me pousse à revenir à ce genre qui a pris une place importante dans ma vidéothèque, ce sont les éléments suivants :
– La composante whodunit (contraction de « Who [has] done it? »), le genre littéraire et cinématographique à la Agatha Christie où l’identité du tueur est révélé à la fin après moults indices disséminés le long du récit.

– Le feeling Hitchcock. Aucun réalisateur de giallo n’a jamais caché son admiration pour Alfred Hitchcock. Ce qui fait que beaucoup de gialli empruntent des éléments aux films les plus sombres de Hitchcock, tels PSYCHOSE, SUEURS FROIDES ou même FRENZY.

 – L’atmosphère horrifique visible à travers une mise en avant des décors inquiétants ou des plans en vue subjective du point de vue du tueur lors des crimes. Le giallo est un genre très visuel. Ceci rend d’ailleurs ces films moins « politiquement corrects » que ceux d’Hitchcock, beaucoup plus crus, avec des crimes crapuleux, des histoires sordides de viol, de détournement de mineures, et mêmes des thématiques propres à l’Italie comme la présence (et corruption) très forte de l’Eglise. Autant d’éléments vus comme du racolage et de la provocation à l’époque, mais rapprochant finalement le genre du giallo au plus près de la réalité, aussi sordide soit-elle.

– La période des années 70 (et dans un contexte européen, éloigné des USA.) Si ces films étaient contemporains en leur temps, aujourd’hui ils gagnent une atmosphère « films d’époque » avec des villes comme Venise qui ne ressemblent plus à ça aujourd’hui. De plus, il n’y avait pas de téléphones portables ou traçage ADN, ce qui rend les intrigues policières forcément différentes des films actuels. En gros, certains trouveront peut-être ces films « vieillots » mais on n’en fait plus des comme ça.

– La musique. Ennio Morricone, Bruno Nicolai, Fabio Frizzi et autres compositeurs ont créé des bandes sons très particulières, très éloignées des musiques d’ambiance habituelles de films policiers. Il en résulte des ambiances toujours très étranges et dépaysantes. Surréalistes.

Bien sûr, il y a eu des bouses racoleuses lorsque le genre était à son apogée et même sur son déclin, avec des réalisateurs de troisième ordre se contentant de mettre leurs actrices à poil et de les trucider dans des films plats et ennuyeux (comme NUE POUR L’ASSASSIN), faisant basculer le genre du côté sexiste de la chose, alors que le bon giallo marche toujours sur le fil entre féminisme et sexisme. Car il y a beaucoup de violences faites aux femmes et de sexualisation oui, mais aussi souvent dénoncée ou raccord avec le sujet, le tueur n’étant pas « cool et iconique » comme dans un slasher, mais dépeint comme un tordu. Et malgré tout ça, le giallo dispose aussi de beaucoup d’héroïnes courageuses et libérées sexuellement en ces années 1970 où on venait juste d’accorder aux femmes le droit de divorce en Italie. Certains tueurs sont d’ailleurs des femmes aussi.

Toujours est-il qu’aujourd’hui, on va parler de bons gialli.

LA MORT MARCHE EN TALONS HAUTS (1971) de Luciano Ercoli

Un voleur de diamants se fait assassiner dans un train. N’ayant pas trouvé ce qu’il cherchait, le meurtrier va s’en prendre à sa fille, Nicole, strip-teaseuse à Paris. Il s’introduit chez elle et la menace, ne laissant voir que ses yeux d’un bleu étrange. Terrorisée, la jeune femme se réfugie chez son amant, Michel. Mais elle découvre chez celui-ci des lentilles de contact bleues. Elle va alors fuir avec l’un de ses riches admirateurs qui possède un cottage en Angleterre en espérant échapper à tout cela. Mais le tueur ne semble pas vouloir la lâcher.

Luciano Ercoli n’est pas un réalisateur bien connu, mais il a tout de même signé quelques bons films, notamment une « trilogie giallesque » avec PHOTOS INTERDITES D’UNE BOURGEOISE (non ce n’est pas un film coquin. C’est davantage un thriller de manipulation qu’un vrai giallo cela dit), LA MORT MARCHE EN TALONS HAUTS et LA MORT CARESSE A MINUIT (un giallo qui ne se prend pas totalement au sérieux et vire au film de gangsters avec un final orienté action, mais fun à suivre.) Celui qui nous intéresse ici est cela dit un vrai giallo. Il y a quelques pointes d’humour mais Dario Argento lui-même ne s’en privait pas dans LES FRISSONS DE L’ANGOISSE.

Si on pourra reprocher à ce film de mettre un peu de temps à démarrer, ou plutôt d’avoir un premier tiers un peu mou (avec quelques passages de romance un poil kitsch entre Nicole et son nouvel amant) et ce après une introduction pourtant très efficace, il se rattrape par la suite avec une enquête pleine de mystères, de faux-semblants et de rebondissements.

Le casting est impeccable avec la belle Nieves Navarro (ou Susan Scott, son alias anglicisé), très bien mise en valeur par Ercoli qui partageait alors sa vie, qui crève l’écran de son charisme magnétique comme dans quasiment tous ses films, et qui fait preuve d’un réel talent d’actrice (et notamment pour la comédie, mais ça se verra davantage dans LA MORT CARESSE A MINUIT.)

On mentionnera aussi Claudie Lange dont la ressemblance avec Nieves Navarro est assez troublante, et le très amusant Carlo Gentili, l’élément comique du film, qui campe un inspecteur pas si idiot que ça mais cynique et blasé qui ne parvient jamais à finir son café, ou qui s’étonne d’avoir eu raison lors de son enquête. A la fois maladroit et habile, il donne vie à un personnage attachant avec ses répliques pince-sans-rire.

Ce qui est très réussi dans ce film c’est cet exercice de style qui tourne autour du regard et de la perception. Il y a beaucoup de plans sur les yeux des protagonistes, de miroirs qui ne révèlent pas tout, de personnages qui pensent avoir vu des choses mais de manière déformée à cause d’éléments perturbateurs. Le fait que Nieves Navarro et Claudie Lange se ressemblent beaucoup n’est pas fortuit non plus mais orchestré pour nous dérouter (elles sont toutes les deux rousses également.) Il y a même un témoin d’un meurtre aveugle, qui ne peut donc se reposer que sur les bruits qu’il a entendus.) Les diamants eux-mêmes sont cachés à la vue de tous. Toutes les fausses pistes et révélations découlent de ces jeux de perception faussée.

En bref il s’agit d’un film réussi même si un peu lent au démarrage.

Il est à noter que ce film a été écrit par Ernesto Gastaldi, un scénariste responsables de très bons gialli ou films gothiques que j’ai parfois déjà pu recommander (L’EFFROYABLE SECRET DU DR. HICHCOCK, LE CORPS ET LE FOUET, L’ETRANGE VICE DE MME WARDH, TON VICE EST UNE CHAMBRE CLOSE DONT MOI-SEUL AIT LA CLE, LA QUEUE DU SCORPION, TOUTES LES COULEURS DU VICE, LES RENDEZ-VOUS DE SATAN, TORSO, etc.)

LES RENDEZ VOUS DE SATAN (Perché quelle strane gocce di sangue sul corpo di Jennifer ?) – 1972 -de Giuliano Carnimeo

Deux jeunes femmes sont assassinées dans le même immeuble appartenant à l’architecte Andrea Antinori. Ce dernier, en échange d’une séance photo pour une campagne de publicité, propose à deux mannequins, Jennifer et Marylin, de venir s’y installer. Tandis que Jennifer (Edwige Fenech) échappe de peu aux assauts du tueur, les soupçons de la police se portent sur Andrea, devenu son amant. Quant à Jennifer, elle a des doutes concernant divers locataires étranges de l’immeuble : la vieille folle et son mystérieux fils, le vieux ronchon, etc. Sans parler qu’elle sera rattrapée par un de ses ex qui ne lui veut pas que du bien. Tous des coupables potentiels.

LES RENDEZ-VOUS DE SATAN (titre à côté de la plaque. Il n’y a ni rendez-vous ni Satan dans ce film. Le titre italien est « Perché quelle strane gocce di sangue sul corpo di Jennifer ? ») est un giallo somme toute assez classique, à base de meurtres de jeunes femmes par un tueur mystérieux ganté de noir. Mais si la formule est classique, l’exécution est excellente. Vous l’aurez compris, avec les locataires ou l’ex de Jennifer, nous avons là une liste de suspects parfaite pour un whodunit à la Agatha Christie.

Les meurtres sont très bien mis en scène (une classique scène de noyade, un ébouillantage, un meurtre au couteau, etc.), la photographie soignée, et même si les meurtres ont tous lieu dans le même immeuble (avec une mise en scène tirant partie de chaque recoin de l’immeuble avec une formidable gestion de l’espace pour instaurer le suspense), il ne s’agit pas d’un huis clos. Il y a tout autant de scènes en extérieur lorsque Jennifer sort ou que l’on s’intéresse à l’inspecteur chargé de l’enquête (pas trop nul pour une fois.) Le suspense est constant, il n’y a pas de baisse de rythme.

Quant au final, il sera à la hauteur de l’attente. Le mobile des meurtres ne sera pas forcément très recherché, mais l’est-il si souvent dans la vraie vie ? Justement le giallo traite de déséquilibrés mentaux, de pervers sexuels, etc.

Le film se pare aussi d’une touche d’érotisme (sage), ce qui n’est pas déplaisant quand on sait que la sublime Edwige Fenech tient le premier rôle. Pour parachever le tout, c’est Bruno Nicolai qui se charge de la musique. Sans atteindre les sommets de ses compositions pour TOUTES LES COULEURS DU VICE ou LA DAME ROUGE TUA SEPT FOIS, elles restent de bonne facture. En bref un giallo simple mais mené d’une main de maître.

MAIS QU’AVEZ-VOUS FAIT A SOLANGE ? (1972) de Massimo Dallamano

A Londres, une élève d’un pensionnat catholique pour filles est tuée de manière brutale près de la Tamise. Enrico Rosseni, un professeur qui entretient une liaison secrète avec une de ses étudiantes était tout près du lieu du crime. Il est rapidement soupçonné. Lorsque son amourette prend fin avec un nouvel assassinat, celui de sa jeune maitresse, il décide d’enquêter lui-même pour lever tout soupçon. Ce qui semble lier les jeunes filles entre elles est une sorte de club libertin qu’elles avaient fondé pour flirter avec des étudiants ou autres hippies. Mais une fille reste introuvable : Solange. Disparue depuis longtemps, sans avoir été déclarée morte, elle pourrait bien être la clé du mystère.

Massimo Dallamano nous livre ici un film très dur. Les victimes sont de jeunes filles assassinées et symboliquement violées par un couteau introduit dans leur entrejambe. Le récit est prenant, le nombre de suspects important (notamment tous les profs du pensionnat, dont certains ont des tendances perverses manifestes) et l’explication finale tient la route. Si on accepte parfois dans ce type de films les meurtres sans raison profonde, il y a cependant dans ce film une vraie raison scénaristique qui justifie le modus operandi des meurtres.

Il est difficile d’approfondir certaines qualités du film sans spoiler. Mais disons que le film est osé et revêt une forme de dénonciation de la société de l’époque. Parmi les sujets abordés on trouve les relations interdites entre élève et professeur, la libération sexuelle des ados, le voyeurisme et la débauche, l’avortement, et le prêtre tueur. Non je ne vous spoile pas l’identité du tueur, rassurez-vous. Mais le tueur est effectivement déguisé en prêtre. Une façon de tacler encore un peu l’Eglise.

Moralement ambigu, le film est plutôt sordide et triste. Il est l’exact opposé d’un slasher « fun et sanglant » que le giallo a fait naitre par la suite.

Pour ne rien gâcher, c’est Ennio Morricone qui assure la partie musicale avec des thèmes mélancoliques envoutants. Quant au casting, il est très bon, avec notamment Fabio Testi convaincant dans le rôle d’un type pas franchement sympathique au départ qui trompe sa femme avec une ado mais qui va changer devant l’horreur qui va se déclencher.

La photographie n’a pas été laissée de côté et redécouvrir ce film restauré en HD est un vrai plaisir. Le film n’adopte certes pas l’esthétique baroque d’un Mario Bava mais l’éclairage de divers décors est de très bonne facture et confère à certains lieux une atmosphère angoissante.

FOLIE MEURTRIERE (Mio caro assassino) – 1972 – de Tonino Valerii

Avez-vous déjà vu une meilleure entrée en matière dans un film policier qu’un agent d’assurance qui se fait croquer la tête par un excavateur hydraulique ? Oui vous savez cette grosse mâchoire qui creuse le sol normalement. Bon…ça annonce la couleur. Petite entorse au règlement du giallo : ici le personnage principal est un flic. Il s’agit de l’inspecteur Peretti qui est chargé d’enquêter sur la décapitation de ce pauvre homme. Au fil de son enquête, les cadavres s’accumulent. Un homme est supposé s’être suicidé, une femme est étranglée, une autre attaquée dans son appartement. Peretti va découvrir qu’un ancien tueur élimine de potentiels témoins gênants qui étaient sur le point de découvrir de nouveaux indices sur une vieille affaire impliquant l’enlèvement d’une petite fille, Stefania Moroni, morte d’inanition.

Encore une fois, le tueur est ici une sinistre ordure qui accumule les meurtres pour un cacher un autre très grave commis des années plus tôt. La clé de l’énigme réside dans ce qu’avait découvert le fameux agent d’assurance. Peretti va donc s’intéresser à la bourgeoise famille Moroni pour en apprendre plus sur une affaire vieille de plusieurs années.

Ce film fait beaucoup penser à du Agatha Christie (en plus violent quand même) dans le sens où le réalisateur Tonino Valerii va s’amuser à tacler la bourgeoisie et ses secrets inavouables. Comme dans bon nombre d’histoires de la romancière, le milieu de la bourgeoisie est dépeint comme indigne de confiance, lâche et suffisant. Chaque membre de la famille Moroni semble cacher quelque chose d’inavouable, ou des preuves qui les mettraient en danger.

Le scénario est complexe, très bien rythmé, et fait la part belle au suspense. Il n’y a pas beaucoup de meurtres ni même d’érotisme (j’en entends qui soupirent au fond là !) mais la rareté des meurtres est tout de même compensée par leur cruauté. On ne voit pas tous les jours une décapitation à l’excavateur ou un meurtre à la scie circulaire. De plus, leur mise en scène dégage une vraie tension dramatique, même si on reste éloigné des transgressions graphiques d’un Dario Argento. Le film reste classique sur la forme mais efficace.

Le métrage repose aussi sur les épaules d’un très bon casting habitant ses personnages. George Hilton déjà, très crédible en inspecteur plus malin que la moyenne (qu’on aura déjà vu dans les films de Sergio Martino) mais aussi les personnages secondaires campés par des talents moins connus mais méritants (Helga Liné, Marilù Tolo, Piero Lulli, etc.)

Quant à la musique, elle est encore signée Ennio Morricone. Ai-je besoin d’en dire plus ?

Petit bémol cela dit : je trouve le plan final un peu raté et comique. On nous explique le long du film que c’est un dessin de la petite fille sur le dos d’un miroir qui dénonce le coupable. Et le dernier plan du film nous le montre. Bon…c’est logique que le dessin d’une fille de 6 ans ne soit pas un Rembrandt, mais ça parait léger comme preuve un dessin aussi approximatif. Et il faut bien réfléchir 10 secondes avant de comprendre le détail incriminant le tueur. Pas assez percutant comme plan final.

QUI L’A VUE MOURIR ? (Chi l’ha vista morire) – 1972 – de Aldo Lado

Le film s’ouvre à Megève alors que la petite Nicole, une fillette rousse, se fait assassiner à l’insu de sa gouvernante, Ginevra Storelli.

Quatre ans plus tard à Venise, on suit le sculpteur Franco Serpieri qui récupère sa fille de 7 ans Roberta venue d’Amsterdam (là où vit sa mère, séparée de Franco) pour les vacances. Rapidement, Roberta disparait, enlevée par une femme (ou quelqu’un grimé comme tel) avant d’être retrouvée morte dans le Grand Canal. On apprend qu’elle aurait été violée.

Anéanti, Franco va se lancer sur la piste du tueur. Sa femme Elizabeth, qui l’a rejoint à Venise après avoir appris la nouvelle, va tenter de l’en dissuader, ou du moins le prier de ne pas prendre trop de risques. Car à présent il devient clair qu’ils ont affaire à un tueur en série. Des similitudes avec la mort d’une autre petite fille rousse, Marinella Marchesin, assassinée l’année précédente, poussent Franco vers des personnes qu’il connaît : le marchand d’art Serafian, l’ancienne gouvernante Ginevra Storelli, maintenant secrétaire de Serafian, l’amant de Ginevra, Filippo Venier, ou encore l’avocat Nicola Bonaiuti soupçonné d’avoir participé à des orgies avec des mineurs en compagnie d’autres notables de Venise.

CHI L’HA VISTA MORIRE ? rejoint la courte liste des gialli dont les victimes sont des enfants, ce qui les a condamnés à être censurés à l’époque. Celui-ci en a moins souffert que le giallo le plus connu abordant ce thème : LA LONGUE NUIT DE L’EXORCISME de Lucio Fulci (simplement interdit dans de nombreux pays dont la France par le comité de censure de l’époque qui n’a pas apprécié l’idéologie anticléricale du film en plus des meurtres d’enfants. Il ne sortira même qu’en l’an 2000 aux USA.) CHI L’HA VISTA MORIRE ? a « seulement » été interdit aux -18 ans.

Si le film de Fulci (très sympa au demeurant) se passe dans un village de campagne isolé, c’est à Venise que prend place l’action du film de Aldo Lado.

L’enquête pousse notre protagoniste endeuillé à se confronter à la haute société de Venise et à ses secrets inavouables. Parmi les suspects, qui vont mourir l’un après l’autre au fil de l’histoire, pas un seul ne semble complètement innocent. Ils semblent tous cacher quelque chose, peut-être même protéger le meurtrier. Giallo oblige, il y a une multitude de coupables potentiels qui servent à brouiller les pistes, mais les révélations s’enchaînent de manière homogène et le scénario reste cohérent.

Le film bénéficie non seulement d’un très bon casting (George Lazenby en protagoniste aux abois, Adolfo Celi en mystérieux homme d’affaires, la ravissante Anita Strindberg en mère endeuillée) mais aussi d’une mise en scène inspirée qui transforme l’architecture singulière de Venise en un dédale de ruelles inquiétantes où se glisse parfois un brouillard oppressant. Ce n’est pas la Venise des cartes postales qui nous est ici présentée. Aldo Lado soigne ses lumières et ses cadres pour faire baigner son film dans une atmosphère inquiétante.

La musique n’est pas étrangère à ce résultat non plus. Morricone (encore lui) compose un thème musical proche de la comptine avec un chœur composées de voix d’enfants qui prend une dimension angoissante et agressive lorsqu’elle accompagne les errements du tueur en vue subjective.

Si le film se suit avec intérêt c’est aussi parce qu’il parvient à nous investir dans la quête de ce père rongé par la culpabilité. Plus le récit progresse et plus il ressemble à une chasse à l’homme, et le final sera particulièrement brutal, mais satisfaisant. CHI L’HA VISTA MORIRE n’est pas le plus agréable giallo à suivre de par ses thèmes abordés, mais c’est une réussite.

IL GATTO DAGLI OCCHI DI GIADA (1977) de Antonio Bido

Mara, une artiste de cabaret se rend un soir dans une pharmacie. Mais une personne cachée derrière la porte l’empêche de rentrer, prétextant que c’est fermé. Mara l’ignore encore mais elle vient de parler à un assassin, celui du pharmacien Biagio Dezzan. Devenue témoin involontaire d’un meurtre (bien qu’elle n’ait finalement rien vu), elle va s’apercevoir que quelqu’un la traque. Mis au courant de la situation, son ami Lukas, ingénieur du son, va se transformer en détective privé pour mener sa propre enquête, parallèlement à celle d’une police étrangement absente (un poncif du giallo.) Peu de temps après, le cadavre d’une femme est retrouvé le visage horriblement brûlé. Elle s’appelait Esmeralda Messori. Au cours de ses investigations, Lukas se rend compte qu’un point commun relie les deux victimes : elles furent voici quinze ans jurés lors d’un procès où un certain Pasquale Ferrante fut condamné pour meurtre. Pasquale, récemment échappé, serait-il l’assassin ? Ou serait-ce trop simple ?

Ce giallo (connu aussi sous les titres WATCH ME WHEN I KILL ou THE CAT’S VICTIM qui n’a pas de titre français ni de VF car jamais sorti chez nous à ma connaissance, sauf dans un blu-ray récent qui utilise le titre italien) nous propose quelque chose d’un peu différent. Sorti tardivement en 1977 alors que le giallo était sur le déclin (voire mort), ce film essaie de renouer avec les débuts du genre. Contrairement aux gialli du pauvre de la fin des années 70 qui ressemblaient de plus en plus à des films érotiques mal fichus, cette fois-ci ce ne sont pas des jeunes femmes les victimes mais des gens des deux sexes, et pas franchement jeunes.

Antonio Bido, fan du cinéma de Argento, s’inspire des premiers gialli à succès pour nous présenter une intrigue solide qui ne repose pas cette fois-ci sur un trauma d’enfance ou une déviance sexuelle poussant le tueur à frapper, mais sur une raison bien plus tragique que je me garderai de révéler. En tous cas, la motivation du tueur est parmi les plus crédibles de tous les gialli.

On a pu reprocher à Antonio Bido de trop insérer des séquences « à la Argento » dans ses films, mais selon moi c’est davantage visible dans son sympathique mais imparfait second film TERREUR SUR LA LAGUNE (SOLAMENTE NERO) qui multiplie les références de manière peu subtile. Ce premier film par contre utilise les codes du giallo de façon maligne et efficace et nous tient en haleine jusqu’au bout concernant les motivations du tueur et ce qui peut lier les victimes entre elles.

Le film est découpé est deux parties distinctes. La première se déroule à Rome et reste assez classique, et la seconde à Padoue. C’est la seconde partie la plus réussie, la plus prenante et mystérieuse. Celle qui met un peu mal à l’aise avec ses rues étrangement désertes et ses personnages étranges.

Ce qui pourra décevoir (à tort) c’est que Antonio Bido ne s’intéresse pas vraiment à deux aspects spectaculaires du giallo : l’érotisme et le gore. Le film reste violent avec une femme qui finit la tête dans un four ou un homme étranglé dans sa baignoire, mais le réalisateur ne cherche pas à styliser les meurtres et le sang ne coule pas beaucoup. Cependant, le scénario captivant compense l’abandon d’une partie des codes du genre. Et en 1977, après moult gialli coquins, c’était un choix judicieux. Laa mise en scène reste indéniablement celle d’un giallo avec ses plans en vue subjective, son suspense, ses scènes nocturnes inquiétantes et son mystère qui nous emmène dans le passé afin d’en trouver la clé.

Le titre, un peu comme L’OISEAU AU PLUMAGE DE CRISTAL, fait référence à un élément quasi anecdotique présent sur une photographie. Mais c’est une marotte du giallo d’imaginer des titres mystérieux à partir d’un élément anodin. En résumé, un film prenant et bien écrit qui renoue avec les débuts du genre.

Vous l’aurez compris, avec les autres titres que je mentionne, je pourrais encore faire une 4ème partie en chroniquant enfin LA LONGUE NUIT DE L’EXORCISME de Lucio Fulci, QUATRE MOUCHES DE VELOURS GRIS et LE CHAT A NEUF QUEUES de Argento, voire aussi TERREUR SUR LA LAGUNE d’Antonio Bido ou TON VICE EST UNE CHAMBRE CLOSE DONT MOI SEUL AI LA CLE de Sergio Martino.

Et il y a les bons thrillers qui pour moi ne sont pas vraiment des gialli mais qu’on retrouve parfois dans les listes du genre, tels LA VICTIME DESIGNEE, JE SUIS VIVANT, PHOTOS INTERDITES D’UNE BOURGEOISE, TORSO (qui est un proto-slasher) ou LA LAME INFERNALE.

En attendant de voir si ces articles se concrétiseront, je vous mets une liste des gialli qui méritent d’être vus.

BONUS : top 20 personnel :
LES FRISSONS DE L’ANGOISSE (Dario Argento)
L’EMMUREE VIVANTE (Lucio Fulci)
LA DAME ROUGE TUA SEPT FOIS (Emilio Miraglia)
L’OISEAU AU PLUMAGE DE CRISTAL (Dario Argento)
LA QUEUE DU SCORPION (Sergio Martino)
PERVERSION STORY (Lucio Fulci)
MAIS QU’AVEZ-VOUS FAIT A SOLANGE ? (Massimo Dallamano)
SIX FEMMES POUR L’ASSASSIN (Mario Bava)
TOUTES LES COULEURS DU VICE (Sergio Martino)
LES RENDEZ-VOUS DE SATAN (Giuliano Carnimeo)
LA LONGUE NUIT DE L’EXORCISME (Lucio Fulci)
QUI L’A VUE MOURIR ? (Aldo Lado)
WATCH ME WHEN I KILL (Antonio Bido)
LE VENIN DE LA PEUR (Lucio Fulci)
FOLIE MEURTRIERE (Tonino Valerii)
LA MORT MARCHE EN TALONS HAUTS (Luciano Ercoli)
L’ETRANGE VICE DE MME WARDH (Sergio Martino)
QUATRE MOUCHES DE VELOURS GRIS (Dario Argento)
LE CHAT A NEUF QUEUES (Dario Argento)
TON VICE EST UNE CHAMBRE CLOSE DONT MOI SEUL AI LA CLE (Sergio Martino)


Notre ex-contributeur Mattie-Boy continue de s’abreuver d’horreur italienne. Il revient aiguiser ses plus beaux couteaux pour Halloween avec une nouvelle sélection de Gialli chez Bruce Lit.

BO du jour :

38 comments

  • JB  

    Merci pour cette présentation ! Je suis assez peu familier avec le genre, hormis les classiques (parmi le top 20, je n’ai guère vu que les Dario Argento)
    J’avoue, j’ai souri à la lecture de l’intro lorsque tu différenciais le bon et le mauvais giallo (souvenir d’un certain sketch des Inconnus)
    LA MORT MARCHE EN TALONS HAUTS : cette obsession pour les yeux fait presque penser à la marotte de Fulci ! Entre le vol de diamant et les souvenirs erronés, ça évoque effectivement beaucoup Hitchcock (la Main au collet et Stage Fright)
    QUI L’A VUE MOURIR ? : le principe de base m’évoque Ne vous retournez pas (sans le commentaire social)

    Bon, bon, j’ai compris, je vais traquer ces films en DVD ou Blu-Ray…

    • Matt  

      « cette obsession pour les yeux fait presque penser à la marotte de Fulci ! »

      C’est vrai. Mais il n’y a pas d’énucluation chère à Fulci dedans^^

      « J’avoue, j’ai souri à la lecture de l’intro lorsque tu différenciais le bon et le mauvais giallo (souvenir d’un certain sketch des Inconnus) »

      J’espère que c’est quand même plus clair la distinction pour le giallo^^
      Bon en gros faut que ce soit bien écrit et mis en scène quoi. Qu’il y ait de la nudité c’est presque attendu. Mais s’il n’y a que ça au service d’une intrigue et mise en scène pataude, bah c’est pas bien quoi.

  • Matt  

    Pour info, les films chroniqués ici sont tous sortis (ou sortent sous peu) en blu-ray chez nous

    LA MORT MARCHE EN TALONS HAUTS chez Artus films
    LES RENDEZ-VOUS DE SATAN chez Le chat qui fume (mais épuisé celui là)
    QU’AVEZ VOUS FAIT A SOLANGE chez Le chat qui fume (encore dispo)
    FOLIE MEURTRIERE chez Le chat qui fume (encore dispo)
    CHI L’HA VISTA MORIRE arrive en novembre chez Frenezy editions
    IL GATTO DAGLI OCCHI DI GIADA chez Uncut movies (qui édite toutes sortes de nanars fauchés chelou…mais parfois des vrais films^^)

    Dans le top 20, il n’y a que TON VICE EST UNE CHAMBRE CLOSE DONT MOI SEUL AI LA CLE qui n’existe ni en DVD ni blu-ray chez nous. Sinon ils existent au moins en DVD.

    • JB  

      Merci pour ces références !

  • JP Nguyen  

    Même si ce n’est pas du tout le genre après lequel je cours, la chose qui me frappe le plus est le style des titres, avec le ponpon pour « TON VICE EST UNE CHAMBRE CLOSE DONT MOI SEUL AI LA CLE »
    Ca donne d’emblée un petit charme désuet, comme un marqueur temporel.

    De nos jours, les titres sont plus courts et souvent avec des anglicismes, voire non-traduits.

    • Matt  

      Hello

      Et pour le coup celui-ci est bien traduit. C’est bien « Il tuo vizio è una stanza chiusa e solo io ne ho la chiave » en italien^^
      Parce que des fois…c’est nawak.

      Après c’était un peu fait exprès, c’est devenu une marotte du giallo de donner des titres comme ça. La faute à Argento je pense et son OISEAU AU PLUMAGE DE CRISTAL qui ne faisait d’alleurs référence qu’à un élément de décor qui permettra d’identifier un lieu pour résoudre l’affaire.
      Je regrette certaines traductions comme LE VENIN DE LA PEUR qui est en réalité « Una lucertola con la pelle di donna » (un lézard à la peau de femme, ou « dans la peau d’une femme »)

  • Jyrille  

    Merci beaucoup Mattie pour le tour d’horizon ! Je ne suis toujours pas très au fait des gialli, je ne viens de voir L’OISEAU AU PLUMAGE DE CRISTAL que récemment, et j’ai bien aimé. Premier Argento en plus. J’ai écouté la BO, qui est de Morricone, elle est pas mal mais c’est pas ce qu’il y a de mieux. D’ailleurs Morricone fait vraiment toujours des BO un peu baroques, même pour les westerns, et je sais qu’il y a un titre de lui pour INVESTIGATION SUR UN CITOYEN AU-DESSUS DE TOUT SOUPCON qui est bien bizarre (et c’est pas un gialli mais un polar je crois). D’ailleurs, dans la galawie John Zorn, tu peux entendre des reprises de Morricone un peu différentes : dans l’album DIRECTOR’S CUT de Fantômas et dans l’album THE BIG GUNDOWN de Zorn, qui n’est qu’un album de reprises de Morricone.

    Je regarderai les vidéos et la BO plus tard. En tout cas on peut dire que tu donnes envie de tous les voir, ces films dont je n’ai jamais entendu parler.

    Sinon j’ai vu aussi au ciné, sorti il y a donc peu, la dernière adaptation de Christie par Kenneth Brannagh, MYSTERES A VENISE, et je le conseille chaudement. Ce n’est pas un chef d’oeuvre mais il y a une bonne ambiance, presque horrifique, chouette photo, et chouettes plans de Venise. Je n’ai pas vu ses deux précédentes adaptations de Agatha. Pour y être allé l’an passé, et pour la première fois plusieurs jours et pas seulement une journée, je peux t’assurer que Venise regorge de ruelles étroites voire très étroites.

    C’est vrai qu’il y a un gros sentiment de slasher dans tout ce que tu racontes, et même d’horreur un peu. L’histoire du film avec Edwige Fenech me rappelle beaucoup le second SODA, LETTRES A SATAN, tu ne trouves pas ?

    Enfin, c’est vrai qu’on pense à Hitchcock, mais n’oublions pas que De Palma est sans doute celui qui refera le plus de gialli dans les années 80. Son film inspiré de BLOW UP, BLOW OUT, met un John Travolta preneur de son en acteur et enquêteur principal, ce qui est raccord avec un de tes films aussi.

    C’est vrai que ces titres à rallonge sont quand même un peu rigolos. Je ne pense pas investir dans les DVDs ou Blu-ray (j’ai même pas de lecteur blu-ray) mais je scruterai au cas où je pourrais les voir ailleurs (Canal+ notamment).

    • Ludovic  

      J’imagine que tu parles d’ENQUETE SUR UN CITOYEN AU DESSUS DE TOUT SOUPÇON, le film d’Elio Petri qui est assez génial (vois le si tu ne l’as jamais vu), qui n’est pas un giallo effectivement mais dont la scène d’ouverture est tout à fait une scène de giallo. D’ailleurs on cantonne souvent le giallo au cinéma bis/populaire/série B mais son influence se retrouvait parfois dans le cinéma des grands auteurs, c’est le cas ici dans le film d’Elio Petri, mais on peut retrouver des motifs chez Antonioni, comme on sait aussi que Fellini admirait beaucoup Mario Bava.

      Quant à l’influence d’Hitchcock elle est centrale, Matt le mentionne des son 1er article sur le genre et il a raison et le succès de PSYCHOSE une matrice évidente du genre. De la même manière que le western décline aux USA puis renait en Italie pour venir réemerger avec le Nouvel Hollywood, le cinéma d’Hitchcock va influencer l’Europe (aussi bien la Nouvelle Vague et le cinéma d’auteur que le cinéma populaire et la série B) pour ensuite repartir vers les USA avec De Palma, Lynch etc…

      • Jyrille  

        Oui ! Et oui je devrais le voir. Je crois que c’est le cas, mais j’ai dû le voir très jeune, j’en ai peu de souvenirs.

        youtube.com/watch?v=_OyP2fQRSzI

        youtube.com/watch?v=IK8ZHZgh0dc

        Merci beaucoup pour toutes les précisions, c’est passionnant.

      • Matt  

        Il faut voir PERVERSION STORY de Fulci aussi, qui s’inspire pas mal de SUEURS FROIDES.
        Même si au final Hichcock n’a pas fait tant de films que ça dans le genre sombre et inquiétant, il a clairement frappé très fort avec PSYCHOSE et SUEURS FROIDES.

        • Jyrille  

          J’ai écouté la BO. C’est du pur Morricone, ça rappelle pas mal GIU LA TESTA (Il était une fois la révolution, « Sean sean sean »…)

          • Matt  

            Voui.

            Tu peux ecouter du Bruno Nicolai aussi qui a fait quelques superbes musiques, notamment celle là déjà mise en BO dans mon article précédent :

            //www.youtube.com/watch?v=Ialkzw16-kg&ab_channel=KorniChiba

            Il y a des BO très intéressantes dans ces films, pour peu qu’on adhère à ce genre de musique.

    • Matt  

      « C’est vrai qu’il y a un gros sentiment de slasher dans tout ce que tu racontes, et même d’horreur un peu.  »

      Le giallo est l’héritier du Krimi allemand, et l’inspiration principale du slasher. Mais je ne suis pas très friand de slashers. Le genre tombe trop souvent dans la tuerie fauchée qui n’a rien d’autre à proposer en terme de scénar, ce qui fait qu’au final ça devient des films qu’on regarde juste pour voir des meurtres rigolos au second degré, avec un tueur « cool » qui devient la star des films. C’est pas du tout le cas du giallo.
      Et dans un sens, le slasher, avec sa manie de faire assassiner les ados aux moeurs légères qui copulent, c’est carrément plus puritain et sexiste que le giallo qui ne se prive pourtant pas de montrer des femmes nues. Sauf que dans le fond c’est quand même moins bas du front que le slasher.

       » L’histoire du film avec Edwige Fenech me rappelle beaucoup le second SODA, LETTRES A SATAN, tu ne trouves pas ? »

      Pas faux en effet. Pas la même ambiance mais je vois le parallèle.

      Je n’ai pas trop parlé de De Palma il est vrai, même si j’ai pensé au preneur de son de BLOW OUT dans le film IL GATTO DAGLI OCCHI DI GIADA qui met en scène un ingénieur du son qui va analyser les messages laissés par le tueur sur le répondeur des victimes.
      Mais au final je ne suis pas bien calé en De Palma. Du moins les films que j’ai vus de lui ne font pas très giallo, sauf PULSIONS peut être.

      • Jyrille  

        Que ce soit BLOW OUT, PULSIONS (DRESSED TO KILL), BODY DOUBLE ou OBSESSION, tu y sens le giallo à fond. Même histoires tordues avec des meurtres et des identités troubles.

  • Jyrille  

    Ah et bien sûr, en plus de cet article ludique et intéressant, ton dessin est encore une fois super.

    • Matt  

      Danke !
      A la base c’est une fausse affiche encore avec le nom des actrices et tout, mais pour l’article j’ai pris l’affiche sans les crédits pour la recycler en dessin de présentation.

  • Ludovic  

    Vrai régal de lecture que cet article ! Envie de me replonger dans tout ces films et de voir les quelques uns que je n’ai pas vu… même dans ton top 20 j’ai quelques lacunes qu’il faut que je rattrape ! et effectivement il y aurait matière à faire d’autres articles du même, le genre est tellement vaste et même si il y a pas mal de films moyens ou mauvais, il y a toujours des découvertes à faire.
    Excellente synthése des caractéristiques du genre en ouverture aussi… l’importance des scénaristes aussi, des acteurs évidemment (les seconds rôles) et les actrices évidemment, Edwige Fenech trouva ses meilleurs rôles dans des gialli avant de devenir la star des sexy comédies, un genre qui fut beaucoup moins intéressant d’une point de vue cinématographique il faut le dire !
    Notons aussi que la belle photo de MAIS QU’AVEZ-VOUS FAIT A SOLANGE ? que tu mentionnes est due à Aristide Massaccesi qui allait devenir un artisan chevronné du bis italien sous le nom de Joe D’Amato en réalisant des westerns, des gialli et en spécialisant dans l’horreur et l’érotisme, signant quelques perles du cinéma trash transalpin pour devenir un stakhanoviste du porno.

    Bravissimo encore !

    • Matt  

      Ah ouais ? Tu m’apprends un truc sur Joe D’Amato. J’avoue que j’ai pas fouillé qui était Aristide Massaccesi.
      Bon bah il est quand même meilleur directeur photo que réalisateur^^
      Enfin…faut aimer son genre trash érotique quoi. C’est moins ma came.

      Pareil les sexy comédie de Edwige Fenech, ouais…bon…pas ouf le genre. Mais elle est superbe dans ses rôles dans les films de Martino ou dans ce RENDEZ VOUS DE SATAN.

      Une autre actrice qui pour le coup avait un vrai talent (plus que d’autres jolies pin-up) c’est Nieves Navarro. Et elle a fini sa carrière dans des trucs à la limite du porno même…Je sais pas si c’était par choix ou parce que tout foutait le camp à la fin des années 70 mais le nombre de réals et d’acteurs talentueux qui ont fini dans des productions bis chelou à base d’orgies cannibales et tout ces machins…c’est un peu dommage selon moi.

  • Fletcher Arrowsmith  

    Bonjour Matt.

    De mon côté je n’ai strictement rien vu : ni ta liste, ni de tes articles (celui là et les autres). Compliqué de donner un avis.

    Mais ton érudition et ta prose font que j’ai quand même taper le nom de quelques titres sur les plateformes auxquelles j’ai accès. Preuve que tu as su titiller ma curiosité.

    Reste qu’actuellement je ne me vois pas passer du temps (précieux) à visionner ces gialli. Je crois qu’à 20 ans j’aurais dévoré ces films. C’est plus compliqué désormais. Je suis très intéressé par contre par les BO.

    Bravo pour l’article. Je dormirai moins bête ce soir.

    • Matt  

      Merci tout de même de ton retour.
      Pour ma part j’avoue conserver une curiosité pour le cinéma. Peut être même plus que pour les BD. Mais ça vient du fait que les BD c’est souvent plus cher, plus long à sortir (sauf si ce sont des one shot. Mais les séries faut y investir du temps et de l’argent et…de la patience.)

      Du coup même à plus de 36 ans (béh ouais, j’ai pas 20 ans non plus^^) j’aime farfouiller à la recherche de films à voir de tous horizons. ça reste je trouve le truc le plus accessible en matière d’investissement. C’est entre 1h30 et 2h par film…c’est le format le plus court.

      Les BO de ces films sont toutes chouettes. Certaines morceaux passent mieux sur des images puisque ce sont parfois des musiques d’ambiance, mais il y a du bon tout de même.

  • Tornado  

    Un autre article essentiel et j’espère évidemment voir le 4° !
    Le hasard veut que je m’apprête à regarder un ou deux gialli cette semaine (je me regarde toujours des films d’Halloween à la période d’Halloween). Je n’ai pas encore décidé lesquels mais ton article constitue une formidable piqure de rappel !
    Excellente, cette intro qui met en lumière et rappelle les constituants et les qualités du genre !
    Magnifique cette BO essentielle de Morricone !
    Précieux, ce TOP 20 en tant que repère qualitatif !
    Et puis, bien sûr, superbe cette illustration ! 😉

    Je tâcherai de repasser pour en discuter encore plus en détail.

    • Matt  

      Coucou.

      Ouais je me suis dit que ce serait sympa comme repère de mettre un top 20.
      Ils ne se valent pas tous dedans et je n’ai pas énormément réfléchi à la hiérarchisation des films (proche du numéro 1 ça vaut le coup, un peu moins autour du 20, mais est-ce que je préfère le 12 au 13 ? J’en sais rien, j’ai pas poussé le vice jusque là^^)

      Ils ne sont pas tous dans le style de Bava avec une mise en scène stylisée, mais même les plus classiques dans leur mise en scène ont des trucs intéressants. Comme je le dis, je trouve que les éléments listés en intro en font des films assez uniques malgré le concept du film policier assez classique. La composante horreur, la musique, le panorama européen, les limitations de l’époque concernant les enquêtes (truc sympa aussi dans les Hercule Poirot. ça ne triangule pas les positions des téléphones portables à tout bout de champ^^)…ça en fait des capsules temporelles représentantes d’une époque révolue.

  • Présence  

    Il n’était pas prévu initialement que j’écrive un 3ème article sur le giallo : hé bien merci pour ces films supplémentaires qui nous offrent ta présence sur le site.

    Bien sûr, il y a eu des bouses racoleuses lorsque le genre était à son apogée et même sur son déclin, avec des réalisateurs de troisième ordre se contentant de mettre leurs actrices à poil et de les trucider dans des films plats et ennuyeux. – Ah, mais c’est ceux-là que je veux voir… au moins pour la première partie. 😀

    Très éclairante cette caractérisation des giallo : la composante whodunit, le feeling Hitchcock, la période des années 70, la musique.

    La mort marche en talon haut : Nicole, strip-teaseuse, ça commence bien. Plus sérieusement, le § (Ce qui est très réussi dans ce film […] jeux de perception faussée) est passionnant. Il me fait venir à l’esprit des comics vraisemblablement influencés par cette approche sur les regards.

    Le rendez-vous de Satan : titre à côté de la plaque (et quelque peu racoleur), Edwige Fenech (même moi j’ai eu l’occasion d’admirer ses charmes)

    Mais qu’avez-vous fait à Solange ? – Un couteau introduit dans leur entrejambe : et dire que ce genre de sévices existe aussi dans la vraie vie. Ennio Morricone : déjà une légende.

    Folie meurtrière : il n’y a pas beaucoup d’érotisme (oui, je fais partie de ceux qui ont soupiré au fond 😀 ).

    Qui l’a vue mourir ? La courte liste des gialli dont les victimes sont des enfants : ça doit être bien glauque. George Lazenby : James Bond ?

    IL GATTO DAGLI OCCHI DI GIADA : je retiens une motivation plus crédible.

    J’ai été envouté par cet article qui choisit le meilleur du giallo avec une analyse du genre, montrant qu’avec des conventions de genre assez limitées, les réalisateurs savent faire preuve d’une créativité sans cesse renouvelée.

    • Matt  

      Merci de ton retour.
      Oui, George Lazenby le James Bond pas bien connu. Pas sur qu’il ait marqué les esprits entant que 007 mais bon il s’en sort bien dans ce film.

      Les victimes enfantines : ils ont la décence de ne pas nous montrer les meurtres en détails comme pour des adultes. Mais ça fait moins rigoler tout de suite c’est sûr…
      LA LONGUE NUIT DE L’EXORCISME n’est pas tendre à ce niveau. ça a choqué (en plus du prêtre tueur…) au point de la voir censuré de partout.
      Alors qu’au final c’est pas si graphique que ça. Moins que pour les adultes. Mais c’est le concept qui n’a pas plus. On touche pas aux enfants. Sauf que dans la vraie vie…ça existe.
      C’est pour ça que je dis que le giallo a choqué mais qu’au final à voir aujourd’hui, c’est des histoires criminelles tristement réalistes, et pas gratuitement choquantes.

  • zen arcade  

    Il y a quelques années, j’avais pris quelques mois pour me faire une grosse rétrospective consacrée au cinéma de genre italien des années 60 et 70. Fantastique gothique, gialli, science-fiction, western et même un paquet de peplums. Plus d’une centaine de films en tout.
    Bon, on va pas se mentir, Bava et Argento surnagent quand même très largement au-dessus de la mêlée mais il y a quelques pépites à dénicher ailleurs, au milieu d’un océan de productions médiocres.
    Tes articles constituent un bon moyen de séparer le bon grain de l’ivraie, même si je ne serais sans doute pas aussi enthousiastes que toi sur pas mal de films. Bravo pour ton travail.

    • Matt  

      Merci de passer.

      Par rapport à tes remarques j’ai un point de vue un peu différent.
      Je n’ai déjà pas besoin que ce soit des chef d’oeuvre à chaque fois pour passer un bon moment.
      Et ensuite, je ne suis pas si fan que ça des gialli de Argento. Bon L’OISEAU…et LES FRISSONS DE L’ANGOISSE sont cool. Mais LE CHAT A NEUF QUEUES est moyen. 4 MOUCHES DE VELOURS GRIS est sympa, mais je préfère MAIS QU’AVEZ VOUS FAIT A SOLANGE ?, ou certains films de Martino comme LA QUEUE DU SCORPION.
      Et à côté de ça, L’EMMUREE VIVANTE de Fulci est super.
      Et au final du coup Bava n’a pas fait des masses de gialli.
      LA FILLE QUI EN SAVAIT TROP fait encore proto-giallo. C’est plus du thriller hitchcockien.
      Je n’ai d’ailleurs chroniqué de lui que 6 FEMMES POUR L’ASSASSIN.

      Du coup bon voilà…à chacun ses préférences mais certains réal moins connus ont fait des trucs que j’ai préféré à certains films des « géants ».

      • zen arcade  

        Disons en ce qui me concerne que ce qui pour moi fait surnager certains films de genre italiens plutôt que d’autres, c’est avant tout l’ambition formelle.
        De toute façon, la plupart des scénarios sont ineptes, répétitifs et sans réel intérêt. Ce qui fait la différence, c’est l’ambition formelle.
        Et sur ce point, Bava et Argento sont la plupart du temps très largement devant.
        Mais ça ne veut évidemment pas dire que d’autres ne peuvent pas de temps à autre se hisser à un niveau intéressant également. Au rayon fantastique 60’s, j’aime ainsi beaucoup Antonio Margheriti par exemple.

  • Eddy Vanleffe  

    Matt et Tornado mes spécialistes perso pour me fabriquer des wishlists de films
    Matt que penses tu de la réputation de Ne vous retournez pas. Qui serait un des meilleurs Gialli alors qu’il n’est pas italien?
    J’adore ce film perso.

    • Tornado  

      Je suis fan de NE VOUS RETOURNEZ PAS. Pour le coup voilà un film qui ne met pas Venise en position de carte postale mais qui au contraire en fait un repère malsain et effrayant. Le film est très dur. Sans concessions bien qu’il ait un peu vieilli dans la mise en scène.
      Les gialli non italiens il y en a des tas. Celui qui me vient immédiatement à l’esprit c’est LES YEUX DE LAURA MARS, davantage que NE VOUS RETOURNEZ PAS qui pioche dans le surnaturel une bonne partie de son temps.

    • Matt  

      Je n’ai point vu ce film figurez-vous.
      Je vais me pencher dessus.

      Après les gars…je précise que je parle de petits films sympas, et vous me parlez de « meilleurs films ». Arrivé à la partie 3 j’ai quand même déjà écarté les meilleurs (même si MAIS QU’AVEZ VOUS FAIT A SOLANGE est très bien je trouve.)
      Vous risquez d’être déçus si vous vous attendez à des chef d’œuvre oubliés.
      Mais de la même façon que j’aime les films d’horreur kitsch de la Hammer ou des épisodes d’Hercule Poirot, je parle de films qui me plaisent par leurs caractéristiques assez singulières (musique, cadre géographique ou historique, idées de mise en scène ou scénarios intéressants) qui en font des films assez uniques.

      Si c’est les idées de mise en scène bizarres et uniques qui vous plaisent le plus, c’est sur que Argento fait des trucs plus originaux. Mais ça passe ou ça casse. Des fois ce qu’il fait marche moyen avec moi. Et un film avec une mise en scène classique mais de bonnes scènes de suspense vont me plaire davantage.

  • Tornado  

    J’ai enfin revu TÉNÈBRES (je l’avais vu du coin de l’oeil un soir, en même temps que je dessinais, il y a peut-être 20 ans ou plus !). Je suis étonné que tu ne le mettes pas dans le Best-of. Il est vraiment dans la lignée des précédents gialli d’Argento et je dirais même qu’ils finissent un peut tous par se confondre tant ils ne sont au final que des variations sur un même thème.
    Je trouve toujours que l’utilisation de la musique chez Argento est totalement insupportable (je vois bien l’idée de briser les clichés en la matière, mais c’est affreux et ça vieillit hyper-mal). Par contre je suis à chaque fois ébloui par son style. C’est clairement un cinéaste de l’architecture. cette manière qu’il a de caresser les structures, les bâtiments, les textures, le tout magnifiquement cadré avec des plans de dingue, c’est quelque chose. C’est aussi un amoureux de botanique, ça se voit pour quelqu’un qui partage cette passion. Il y a souvent des scènes dans des jardins ou des lieux qui mèlent l’architecture avec la nature. Ce sont des motifs qui reviennent souvent.
    À côté de ça, le scénario est quasiment un prétexte et les dénouements sont systématiquement kitsch avec à chaque fois l’identité du tueur qui est en fait un des personnages principaux comme dans un épisode de Scooby-doo ! Ça a totalement perdu son pouvoir horrifique (il y a une vingtaine d’année ça me faisait encore de l’effet) mais ça reste un chouette moment de cinéma.

    • Matt  

      Bah franchement ouais j’ai du mal avec :
      -la musique
      -les chuchotements bizarres du tueur qui semble parler sans que personne n’entende.
      En gros des effets de style super bizarres. ça ne m’a pas super plu sur TENEBRES.
      La musique de PROFONDO ROSSO je l’aime bien. Celle de TENEBRES non.

      Après je dois peut etre aussi lui redonner sa chance mais vraiment je n’avais pas accroché sur celui-là, donc il n’est pas dans ma liste.

      Le coté kitsch/pourvoir horrifique c’est toujours pareil c’est subjectif. Je dirai malgré totu que les débordements gores, les respirations d’un tueur qui bute des gens de manière sale, ça reste plus choquant que la créature du lac noir tu vois^^
      Après si tu vas par là, y’a plus grand chose qui fait peur. Tu vois on discute parfois que les films comme IT moi ça ne m’effraie pas du tout et ça fait très cliché de maison hanté (donc de l’horreur de divertissement, avec zéro angoisse)
      En regardant des films comme QU’AVEZ VOUS FAIT A SOLANGE avec un tueur qui plante des couteaux dans l’entrejambe de mineures…euh…je rigole déjà moins. Même si en soi je ne suis pas non plus enfoui sous mes couvertures^^
      L’essentiel tu le dis : ça reste un bon moment de cinéma.

    • Matt  

      Après ouais moi je t’avais averti qu’en regardant tous ceux du même réal à la suite ça allait faire cet effet de mélange^^
      Faut voir un peu de Fulci, ou de cinéastes peut etre moins talentueux mais honnêtes artisans s’inspirant des meilleurs comme Martino qui fait un peu du Bava, et sur fond de musiques que tu apprécieras mieux (Morricone, Nicolai)

    • Matt  

      Après tu as vu un peu du Krimi allemand ? Là c’est purement du scoubidou ^^
      ça fait bande dessinée, ou Fantomas (version Louis du Funes)
      Sans l’humour certes mais l’humour est involontairement là parce que LA GRENOUILLE ATTAQUE SCOTLAND YARD ça fait sourire par exemple^^
      La dimension gore et bien plus scabreuse des gialli leur donne un avantage dans l’aspect horrifique.

      • Tornado  

        Je vais aussi regarder du Fulci, du Martino, etc. Mais avant je fais les Argento. C’était prévu comme ça dès le départ ! ^^
        Oui je pense que tu devraisy redonner sa chance à TÉNÈBRES. Ça reste dans la lignée des bons Argento.

        • Matt  

          Tu devrais redonner sa chance à SUSPIRIA si tu aimes la façon de filmer de Argento ^^
          Moi même j’ai mieux apprécié récemment et c’est un beau film fantastique/horrifique

        • Matt  

          Tiens si t’as envie tu peux aussi tester LE SANG DES INNOCENTS.
          Il faut juste oublier qu’il est sorti en 2001 ^^
          Si tu t’imagines qu’il est sorti dans les années 1970 c’est un Argento sympa.
          Il s’est un peu fait tailler pour son côté kitsch rétro et donc soi disant décevant pour un Argento, même si je pense que le but était de refaire un giallo à l’ancienne.

        • Matt  

          La qualité des films de Argento se ramasse vraiment à partir des années 90.

          Deux Yeux maléfiques est OK, je crois qu’on l’a vu tous les 2. TRAUMA faut éviter c’est naze, LE FANTOLE DE L’OPERA et son coté ultra cheap téléfilm de M6 aussi, LA TROISIEME MERE c’est une cata, GIALLO aussi, et je n’ose à peine mentionner son DRACULA…
          Mais il y a quelques exceptions avec des films certes un peu bancals quand même mais sympas et intéressant comme LE SANG DES INNOCENTS ou LE SYNDROME DE STENDHAL.

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